Conférence de presse du 23 juin 1982

[(Treize heures quarante-deux minutes)]

[M. Lévesque:] Je vais vous faire une introduction qui, à toutes fins utiles, va se terminer presque en commençant. Je n’ajouterai rien de particulièrement nouveau à ce que je disais hier soir. Ce sera à vous, par vos questions, tout à l’heure, de me provoquer davantage. Je pense que M. Bertrand va le faire aussi. Il me semble que la moindre observation de ce qui s’est passé surtout pendant la deuxième partie de la session qui vient de se terminer, confirme cela. C’était inévitable aussi, c’était la moindre des choses. L’accent a été mis sans arrêt, parceque c’est une obsession que tout le monde partage, sur les causes économiques.
M. Bertrand va vous en faire part en faisant son bilan de la session. Il y a des choses qui n’ont rien à voir avec la Chambre, c’est normal, mais qui ont également été dans cette espèce de mouvance économique à laquelle personne n’échappe. Cela ne passe pas à l’Assemblée nationale, forcément. Que ce soit l’espèce de perspective que dessine ce qu’on appelle le virage technologique, les mesures d’urgence et le programme du côté de l’habitation qui viennent du sommet de Québec et aussi de certaines choses qui étaient déjà dans la machine, si vous voulez, les bons d’emploi, les programmes de prêt et de garantie de taux d’intérêt aux PME, ce sont toutes des choses qui n’ont pas d’incidence législative, mais qui font partie de cette espèce d’effort qu’il faut faire constamment et qu’il faudra poursuivre en ce qui concerne l’économie.
Cela dit, M. Bertrand – c’est une habitude qu’on a prise depuis quelques années, et c’est normal – même si c’est un ajournement, a quand même un bilan à établir. Je vais demander au leader parlementaire s’il veut vous tracer le tableau tel qu’il le voit et, ensuite, ce sera à vous de réagir comme vous voudrez.

[M. Bertrand: Je n’ai pas besoin de vous dire que, depuis à peu près un an que nous sommes engagés dans ce deuxième mandat de gouvernement, depuis le 19 mai 1981 jusqu’au 22 juin 1982, nous avons légiféré à l’Assemblée nationale en temps de crise. La crise a d’abord été constitutionnelle. Je pense qu’on peut, à ce point de vue, se rappeler les événements de 1981 et dire que la partie de la session que nous avons connue durant l’année 1981, particulièrement l’automne dernier, a été marquée au coin de cette crise constitutionnelle. Quant à celle que nous avons connue du 23 février au 22 juin, quatre mois en fait de session, on peut dire que nous avons certainement mis fin, jusqu’à un certain point, à ces préoccupations constitutionnelles suite à ce coup de force constitutionel, à l’impasse eu niveau des négociations mais, par contre, sont apparus plus évidents que jamais, plus graves que jamais les problèmes économiques et les problèmes budgétaires. Donc, on peut dire que la toile de fond de cette partie de session, durant les quatre derniers mois, a été la crise économique et la crise budgétaire.
Donc, si j’avais à résumer en quelques phrases ce que nous avons eu à réaliser comme objectifs au cours de ces quatre mois, tenant compte du fait que la toile de fond était, demeure, la crise économique et la crise budgétaire, cela a été une session des choix difficiles mais des choix nécessaires. Une session où le gouvernement a indiqué clairement sa volonté de passer à travers la crise économique et budgétaire et de permettre le progrès quand même. Pour y parvenir, il a fallu prendre toutes nos responsabilités, mais les prendre en très étroite relation, et j’oserais même dire, en très étroite collaboration avec l’ensemble des agents sociaux économiques de notre société et cela en lançant un appel à la solidarité qui a déjà été entendu et compris par plusieurs groupes. On a qu’à penser au sommet de Québec et à la loi sur la relance de la construction domiciliaire.
M. Saint-Louis: …aux banques auxquelles on impose une loi.
M. Bertrand: Appel à la solidarité qui gagne de plus en plus toutes les couches de la
toile de fond, nous avons effectué au cours de cette session, des choix difficiles mais des choix nécessaires.
Je dois dire, deuxièmement, que cette session m’est apparue -je pense que c’est un jugement objectif- productive. Nous avions, et en cela je ne dévoilerai pas de secrets qui sont l’information, beaucoup de ces documents pourront devenir accessibles. Je me rappelle d’une décision du Conseil des ministres prise le 24 février dernier, c’était le lendemain même de l’ouverture de cette partie de la session et nous avions, à ce moment-là, décidé de faire adopter, par l’Assemblée nationale, une vingtaine de lois, de 20 à 25 lois publiques. Or, le résultat net, après 52 jours de séances en quatre mois, c’est 44 lois publiques. Pour être plus exact, c’est 41 lois réelles, puisqu’il y a trois projets de loi publics qui sont, en fait, des projets de loi privés inscrits au nom de députés, mais convertis en projets de loi publics.
M. Saint-Louis: Si vous enlevez celle des médecins.
M. Bertrand: Non. Dans les 4~4 lois publiques…
M. Saint-Louis: …bilan positif.
M. Bertrand: 44 lois publiques, 35 lois privées et j’ajouterai à cela des éléments qui, 7abituellement, n’apparaissent pas toujours dans ce qu’on appelle le bilan de la session, mais qui sont là tout de même et qui indiquent un peu la teneur économique de cette session, soit cinq motions gouvernementales dont quatre à incidence très directement économique et neuf
société car elle s’avère indispensable à la relance économique. D’une façon générale, sur
cette
habituellement ceux du Conseil des ministres, quoique avec
la nouvelle loi d’accès à
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déclarations ministérielles dont huit à incidence très directement économique.
Je fais état aussi du fait que deux commissions parlementaires spéciales ont travaillé très fort et ont produit, dans un cas, un rapport et, dans l’autre cas, un rapport d’étapes avec rapport final devant être soumis à l’Assemblée nationale l’automne prochain.
Pour ce qui est de ce contenu même de la session, concernant les lois publiques adoptées, on peut dire que, justement, en tenant compte de cette toile de fond que je décrivais tout à l’heure, la crise économique, la crise budgétaire, l’Assemblée nationale a adopté, dans cette quarantaine de lois publiques, plus d’une douzaine de lois qui sont à incidence économique. Làdessus, sans vouloir faire une nomenclature de tous ces projets de loi, je peux citer ceux relatifs à la Société de développement industriel, au Centre de recherche industriel du Québec, à SOQUIP, à la Société québécoise de développement des industries culturelles, la loi 82 sur la construction domiciliaire, la loi 77 sur la mise en marché des produits agricoles, la loi 63 sur la Raffinerie de sucre du Québec, la loi 49 sur les terres publiques, la loi 76 sur la protection du territoire agricole, la loi 56 sur les coopératives et quelques autres, de telle sorte que l’objectif que nous nous étions fixé, c’est de faire en sorte que la majorité des lois importantes que nous avions à débattre au cours de cette session puissent être à teneur économique.
Mais il y a aussi eu des lois qui correspondaient à ce que je disais tout à l’heure, c’est-àdire ces choix difficiles, mais nécessaires: la loi 68 sur les régimes de retraite; la loi 70 sur la rémunération dans les secteurs public et parapublic; la loi 91 sur la prestation des soins
médicaux sur le territoire québécois; la loi 72 sur les services regroupement des villes de Baie-Comeau et Hauterive.
Dans tout cela, le ministre des Communications m’a demandé d’en faire part, un rayon de soleil dont on a pas beaucoup parlé mais qui, à mon avis, revêt son importance, qui est l’adoption d’une loi majeure au niveau de ce qu’on pourrait appeler la poursuite des objectifs de transparence et d’amélioration de notre système démocratique, la loi 65 sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.
Voilà donc un certain nombre d’éléments que je vous livre en rappelant que nous avons eu à faire cela sur le coup d’une crise: taux d’intérêts élevés, dérangements fiscaux, évaluation approximative de 500000000 $ , chômage chronique, inflation aussi très élevée. Malgré tous ces problèmes budgétaires, économiques qui assaillent la société québécoise comme la société ,canadienne dans son ensemble, et j’oserais dire toutes les sociétés par les temps qui courent, le gouvernement a, au cours de cette session, à mon point de vue, rempli sa mission qui était de faire des choix difficiles, de prendre ses responsabilités parcequ’il considérait que c’était son devoir d’État de faire en sorte que nous puissions à l’Assemblée nationale, par voie législative ou autrement, passer à travers la crise économique et permettre quand même le progrès.
Vous le savez déjà, l’ajournement a été fixé au 9 novembre 1982, ce qui laisse pour les
essentiels; la loi 37 sur le
parlementaires une possibilité de trois semaines régulières de session, du 9 novembre jusqu’au 1er décembre et, par la suite, trois semaines intensives, les semaines habituelles que vous commencez maintenant à connaître, avec huit lois publiques inscrites au feuilleton, dont certaines fort importantes comme la Charte des droits et libertés de la personne, la Loi de l’Assemblée nationale, la Loi sur les valeurs mobilières et un certain nombre de projets de loi privé de plus ou moins grande importance mais qui sont toujours fondamentaux pour les groupes ou les organismes qui veulent que l’Assemblée nationale se penche sur l’ensemble de leurs dossiers et de leurs préoccupations.
Vous avez un document qui vous donne aussi le bilan complet, avec des tableaux
Législature, mais de la Législature précédente, de telle sorte que s’il y avait des questions sur l’un ou l’autre des éléments contenus dans ce rapport, il me fera M. Harris: Pierre Tourangeau et Gilles Morin. M. Rhéaume: Rhéaume.
M. Harris: M. Rhéaume.
M. Rhéaume: J’aurais deux questions à poser, dont la première au leader parlementaire. J’aimerais savoir quelle est l’évaluation, le bilan objectif, si la chose est possible, de votre
mandat comme leader parlementaire. En particulier, j’aimerais savoir si a été satisfait désir de piétiner le corps déjà quelque peu affaibli de l’Opposition libérale.
La deuxième question serait pour M. Lévesque. Je voudrais savoir s’il envisage, au cours de l’été, de faire un remaniement ministériel.
M. Bertrand: Pour ce qui est de cette expérience vécue comme leader parlementaire au cours des quatre derniers mois, on se rappellera d’abord dans quelles conditions le tout s’est déroulé. Je l’ai appris le 23 février au matin, quelques heures à peine avant que ne commencent les travaux de la session et dans un contexte où, il ne faut pas l’oublier, j’avais à cumuler plusieurs responsabilités: d’abord, celle, toujours la plus importante à mes yeux, de député du comté de Vanier; ensuite, ministre des Communications, avec tout le temps qui a dû être mis, entre autres, sur la Loi d’accès à l’information dont je dois dire, en passant, que dans nos plans initiaux elle aurait pu être reportée à l’automne et adoptée à l’automne. Finalement, grâce à
une étroite collaboration entre le ministre des Communications et le leader parlementaire, on qst arrivé à l’adopter avant la fin de la session. Je pense que c’est une bonne décision.
Donc, contexte particulier. Au-delà de ce contexte particulier, je veux dire très simplement – là-dessus, de toute façon, chacun peut porter son jugement – que, dans l’ensemble, j’ai profité d’une collaboration totale et renouvelée chaque fois, malgré les problèmes qui pouvaient surgir à l’occasion, en cours de route. J’ai profité de la collaboration du leader de l’Opposition, M.
Gérard O. Lévesque qui, effectivement, comme il l’a rappelé lui-même hier soir, lors des
comparatifs de toutes les sessions que nous avons eues, non seulement au
cours de la présente
plaisir d’y répondre.
votre

quelques discours qui ont mis fin à la session, a rappelé que l’Assemblée nationale est un endroit
« malheureuse » que j’aurais pu prononcer dans le cadre du débat sur la motion de clôture sur le projet de loi no 37, je dois dire évidemment que je faisais référence à une déclaration du député de Hull qui avait dit qu’il faudrait que le gouvernement lui passe sur le corps pour que le projet de loi no 37 soit adopté. Que j’aie repris cette phrase et que j’en aie fait ensuite un énoncé de politique gouvernementale, je pense qu’il y avait toute une distance; mais au-delà de cela, comme je l’ai dit hier soir, je pense que ces paroles ne témoignent pas vraiment de l’état d’ergrit qui m’animait. Je n’ai ni le goût ni la motivation de passer sur le corps de qui que ce soit ou, en tout cas, je ferai mes choix quand je prendrai la décision de le faire.
Pour le reste, je pense que c’est au premier ministre qu’il appartient de prendre les décisions qui, à tout moment, peuvent s’imposer. Je considère, à toutes fins utiles, que la session a été très productive: 44 lois publiques, 35 lois privées, 52 jours de séances. Au bout de la ligne, je pense m’être acquitté convenablement de mes responsabilités de leader parlementaire du gouvernement. Dans ce contexte, je dois vous dire qu’effectivement cela a été rendu possible en très grande partie par la collaboration que m’a apportée, tout le long de ces quatre mois, le leader parlementaire de l’Opposition.]

[M. Lévesque:] J’ajouterais juste une chose, cela me frappait. Les propos de M. Ryan, hier soir, étaient intéressants à ce point de vue parcequ’il soulignait que malgré ce côté un peu arène de boxe que prend à la longue, quand ça dure quelques mois, l’enceinte parlementaire, le bouillon de culture que cela peut représenter, malgré ça il y a eu sur pas mal de lois – il en a citées quelques unes, je ne reprendrai pas ce qu’il disait – une collaboration qui, à la fin de la session, au moment de l’ajournement, surprend toujours tout le monde peut-être même aussi les gens des médias quand ils ont un peu de recul. Cela me fait un peu penser aux combats de boxe autrefois, il n’y avait pas de limite, c’était une ronde après l’autre, ça pouvait durer jusqu’à 90 rondes, c’était jusqu’à l’épuisement total. Il n’y avait pas de gants de boxe. Ici, il y a les gants de boxe du règlement, quand on réussit à le suivre, pour atténuer les coups. On finit par être un peu comme des boxeurs obsédés, tout le monde cède à cela, les médias les premiers. On fait des grosses manchettes avec une phrase, etc. Bon! C’est normal, mais cela devient une sorte d’obsession, le nez collé sur la vitre ou le nez collé sur la ronde suivante, d’une période des questions à l’autre et finalement, quand on décante cela, j’ai l’impression qu’on s’aperçoit qu’on est porté à superdramatiser, avec les résonnances que cela donne de jour en jour. Quant tu y repenses, il y a quelque chose d’un peu comique, mais ça ne fait rien, il faut alimenter l’actualité, etc., c’est une façon comme une autre de le faire.
La deuxième question, celle qui m’était adressée, me permet de vous dire simplement ceci: C’est que normalement, – et je pense que c’est très important cette année, – parceque la session va continuer – le contexte va nécessairement être plein d’incertitudes. Il suffisait de passer une couple de jours avec des Américains et des gens des Maritimes pour voir à quel point c’est incertain partout. Il n’y a pas de boule de cristal nulle part. On ne sait pas du tout ce qui va émerger du nouveau discours sur le budget de M. MacEachen qui a un budget depuis six mois qui n’a jamais été voté. Dans le contexte où on est, il est évident qu’il va falloir faire le point, essayer de dégager une perspective et cela, on voudrait le faire par un Conseil des ministres spécial, autrement dit, selon une habitude qu’on a prise, mais qui est peut-être plus tournante comme implication cette année. Ce serait dans la deuxième moitié du mois d’août et évidemment, un caucus aussi assez substantiel pour qu’on puisse arrimer le mieux possible la perspective pour l’automne et aussi pour l’année qui vient. Ce qui peut intervenir là-dedans, y compris la réponse à votre question, en temps et lieu, vous verrez.

[M. Harris: M. Gilles Morin.
M. Morin: C’est un peu dans la même veine, M. Lévesque. Vous vous en doutez bien. Tout au cours de l’hiver, sporadiquement, on voyait des éditoriaux dans les journaux où les éditorialistes mentionnaient la fatigue de certains éléments de votre cabinet. Êtes vous en mesure ou êtes vous… Est ce un élément d’analyse dans votre réflexion?]

[M. Lévesque:] Toujours, y compris la fatigue que je peux ressentir moi même. Il y a toutes sortes d’éléments dans les analyses qu’on doit faire périodiquement, c’est sûr. Il y a des poids qui peuvent devenir excessifs pour certains. Il y a des changements qui peuvent devenir – c’est évident aussi – de nouveaux défis. Il y a toute une série de facteurs. J’ai déjà cité cela, mais entre nous, je n’ai rien inventé. C’est MacDonald – en anglais, c’est « cabinet », le Conseil des ministres – qui disait: La pire maudite « job », c’est [« cabinet making »], ce qui veut dire aussi un travail de loisirs. La seule réponse que je peux vous faire c’est qu’aussitôt qu’éventuellement quelques décisions seraient prises, elles vous seraient communiquées rapidement, parcequ’en général, cela ne traîne pas, mais pour l’instant, je n’ai pas d’autre réponse à vous faire.
[M. Morin: Est ce que le Conseil des ministres…]

[M. Lévesque:] Je ne commencerai pas à faire quoi que ce soit qui puisse ressembler à un remaniement en passant par les médias. Je pense que vous comprendrez.

[M. Morin: Le Conseil des ministres du mois d’août, c’est avec l’équipe actuelle?]

[M. Lévesque:] Le Conseil des ministres du mois d’août sera le Conseil des ministres du mois d’août.

M. Saint-Louis: Vous n’écartez donc pas un remaniement? Est ce qu’en plus de changer des hommes ou d’en amener de nouveaux, de demander à d’autres de retourner comme simple député, comme vous aviez dit d’ailleurs dès la formation de votre premier cabinet en 1976 et est ce que vous n’envisagez pas des modifications de la structure actuelle du Conseil des ministres, des ministères comme tel? Est ce que, par exemple, les ministères d’État ne pourraient pas disparaître?]

[M. Lévesque:] Cela aussi, si jamais il y a des choses comme cela qui se produisent, vous allez le savoir, cela ne sera pas long. Cela ne sert à rien de continuer à tourner autour. Je vous ai déjà dit que des perspectives de changement, de remaniement, etc., j’ai appris à mes dépens que cela ne se discute pas à partir des rumeurs. C’est simplet.

[M. Saint-Louis: Est-ce que les structures actuelles vous satisfont? Est-ce qu’elles sont…]

[M. Lévesque:] Jusqu’à nouvel ordre, je trouve cela pas mal. S’il n’y a pas autre chose, on va terminer, parcequ’on est obligé de retourner au Conseil des ministres.

[M. Harris: J’aurais un autre sujet.]

[M. Lévesque:] Oui, je n’ai pas d’objection à changer de sujet.

[M. Droletz M. Lévesque, vous venez de perdre un député de votre caucus. Quelle
interprétation donnez vous à la décision gardant sa carte de membre du PQ?]

[M. Lévesque:] Cela prouve au moins une chose, c’est que peu importe tout le reste, il n’a pas trouvé de parti plus accueillant, plus hospitalier. Je trouve que c’est un peu curieux tout de même comme logique, parceque c’est soi disant sous le coup de la loi 70 essentiellement que M. Bisaillon veut devenir député indépendant. Il veut rester dans le parti, parceque le parti lui paraît une meilleure structure d’accueil pour ses priorités idéologiques que le gouvernement ou que l’équipe ministérielle. Il n’a pas beaucoup participé, d’ailleurs pas plus là qu’ailleurs, aux discussions de ces derniers temps dans le parti ou le conseil national du parti, aux 9/10, face à la situation telle qu’elle est, a aux 9/10 endossé, non pas de gaieté de coeur, mais comme une nécessité, le contenu de ce qui est devenu la loi 70 et aussi la loi 68.
Il y a une sorte de contradiction interne que M. Bisaillon pourra résoudre lui même. Il y a une chose qui nous frappe comme une sorte de non-sens, c’est que certains éléments porte-parole de l’association du Parti québécois du comté de Sainte-Marie, semblent vouloir devenir, comme le député, une sorte d’association indépendante. Je pense qu’il y a là une sorte d’illogisme qui, enfin, devrait sauter aux yeux. Une association indépendante d’un comté, c’est-à-dire hors de l’équipe ministérielle, hors de l’équipe d’ensemble du parti, cela ne tient pas beaucoup debout. Enfin, je pense qu’il va y avoir d’autres réflexions qui vont se faire en cours de route, c’est inévitable.

[Une voix: Vous voudriez qu’il sorte du parti en plus de sortir du caucus, vous n’êtes pas satisfait qu’il sorte seulement du caucus.
de M. Bisaillon de siéger comme indépendant tout en]

[M. Lévesque (Taillon):] Il est évident que si vous regardez tout simplement avec une tête sur les épaules, la prochaine campagne électorale, quand viendra le moment de choisir un candidat, il est évident qu’une association indépendante choisissant un autre candidat que le candidat du Parti québécois – si l’on était dans cette situation – il y aurait un vaudeville à écrire sur ce que cela peut représenter. Pour l’instant, on ne peut pas dire que c’est marqué « urgence catastrophe » mais je suis sûr qu’il va y avoir des réflexions additionnelles.

[M. Drolet: Est-ce que vous seriez prêt à accueillir M. Bisaillon s’il décidait de revenir dans le parti?]

[M. Lévesque (Taillon):] Écoutez, il est parti une couple de fois. On verra. Non, les valses hésitations de ce genre… Vous savez, M. Bisaillon m’avait parlé avant les fêtes de certaines différences idéologiques, pour employer un grand mot, enfin, c’est lui qui l’employait, d’un fossé idéologique qui était en train de se creuser. C’était quelques jours après qu’il ait participé, si j’ai bonne mémoire, à une éventuelle problématique perspective d’un parti « progressiste ». À ce moment, il ne s’agissait pas du bill 70. Il y a eu un changement de cap que je n’ai pas à expliquer, c’est à lui de s’évaluer, et maintenant il y a une autre raison qui, je suppose, soustend ses différences idéologiques et qui lui permet de dire: Bon, je deviens un député indépendant tout en restant dans le parti etc. Je trouve qu’il y a eu une recherche assez laborieuse des motivations pour son départ, mais enfin, c’est fait, c’est fait. Une bonne chose, ce serait peut-être qu’étant indépendant, tu deviens porte-parole de toi même et tu es dégagé de la solidarité d’équipe et cela l’amènerait peut-être à être un peu plus assidu, parceque , que ce soit au caucus des députés ou que ce soit en Chambre, il fait partie de ceux qu’on ne voit à peu près jamais, sauf peut-être à l’occasion, quand ils ont quelque chose de pas réaction d’équipe à faire valoir. Pour le reste, ce sont les autres qui ont porté le poids par rapport à des gens comme lui; il n’est pas le seul, mais enfin, c’est un cas particulièrement frappant, de ce manque d’assiduité qui fait que, finalement, ce sont les autres qui payent pour. Peut-être que ça le rendra plus assidu, le fait d’être porte-parole unique, jusqu’à nouvel ordre.

[M. Fraser. J’ai une question finale, M. Lévesque, et une autre question pour M. Bertrand. Est ce que ça veut dire que vous voulez que le parti considère la possiblité d’expulsion?]
[M. Lévesque (Taillon):] La réponse est non.

[M. Fraser. Pour M. Bertrand, vous avez parlé d’un manque d’assiduité des journalistes à propos du projet de loi no 65. II faut dire qu’avec le chevauchement des comités et le manque de transcription, ça a été souvent difficile de suivre des commissions.
Des voix: C’était complètement impossible.]

[M. Lévesque (Taillon):] Sur les derniers milles, c’est évident.

[M. Fraser. Vous avez parlé un peu de la collaboration que vous avez reçue du leader, j’aimerais que vous décriviez un peu votre expérience. On a, dans les discours hier soir, parlé
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beaucoup de la collaboration avec l’Opposition. M. Lévesque a fait référence tout à l’heure à la collaboration sur certaines lois; je pense que peut-être il a fait référence au projet de loi no 65 comme un exemple.]

[M. Lévesque (Taillon):] C’est que M. Ryan lui même soulignait hier.

[M. Fraser: J’aimerais un peu votre version de cette expérience de collaboration en commission sur le projet de loi no 65.
M. Bertrand: Je sais qu’il est très difficile, et pas seulement pour vous mais même pour nous, d’obtenir les transcriptions des débats qui ont lieu en commission parlementaire, on les obtient plusieurs jours après. Effectivement, même pour nous, c’est effectivement agaçant; si on pouvait trouver une solution à cela et le régler une fois pour toutes, ça serait fort utile et pour vous et pour nous. Ce que je voudrais souligner, c’est qu’effectivement, et vous l’aurez noté parceque cela était disponible très rapidement, à l’Assemblée nationale hier, lors du débat en troisième lecture sur le projet de loi no 65, le député de Westmount a pris la parole, le député de Jeanne-Mance, le député de Taschereau, le député de Marguerite-Bourgeoys et moi même et tout le monde a tenu le même langage; c’est une commission parlementaire où, je dois le dire, on a tous laissé nos gants de boxe à la porte et on a vraiment travaillé en équipe. En aucun moment on avait l’impression de sentir qu’il y avait des représentants du Parti libéral d’un côté, l’Opposition, du Parti québécois de l’autre, le gouvernement, mais la plupart du temps quatre ou cinq députés extrêmement intéressés par le dossier et qui étaient en même temps très conscients que cette loi est une loi qui devra par la suite être vécue sous n’importe lequel gouvernement, le nôtre, ça pourrait être un autre plus tard.
Donc, il y avait un très grand sens des responsabilités qui s’était développé dès le début, mais qui n’a pas empêché, de part et d’autre, des amendements fort nombreux; sur 184 articles, tout près de 70 amendements ont été apportés, c’est considérable, et certains d’ailleurs qui sont majeurs. Dans un contexte comme celui là, tout le monde, à la fin, se réjouissait du climat qui
avait prévalu où jamais, pendant 32 heures et 16 minutes de discussion, il n’a eu quelqu’allusion
partisane que ce soit. Je le dis comme je le pense: Après cinq ans et demi à l’Assemblée nationale, c’est un des beaux moments de la vie parlementaire – les gens de l’Opposition ont tenu à le souligner aussi – d’avoir à discuter une loi dans un tel climat. C’est le député de Westmount qui me le disait hier, à la sortie de le Chambre. À son point de vue, lui, qui a beaucoup étudié les différentes lois qui existent dans différents pays relativement à l’accès à l’information et à la proteciton des renseignements personnels, il disait que dans les régimes politiques, dans les systèmes politiques de type britannique, cette loi lui paraissait comme la loi la plus avant-gardiste, la plus progressiste et qu’il n’avait pas peur maintenant de la citer en exemple devant tous les autres Parlements. Je pense qu’à ce point de vue, l’Assemblée nationale du Québec, à peine un an après la remise du rapport Paré – M. le premier minsitre s’en rappelle dans l’édifice d’Hydro-Québec, à Montréal, nous avons ici, à l’Assemblée nationale du Québec, notre loi d’accès à l’information. Je crois que nous avons donc procédé avec diligence et que nous avons finalemeant un projet de loi extrêmement intéressant.
M. Fraser. Néanmoins, le député de Westmount a exprimé dans son discours hier un regret sur l’insistance du gouvernement de maintenir la clause no 146 qui donne finalement un contrôle complet au gouvernement pour fermer la porte sur quoi que ce soit.
M. Bertrand Ce sont des gros mots, « contrôle complet » pour le gouvernement de fermer la porte sur les organismes publics et les décisions qu’ils pourraient prendre. Il faut d’abord savoir que l’article 146 réfère à des décisions de la commission, donc après un appel qui aurait été logé par des individus qui n’auraient pas obtenu satisfaction auprès des organismes publics, donc après que la commission ait pris une décision. Là, le gouvernement, lorsqu’il jugerait qu’il en va de l’intérêt public, de la protection de l’intérêt public, pourrait suspendre l’exécution d’une décision pour une période de temps qu’il devra indiquer. Cela fera l’objet d’une décision au Conseil des ministres, qui prendra la forme d’un décret, qui devra être déposé à l’Assemblée nationale.
Je pense qu’on a mis beaucoup d’emphase sur cet article 146. Si un gouvernement, le nôtre ou un autre, se mettait à faire de cet article 146 le principe général de l’application de la loi, évidemment, il se ferait juger très rapidement, d’abord par les journalistes, deuxièmement, par les députés à l’Assemblée nationale et, troisièmement, en dernier ressort, par la population, cela va de soi. C’est donc un article, à mon avis, qui sera utilisé dans des circonstances tout à faite exceptionnelles et j’oserais même dire que les gouvernements y penseront deux fois avant d’utiliser l’article 146. Je pense que l’essentiel de la loi, ce sont les 183 autres articles; l’article 146 est là, à mon avis, comme une nécessité, parcequ’il pourrait se présenter des situations où le gouvernement, qui est tout de même l’organe, l’organisme qui représente la population – c’est un gouvernement qui a été élu démocratiquement – et qui, à mon avis, est l’institution la mieux placée, en dernier ressort, pour juger ce qui est contraire ou non à l’intérêt public. Cela m’apparaît tout à fait normal que cet article ait été introduit dans le projet de loi mais,
encore une fois, le gouvernement qui l’utilisera sera jugé à sa façon de l’utiliser et au nombre de fois qu’il recourra à cet article 146.
M. Harris: Jacques L’Archevêque.
M. L’Archevêque: Ma question s’adresse à M. Lévesque et, pour faire plaisir à mes camarades, je ne ferai pas de préambule cette fois ci. M. MacEachen présente un budget lundi. Le Québec a t il des attentes?]

[M. Lévesque:] On en a tellement que cela ne sert à rien de commencer à les énumérer. Je ne commencerai pas à essayer de voir quels petits morceaux de l’éventuel problématique budget de M. MacEachen feraient le plus notre affaire. Tout ce qui pourrait aider de quelque façon que ce soit à diminuer un peu l’insécurité économique galopante qu’on est en train de vivre, cela fera l’affaire du Québec comme cela fera l’affaire de tous les gens de l’Atlantique au Pacifique. Avez quoi va t il aboutir? Il est rendu, par rapport à environ 10000000000 $ de prévisions, à une prévision qui semble maintenant s’en aller vers 17000000000 $ ou 18000000000 $ de déf..:it. Celui de l’an dernier – je pense que le chiffre final est dans le journal de ce matin – était prévu, lui aussi, autour de 11000000000 $ , je pense, et est rendu à 13000000000 $ une fois complété, espérons le, ce qui veut dire que, de toute façon, on est dans la mise, collectivement. L’inflation, hier, était de 11,8%, sauf erreur, le 1 $ à 0,76 $ , le chômage galope, l’économie et les entreprises s’écrasent jusqu’à nouvel ordre. Qu’il fasse quelque chose! Depuis le temps qu’ils ont une politique – si on peut appeler cela une politique – qui nous a menés là et qu’ils ont les grands leviers en main, bien qu’ils fassent quelque chose. Maintenant, attendons à lundi et on verra. Je dois dire qu’on n’aura pas de réaction avant d’avoir analysé cela comme il faut, sauf la réaction normale du ministre des Finances, s’il veut en donner une mardi, mais le gouvernement, pour élaborer davantage, va attendre à mercredi prochain pour pouvoir étudier cela comme il faut. Pour l’instant on attend.

[M. Harris: M. Lévesque c’est une question pour vous.
M. Girard: M. Lévesque, je pense que vous êtes revenu des États-Unis alors qu’un comité ministériel vous avait préparé un bébé dans son bain, c’est-à-dire Sidbec, est ce que le Conseil des ministres s’est penché aujourd’hui sur cette épineuse question? Est ce que vous pouvez faire le point?]

[M. Lévesque (Taillon):] En vous quittant on va aller se pencher. C’est-à-dire qu’il y a une chose qui est évidente, c’est qu’il va falloir avancer des liquidités à Sidbec très bientôt, c’est marqué pressé, de façon à voir en même temps avec eux – cela aussi c’est marqué pressé – comment on peut trouver un sorte de plan de redressement, si vous voulez, et cela implique de réexaminer les morceaux principaux, on les connaît tous, de l’ensemble Sidbec. L’étude est assez avancée, je n’ai pas tous les détails. On va regarder à la fois ce qui a été en même temps la nécessité de renflouer les vides à court terme et, forcément, quelle sorte de perspective on peut dégager au plus sacrant, excusez l’expression, pour voir comment on peut comprimer cette espèce d’hémorragie permanente.

[M. Girard: Sidbec, c’est un peu votre bébé; vous vous souvenez du milieu des années soixante. Bon Dieu! Comme vous avez pédalé fort pour qu’on ait une sidérurgie qui permettrait de briser le cartel de l’acier etc.]

[M. Lévesque (Taillon):] Ce n’était pas mon bébé principal à ce moment là mais, enfin.

[M. Girard: Non, mais cela en a été un parmi ceux que vous aviez, parcequ’il y en avait quelques uns qui allaient de front.]
[M. Lévesque (Taillon):] Enfin, cela n’a pas été l’enfant le plus fort qu’on a produit, cela
c’est sûr, mais qu’est ce que vous voulez?

[M. Girard: Ceci nous amène bien dans le sens de la question que je veux poser. Sidbec, par elle même, la sidérurgie, semble t il serait rentable, Ce qui déconcrétise toute l’histoire, c’est Normines. Ce que je veux poser comme question c’est la suivante.]

[M. Lévesque (Taillon):] Je vous ferai remarquer que ce n’est pas de mon temps que Normines s’est ajouté.

[M. Girard: Je vous concéderai que vous avez raison.]

[M. Lévesque (Taillon):] Une fois n’est pas coutume.

[M. Girard: Ce que je veux vous poser comme question, c’est qu’en tant que chef de gouvernement, donc responsable de l’exécutif, est ce que vous favoriseriez qu’on puisse se départir de Normines, de façon à sauver Sidbec?]

[M. Lévesque (Taillon):] La réponse, indiscutablement, c’est oui. Mais je dois ajouter  » mais » tout de suite dans le sens suivant: il y a des contrats de partnership qui sont très lourds à porter, qui sont en fait exhorbitants à beaucoup de points de vue, pas seulement pour le Québec, sauf erreur pour British Steel aussi. Deuxièmement, il y a aussi l’état général de la situation économique de la Côte-Nord, en ce moment, dont il faut tenir compte. Alors, nous sommes devant un beau cas.

[Une voix: C’est à vendre?]

[M. Lévesque (Taillon):] Si vous trouvez un acheteur, en tout ou en partie…

[M. Girard: M. Lévesque, on n’aura probablement pas l’occasion de vous reparler après le Conseil des ministres pour savoir ce qui aura été décidé mais, lorsqu’on parle d’une injection de capital à court terme pour permettre…]

[M. Lévesque (Taillon):] Là, je n’entre pas dans le détail, ce n’est pas nécessairement du capital en tant que tel, c’est vraiment d’avancer de l’argent et on va décider de quelle façon. Il en faut. Cela n’a pas d’importance, il faut des liquidités additionnelles.

[M. Girard: Cette liquidité peut elle être de l’ordre de grandeur qu’on a mentionné, c’est-àdire de 40000000 $ à 50000000 $ ?]

[M. Lévesque (Taillon):] Même peut-être un peu plus. Non, la situation n’est pas précisément…

[M. Girard: Jolie, jolie…]

[M. Lévesque (Taillon)] …jolie, jolie. Cela ne sert à rien d’anticiper, il va falloir examiner ce qu’on peut de paramètres et fixer des montants. On va le faire tout à l’heure et vous aurez sûrement une annonce, qu’elle vienne de moi ou l’annonce de tout ce qui a été décidé, c’est sûr.

[M. Girard: Aujourd’hui ou demain?]

[M. Lévesque (Taillon):] Bien, aujourd’hui ou demain au plus tard. Le plus vite possible, il n’y qu’elle vienne de chez M. Biron.

[M. Harris: Il reste trois questions en français et peut-être après qu’on peut passer en anglais: Michel Lacombe, Gilles Lesage et Mme Gibb-Clark.
M.Lacombe: M. Lévesque, avant de quitter, Guy Bisaillon avait dirigé les travaux d’une commission assez importante, je pense à la réforme des habitudes administratives de la fonction publique et qui touche même beaucoup à la réforme parlementaire dont il était question dans le rapport Vaugeois au départ. Ma question est en deux temps: est ce que, d’une part, le départ de Bisaillon enlève beaucoup de crédibilité au rapport de cette commission? Est ce que cela va le faire aller plus vite sur les tablettes et, d’autre part, de quelle façon pouvez vous traiter de ce dossier pendant les négociations?]

[M. Lévesque (Taillon):] Bien, de toute façon, j’ai lu le rapport. C’est un travail d’équipe, cette fois là, auquel M. Bisaillon a présidé, si vous voulez, comme président de cette commission pilote, un peu du côté des commissions spéciales: on peut dire qu’en soi, c’était du bon travail. Ils ont travaillé durant plusieurs mois mais, même plusieurs mois, ce n’est pas tellement, parceque j’ai lu le rapport. Je ne peux pas l’analyser en ce moment, je l’ai lu trop vite et il va falloir le faire étudier. Il y a une sorte de cohérence générale des principes, mais cela veut dire que tout le travail reste à faire et d’ailleurs, le rapport ne s’en cache pas. Arrangez vous avec cela maintenant. Il y a une sorte de perspective, mais reste à établir une perspective et voir comment tu mets les morceaux ensemble et quel est le rythme d’application possible, etc. Ils posent le problème à quelques reprises dans le rapport mais il reste à trouver la façon. Il y a certaines choses très concrètes, touchant tel ou tel article de la Loi 50 actuelle, qu’on peut évaluer au mérite, rapidement, mais il y en a pas tellement et il va falloir comment cela peut s’inscrire dans un ensemble.
Alors, c’est évident qu’au ministère de la Fonction publique, ils l’ont reçu avec beaucoup d’intérêt, on a pas eu le temps encore de voir le rapport au Conseil des ministres, et quelque soit son sort éventuel, ce ne sera d’aucune façon relié à ce qui est arrivé à M. Bisaillon par la suite. Il faut juger le rapport au mérite et voir comment, au mérite, on peut en tirer quelque chose de valable et quelles sont les étapes à parcourir pour relier cela aussi à la perspective générale, si vous voulez, de la refonte qui exigée du côté de la Loi 50. Cela implique aussi des négociations? Je ne crois pas, je n’ai pas vu de liens directs, particulièrement pesants, si vous voulez, comme implications de ce côté là, mais encore une fois, j’ai fait une lecture rapide, je n’ai pas eu le temps.

[M. Lacombe:] Au sujet de la négociation, M. Lévesque, on n’entend parler de rien de ce
structures, des organismes, on est pas encore sorti du bois et le rapport utile, j’en suis sûr, à la réflexion qui se poursuit et aux projets éventuels. Est ce que cela peut avoir des incidences – pas dans l’immédiat, temps là, est ce qu’il se prépare quelque chose, est ce que vous essayez de ne d’appliquer la Loi 70 ou si vous vous en allez allègrement vers cela?]

[M. Lévesque (Taillon):] Non. Premièrement, on a dit depuis le début qu’on ne tenait pas, Dieu sait, à appliquer la Loi 70. Ce n’est pas pour rien qu’il y a un article dedans qui dit qu’elle peut toute être remplacée par une entente éventuelle; enfin, je paraphrase. Donc, notre objectif prioritaire, l’ objectif fondamental c’est un certain nombre de centaines de millions de dollars qu’on a pas les moyens, en conscience, de se payer d’ici au 31 mars 1983. Cela, si vous voulez, malheureusement, c’est comme cela, ce n’est pas négociable.
Pour ce qui est de l’application, de cette récupération si vous voulez, nécessaire des
centaines de millions en question, on a dit: S’il faut absolument – rendu au 31 décembre – appliquer la loi 70, on l’appliquera, elle est maintenant une loi. Mais cette loi comporte un article qui dit: Si on peut faire autrement par entente, tant mieux pour tout le monde. C’est la chose qu’on dit sans arrêt depuis la mi-avril, depuis la première proposition de réouverture qui avait été faite.
Cela étant dit, je pense qu’en ce moment, quant aux retombées immédiates de 70, 68, il serait un peu invraisemblable qu’on commence à dire: On se met à table tout de suite. Il faut laisser passer quand même quelques jours ou quelques semaines peut-être. De toute façon, crois que, normalement, l’initiative devrait venir de la part de nos interlocuteurs syndicaux; je sais qu’il en a été question entre les branches en tout cas. Je ne peux pas aller plus loin pour l’instant mais j’ai l’impression j’ai même confiance qu’on sera à table les uns et les autres bien avant l’échéance du 31 décembre. Vous situer cela exactement, je ne peux pas.

[M. Lacombe: Actuellement, il n’arrive rien. Ce n’est pas le temps.]

[M. Lévesque:] S’il arrive des choses, ce seront des choses tellement privées que je n’en sais rien.

[M. Lesage: J’aimerais savoir comment vous allez procéder à l’automne. Est ce qu’il va y avoir une fin de session et le début d’une autre? parceque la session n’était pas commencée au mois de novembre l’an dernier.]

[M. Lévesque:] Normalement, ce que je vois, pour essayer de dégager une perspective le
économique, cela correspond à ce qu’on vient de dire en conversation avec des Américains élus chez eux et des gens des Maritimes, de mois en mois, il n’y a plus une boule de cristal qui fonctionne. Alors, d’ici six mois, donnons nous cet horizon, c’est-à-dire d’ici à la fin de 1982; tout ce qui est imprévisible peut arriver. Alors, dans ces circonstances, pense que, avant Noël, le 23 décembre ou par là, et de reprendre, si on peut dégager les perspectives de relance ou, en tout cas, de fonctionnement renouvelé, jusqu’à un certain point, attendre normalement pour une nouvelle session après le détour de 1983, selon les circonstances, mais normalement, vous le savez, c’est toujours autour de février ou au plus tard au début de mars.

[M. Lesage: Est ce qu’on peut prévoir qu’il va y avoir un budget supplémentaire ou un nouveau budget comme Ottawa en présente un la semaine prochaine?]

[M. Lévesque:] Je ne vois nulle part à l’horizon un nouveau budget, mais un budget supplémentaire, je pense que oui. De toute façon, même s’il s’agissait seulement de tenir compte des crédits périmés, parcequ’à ce moment là on a une bonne idée, au milieu de l’exercice, c’est une des choses élémentaires qu’il faut faire, ce sont des réajustements, des redistributions aussi.
[Mme Gibb Demain c’est la première fête nationale depuis qu’on a imposé la constitution canadienne au Québec. Si je comprends bien, vous n’avez pas l’intention de marquer cela dans les faits. Est ce que vous avez songé à cela?]

[M. Lévesque (Taillon):] [« Marquer cela dans les faits »?]

[Mme Gibb-Clark: Marquer…
M. Girard: …des faits pour la constester.
Une voix: Manifester.]

[M. Lévesque (Taillon):] Écoutez, il peut y avoir des initiatives parceque c’est très fortement laissé, peut-être plus cette année que jamais pour toutes sortes
l’initiative locale, régionale. Il peut sûrement y avoir des manifestations au sens légitime et simple du mot, de ce genre de réactions, oui, mais ce n’est pas prévu en soi. Cela va probablement venir dans le discours inévitablement, c’est tout. En fait, j’ai bien aimé la façon – c’est un peu ce que j’essayais de passer dans le petit message traditionnel qu’on fait toujours pour la Saint-Jean – la façon dont M. Ryan l’a développé hier. Je pense que cette année, cela se présente – c’est toujours le moment pour le faire – dans une perspective historique, il s’agit quand même de la fête nationale. On a toutes les raisons dans notre passé et on en a quand même quelques unes, au moins autant que d’autres, dans notre présent, d’avoir confiance. En même temps, c’est – comme jamais auparavant – marqué sous le signe du réalisme. Autrement dit, ce n’est pas le moment de rêver en couleur Je pense que, sans qu’on ait besoin de travailler là dessus tellement, c’est la thématique qui ressort de la situation elle même.

[M. Harris: Est ce que l’on peut passer à la période de question en anglais, s’il ne reste plus de questions en français. M. Rick LeGuerrier.
Une voix: Oui, oui, d’accord, la minorité.
M. LeGuerrier . Rick LeGuerrier de CFCF, j’ai une question à poser. I have two questions. First, the question for the House leader and then a question for you Mr Levesque.
M. Lévesque (Taillon): May I take mine first because it is going to be the first and last because I have to get back to the Cabinet meeting. Si cela ne vous fait rien, je vais prendre les deux premières because 1 have to get back, Mr Bertrand can stay behind a bit.
M. Le Guerrier: Mr Premier.
M. Lévesque (Taillon): O.K.
M. LeGuerrier. Over the last few months we have seen the Government more orless force the employees to give back a wage or we are going to see it in January, forcing the banks to contribute to your plan, forcing a merge of two towns just north of Quebec City here, forcing the doctors to return to work, forcing the bus drivers to go back. How would you characterize this past Session, a forceful Session?
M. Lévesque (Taillon): Well, I think I will just give you the same answer that Mr Bertrand, as a House leader, more orless got, kind of inevitably, by looking at what happened during the last few months in the Session and outside the Parliament. This is a year for difficult choices and, you know, on a provincial basis, where does the buck stop? It stops where you have to make those choices. That is it. It is up to voters to judge eventually if we dit it right,if we did it wrong or if we went too far, if we did not go far enough. You know that there are some people saying all the time, you know there is a sort of schizophrenia all over the place among people that I have occasion to read or to listen to. On the one hand sometimes we are beaten over the head because we are becoming terribly conservative, we are not social-democrats, « quote, unquote », anymore. On the other hand, we are too lax,we are not yet, you know, in the kind of strict rigorous administration that we should be. I tell a lot of people: make up your minds, we do the best we can in difficult circumstances, and it means forceful choices sometimes. You know, some people are dreaming in colors about the new approach and with due respect I am mentioning it, because it is a glaring reality now, a new approach by the new Socialist government in France including Communist ministers, if you read the news there. And it was foreseeable, they are exactly at the same point as others now after one year. They just had to freeze salaries, freeze all incomes in fact except minimum income, if I have read it right, until September, until further notice. Ask the general run of workers to take a cut of 3% to 4% in their purchasing power and make rather severe cuts in social programs all at once and a second possible devaluation coming up. So, who else has got magic recipes?
M. Harris: I have two questions that I would like to ask very quickly on two completely different subjects. You said at the beginning of your remarks in French when you were asked about the possible cabinet shuffle that anyone can be tired, including yourself. I am wondering if you are contemplating leaving public life is some point in foreseeable future?
M. Lévesque (Taillon): That is part of general assessment, sort of assessment that you always have to make, it is on-going.
M. Harris: My second question is also about leadership. At least implicitly, recently you and M. Bertrand were somewhat flattering to M. Ryan. I am wondering if you have any thoughts on his leadership, would you rather see Mr. Ryan remain party leader, as opposed to other
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names that have been mentioned?
M. Lévesque (Taillon): That is not a joking matter. Well, look I will not answer your
question the way you put it because that would
be kind of indecent. I will just say one thing, it
rather impressed me last night because it was obviously thoughtful in the sense they had been thinking before that speech. It was this closing address to the National Assembly and revealing, I think, more eloquently than Mr. Ryan run’s of the mill – we all have a run of the mill moments – a certain clear intention which is, in a sense, I would say, an effort to repatriate practically on a Québec basis the provincial Liberal party. I notice that for once, there was no look towards that part of the caucus, the one behind, the one all over the place. It was really a sort of effort to « requébéciser », because it was darn close to not being a Québec entity anymore, de « requébéciser » le Parti libéral on that, more power to it.
M. Harris: Did it occur to you that might be his last speech in the National Assembly?
M. Lévesque (Taillon): It could have been that. Then, it would be a very good farewell address. But I do not think that is the feeling you got from it, especially when some of you also have indiscreet comments about meeting Mr. Ryan a couple of days ago beyond the press conference. If you put the two together, I think the conclusion seems to be obvious that he is not ready to go for the moment, quite to the contrary, but as far as that, I can not go. Merci beaucoup.
M. Harris: M. Bertrand.
M. Le Guerrier. How do you feel that you have performed as House leader over the last four months and especially in light of the fact that it was a stormy session at times and you were even heard to say at one point that the Government intends to crush the Opposition underfoot? I am paraphrasing. It was along those lines. How do you evaluate your performance as House Leader?
M. Bertrand: Well, I think, considering that, there are moments when we act on both sides as people who really want to smash each other and not taking into account this little sentence and this little moment, which was just a little part of all those four months, I must say that I feel the National Assembly was quite efficient. If we refer to the goal we had to pass approximately 20, 25 laws before the National Assembly and that, finally, we have approximately 45, 1 think that this gives you an indication of the kind of productivity we have and I am quite satisfied about it. And I feel that the relations are quite good with Mr. Gérard-D. Levesque, who is the Leader of the Opposition and that if I have to go along with the job next Autumn
and next year, there will not be any problem. I feel at ease in it and I everything into consideration, the job has been done quite fairly.]

[M. Lesage: Au sujet de la création de la commission qui est prévue par la loi 65, comme cela doit être adopté par l’Assemblée nationale, cela veut dire qu’elle ne sera pas créée avant la fin de l’année, donc que le mise en oeuvre de la loi sera retardée d’autant.
M. Bertrand: De toute façon, nous avons adopté un amendement en commission
prochain. Nous avons voulu rapprocher la date d’entrée en vigueur de la loi le plus possible de la session, de la reprise des travaux à l’Assemblée nationale pour justement être en mesure de pouvoir nommer les trois commissaires et leur permettre de commencer leur travail. Effectivement, au cours des premiers mois, il y aura beaucoup de travail à effectuer, entre autres, d’indiquer au gouvernement comment ils voient le calendrier d’implantation, comment ils voient l’implantation graduelle de la loi, quels organismes devraient être les premiers à être assujettis à la loi, puisqu’il y en plus de 5000.
Donc, on a voulu indiquer dans la loi que son entrée en vigueur serait le 1er octobre et, par la suite, probablement dans les premiers jours, les premières semaines de la session, au mois de novembre, on pourrait nommer aux deux tiers des membres de l’Assemblée nationale les trois commissaires. Cela va nous donner beaucoup de temps aussi pour trouver trois personnes tout à fait qualifiées et tout à fait compétentes pour remplir un mandat par ailleurs fort important et fort délicat. On verra.
(Fin à 14 h 43)]

[QLévsq19820623cp]

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