Conférence de presse du 13 novembre 1981

[(Treize heures quarante-trois minutes)]

[M. Lévesque:] Je vais faire un préliminaire extrêmement bref. Il y a une semaine à peu près, assez exactement une semaine, qu’à partir d’Ottawa et de certains autres coins, on joue un jeu assez curieux et, comme d’habitude, cela fait des manchettes, des rumeurs, etc., et toute une pression aussi qui a été très bien manipulée qui s’adresse au gouvernement du Québec. On voudrait nous ramener à une table où on serait face à face avec ceux qui prétendent nous voler des droits et des pouvoirs essentiels pour voir si on pourrait gentiment les aider à réduire les dégâts. Ce n’est pas un genre de jeu auquel on se prête après ce que nous avons connu sans mettre d’abord, puisque les autres se sentent incapables ou impuissants à le faire, nos cartes essentielles sur la table. Je ne sais pas si vous vous en doutez – enfin, peut-être que cela a filtré un peu – la première façon de faire cela qui nous semble la plus indiquée, c’est d’aller à l’Assemblée nationale et de baliser très clairement la perspective.
Je n’ai pas pu consulter, je n’ai pas eu le temps de consulter le chef de l’Opposition cette fois ci. Seulement, je dois vous dire qu’il a été mis au courant par l’envoi du texte de la résolution dès ce matin, aussitôt qu’il a été terminé. Je ne voyais pas, non plus, de nécessité vraiment de consultation puisque, en fonction du vote du Parti libéral au mois d’octobre conjointement avec le parti ministériel, il n’y a rien là, me semble t il, que ne puissent pas accepter des gens qui se souviennent de leur vote du mois dernier. D’autre part, le secrétaire général de l’Assemblée nationale a reçu copie de la résolution pour qu’elle soit inscrite au feuilleton dès le début de la semaine.
Si vous me le permettez, je vais vous lire la résolution et, aussi brièvement que possible, essayer de la situer ensuite dans son contexte. « L’Assemblée nationale du Québec, rappelant le droit du peuple québécois à disposer de lui même et exerçant son droit historique à être partie prenante et à consentir à tout changement dans la constitution du Canada qui pourrait affecter les droits et les pouvoirs du Québec, déclare qu’elle ne peut accepter le projet de rapatriement de la constitution sauf si celui ci rencontre les conditions suivantes: 1. on devra y reconnaître que les deux peuples qui ont fondé le Canada sont foncièrement égaux et que le Québec forme, à l’intérieur de l’ensemble fédéral canadien, une société distincte par la langue, la culture, les institutions, une société qui possède, donc, tous les attributs d’une communauté nationale distincte.
Deuxièmement, le mode d’amendement de la constitution, ou bien devra maintenir au Québec son droit de veto traditionnel, ou bien sera celui qui a été convenu dans l’accord constitutionnel signé par le Québec, le 16 avril 1981, et confirmant le droit du Québec de ne pas être assujetti à une modification qui diminuerait ses pouvoirs ou ses droits et de recevoir, le cas échéant, une compensation raisonnable et obligatoire.
Troisièmement, étant donné l’existence de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, la charte des droits inscrite dans la constitution canadienne ne devra inclure que: premièrement, les droits démocratiques; deuxièmement, l’usage du français et de l’anglais dans les institutions et tes services du gouvernement fédéral; troisièmement, les libertés fondamentales, pourvu que l’Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence; et quatrièmement, les garanties quant à l’enseignement dans la langue des minorités anglaises ou françaises, pourvu que le Québec reste libre d’y adhérer volontairement puisque sa compétence exclusive, en cette matière, doit demeurer totale et inaliénable et que la situation de sa minorité est déjà la plus privilégiée au Canada.
Quatrièmement, on donnera suite aux dispositions déjà prévues dans le projet du gouvernement fédéral concernant le droit des provinces à la péréquation et à un meilleur contrôle de leurs richesses naturelles.
Alors, cette motion vise donc à faire connaître au gouvernement d’Ottawa et aux gouvernements provinciaux du Canada anglais les conditions qui doivent être remplies s’ils désirent vraiment associer le Québec à quelque projet constitutionnel que ce soit. Inscrite au feuilleton dès le début de la semaine prochaine, cette motion sera débattue dans les meilleurs délais par l’Assemblée nationale, le seul Parlement qui appartienne en propre au peuple québécois et qui apparaît plus clairement que jamais en ce moment comme le seul rempart politique de notre identité et de nos droits collectifs. J’ai pleine confiance par conséquent que la Chambre votera ce texte, puisqu’il touche le coeur même de son rôle et de sa raison d’être. On y trouve d’abord une exigence que les circonstances ont rendue indispensable. On doit reconnaître, une fois pour toutes, à Ottawa comme partout au Canada anglais, ce peuple distinct que nous constituons avec tous ses attributs essentiels. Il faudrait qu’un Québécois ait littéralement cessé de l’être pour s’opposer à cela.
De plus, la motion contient les ultimes concessions que nous avions mises au point la semaine dernière avec ceux qui étaient encore, ou du mains qui se disaient encore, nos sept partenaires. Ce compromis final, qu’on retrouve aux articles 2, 3 et 4 de la motion, c’était la limite extrême de ce que nous pouvions accepter en vertu du mandat que l’Assemblée nationale nous confiait le 2 octobre dernier à l’unanimité des parties. Ce mandat, le chef de l’Opposition, M. Ryan, l’avait d’ailleurs déjà défini pour son parti, en conférence de presse, le jour même du jugement de la Cour suprême lorsqu’il disait: [« Nous ne pouvons pas consentir et nous ne pourrons pas consentir à ce que l’Assemblée nationale du Québec soit dépouillée du pouvoir législatif qu’elle détient en vertu de la constitution, ou que ses pouvoirs soient amoindris, ou diminués, ou transférés. C’est un point qui doit être bien clairement établi. »]
Maintenant, aussi brièvement que possible, je voudrais situer cette motion dans le contexte où les événements nous ont placés. Ce contexte a d’abord été le référendum de mai 1980 et la multitude de tenants du non qui étaient de bonne foi, mais qui ont dû constater depuis lors à quel point on les avait trompés. Précédée d’une négociation soigneusement manipulée en vue d’un échec, la preuve de ce viol référendaire des esprits est arrivée en octobre 1980 avec le coup de force unilatéral et inconstitutionnel du gouvernement Trudeau. Le contexte, ce fut ensuite la formation d’une alliance défensive de six, puis de huit provinces qui aura au moins contribué à retarder de plus d’un an ce chambardement constitutionnel absolument inacceptable qui devait, à l’origine, être complété avant Noël l’an dernier.
C’est dans le cadre de ce front commun que, ce printemps, huit signatures, dont celle du Québec, étaient ensuite apposées à un accord demandant à Ottawa de se contenter du rapatriement, assorti uniquement d’une formule d’amendement afin d’éviter le recours odieux à un Parlement étranger pour toute autre modification. Le contexte, enfin, c’était, il y a quelques semaines, la décision de la Cour suprême, dont l’effet principal, en plus de clarifier certaines questions, fut de forcer le gouvernement fédéral à proposer une reprise des négociations.
C’est au cours de ces pourparlers, la semaine dernière, devant l’intransigeance toujours aussi totale de nos vis-à-vis fédéraux, que fut mis au point le compromis qui, je le répète, représentait pour le gouvernement québécois le maximum des concessions encore acceptables. Mardi soir, 3 novembre, cette proposition était présentée au premier ministre fédéral par trois porte-parole du front commun, accompagnés du premier ministre Davis, de l’Ontario. À ce moment là, donc, huit provinces, et peut-être même neuf, croyaient, ou du moins, faisaient semblant de croire qu’il y avait là sur la table une entente honorable et vivable pour tous.
Sans autre forme de procès, M. Trudeau la rejeta pourtant du revers de la main et, dans les heures qui suivirent, lui et ses adjoints, avec le concours de quelques complices provinciaux vite regroupés, se mettaient à la tâche de briser, une fois pour toutes, l’alliance interprovinciale et du même coup, d’isoler le Québec. Ils réussirent en moins de deux jours, à tel point – j’ajouterais, croyez le ou non – que nos ex-partenaires, en plus de renier leur parole et leur signature, allèrent jusqu’à faire disparaître même les copies de cette dernière proposition que nous avions préparée ensemble.
La façon dont ça s’est effectué aura donc servi tout particulièrement à souligner que la dualité canadienne, fatalement, dirait on, en vient toujours, aux minutes de vérité, à se révéler par l’irréconciliable. Le Québec se voit considérer comme une quantité négligeable et on tâche surtout de l’amener, de force ou sournoisement, à n’être rien de plus qu’une province comme les autres, une province dont les attitudes pas comme les autres ne seraient, par conséquent, qu’une espèce d’anormalité de comportement.
C’est ainsi que sans exception, depuis 25 ans et plus, tous les gouvernements du Québec se sont vus, au moment stratégique, isolés et écartés de la partie. Quant à nous, nous avons, de plus, été simplement trahis, après avoir si longtemps et loyalement cherché un accord avec les autres. On nous faisait sentir ainsi que nous logeons dans une maison fédérale qui n’est pas à nous, mais la pièce que nous y occupons, qui est le Québec, on n’en fera jamais celle d’un locataire dont on peut déchirer le bail à volonté.
C’est pourquoi, comme première règle du jeu auquelle on prétend nous réinviter et comme condition fondamentale de tout accord du Québec, il va falloir d’abord qu’on reconnaisse, une fois pour toutes, cette fameuse dualité canadienne, c’est-à-dire ce peuple dont le Québec est le foyer et la patrie. Et il faut, comme le dit la motion que nous allons présenter à notre Parlement, que cette reconnaissance comprenne tous les attributs nationaux de ce peuple. Si le Canada anglais n’a pas encore compris ce que nous sommes, nous lui offrons une chance de le faire, une chance qui pourrait bien être la dernière. De plus, comme un maximum que nous maintenons toujours, mais que nous n’avons pas le droit de dépasser et qui n’est donc pas négociable, nous remettons sur la table l’ultime compromis auquel nous consentions la semaine dernière. Si on l’acceptait, là aussi, on démontrerait un début de compréhension, mais surtout, à une entente qui nie le Québec tout en prétendant le garder enchaîné, on ajouterait cet élément indispensable sans lequel aucun consensus ne pourra jamais être valable ni durable. L’accord d’un peuple qui lui aussi a fondé cette fédération, un accord sans lequel cette fédération n’aurait pas existé et un accord sans lequel cette fédération n’aurait plus guère de chance de longévité.
Nous mettons ainsi sur la table les conditions indispensables quant à nous à un accord. Ceux qui ont du mal, à une besogne très mal faite, assez ignominieusement faite, à réparer et qui cherchent, paraît il, certains moyens de réparation, c’est à cela d’abord, me semble t il, qu’ils doivent réagir.

[M. Harris: Daniel L’Heureux, suivi de Michel Lacombe.
M. L’Heureux: S’ils ne réagissent pas, M. Lévesque? Quand on veut comme cela reprendre les négociations, il faut aller se chercher une certaine arme, il faut aller se chercher certaines munitions.]

[M. Lévesque:] Les munitions fondamentales, c’est la source du pouvoir, cela s’appelle l’opinion publique, les citoyens, le peuple. Ce sont les munitions, en fin de compte, l’arsenal. Il reste une chose que je dois ajouter, c’est qu’évidemment il y a des choses qu’on étudie en ce moment. Je vais prendre les choses une à la fois, à mesure qu’on peut se consulter et préparer convenablement et les mettre devant le public. Il y a d’autres gestes qui doivent nécessairement se produire, le cas échéant, elles sont en préparation, mais je n’irai pas plus loin pour aujourd’hui.

[M. Harris: Michel Lacombe.
M. Lacombe: Est ce que cela a encore une certaine importance – et si oui, qu’est-ce que vous êtes prêt à faire pour cela – que vous obteniez l’appui de M. Ryan?]

[M. Lévesque:] Oui, cela a une certaine importance, c’est sûr. Cela demeure quelque chose d’assez effrayant, parceque cela a aussi, c’est au coeur – je l’ai déjà noté dans le discours inaugural – non seulement de l’incompréhension, mais cette espèce de mépris dont on nous abreuve et dont on nous a abreuvés un peu trop souvent dans notre histoire de la part du Canada anglais et, hélas, de la part du gouvernement fédéral, y compris trop souvent par les gens au sommet dans le gouvernement fédéral, même quand ils viennent du Québec, et les gens serviles trop souvent aussi qui les accompagnent. C’est évident que cela a un poids, même si ce poids a été foulé aux pieds au moment d’une motion unanime de l’Assemblée nationale. Cela demeure la chose première dans une démocratie politique que le Parlement du Québec, qui nous appartient en propre comme Québécois, souligne par ses élus certaines des choses fondamentales qui, d’ailleurs, reprennent ce que nous avions déjà voté le mois dernier.
Je ne vois pas comment, jusqu’à nouvel ordre, le chef de l’Opposition et le Parti libéral pourraient, sur la base de cette motion qui évidemment s’adapte aux circonstances nouvelles qui ont bté créées la semaine dernière, refuser de la voter, mais, enfin, c’est à eux de donner leur réaction. Ils ont quand même… Vous n’avez qu’à les rejoindre.

[M. Lacombe: Est ce à dire qu’il y a certains accomodements possibles quand même pour les accomoder?]

[M. Lévesque:] Sur le fonds de la motion? Non, aucun.

[M. Lacombe: Sur la formulation de la motion?]

[M. Lévesque:] S’il y a des mots qui peuvent être meilleurs, cela se discute.

[M. Harris: Jean-Claude Picard.
M. Picard: M. Lévesque, je voudrais des éclaircissements sur la logique de votre démarche. Je voudrais savoir comment vous pouvez croire que le gouvernement fédéral va être prêt maintenant à engager des négociations avec le Québec sur une…]

[M. Lévesque:] Non, il ne s’agit pas d’engager des négociations, je m’excuse. Il s’agit de savoir si le gouvernement fédéral qui prétend, par divers porte-parole qui se contredisent un peu – mais enfin, cela n’est pas nouveau – qu’il y a des choses à ajuster, qu’il accepte d’abord ou qu’il refuse ce qui pour nous représente maintenant des conditions fondamentales.

[M. Picard: Je vais finir ma question. Ma question était la suivante: Comment le gouvernement fédéral peut il accepter des conditions fondamentales, dites vous, qu’il a, je pense, très clairement refusées la semaine dernière?]

[M. Lévesque:] Depuis la semaine dernière, encore une fois, je répète la même chose, j’ai fini de me fier à ce qu’on dit de ce côté, mais ils prétendent quand même – jusqu’à la dernière minute, il faut tout de même penser qu’un jour ou l’autre, cela finira peut-être par être ce qu’ils disent – qu’il y a des choses à corriger, à compléter et qu’on devrait s’en parler.
Avant de parler de quoi que ce soit, il faudrait que cela soit la réparation essentielle de ce qui a été perpétré, si je peux me permettre l’expression, la semaine dernière.

[M. Harris: M. Jean-Claude Picard.
M. Picard: Croyez vous qu’il est possible que le gouvernement fédéral accepte maintenant ce qu’il a carrément refusé la semaine dernière?]

[M. Lévesque:] Je ne vois pas pourquoi ce serait moins possible que cela a été possible pour sept provinces de déchirer leur signature et de jouer le jeu qu’elles ont joué. Les précédents sont là. Mais ce n’est pas notre affaire; ce jeu, nous ne le jouons pas. On met sur la table ce qu’on a à mettre.

[M. Harris: Norman Rhéaume.
M. Rhéaume: M. Lévesque, vous dites dans votre texte que, si le Canada anglais ne devait pas saisir la chance que vous lui offrez, il pourrait bien s’agir de la dernière. La fin de votre texte…]

[M. Lévesque:] Oui, parcequ’un jour, je crois, la patience d’un peuple même très patient et qu’on confusionne tant qu’on peut dans un régime schizophrénique qui littéralement déchire souvent les esprits en deux morceaux, qui nous fait loucher un oeil sur Québec et un oeil sur Ottawa, il y a une limite à cette patience. Je crois qu’historiquement, cela pourrait être assez proche de la limite qu’il ne faut pas dépasser, si on veut maintenir cette fédération canadienne.

[M. Rhéaume: M. Lévesque, si vous me permettez de compléter ma question, cela vous permettra peut-être aussi de compléter la réponse. C’est justement que…]

[M. Lévesque:] Je ne veux pas prolonger l’exercice, mais je m’excuse, j’ai été obligé de le retarder d’une couple d’heures pour vous autres.

[M. Rhéaume: J’y vais rapidement. La fin de votre texte se termine en disant: La fédération canadienne n’aurait plus guère de chance de longévité, si effectivement cela…]

[M. Lévesque:] Dans le contexte où la phrase est là, oui.

[M. Rhéaume: D’accord. Je voudrais savoir si les suites ou les conséquences d’un refus du Canada anglais ou du fédéral d’aller plus loin dans le dossier sur la base des prérequis que vous établissez peuvent correspondre à ce que le vice-président de votre parti, Sylvain Simard, et le député de Rosemont, Gilbert Paquette, ce matin, mentionnaient dans un communiqué, à savoir la possibilité qu’ils demandent le déclenchement d’une élection sur la base de la souveraineté politique du Québec.]

[M. Lévesque-.] C’est évident qu’en temps opportun, il y aura une élection et que cette élection pourrait venir plus vite ou plus tard et qu’au centre de la prochaine campagne, il devra y avoir, de toute façon – je le pense, en tout cas, parceque cela a l’air d’être la tendance normale de notre parti après deux élections – notre option fondamentale.
Je ne peux pas commenter ce que M. Paquette et M. Simard ont dit, parcequ’ils parlaient comme militants du parti et comme nouveaux élus au conseil exécutif national du parti qui doit d’ailleurs se réunir – c’est aujourd’hui vendredi – ce soir. Comme je n’ai pas vu leurs propos, je présume que cela doit s’intégrer dans la perspective du parti et je ne peux pas les juger quand je ne les ai pas lus ou entendus.

[M. Harris: Jacques L’Archevêque.
M. L’Archevêque: M. Lévesque, vous dites que c’est la base minimale du Québec, que ce sont les conditions essentielles pour que le Québec soit partie à l’entente. Il y a un certain nombre d’expressions qu’on retrouve ici comme « les deux peuples fondateurs » dont M. Trudeau ne veut absolument pas entendre parler.]

[M. Lévesque:] C’est très malheureux qu’ils ne veuillent pas entendre parler de la réalité, mais enfin!

[M. L’Archevêque: Il y a la question de la compensation financière. C’est lui qui a exigé, les autres se sont rendus à son exigence, mais c’est lui qui a exigé que ce soit…]

[M. Lévesque:] Je dois corriger quelque chose. Est ce que c’était l’essentiel de votre question?

[M. L’Archevêque: Oui, mais cela venait d’un ministre fédéral, peut-être que…]

[M. Lévesque:] Non. Je dois corriger quelque chose, parcequ’il y a eu tellement de fouillis invraisemblable avec tous les jeux de coulisses, etc., qu’on est en train de reconstituer l’histoire de cette extraordinaire semaine. J’ai dit l’autre soir, à la télévision, à une émission avec Mme Bombardier, à Radio-Canada, que c’est M. Trudeau lui même qui avait exigé… Dans le scénario, qui avait été préparé dans la nuit, quand j’ai rencontré mes ex-partenaires au déjeuner de la dernière journée, on avait donné le rôle à M. Peckford lui même, de Terre-Neuve – en fait, c’était un figurant – de présenter un texte où la compensation financière, en cas de droit de retrait du Québec, était déjà éliminée. Alors, ça, c’était déjà fait, cela confirmait qu’il y avait eu toute cette « complotite » pendant la nuit et puis, une couple d’heures après, lorsqu’est venu le moment d’examiner ce texte historique qu’ils avaient fricoté ensemble pendant la nuit, là, c’est M. Trudeau, personnellement, à qui on avait confié le rôle, qui s’était donné le rôle de dire: .Pour ce qui est de l’éducation, pour les minorités, le droit du Québec de ne pas faire partie de
ma charte, cela, je vous le demande de l’enlever, et sans trop nous regarder dans les yeux l’ont accepté, alors cela complétait le scénario.

[M. L’Archevêque: C’était l’autre partie de ma question. ]

[M. Lévesque (Taillon):] Je reviens à votre question.
Qu’est ce que vous voulez que je vous dise? M. Trudeau ne croit pas, n’a jamais cru aux
deux peuples fondateurs. Il ne croit pas, et la mafia anglophone qui l’entoure dans le technocratie fédérale encore moins, il a réussi à faire un troupeau extraordinairement dénaturé à peu près de la totalité des gens que l’on envoi au nom des Québécois dans le Parlement fédéral. C’est bien connu, ses attitudes, c’est également un homme qui essaie de mettre une dernière plume à son chapeau en ce moment, avant de partir pour d’autres cieux ou d’autres préoccupations. Cela, je n’y peux rien; on n’y peut rien personne. Mais il y a une chose telle que la prise de conscience de l’ensemble des citoyens d’une opinion pulique et l’effet que cela peut avoir.
Deuxièmement, depuis une semaine, je le répète pour la dernière fois, parceque cela ne sert à rien de toujours répéter les mêmes choses, depuis une semaine, on joue avec des rumeurs dont on fait comme vous autres des manchettes, des analyses ou des chroniques extraordinairement pleines de suspense sur le fait qu’il y aurait peut-être lieu de corriger certaines choses, d’ajuster certaines choses. On n’est pas pour se mettre à table pour jouer ce jeu là avant d’avoir mis sur la table nos cartes essentielles qu’en conscience on croit devoir y mettre. Elles sont là; elles iront devant l’Assemblée nationale au début de la semaine.
M. Trudeau ou d’autres pourront dire s’ils maintiennent cette espèce d’ignorance entretenue de l’existence d’un peuple ici, et deuxièmement s’ils tiennent absolument à décortiquer jusqu’à la dernière minute, à échiffer jusqu’à la dernière minute les pouvoirs que nous on n’a le droit d’aucune façon de laisser attaquer ou diminuer. La parole est de l’autre côté encore une fois, qu’est ce que vous voulez?

[M. L’Archevêque: L’autre aspect de ma question c’était: Avec le texte d’une motion comme celle là, où vous reprenez des choses déjà votées par l’Assemblée nationale, des choses affirmées dans la livre beige du Parti libéral et des choses reconnues, règle générale en tout cas, si on se fie au sondage par les Québécois, est ce que vous ne risquez pas quand même d’achever le déchirement du Parti libéral du Québec?]

[M. Lévesque (Taillon):] Écoutez , je n’y crois pas et j’ai dit comme M. Ryan l’a souvent dit, qu’on ne doit pas gouverner par sondages, mais est ce que ce n’est pas dans un journal de ce matin que je voyais que le Parti libéral lui même avait commandé, paraît il, un sondage. Ils ont décidé que c’était peut-être un instrument valable, et, sans être un instrument à lui seul déterminant, et si j’ai bien compris le résultat, cela dit que 60% des gens qui ont répondu approuvaient l’attitude qu’avaient prise M. Ryan et son parti dans l’ensemble, lorsqu’ils ont voté la première motion. Mais, vis-à-vis d’eux, ce qui s’est passé depuis quelques jours est tellement rempli d’ambiguité, y compris les propos de M. Ryan en réponse au discours inaugural, que je crois, en autant qu’il s’agit du Parlement du Québec et de l’Opposition, que cette motion est importante comme réaffirmation ajustée aux nouvelles circonstances de ce qu’on a déjà déclaré le 2 octobre.
Deuxièmement, c’est important aussi parceque cela dit à M. Trudeau et à son entourage et aux gens du Canada anglais qui se sont comportés comme on le sait la semaine dernière, qu’il y a une limite et, cette limite là, quant à nous, la voici en ce qui concerne le Québec. Cela dit également et éventuellement à des gens à l’étranger que, sans compter d’autres gestes qui viendront, le cas échéant, si c’est nécessaire, que là aussi il y a une limite à ce qu’on peut faire entre un parlement massivement anglophone à Ottawa, un Parlement totalement anglophone au Royaume-Uni, à ce qu’on peut faire sur le dos d’un peuple qui a une langue, une culture et une identité qui sont différentes.

[M. Harris: M. Lévesque, il semble qu’il y aurait eu des conversations entre M. Bédard et M. Chrétien. Est ce qu’au moment où on se parle, il y aurait eu des contacts soit entre vous ou des membres du cabinet et est ce qu’il y a des approches qui ont été faites, par exemple, pour la fin de semaine?]

[M. Lévesque (Taillon):] Non. L’approche, je crois que la façon normale de la faire dans les circonstances, c’est en passant par le processus que je suis aujourd’hui, puisqu’ils ont des réunions, paraît il, à Québec en fin de semaine, qu’ils le sachent grâce à vous, de quoi il s’agit dans notre esprit. Pour ce qui est des conversations, je sais que M. Bédard a fini par être rejoint ou a fini par rejoindre M. Chrétien, qui lui courait après au téléphone. C’est curieux comme il ne savait pas se servir du téléphone la semaine dernière quand on aurait pu nous avertir de ce qui se passait, l’instrument est devenu d’un usage multiquotidien depuis quelques jours.
Alors, M. Bédard, oui, a été rejoint par M. Chrétien ou vice versa après plusieurs appels, puis ils se sont dit simplement, je pense en gros, ce qui paraissait être l’essentiel, bien, pas l’essentiel, la condition préalable à n’importe quelle rencontre, c’est que, d’abord, nous, on établisse nos positions parceque , sinon, cela ne sert à rien d’entrer dans ce jeu là. M. Chrétien a même couru après M. Morin, paraît il, qui est à Paris en ce moment pour une réunion annuelle de l’Agence de coopération francophone et je crois que vous trouverez dans les dépêches la réaction de M. Morin à ces échanges.

[M. Harris: Victor Malarek.
M. Malarek: M. Lévesque, au début de la semaine, dans le message inaugural vous avez senti le besoin de réitérer le voeu d’intégrité et de tranparence de votre gouvernement…]

[M. Lévesque (Taillon):] Oui.
[
M. Malarek: …et vous avez dit: Nous n’hésiterons jamais à agir à partir des faits. Alors, il y a justement un cas ce matin, il y a le directeur du financement des partis politiques qui dit qu’il y a du matériel réservé pour les fêtes nationales qui a servi à la promotion de l’option du oui, autrement dit, des fonds publics qui, illégalement, ont servi…]

[M. Lévesque (Taillon):] Non.

[M. Malarek: …excusez, est ce que je peux finir ma question?]

[M. Lévesque (Taillon}] Oui, je m’excuse, vous êtes au mauvais endroit. Si j’ai bien lu, c’est le regroupement qui a suivi le référendum, ce qu’on appelait le Regroupement des Québécois pour le oui, mais qui a suivi le référendum, regroupement démocratique, et cela, je peux me tromper, mais…

[M. Malarek: Selon les révélations qui avaient été faites un peu plus tôt par la presse, c’est plutôt du matériel qui était à la disposition du comité des fêtes et qui avait servi au regroupement pour le oui. M. Boucher dit qu’il ne peut agir, parcequ’il ne pourra pas prendre de poursuites parceque les délais sont prescrits. Est ce que vous entendez vous abriter derrière cette prescription ou, s’il s’agit de personnes qui sont encore en fonction au gouvernement, estce que vous allez sévir contre ces personnes?]

[M. Lévesque (Taillon):] La seule chose que j’ai eu le temps de faire ce matin, c’est que j’ai demandé à quelqu’un de mon cabinet de s’enquérir auprès de M. Boucher pour savoir d’abord une chose, si les gens qui étaient responsables de ce regroupement pour le oui au niveau national, ce qu’on appelle le comité national, auraient de près ou de loin été mêlés à cela. Et la réponse, c’est non. Non seulement ils n’étaient pas mêlés à cela mais ils n’étaient même pas au courant. Cela peut être venu de je ne sais où, on essaiera de voir d’où s’est venu mais, pour l’instant, je n’en sais pas plus long. Seulement, je sais que les responsables qui avaient assumé la responsabilité de procéder selon les façons de faire qui sont prescrites, eux, ils l’ont suivie, puisque, de l’événement où de l’incident dont vous parlez, ils étaient ni au courant ni encore moins mêlés à cela.

[M. L’Heureux: Écoutez , M. Boucher, c’est le directeur du financement des partis politiques, il dit que c’est un cas flagrant de violation de la loi. Est ce que vous ne prenez pas sa parole?]

[M. Lévesque:] Bien non, ce n’est pas cela. C’est que la première chose, bien oui, je prends sa parole et je n’ai pas lu son rapport, la première chose, je comprends qu’on fasse des révélations tous les jours, il y a une campagne systématique là-dessus et on est prêt à la prendre, parceque cela ne nous fait pas de mal en soi. Seulement il y a une chose, c’est que, quand on commence à nous sortir n’importe quels trucs à tous les jours, les uns vrais, les autres faux, les uns plus ou moins fondés, les autres amplifiés par des titres, il faut tout de même qu’on prenne le temps de voir de quoi il s’agit. On ne peut pas passer notre temps uniquement à suivre tout ce qui, de près ou de loin, ressemble à une espèce de campagne de dénigrement systématique de plus en plus, à beaucoup de points de vue.
Dans ce cas ci, je répète ce que j’ai dit, je ne peux pas aller plus loin pour l’instant. La première chose que j’ai demandée, parceque cela aurait été plus grave, en faisant demander à M. Boucher, est ce que vos constatations sont que le comité national, qui était pleinement responsable de ses procédures, de sa façon d’agir, était au courant ou a été mêlé.

[M. Picard. J’ai deux questions, si vous me le permettez. La première sera brève. À quel moment, M. Lévesque, pensez vous pouvoir présenter cette motion, la faire discuter par l’Assemblée?]

[M. Lévesque:] La priorité absolue en ce moment, sauf en cas d’urgence flagrante, c’est le débat sur le discours inaugural qui doit se terminer vers le milieu de la semaine prochaine. À partir de ce moment là – s’il n’y a pas d’urgence absolue, et je n’en vois pas – on jugera au jour le jour, selon les circonstances.

[M. Picard: Vers la journée du jeudi.]

[M. Lévesque:] C’est censé finir jeudi, je crois.

[M. Picard: Mon autre question est la suivante: Dans votre perception, quelle est la chance que vous vous donnez que M. Trudeau puisse accepter de discuter à partir de cette base?]

[M. Lévesque:] Je l’ai déjà dit l’autre jour, à Ottawa, je ne suis pas un parieur. Vous me demandez de faire une sorte d’évaluation.

[M. Picard: Vous donnez l’impression que vous négociez à la hausse, M. Lévesque. C’est ça que je veux dire.]

[M. Lévesque:] On négocie à la hausse sur un seul point qui est l’article 1 de la résolution.

[M. Picard: Sur la dualité…]

[M. Lévesque.] Je ne répéterai pas ce qui est dans le texte, vous trouverez l’essentiel; la réponse, c’est que ça suffit. Cela fait assez de fois, dans notre histoire qu’on se fait traiter littéralement non pas comme une entité nationale à respecter, mais comme des espèces de colonisés qui doivent passer par là n’importe quand si l’autre peuple de cette fédération se regroupe suffisamment pour essayer de nous l’imposer. Cela fait combien de fois? Il y a une limite à ça, je l’ai dit tout à l’heure.
Maintenant, il n’est rien dit de nouveau là-dedans, on l’a évoqué. Je pense que ce sont des thèmes sur lesquels on s’entend et qui ont fait aussi officiellement l’unanimité pour le Parti libéral. Il n’y a que deux partis qui représentent les Québécois, en ce moment, sur le plan québécois du Parlement québécois. Alors, premièrement, en ce qui nous concerne, ici, à Québec, ça ne devrait pas créer de problèmes. Il n’y a pas un Québécois qui ne devrait pas se reconnaître là-dedans et voir à quel point c’est devenu essentiel de quand même faire comprendre une fois pour toutes qu’il ne s’agit pas d’une province parmi dix seulement, il s’agit d’une province qui est en même temps le foyer d’un peuple sur deux. Cela devrait être facile à admettre. Même la commission Pépin-Roberts, c’est une créature du gouvernement fédéral actuel, a souligné à quel point il y avait à la fois diversité régionale au Canada et dualité fondamentale.
Deuxièmement, M. Trudeau lui même, l’an dernier, en septembre 1980, a fait une longue discussion à laquelle tout le monde assistait, au dernier mille de la négociation de l’an dernier, autour de son fameux préambule constitutionnel. Vous vous souvenez peut-être que parmi les douze points, si j’ai bonne mémoire, douze ou treize, qui étaient sur la table, il y avait cette élucubration de préambule constitutionnel que M. Trudeau avait présenté et qui avait été très contesté. Là encore, ça ignorait complètement, comme une chose inexistante, les fondements mêmes de la dualité du Canada, des deux peuples. Là, il y a eu une très longue discussion devant tout le monde et tout le monde a participé. Un certain nombre de nos collègues étaient tellement d’accord – à ce moment là, en tout cas – avec cette perspective de souligner ça, que, finalement, le préambule a été abandonné avant même la rupture des négociations. Il me semble qu’une constitution qui prétendrait se respecter… Je me permets de souligner la médiocrité invraisemblable, le côté non seulement pas inspirant, mais le côté marchand de tapis de ce qu’on prétend appeler une charte des droits pour tout un État fédéral. Il faut lire ça et se demander dans quel genre de technocratie, presque de bas étage, une chose pareille peut avoir été fabriquée.
D’autre part, une constitution qui prétendrait ne pas souligner des éléments essentiels sans lesquels elle n’existerait pas, sans lesquels elle ne serait pas viable, qui prétendrait escamoter cette dimension, c’est une constitution qui est absolument, à tout de point de vue, politiquement, moralement invalide. Une constitution pour la frime. Alors, il me semble que ce sont des choses qui peuvent finir par être admises, même là où on a prétendu nier cette réalité depuis trop d’années.
Enfin, qu’est ce que vous voulez? Je ne peux pas répondre à votre question: Quelles sont les chances? Je dis: Tout dépendra de l’évolution de bien des facteurs, y compris de certains esprits que je ne peux pas sonder. Je ne suis pas l’ange des Arabes.

[M. Harris: Michel David.
M. David: M. Lévesque, je voudrais savoir, selon vous, quelle est l’extensibilité de la patience du peuple québécois? Entre d’autres termes, est ce qu’il y a une sorte de « dead line » à l’ultimatum que vous donez au gouvernement fédéral et est ce qu’il y a une espèce d’échéancier sur les autres gestes qui sont en préparation?]

[M. Lévesque:] Non, moi, je ne suis pas aussi fort sur les échéanciers que M. Trudeau, parceque ça m’évite, le plus souvent possible, d’être obligé de les reprendre sans arrêt et de les rafistoler de nouveau. Je ne veux pas faire d’échéancier, je dirai simplement qu’on n’est peut-être pas très loin, avec ce qui vient de se passer, de la limite d’une patience nationale qui a duré, à mon humble avis, trop longtemps – je ne vous cache rien – vous le savez, qui ne peut pas durer perpétuellement. Vous savez, le Québec s’est transformé, il y a eu une mutation de la société québécoise, du peuple québécois depuis vingt ans, on n’est plus tout à fait les survivants qui s’accrochaient plus ou moins à le vie, qui étaient isolés, qui n’avaient pas tellement de répondants, ni même de connaissances, si vous voulez employer un terme familier dans le reste du monde, qui étaient dans un état de dépendance, ou une minorité accrochée à des privilèges, un héritage colonial qui pouvait tout dominer, autrement dit les choses sérieuses appartenaient à cette « minorité sérieuse ». Nous, c’était le folklore. Ce n’est plus vrai, ça. Je pense qu’il n’y a personne qui n’est pas conscient du fait que c’est transformé.
C’est un élan – j’ai essayé de l’évoquer de mon mieux lundi dans le discours inaugural qu’on ne peut pas briser. On peut essayer de le ralentir, on peut essayer de le comprimer, je serai obligé de cesser de croire à vingt ans d’histoire qui ont été quasiment comme le début d’un chapitre de maturité. J’ai pleine confiance qu’il n’y a personne qui va empêcher ça, pas plus que la marée normale de l’évolution là-dedans. À quel moment arriverait cette maturité définitive, il est évident que ce qu’ils font là peut l’accélérer, s’ils ne prennent pas garde, s’ils ne font pas attention. Mais ne commencez pas à me demander des échéanciers.
Pour l’instant, ce qu’il faut, c’est d’essayer de réparer ou les amener à réparer le mal qu’ils ont essayé de faire ou qu’ils ont concocté ensemble la semaine dernière.

[M. Harris: Est ce qu’on peut passer aux questions en anglais?
M. Lévesque: Yes, as briefly as possible. Do not ask me to translate everything, because you are better translators than I am.
M. Harris: Five names on the list, and they will go as fast as possible. M. Lévesque: If we can go into questions and not repeat everything, ok? M. Harris: Rick Le Guerrier and François Richard.
M. Le Guerrier: Mr. Lévesque, if Mr. Trudeau would accept this whole motion next week,
Quebec to a constitutional project that we all know about, if that should come, the acceptance of that, then Quebec’s agreement… When we give our word, we do not break it, and when we say we should or would sign, we do it and then we respect our commitments. So, in the present context, there would have Quebec’s agreement on the constitutional accord.
Une voix: For how long?
M. Levesque: For as long as the people of, Quebec, the population does not think that something better is facing them than remaining in the federal system, the way it is, even with such corrections. It is up to the people to decide, we will not change our convictions on account of that. I have always said and I repeat that for as long as it lasts – and I am no prophet – Canadian federalism should be something that both peoples – because there are two basic
ce qu’on a essayé de faire la semaine dernière, l’anéantir; personne n’y arrivera jamais ou
alors,
would you throw out the whole indepedence option and decide to stay within Federation for as long as you are the leader of the Parti québécois? M. Lévesque: No, the answer is very simple. If those basic conditions
the Canadian for any agreement by constituents of Canada – feel able to live in in a livable way, to breatle in in a respectable way. This would give a better choice in many ways, if I may be cynical a bit, to the citizens when the day comes when they have a choice between remaining once again in that federal system or opting out for a new status, without hostility, but deciding to do it on our own.
M. Le Guerrier: I have a sous-question to that. If, then, that is the case and you can call an election within the next two or three years, anyway, why should Mr. Trudeau, why should the Federal Government give into this? Why should they say: Well, we will give into it now for the
next two or three years?
M. Lévesque: Why do you not wait for their answer because, after all, what they did last week was, to say the least, unconscionable altogether, in the dark of the night, and it has as an end result a sort of negation, as we say in the motion, of that basic ingredient without which any accord is completely, morally, politically invalid, unfeasible in any medium or long term you can think about. So, that negation of basically what we are as a Quebec people has to be repaired. It will be repaired either because they understand. After all, for a week, they have been playing around with the telephone. They could not even phone us to give us an idea of what was going on last week, but Mr. Bell’s invention is sure as hell serving in Ottawa over the last few days. Well, if they are serious in what they pretend to say or what the medias made headlines about – a sort of pressure has been organized so that maybe they could cave in the Québec Government – if they are serious and not inclined to cave us in, but in trying to repair damages or do a better job, well, it is up to them, ask them, they will have a chance to tell
us.
M. Harris: François Richard.
M. Richard: Sir, you are saying that this text, this resolution is adapted to present circumstances. Between the conference and this week, what do you feel the evolution of your position has been or has there been an evolution?
M. Lévesque: Well, you see it there. One basic condition which you will find in these very short remarks – relatively be very short this time – that I made with the motion, so that you could see the background, explains one change which is very fundamental and this goes back to what a respectable constitution should be. The recognition of two national entities in Canada and all that implies, that is a basic thing because we were practically negated; it has been too often true throughout history, but, last week to me was the last straw and I think I am not alone to say that.
They will have to stop. Whoever thinks that can go on, they will have to stop ignoring the existence of a national entity, a nation whose only homeland is Québec. If that homeland is to remain a part of a federal system, there has to be a recognition of its national identity and all that goes with it. That is one change because enough is enough.And the second thing that is, I think, part of any kind of respectable preamble for a constitution, for a structure like Canada.
The second change is that we have to give a choice this time. We still accept the socalled accord, amending formula, in other words, the one that we signed with seven other provinces. But it is either or it has to be a basic requirement that it is either that which gives the rest of Canada and the Federal Government a chance to make changes, basic changes if
dishonestly as it ended up last week, either that or going back to a traditional veto. You know, we did not abandon it, we replaced it with the agreement and the signatures of seven other elected heads of Government. If a deal falls through, it has to be repaired one way or the other the damages that ensue.
M. Richard: You said…
M. Lévesque (Taillon)- Those are the two changes.
M. Harris: Sous question très courte.
I just want to make a suggestion, there are four or five names left and we want to try and get as many in, we would be better off just asking one question each.
M. Richard: I am sure that somebody else is going to ask the exact question I was going to ask so I will leave somebody else do it.
M. Harris: Thank you very much.
M. Wilgust: Mr. Lévesque you are asking the federal government and the nine other provinces to effectively scrap the deal that they worked out?
M. Lévesque (Taillon): Not scrap it, repair it because, you know, honestly most of it in articles 2, 3, and 4 of our motion, is there. If you look at that rather incredibly mediocre charter that has been devised and finalized during a dark night and it shows in the way it is written. It is not the most inspiring and I am being very polite. It is not the most inspiring, quote unquote, basic national document I ever read. Such as it is parts of it are acceptable what we are have changed as I just said that is something that should go into any respectable preamble for a constitution, for a country or a federal system like Canada.
M. Walgust: You are asking for these major modifications to be made, presumably before the constitution is patriated, what do you feel will be the consequences for the federal system if that does not happen?
M. Lévesque (Taillon): Well, the consequences will, you know, develop if it does not happen, in a way which I think can lead, as I said before, to rather incalculable but much faster changes than we ever expect. It is the only thing I can say for the moment.
Obvious, this is the first step for us after a week of having all those, you know, rumors and even some insipient pressures on the people who got gipped to go back without any precondition to the people, have devised a way to gip us the first basic thing to reaffirm
they want in many things, but as long as Québec is
not roped in forcefully and especially essential conditions in changed circumstances, they are there. But that it is not the end of it, that is the beginning.
M. Macpherson! Mr. Lévesque, there have been a lot of comments in the press in Quebec urging you to resume negotiations. There was also a public opinion survey this week that rightly or wrongly created the impression in a lot of minds that that is what Quebec public opinion wants that you should go back to the negotiating table. To what extent is your action today in announcing this resolution, a response to that pressure, to give the impression you are in fact
returning to the negotiations.
M. Lévesque (Taillon)- I am not trying to give any impression and I am not going by 52% of people who were all mixed up, we still are in many ways that were consulted in the hours, starting in the hours after the first reports came out. I emphasize what I said yesterday. If there should be something like half of the people who give an opinion, who feel that there should be more negotiations, well, it is sure a rather drastic judgment unconscious as it may be, a drastic judgment, of what those railroaders in Ottawa and others who work with them throughout a certain night, what they have tried to do as a great urgency, whatever their results.
I also noticed in that same poll that the bigger, the biggest block of answers, if I am not mistaken, about whether they agreed or disagreed with the result, the biggest block said: We cannot accept it, we do not agree; 43%, 1 think, of the people answering. So I do not think you can give a lot a mileage, I know I would not, on a thing like that.
M. Harris: M. Noseworthy.
M. Noseworthy: Two questions if I may. Sir, you are not ready to run of to Ottawa for new negotiations. Do you want Ottawa to accept the conditions you spelled out in this with no neg -tiations and no talks? Just accept…
M. Lévesque: Well, you can talk as of the moment this is accepted, not before. Because there are things: For instance if we have a new amending formula, it has to be, you know, wrapped up in a way that is practical and feasible. That Implies a lot all of mechanics inevitably. Things like that, yes, to finalize an agreement technically in many ways, but certainly on the basis of principle those are things that we have to have an answer to before any other move with or towards Ottawa can be considered.
M. Noseworthy: The wording of is motion seems to have been towed down from other reports we have read. There is no mention of « auto déterm ination ». Is the motion… M. Lévesque: Yes.
M. Noseworthy: Exactly « autodétermination »?
M. Lévesque: There are two ways of « autodétermination » and even you find it difficult to wrap your lips around that one…
Des voix: AN
M. Lévesque: « Autodétermination » is also described in by United Nations and I think that is what… You know, anything that has to do with the rights of peoples is basically tied to international law, I think, without being an expert. And, in international law and custom or convention, it is called the right of people to fully make up their own minds about what they are. « Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », that is the same thing. It is mentioned, but it is also – that is something that everyone who knows anything about political institutions or
political principles would know – as one fundamental condition for any kind of agreement by Quebec. What we say is that it should recognize a distinct society, article 1, that owns all the attributes of a distinct national community. Now, this, obviously, as one of its components, it is true everywhere in the world, in the civilized world, the right to « autodétermination », call it whichever way you want. I think there are better words. « Autodétermination », you know a lot of people feel that what the heck does that eat in winter, you know when they see the word.
Des voix: Ah!
M. Lévesque: But it is the right of people, the right of national entities to make up their
own minds about what they want to do. « Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » is a bit
closer to what everybody uses in common day parlance. This is the same thing.
M. Noseworthy: The question I am stumbling my way to… I did not finish my question, Sir. M. Harris: You have already had…
M. Lévesque: Well, I stumbled my way to an answer.
M. Noseworthy: Would the National Council follow up or accept this motion? Is this strong enough for them?
M. Lévesque: We will find out from them Saturday, but I think it is in the direction that our party, at Parliamentary level and, I think, from what consultation we had – as much as we could over the last few days – what they desire as one step, not necessarily, certainly not in fact, as the only step, but that there should be a move, a very clean-cut move to state or restate essential things in Parliament.
M. Harris: Mr. Fryer, then Paul…
M. Fryer: Mr. Premier, notwithstanding the two choices that you have laid out on the question of the amending formula, if I read you correctly, this is not an offer to Mr. Trudeau to re-open negotiations. It is a take it or leave it proposition.
M. Lévesque: That is it.
M. Fryer: And if Mr. Trudeau decides to leave it, what is the next step?
M. Lévesque: Then we will find out. The next step will come. But we have to give them, I think, a last… Well, they have been playing around with the phone, as I said, for a week: yes, no, yes, no. You know, the old game. The end justifies the means, including playing with the media, trying to manipulate public opinion. But they are serious about any kind of intention of repairing the damage that they contrived during that night. Those are our conditions. That is all. And they are not negotiable.
M. Harris: C’est tout. Merci beaucoup. Il n’y a pas d’autres questions. Donc, c’est fini. M.]

[Lévesque:] Merci beaucoup.
[(Fin à14h43)]

[QLévsq1981113cp]

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