Conférence de presse du 11 septembre 1985

[(Quatorze heures onze minutes)]

[M. Saint-Louis: Il est précisément 14 h 12. M. Lévesque a une déclaration à faire tout d’abord. Par la suite, lui et ses ministres seront disponibles bien entendu en français tout d’abord et en anglais ensuite. On pourrait peut-être réserver de 14 h 42, 14 h 43 jusqu’à 14 h 55 pour nos collègues anglophones de la radio et de la télévision. Est ce que cela vous irait?]

[M. Lévesque.] La chose fondamentale puisque les jours raccourcissent comme vous le savez c’est qu’il faut que je sois sorti d’ici à 2 h 55. Vous connaissez le système Fabius.

[M. Rhéaume: Nonobstant tout le respect qu’on a pour les autres ministres, peut-être qu’eux on pourrait leur poser des questions à 2 h 55.]

[M. Lévesque:] Non, cela s’enchaîne.

[M. Rhéaume: D’accord.]

[M. Lévesque:] La première chose la moins importante c’est que je vais faire un petit voyage, tout le monde voyage, mais qui a son importance parceque c’est à Philadelphie où il y a, la semaine prochaine, l’ouverture d’un congrès qui touche les études canada-américaines québécoises et la publication pour la première fois d’un répertoire d’ouvrages québécois sur le Québec mais destiné aux universités américaines où il y de plus en plus de [« Canadian studies », de « Quebec studies »] etc. Ce qui n’exclut pas qu’on ait eu une ou deux choses à faire à New York et peut-être en d’autres lieux, mais tout cela en trois ou quatre jours. Ce qui veut dire aussi que je ne serai pas ici pour le Conseil des ministres la semaine prochaine, ce qui n’est pas d’une gravité extrême. Dans les circonstances c’est M. Bérubé qui me remplacerait pendant la semaine.

Une deuxième chose, il y a une nomination extrêmement importante – c’est toujours très
important – je l’ai souvent dit et je me répète, c’est le navire admiral de l’économie québécoise à Hydro-Québec, on a nommé aujourd’hui un nouveau président du conseil d’administration d’Hydro-Québec pour remplacer M. Joseph Bourbeau qui était un des vieux pionniers on peut dire de tout le développement d’Hydro-Québec, mais qui va terminer sa carrière comme il nous l’a fait savoir. Celui qui le remplacerait – c’est une décision du Conseil des ministres – c’est un vétéran du conseil d’administration, M. Hervé Hébert. Si vous avez quelques questions sur ces deux sujets entre autres, peut-être quelques explications, parceque cela change le rôle du président du conseil d’administration, M. Rodrigue pourrait vous les donner.

[M. Rodrigue: M. Hervé Hébert est nommé président du conseil d’administration d’Hydro-Québec.

M. Normand: Le curriculum, est ce que vous l’avez?

M. Rodrigue: Oui.]

[M. Lévesque:] On vous enverra le curriculum, M. Normand.

[M. Rodrigue: Il entre en fonction le 26 octobre 1985. Il sera en fonction pour une période de deux ans. C’est le mandat qui lui a été confié. Pourquoi deux ans? C’est à la demande de M. Hébert que le mandat a été établi à deux ans contrairement au mandat qui avait été accordé à M. Bourbeau qui a été d’une période de cinq ans. Hydro-Québec a connu au cours des cinq dernières années, je pense, des transformations importantes et M. Bourbeau qui était un cadre de Hydro-Québec avait accepté d’occuper la présidence du conseil à plein temps pour, justement, assister et appuyer le président-directeur général dans le travail de transformation des structures de Hydro-Québec et également dans la réorientation des activités de Hydro-Québec qui, comme vous le savez, il y a cinq ou six ans encore était un constructeur important, mais a dû se réorienter, mettre l’accent beaucoup plus sur les ventes d’énergie, sur l’amélioration de son réseau de distribution et mettre en veilleuse un peu les constructions de centrales parcequ’ on avait des surplus importants à cette époque là.
M. Hébert est président et chef de la direction de la Fiducie du Québec et il est membre du conseil d’administration de Hydro-Québec depuis 1978. Il a également été membre du conseil d’administration de Hydro-Québec International, de la SEBJ et d’un certain nombre d’autres entreprises. Comme le curriculum vitae va vous être distribué, je vais cesser mon énumération, mais il y a un certain nombre d’entreprises, en particulier dans le secteur du mouvement coopératif où il est encore administrateur.
S’il y a des questions, je me ferai un plaisir d’y répondre.

M. DeBlois: Est ce qu’il y a une raison pour laquelle M. Hébert a demandé deux ans?

M. St-Louis: M. DeBlois, peut-être qu’on pourrait terminer avec toutes les déclarations
préliminaires et par la suite revenir avec les questions. Ce serait M. DeBlois: Très bien.
R. i
peut-être plus simple.]

[M. Lévesque:] M. Bérubé pourrait peut-être dire un mot après sur le rapport MacDonald parcequ’ on l’a depuis quelques jours.

[Une voix: D’accord.]

[M. Lévesque:] Maintenant, si vous avez sur ce sujet là – c’est quand même l’importance majeure de Hydro-Québec – quelles que questions que ce soient…

[Une voix: Il serait peut-être préférable qu’on y revienne après.
Une voix: La suggestion serait plutôt de faire toutes les déclarations… M. St-Louis: Vous auriez terminé M. Lévesque s’il vous plait!]

[M. Lévesque:] Bien, je complète mes notes. Comme vous le savez, tout le monde a reçu le rapport MacDonald, enfin ceux qui sont capables de manoeuvrer cette brique invraisemblable, mais qui est quand même extraordinairement importante, puisque cela date de M. Trudeau et cela a été confirmé avec peut-être certains virages qu’on ne connaît pas l’an dernier par M. Mulroney, le mandat de cette commission, ce qui explique certains aspects qui semblent un peu contradictoires. Mais, enfin, on ne sait pas.
Je vous donne l’essentiel de la réaction préliminaire. Dans un instant, je vais vous dire pourquoi c’est préliminaire. Donc, ce matin, après avoir fait travailler pas mal de gens pendant une semaine, pour au moins essayer de cerner l’essentiel, le Conseil des ministres a pris connaissance d’une analyse encore préliminaire des quelque 2000 pages du rapport de la commission.
Un document aussi volumineux et aussi tous azimuts ne peut pas susciter une adhésion sans nuance ni, non plus, un refus global. C’est aussi simple que cela, parcequ’ il suffit de le lire et je suis sûr que vous l’avez tous lu avec soin comme moi; c’est normal. Cela comporte inévitablement des aspects positifs, même très positifs, de même que des propositions qui peuvent être nettement contraires aux intérêts du Québec – je pense que d’autres provinces sont en train de faire un peu la même analyse – parcequ’ il y a de tout là-dedans.
Parmi les points positifs, il faut souligner l’analyse et le diagnostic de la situation de
l’économie canadienne. Je pense que tout le monde s’entend pour dire que c’est assez remarquable, l’analyse, le diagnostic, autrement dit, l’état de santé. Aussi, la reconnaissance du besoin d’accroître la liberté des échanges, non seulement avec les États-Unis, mais avec tous les pays; c’est fondamental, on le sait. Et puis, tout cela relié au progrès – c’est devenu comme disait notre ami, Parizeau, dans le temps, la tarte aux pommes et la vertu de la maternité – implique le développement de la productivité et de la compétitivité, l’adaptation de la main-d’oeuvre et la perception claire de la nécessité de refondre et d’intégrer le système de sécurité du revenu, pas nécessairement de dire qu’on est d’accord avec tout le détail sur l’assurance-chômage, la façon de parler de sécurité du revenu, etc., mais de refondre ça. C’est sûr parceque c’est une jungle.
Dans tous ces domaines, ceux que je viens de mentionner – vous aurez le texte; c’est un bout de communiqué qui n’avait pas été terminé; vous l’aurez tout à l’heure; si ce n’est pas avant la fin, ce sera rendu à la tribune parlementaire – c’est positif et d’autant plus que cela
rejoint, comme perspective, les choses concrètes que le Québec fait déjà depuis quelques années, que ce soit dans le domaine de l’emploi, que ce soit dans le domaine du libre-échange. Vous savez à quel point on a insisté; c’était un risque, mais c’est comme tout le reste.
Si tu veux devenir compétitif quand un marché de 6 500000 d’habitants ne peut pas absorber tout ce qu’on produit, il faut que tu t’exposes parcequ’ il faut absolument vendre, sinon on crève.
On disait cela à Terre-Neuve, l’autre jour, quand on s’est rencontré, c’est un peu comme le hockey, le baseball, le tennis, si tu ne t’exposes pas à la concurrence, tu ne seras jamais bien fort. Pour apprendre, il faut travailler, là-dedans comme dans les autres domaines, y compris même les sports. Si tu veux rester protégé dans ta petite salle de je ne sais pas trop quoi, tu vas jouer tout seul, tu n’iras pas bien loin dans les lignes majeures. On a besoin d’être dans les lignes majeures, et pour ça, il faut absolument s’exposer – c’est le creuset essentiel – à la concurrence, et il faut savoir la rencontrer, ce que nos gens du Québec savent de mieux en mieux faire.
Une chose qui a été soulignée par un journal, je pense, mais qui mériterait d’être soulignée abondamment, c’est la première fois que plus d’un tiers, pas loin de 40 % des emplois, au mois d’août de cette année, de tout le Canada, ont été créés au Québec. Ce n’était jamais arrivé. Ce qui a été à peu près comparable, c’est un mois, je ne me souviens pas lequel, de 1973, au temps des grandes années de prospérité facile, et où la proportion était beaucoup moindre, à peu près 20 % du total canadien, mais c’était au-delà de 100000 emplois, quelque chose comme ça.
Cela rejoignait ce qu’on a réalisé au Québec en août 1985. Pas loin de 40 % des emplois de tout le Canada ont été créés ici en chiffres absolus. Il y a des domaines où on manque de main-d’oeuvre qualifiée; cela ne vous a peut-être pas frappé parceque ce n’est pas votre secteur d’activité: certains secteurs de la construction, par exemple.
Un secrétaire de comté ou adjoint politique de comté, qui est un ouvrier professionnel de la construction s’est fait téléphoner pour dire: Tu ne pourrais pas prendre un travail, on manque de gars pour tel ou tel contrat. Quand ça se rend jusqu’à un bureau de ministre, cela veut dire qu’il y a des secteurs… Ce n’est pas général, on a encore un chômage intolérable, tout ce qu’on voudra, mais quand on se compare, comme disait M. Johnson, père de l’autre, on se console. Cela ne nous frappe pas, parceque c’est de la bonne nouvelle.
La chose sur laquelle il faut quand même insister – c’est comme si ça avait été ajouté, c’est l’impression que ça laisse, et c’est important – c’est qu’en ce qui concerne le domaine qu’on peut appeler vastement constitutionnel, la Commission MacDonald souligne, a posteriori, à quel point on n’a pas eu totalement tort en ce qui concerne « l’opting out » qui, comme vous vous en souvenez peut-être, avait été signé par un certain nombre de provinces et qui, ensuite, est disparu par une nuit sans lune, « l’opting out » complet, de même que le veto sur les institutions, sans compter, ce qui est fondamental et tellement évident, la reconnaissance spécifique du « peuple » – je préfère souvent la « nation », parceque c’est cela le fond du problème, mais enfin – du Québec comme entité différente et spécifiquement à reconnaître et certaines choses qui en découlent. Ce n’est sûrement pas l’influence de M. Trudeau qui a amené la commission Macdonald à cette conclusion. Je ne sais pas comment l’évolution s’est faite à l’intérieur, mais une chose est certaine, c’est que ce n’est quand même pas désagréable que tout le pays sache que des gens qui ont travaillé sous deux gouvernements assez divergents au fédéral, et qui ont
été bien payés pour faire un gros travail, arrivent à des conclusions qui paraissaient évidentes il y a quelques années déjà.
Finalement, tout cela étant préliminaire, les instructions ont été données très normalement à tous les ministères parceque tout le monde est concerné. Ce matin, on a fait un tour de table partiel et chacun arrivait avec le point qui le préoccupe parceque cela touche la culture, la langue, l’emploi, tout le système économique, tout le système… si vous voulez, les filets de sauvetage des programmes sociaux, en particulier du côté chômage, recyclage et tout cela. Donc, il n’y a pas un ministère qui n’est pas concerné. Cela va prendre quelques semaines, peut-être que cela viendra au fur et à mesure, mais quelques semaines avant que, spécifiquement, on puisse vous donner le résultat de l’approfondissement qu’on doit faire de tout cela. Un exemple très simple. Dans le domaine de la langue, de l’éducation etc., forcément, on trouve des points, justement à cause de la spécificité du Québec, où on a besoin d’une certaine analyse, très rigoureuse, à cause de ce que le Québec fait déjà lui même dans certains domaines. M. Bérubé pourrait vous donner un exemple, si vous permettez; il est peut-être passé

[M. Bérubé: …pouvoir délibérer pour me retirer. Une voix: C’est sa propre interprétation.

M. Bérubé: Non. Il est intéressant, par exemple, de constater dans le rapport de la commission Macdonald une critique assez sévère du système d’éducation canadien qui, à certains égards, peut être justifiée. Toutefois, en même temps, la commission passe sous silence un certain nombre de gestes posés par le Québec, qu’il vaut la peine de rappeler. Déjà, dès
1977-1978, nous entreprenions une réflexion en profondeur sur notre système d’éducation: je vous rappellerais le livre orange, je vous rappellerais une remise à neuf de tous les régimes pédagogiques au Québec avec la suppression, par exemple, de ces voies professionnelles allégées que l’un de nos collègues de la presse parlementaire soulignait dans un article tout récent dans le Journal du Québec. Effectivement ce que nous avons entrepris de faire, c’est de complément modifier nos régimes pédagoqiques, justement pour donner une formation de base nettement plus forte, et ce que la Commission Macdonald découvre, elle le découvre dans le fond, presque huit ans après l’effort de réflexion entrepris au Québec et qui mène, à l’heure actuelle, à des changements très profonds à l’intérieur de notre système d’enseignement primaire secondaire, ce qui n’est pas sans soulever des vagues – on connaît les problèmes d’implantation des nouveaux programme -, mais néanmoins, ces vagues existent parceque le gouvernement a pris un certain nombre de moyens pour répondre à certaines critiques valides qui étaient soulevées à l’égard de un peu à côté de votre attention ces derniers temps, mais seulement dans le domaine l’éducation.
De notre système, je vous rappellerais, par exemple, que lors du sommet sur la micro-électronique à Montréal, nous avons eu les représentants de l’industrie qui ont souligné à quel point la formation au Québec dans les domaines de haute technologie répondait à la fois en quantité et en qualité. Autant les industriels québécois trouvaient qu’au niveau universitaire, ils avaient certaines critiques à adresser à notre régime d’enseignement, autant ils ont constaté qu’au niveau collégial, notre système répond très bien. Or, la vérité, c’est que nous avons effectivement produit de nouveaux programmes avec les nouvelles technologies dans près de 40 nouveaux programmes au Québec et, à l’heure actuelle, il y a un changement profond de tout l’enseignement collégial.
Je soulignerais – et cela a été relativement peu couvert – que, par
critiques de la Commission Macdonald s’adresse aux provinces et elle reproche aux provinces de ne pas avoir cherché à établir des créneaux d’excellence. Or, justement, ce sujet d’actualité faisait qu’hier j’annonçais 17 créneaux d’excellence où nous allons constituer dans nos universités québécoises des groupes de recherche qui sont de taille véritablement internationale. Lorsque nous comparons les groupes dont on parle, ces groupes seront, en général, aussi gros sinon plus gros que ce qu’on retrouve ici à l’équivalence, par exemple, dans des écoles comme MIT – c’est une très bonne école, comme tout le monde le sait – Carl-Tech ou les autres. En d’autres termes, effectivement, le choix du gouvernement du Québec depuis maintenant 1981 a justement visé à établir des créneaux d’excellence dans notre système d’enseignement et c’est une réponse directe à une critique qui nous est adressée globablement par la Commission Macdonald.
Il est clair que, par exemple, lorsque l’on propose de créer un conseil fédéral de l’éducation primaire et secondaire, c’est qu’on oublie qu’il existe au Québec un Conseil supérieur de l’éducation dont c’est le mandat. On oublie qu’il existe un Conseil des collèges et un Conseil des universités. Lorsque l’on parle d’orienter le financement de l’enseignement post-secondaire en fonction de priorités dites canadiennes qui ne cadrent pas avec les besoins du Québec, il faut s’interroger sur le rôle que pourra jouer un niveau additionnel de juridiction quand, justement, on se plaint à l’heure actuelle d’une trop grande bureaucratisation et du poids trop lourd de l’encadrement administratif dans le secteur de l’éducation.
Quant au financement direct aux étudiants, tel qu’il est proposé par la Commission Macdonald, je vous soulignerais que c’est un très bel exemple pour réclamer le droit de retrait avec pleine compensation. En effet, le gouvernement fédéral a mis sur pied un programme parallèle d’aide financière aux étudiants. À l’époque, le Québec avait demandé de pouvoir se retirer u programme avec pleine compensation financière; ce qui lui avait été accordé. C’est ,donc dire qu’à l’heure actuelle, nous avons déjà exercé ce droit de retrait.
Donc, dans la mesure où la commission reconnaît la spécificité québécoise et recommande que l’on attribue au Québec ce droit de retrait avec pleine compensation financière, il est clair que, dans le domaine de l’éducation; l’on va continuer à fouiller, je pense, un peu plus en profondeur cet aspect du rapport de la commission Macdonald. II est clair cependant que cela ne
répond certainement pas aux attentes du Québec. Nous avons, en général, anticipé de beaucoup
exemple, l’une des les analyses de la commission Macdonald.]

[M. Lévesque:] Vous avez sûrement une pleine page… Mais il y a une chose, ce sont 75000000 $ ?

[M. Bérubé: On met 75000000 $ dans les créneaux d’excellence dans les universités québécoises.]

[M. Lévesque:] Strictement là-dessus.

[M. Saint-Louis: Mesdames et messieurs, comme il ne reste que 25 minutes, il faudrait peut-être s’autodiscipliner …]

[M. Lévesque:] Peut-être que MM. Rodrigue et Bérubé peuvent rester un peu plus longtemps. Je ne le sais pas. C’est à eux de décider cela.

[M. Saint-Louis: Mais avec M. Lévesque, comme il doit quitter à 14 h 55…]

[ M. Lévesque:] Mais moi, à 14 h 55, out.

[M. Saint-Louis: … ce seront alors quinze minutes en français et dix minutes en anglais; s’il vous plaît, pas plus d’une sous-question.]

[M. Lévesque:] Je ferai un petit commentaire final que M. Bérubé me permettra. Avec ce qu’on disait sur l’emploi, il y a quelques minutes, et après ce que M. Bérubé vient de dire, parfois j’ai l’impression que c’est le Québec qui porte le Canada à certains points de vue.

[M. Saint-Louis: Première question, M. L’Archevêque.
M. L’Archevêque: M. Lévesque, vous avez vous même remarqué et souligné que la commission Macdonald avait senti le besoin de parler de l »‘opting out », du droit de veto, du caractère spécifique… Comment expliquez vous, pour ce que vous en savez, qu’une commission, dont ce n’était absolument pas le mandat, ait senti le besoin d’aborder ce sujet sur l »‘opting
‘ou t »? P]

[M. Lévesque:] C’est plaqué un peu, on dirait. C’est pour cela qu’on peut l’extraire de l’ensemble, je pense, assez facilement. Je ne veux pas dire que c’est plaqué au sens péjoratif du mot, loin de là; mais c’est comme quelque chose qui a été ajouté en cours de route. Je n’ai pas d’explication car je n’ai pas fait partie de la commission. Je n’ai pas eu l’occasion d’avoir beaucoup de relations avec eux. Je ne sais pas. La seule chose qu’il y a, c’est qu’ils ont dû y penser parcequ’ ils le développent de façon très claire et très concrète. Cela correspond exactement à des choses que, depuis des années… Enfin, en tout cas, la « constitutionnalite » là.

[M. Saint-Louis M. DeBlois.
M. DeBlois: M. Lévesque, vous avez parlé d’aspects positifs; est ce qu’on doit comprendre, mise à part la réserve de M. Bérubé, qu’il n’y a pas d’éléments négatifs dans ce rapport?]

[M. Lévesque:] Il y a des éléments négatifs qui vont apparaître et qui sont déjà pressentis. Mais ce sont des éléments pas nécessairement négatifs. Comme je l’ai bien dit au début, et vous allez l’avoir dans le texte du communiqué qui va venir, c’est tellement vaste que cela ne peut être ni une acceptation sans nuance ni un refus global. Mais il y a des choses spécifiques qui vont être à l’étude dans tous les ministères et qui vont, en approfondissant notre connaissance de la recherche et des conclusions de la commission, nous apparaître… Déjà, on en pressent quelques unes. Celle dont M. Bérubé vient de parler saute aux yeux, mais il y en a d’autres.

[M. DeBlois: Donc, à première vue, l’élément positif l’emporte largement sur une année.]

[M. Lévesque:] Non, ce n’est ni l’un ni l’autre. Il y a beaucoup de choses qui nous paraissent positives. Entre nous, la meilleure de toutes les flatteries c’est l’imitation. La commission Macdonald, huit ans après, cinq ans après, quatre ans après arrive pour dire la même chose que ce qu’on essaie de faire avec les moyens du bord d’un État provincial depuis trois ans, cinq ans, parfois près de dix ans. Le livre orange qu’évoquait M. Bérubé, c’est Jacques-Yvan Morin, si j’ai bonne mémoire, qui l’avait. Dieu sait qu’entre le papier et la réalisation, quand on pense à la syndicalisation totale du genre catalogue chez Eaton des conventions collectives dans l’enseignement, etc., cela ne passe pas du papier à la réalité aussi vite qu’on voudrait, mais c’est déjà là, c’est à pied d’oeuvre. Je ne sais pas où… Mais ce qui arrive, très souvent… Il y a déjà eu un aveu absolument stupéfiant à Ottawa de la part de hauts fonctionnaires – cela s’équivaut un peu – je me souviens de l’avoir lu, je l’ai quelque part dans mes papiers, à savoir que, sur une série de choses fédérales, non seulement du temps de M. Trudeau, mais c’est à ce moment là que cela a frappé, sur une série de projets, de décisions fédérales, il y a eu un seul oubli. C’est juste à peine regrettable. Ils l’avouaient: On n’a pas tellement « checké » ou vérifié ce que le Québec fait spécifiquement. C’est tellement plus facile de « melting potter » cela dans un ensemble anglo-canadien et de dire: Arrangez vous avez vos troubles. Cela a déjà été un
aveu – je paraphrase – très spécifique. Les gens étaient au pied du mur, je ne sais pas à quel moment, il y a trois ou quatre ans de cela. Ils ont dit: On a oublié de penser au Québec, mais il devrait pouvoir s’adapter. C’est peut-être un peu cela aussi qu’on va découvrir à certains points de vue.

[M. Saint-Louis: M. Desbiens.]

[M. Lévesque :] Mais, comme je vous ai dit, je n’entrerai pas dans beaucoup de détails et je ne veux pas le faire, parceque l’étude doit se poursuivre dans tous les compartiments à peu près qui sont touchés. Après cela, forcément, il y aura une conclusion globale, mais je ne pense pas que beaucoup de provinces aient réagi d’aucune façon jusqu’à présent, enfin sauf erreur.

[M. Saint-Louis: M. Desbiens.
M. Desbiens: Oui, M. Lévesque, le fait que la commission Macdonald reconnaisse la spécificité du Québec, le droit de veto, l »‘opting out » et tout cela, est ce que, à votre avis, c’est de nature à faciliter l’éventuelle ronde de négociation sur le plan constitutionnel?]

[M. Lévesque:] Cela me semble assez évident. En tout cas, une chose certaine, cela ne peut pas faire de tort.

[M. Saint-Louis: M. Rhéaume.
M. Rhéasime: Le rapport Macdonald, M. Lévesque, risque peut-être d’aboutir sur une
tablette, d’autre part.]

[M. Lévesque:] Cela, ce n’est pas demain la veille, c’est toujours vrai dans ces histoires là.

[M. Rhéaume: C’est ce pourquoi, sur le plan économique, dans les relations avec le fédéral, j’aimerais aborder un dossier concret qui découle, d’une certaine façon, de la commission Macdonald et c’est tout le domaine de la pétrochimie, avec la fermeture de la raffinerie de Gulf dont plusieurs disent que c’est la conséquence de l’achat par Petro-Canada de certains actifs de Gulf. Que fait votre gouvernement auprès du fédéral actuellement là-dessus?]

[M. Lévesque:] Je pense que l’essentiel devrait nous être répété par M. Rodrigue, parceque c’est essentiellement son dossier au Conseil des ministres.

[M. Rodrigue: Primo, la fermeture de la raffinerie de Gulf a peu d’impact sur le secteur de la pétrochimie à Montréal. Pour la région de Montréal, c’est un impact, à toutes fins utiles, marginal.
Deuxièment, effectivement, je pense – je l’ai déclaré il y a environ dix jours – que l’achat ;du contrat du 30000 barils par jour, qui existait entre Gulf et Texaco, par Petro-Canada rend, à toutes fins utiles l’exploitation de la raffinerie de Gulf non rentable. Cela condamne presque, à toutes fins utiles, la raffinerie de Gulf à Montréal.
J’ai expédié une lettre à ma collègue fédérale, Mme Camey, pour lui demander d’intervenir auprès de la direction de Petro-Canada dans le but de faire en sorte que la production à la raffinerie de Gulf puisse être maintenue par Petro-Canada, ou du moins que Petro-Canada intègre une bonne partie ou la totalité des employés de la raffinerie de Gulf à ses installations de Montréal-Est si c’est plus rentable d’agir ainsi, mais de s’assurer que la production destinée au Québec soit faite au Québec. J’ai un accusé de réception de la part de ma collègue •férale. Évidemment, j’ai l’intention de m’entretenir avec elle d’ici un mois pour aborder ce sujet, entre autres et un certain nombre d’autres sujets qui découlent des questions de l’énergie.
M. Saint-Louix M. Tremblay.
M. Tmmblay: M. Lévesque, au sujet de la libéralisation du commerce international vous êtes favorable à cela. Vous dites qu’il faut se …]

[M. Lévesque :] On l’a toujours dit, enfin depuis au moins une couple d’années, et peu à peu l’étude se consolide. Gulf c’est un marginal à certains points de vue et les résultats dont je vous parlais tout à l’heure, qui sont actuellement les résultats économiques du Québec, nous fortifient dans la conviction qu’il faut s’exposer à la concurrence. Chose certaine, il y a toujours des transitions, d’autant plus avant que ce soit conclu. Vous savez il y a le GATT, il y a les États-Unis et avant que quoi que ce soit conclu cela peut prendre un certain temps, donc c’est important de commencer vite en particulier peut-être à cause de la vague protectionniste, qui est plus superficielle que ce qu’on imagine quand cela est dramatisé par des titres, mais il y a une espèce de courant protectionniste aux États-Unis. Le déficit énorme, le déficit en particulier des échanges fait qu’au Congrès il y a toutes sortes de mouvements divers et cela se répercute dans certains secteurs qui voudraient mieux être protégés, etc. La force du dollar américain – même si elle a diminué un tout petit peu – est encore dangereuse pour les Américains, elle est dangeureuse pour tout le monde. Tout cela fait que c’est important qu’il y ait une décision de prise pour amorcer quelque chose dans ce sens. Je trouve que l’attitude non seulement de la

[M. Trembla): Est-ce que je peux finir ma question? Ce que je veux savoir c’est si vous ne craignez pas qu’il y ait des industries qui disparaissent à cause de cela.]

[M. Lévesque:] Cela peut arriver.

[M. Tremblay: Vous ne craignez pas cela?]

[M. Lévesque:] Écoutez, êtes vous capable de faire une omelette sans casser des oeufs? Mais s’il faut faire une omelette des fois il y a des oeufs qui doivent être cassés. Je veux bien craindre mais je pense que c’est un peu un rôle des fois de la part des médias d’information d’inspirer la crainte, mais l’essentiel c’est quel est l’équilibre qui va en sortir. Est ce que cela va être mieux ou moins bon? C’est comme Gulf. À chaque année, il y a des fermetures, à chaque année il y a des ouvertures. C’est évident que les ouvertures sont moins soulignées que les fermetures. J’ai toujours dit: Si je fais le voyage Québec-Montréal sans accident, il n’y a pas de problème, il n’y a pas de nouvelle. Si on se casse la figure, oui, il y a une nouvelle. C’est toujours pareil cela. J’ai été journaliste assez longtemps pour le savoir. Je n’ai jamais vu autant de plaisir qu’il se passe quelque chose que le petit gars qui de rage est allé engueuler je ne sais qui, un de nos candidats à Rouyn-Noranda, cela faisait du nouveau.

[Une voix: Claude Johnson…]

[M. Lévesque:] Je comprends, mais c’est l’équilibre final de chaque année disons. Combien y a t il d’emplois de créés ou de reparus? Combien y a t il d’emplois qui ont été perdus? Entre les deux il y a tout l’aspect humain du recyclage, la façon de refaire une vie ou une carrière autant que faire se peut aux gens qui ont perdu leur emploi. Mais quel est le résultat global? C’est cela qui est important. Moi, je crois que c’est sûr qu’il y a des risques. Qui ne risque rien n’a rien. Les sages font les proverbes, les sots les répètent, mais enfin, c’est vieux comme le monde, puis c’est vieux comme l’économie. Celui qui ne risque rien, il reste dans sa cour; celui qui risque quelque chose, s’il a bien calculé ses risques, s’il les a bien balisés aussi, il peut sortir gagnant. Moi, j’ai confiance que dans à peu près tous les domaines, les Québécois sont maintenant parmi les deux, trois sociétés les plus en pointe dans le monde. C’est mon humble avis, avec certains coins qui sont retardataires par rapport à ce qui se passe.

[M. Saint-Louis: M. Girard.
M. Girard: M. Lévesque, est ce qu’on doit comprendre des propos que vous avez tenus au début que M. Bérubé est devenu, ce matin, le premier ministre par intérim pour une période de temps?]

[M. Lévesque:] Non, absolument pas.

[M. Girard: Non?]

[M. Lévesque:] Il peut l’être à partir du moment où j’ai franchi la frontière.

[M. Girard: Alors, cette précision étant…]

[M. Lévesque:] C’est-à-dire que pendant trois ou quatre jours ou quatre ou cinq jours au maximum la semaine prochaine, incluant mercredi, le jour du Conseil des ministres, c’est M. Bérubé qui agira à ma place.

[M. Girard: Ce qui veut dire que vous serez absent du Québec pour Philadelphie, New York, de lundi à vendredi?]

[M. Lévesque:] Jeudi.

[M. Girard: De lundi à jeudi?]

[ M. Lévesque:] Oui.

[ M. Girard: Merci.

M. Saint-Louis: Cela va, M. Girard? M. Girard. Oui.’

M. Saint-Louis: M. Desbiens.]

[M. Lévesque:] D’ailleurs, écoutez, aussitôt que les détails, pour autant qu’il y ait des détails à ajouter, seront fixés – c’est toujours pareil cela – vous aurez l’habituel communiqué.

[M. Desbiens: M. Lévesque, quand un chef de gouvernement quitte la vie politique – cela va être votre cas bientôt… ]

[M. Lévesque:] C’est probable! C’est probablement, je ne le sais pas, mais c’est possiblement la dernière fois que j’ai le plaisir de vous rencontrer de façon comme on dit « organisée » comme premier ministre, oui.

[M. Saint-Louis: Mais avant de partir vous ne viendrez pas nous voir?]

[ M. Lévesque:] Sûrement pas pour faire une conférence de presse.

[Une voix: Est ce que vous pensez démissionner?]

[ M. Lévesque:] Écoutez , si vous avez des questions en anglais aussi…

[M. Desbiens: Vraiment juste une autre. Évidemment, quand un chef de gouvernement quitte, M. Lévesque, il fait un certain nombre de nominations. Quand on regarde les nominations que vous avez faites, il y en a qui relèvent de la haute fonction publique. On fait aussi des nominations politiques. On se souvient de ce qui s’est passé l’an dernier lorsque M. Trudeau a quitté. Il y a votre personnel politique qui devra…]

[M. Lévesque:] Je suis protégé par une chose, il n’y a pas de Sénat.

[M. Desbiens: Quelle est votre position là-dessus en regard des nominations? On sent qu’il y a une espèce de prudence par rapport à ce qui s’est passé l’an dernier au fédéral.]

[M. Lévesque :] Justement, on a des gens qui vont quitter, qui vont se recycler dans le privé, dans le public. Je parle de mon bureau, mais si vous parlez de nominations qui dépendent de la décision di Conseil des ministres, qui sont réservées, si vous voulez, à l’initiative du premier ministre, ce qui m’a frappé, c’est que j’ai dû me négliger
terriblement parceque pendant les mois d’été, l’an dernier, il y a eu une vingtaine de ces nominations de haut niveau qui doivent aller au Conseil des ministres pour lesquelles cet été, je ne sais pas pourquoi, il y a eu de la négligence, on est rendu à six. Alors, on va essayer peut-être de rattraper cela, je ne sais pas moi. C’est-à-dire, écoutez, il n’y a pas d’orgie possible et il n’y en aura pas, pas plus qu’il n’y aura – parcequ’ on a aboli ce système là – ce qui est arrivé à la fin de M. Bourassa. Je ne le blâme pas, c’était le système, la permanence absolue, la garantie à tout le monde qui sortait de quelque cabinet que ce soit, surtout le sien, parceque cela a été dur à recaser tout ce monde là. Là, il y en a, oui, qui vont retourner à la fonction public, ils ont la permanence. Il y en a dans des postes, ils ont le droit de gagner leur vie comme tout le monde avec l’expérience acquise. Il y en a qui vont s’en aller vers le parapublic probablement, il y en a qui vont s’en aller vers le privé. J’en connais au moins un ou deux cas. Si vous voulez aller plus
loin, cela inclut un certain nombre de ministres. Vous savez déjà qu’il y a des cas. Vous ne pouvez pas vous attendre à une avalanche dramatique d’ici le début d’octobre.

[M. Saint-Louis: Dernière brève question en français, M. Rhéaume.
M. Rhéaume: M. Lévesque, quand vous regardez depuis deux mois la course ou la marche à la direction dans votre parti, cela ne vous donne pas envie de
fait?]

[M. Lévesque:] Je vais analyser cela, je vais y penser. Vous me suggérez quelque chose. Au comté, je n’ai pas pris de chance, en tout cas avec les bons militants, les membres, ceux qui m’ont enduré depuis bientôt neuf ans. Je leur ai dit que ce n’était pas un adieu, que c’était plutôt un aurevoir, mais de quelle façon? Je ne sais pas.

[M. Saint-Lour En anglais maintenant, M. Saint-Laurent. M. Saint-Laurent: Well, I was going to ask that question. M. Lévesque: Well, if it is done, it is done.
M. Saint-Laurent: Yes. But, on a more serious level, the Macdonald Commission, while expounding the virtues of free trade, also says that we should set up a traditional adjustment and adaptation period to deal with those people who will lose their jobs and things like in textile…
M. Lévesque: That has been part of the – I said that in French a few moments ago and it is one of the specific items – Quebec efforts, in fact since the recession, to work on that, work on that for young people, for people who are older and lose their jobs. This is hiting women more and more now, due to the technological changes in office work, because that is where women are in a huge majority. So, this is a basic preoccupation, and we did not wait for Macdonald. We are very glad because, as we say in French sometimes, the best of all flatteries is imitation. So they are saying what we are trying to do. Well, we are not.

M. Saint-Laurent: So you think we are ready to meet… to deal with free trade?

M. Lévesque (René): That is a different question. Are we ready to meet with the perspective in which the Commission tells people that this is the way it should go? That is where there has to be a lot of study by all departments, because it touches all imaginable
My impression is that there were two Governments and there have been a few
reorientations…
M. Saint-Laurent: It is worth the risk, Mr. Lévesque. What you are saying is what the Macdonald Commission, what Prime Minister Mulroney seems to be wanting to go towards, it is definitely worth the risk.
M. Lévesque (René): I repeat. The essential reaction we have today, except in some specific points which I have given already and that are positive, is that you cannot accept it globally and you cannot refuse it globally. It is too large and too complex. But, there are things that are, let us say, worrisome and there are things that are obviously positive from a Quebec point of view. That is as far as I can go with the few details you will get in the communiqué, but I spelled them out a few moments ago.
M. Saint-Louim M. Grant.
M. Grant: Mr. Lévesque, you say that the Macdonald Commission spent a lot of time catching up to where Quebec has been, in some cases, since 1970-1980.
fields, practically, so that we can assess that very carefully. Because there is a sort of centralizing and decentralizing, which is a sort of, I don’t know…
mix-up,
M. Lévesque (René): In many fields.
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M. Grant. Do you then regret a little bit the fact that you did not participate more in the Macdonald Commission hearings?
M. Lévesque (René): There were Quebec representatives: Mr. Breton – I saw them on TV the other day; it reminded me – Mr. Docquier who is a minority voice, and – what is his name – A former CBC… Mr. Picard. Quebec was there, and that was a federal initiative by you know
who, so, there was not much percentage, except there were a few presentations by Quebec as a Government even, I think, from our party. There was also one by Mr. Bourassa. I think so.

M. Grant: But you do not think that it would have… I mean, you seem agreeably surprised…
M. Lévesque (René): At some points. Some points are obvious. A few years back, we did sign something with a total of eight provinces that had to do with opting out. That made sense to everyone. Something happened during a moonless night a few months later. So the Macdonald Commission says: It is a good idea. Basically, sure, it is a good idea, and a veto, I think, institutionally, that is where it should lie. But opting out give much more leeway to everyone. It makes absolute sense especially, not just first for Québec, for obvious reasons, we are different, and we are less mobile than many other people throughout the continent.
And it also applies … Look, I was in Newfoundland. Listen to voices from the Maritimes, including Newfoundland, or BC, or the Prairies. This difference, you know, that goes back to the Pepin-Robarts Report, this difference, the regional, in our case, idendity, also I would say in Newfoundland, on account of its history, if you know anything about it, BC also.
But there is a collection of, at least, societies, in our case, of a nation, on top of the fact that it is a different society. So, it is the obvious way to have this kind of opting out, because your program, even with the geniuses you can find on the Hill in Ottawa, no program by technocrats in their offices pretending to cover all of Canada, in all its differences, is possible. So, with the best will in the world, there has to be some sort of way out which does not break up everything. I think the opting out is the only one. I am glad to see that four or five years later, we get at least a rather official and expensive voice after many months and months of work. It is suddenly coming up with that.

M. Saint-Louis: M. Kouch.
M. Kouch: I just want to take a one step further. What does the Macdonald Commission recommendations on the Constitution do for Québec’s position?
M. Lévesque: Honestly what?. A few obvious things that you can find in our May proposals constitutionnaly, for instance, the recognition, as normal, to recognize a nation which is French Québec. And the basis of Québec is that. I does not mean all Quebeckers are not Quebeckers,
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but everyoby knows that it is where the problem lies, has lain historically, since the Laurendeau Commission towards the Pepin-Robarts, and what have you. The recognition I fully endorse – and I think everybody does for many reasons – of aboriginal nations, or peoples. Well, Québec happens
to also exist. So, the recognition of an obvious fact, which is as obvious as a nose in your face, plus what goes with it, and especially opting out, with full compensation offered to everyone
because there are many differences – but Québec is basic, more basic than any other – plus the institutional veto which, I think, makes sense. To me, it is obvious.

A voice: … it did not help.
M. Lévesque: It cannot hurt.
M. Saint-Louis Mr. Noseworthy.

M. Noseworthy: Sir, your Cabinet must have discussed at great depth, the problem with the asbestos industry. There is no chance, I take it, at pouring more bad money after good money.

M. Lévesque: That is exactly, absolutely outside of the problem. It is not a question of pouring bad or good money. It is a question of a consolidation which, I think, is absolutely essential. Mr. Rodrigue has gone to explain it a few times to the people involved directly. First, there is this necessity of a consolidation, a bit comparable to what happen in the iron ore mining industry. Save as many jobs as possible and make them better, but you have to sacrifice a few. And additional to that, there is an absolute obvious necessity of more diversification in that. There are many possibilities, and a lot of people are working on it with Mr. Rodrigue, Mr. Biron and Mr. Masse who is, I think, the regional minister with the most experience, in that same district. Mr. Marcel Masse is working, I think, more and more anyway. From what we hear of his press conferences, he is sure working.
M. Noseworthy: Is it necessary to change Americans’ attitude towards asbestos? There are so concerned about its help risks.
M. Lévesque: It is not American, it is worldwide, except maybe in the developing world, because there, well, you know, some priorities are more pressing than the kind of quality evaluation that advanced or so-called advanced countries can make. In Europe and in the U.S., it Is a continuous watching that we have to do because there are tendencies to overeact to anything that has to do with asbestos. That is part of life.
M. Saint-Louis: Mme Mesley.
Mme Mesley: Obviously, a lot of ministers that left the Government a long time ago, there
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is another group of ministers that are saying either that they will not or that they may not run again, big numbers, more than a dozen that are saying that there are considering not running… M. Lévesque: If you are taking in for the moment…

Mme Wesley: Backbenchers too.

M. Lévesque: Yes. If you are take in the caucus and the… Mme Wesley: Yes.

M. Lévesque: …yes.

Mme Wesley: It is still… We have not seen that, when a leader leaves a party, that is very unusual to see that, how do you explain that?

M. Lévesque: I was just about to risk a personal question. Let us just say: People who have families and the children grow, who, in many cases, have given eight, nine, ten years and more of their life to public service, unpaid comparatively to anything they could do in private life or anywhere else, underpaid, getting, you know what for you know who, including you people for years on end. I think that these is basically a very rational explanation. Those you are talking about are essentially veterans, I think, except maybe a couple of cases of sickness which is part also of the risks of life. So, you do not have to look, you know…

Mme Wesley: But why such an unusual number in Québec? That is many. It is a huge number. People get tired everywhere. Why such a huge number here?

M. Lévesque: As far as the cabinet is concerned, it has not reached, I think not quite – and I do not think it will – the proportions that we had when we had to change course.

Une voix: Monsieur?

M. Saint-Louisw Une dernière question, M. Ross. M. Lévesque: Oui, parceque là, je… Une voix: O.K. Well, I will get my chance…

M. Ross: M. Lévesque, what you said about the Macdonald Commission, you said: At least, it is not going to hurt and it may help Quebec’s constitutional…

M. Lévesque: In that particular specific case, that is absolutely sure that has to do with the recognition of Québec as such and basically opting out and institutional veto, which does not change much anyway, since it is there.

M. Ross: Yes. It may give a certain amount of boost to your constitutional proposals that you put forward in May on no specific things anyway. How do you feel about the fact that you are not going to be around to go through it after…
M. Lévesque: Ah! Ah:
M. Ross: …you worked so hard to do it and after the Macdonald Commission, in a sense, is agreeing with you in a way you…

M. Lévesque: There is nothing more, in a sense, satisfactory then that kind of belated recognition of the fact that we were not all wrong. That is my essential feeling.

M. Ross: But what about the fact that you are not going to be around at the table, that you are not going to be able to hammer it out, there?

M. Lévesque: There are many things that I can do without easily, you know, like scrums, like constitutional conferences, like some aspects of federal-provincial relations. That experience has to be widened. So, somebody else is going to acquire a lot of experience, and I can be a one-dollar-a-year man eventually on that particular matter.

M. Ross: A lot of people said about you that one of the things that you would have liked to have done and one of the things that mass media announced that you do not like, but it has been said that one of the things you sort of wanted to do – it is my last question – is that you would like to have remade or corrected that night with no moon, and now that you are going
to…
M. Lévesque: I do not remember exactly… M. Ross: Now that you are going to be…
e f
M. Lévesque: Maybe there was a full moon, I do not know.
M. Ross: O.K., but now that you are going to be leaving, it seems that you are not going to be able, personnally, to correct what went on. How do you feet about that?
M. Lévesque: That is right. The most basic thing – it is obvious – that, 1 think, will come
back in a different way, as I said, in a certain way, and you had the specifics which we gave you quickly today, in a certain way I get the feeling sometimes that, in many fields, Quebec is carrying Canada. So, essentially, what I mean, the basic regret, which is normal, is that we did not get to something which I think, in some way or other, but different, I suppose, will eventually happen and will mean some sort of association and basic sovereignty or independance
for Quebec in its essential decisions. That is a regret because I think it makes sense eventually in a different way, because people have to adhere, you know… In fact, people have to decide, which they are doing. But they are doing it here and there and in every sector, more and more, with few exceptions. Self-confidence, total self-confidence. Not presumption but self-confidence that we are as good as anybody else in many fields in the world, and as anybody else in Canada in most fields. And more and more, it is true. Which means that why the hell should our decisions that have to do with our development, with our identity or with anything that is « existentiel », you know, basically important. It should be filtered through a lot of people. In many ways, they do not know much about Quebec. It does not make much sense, and more and
more, it will make less sense. It is not a very good sentence, but… Mesdames et messieurs, I have to tell you, c’est terminé.

Des voix: Merci.
(Fin à 14 h 59)]

[QLévesq19850911cp]

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