Le Conseil des ministres du Québec a été invité à examiner trois possibilités quant à l’avenir du stade olympique, ces possibilités ayant été tirées du rapport du Comité Marsan qui avait été mandaté par le ministre responsable de la Régie des Installations Olympiques pour en faire l’étude.
Ces trois possibilités sont connues. Elles comportent d’abord le maintien du stade à sa construction actuelle, c’est-à-dire de le laisser ouvert, ce qui impliquerait quand même un déboursé additionnel 33 à 35 millions de dollars pour le préserver de la détérioration (le stade a été conçu pour être couvert) et achever l’essentiel des travaux nécessaires à son utilisation présente. C’est la décision provisoire que le gouvernement se voit contraint de prendre et, sans plus tarder, d’expliquer aux citoyens pour les raisons que l’on trouvera ci-dessous.
Mais cette décision exige du gouvernement un délai d’au moins un an, peut-être davantage si la conjoncture demeure aussi défavorable avant d’amorcer la mise en chantier des travaux de parachèvement. Dans le contexte d’une situation économique douloureuse et compte tenu du petit nombre d’emplois crées pendant deux ou trois ans sur ce chantier, il serait à notre avis inacceptable de s’engager présentement dans ce parachèvement pour le 70 millions $ qu’il réclame au-delà des travaux dits essentiels pour la sécurité de l’édifice et l’entreposage de la toile.
D’autant plus qu’il nous faut informer aujourd’hui même nos concitoyens que le cauchemar olympique n’est pas terminé. Le fonds spécial olympique, savamment imaginé par une combine de deux gouvernements coupables de la plus pure négligence pendant que le déficit de l’aventure escaladait, ce fonds qui devait étaler sans douleur sur sept ans les paiements d’un emprunt de 700 millions $ contracté par le gouvernement pour que les Jeux aient lieu, il faut dire qu’il sera bientôt à sec et tous travaux additionnels seraient donc puisés à même les fonds courants du gouvernement qu’il se doit d’affecter à des priorités sociales et économiques infiniment plus criantes.
Reprenons les prédictions Garneau de mai 1976. Du déficit alors annoncé de 995 millions $, la Ville de Montréal devait assumer à elle seule 200 millions $ pour l’indéniable responsabilité de ses dirigeants, le reste étant porté au compte de la Régie des Installations Olympiques. Celle-ci contracta donc un emprunt de $700 millions à l’été 1976, qu’elle devait achever de rembourser en 1983, en cumulant le remboursement de capital dans les cinq dernières années de cette échéance.
Non seulement n’avons-nous pas encore commencé à rembourser le capital, nous n’avons jusqu’ici que rencontré nos obligations sur les intérêts, mais il est déjà assuré que la formule prévue pour y faire face est insuffisante et qu’il faudra bientôt, quatre ans après les Jeux, nous obliger encore à des sacrifices pour les payer.
La taxe sur le tabac, de dix cents par paquet depuis mai 1976, devait rapporter 665 millions $ en sept ans: on estime aujourd’hui que son rendement ne lui fera pas atteindre 540 millions $. La vente du village, qui a coûté 95 millions $, devait, selon l’ancien gouvernement, rapporter 50 millions $: la vente à un organisme sans but lucratif est aujourd’hui fixée à 33 millions $ et encore, le litige demeure avec le gouvernement fédéral et la société centrale d’hypothèque et de logement. Et, trouvaille des trouvailles, la »généreuse » contribution du gouvernement central, la Loto-Canada qui, aux dires de Jean Chrétien devait rapporter 350 millions $ au lieu d’exiger comme minimum garanti, comme nous le leur suggérions, ne rapportera qu’au plus 250 millions $, et encore faut-il rappeler que 45% des billets sont achetés par des Québécois!
Donc, il faut dire tout de suite que le maquignonnage Garneau-Chrétien est un échec lamentable et que le fonds de remboursement va exiger de tous les Québécois, au plus tard en 1980, un refinancement de 400 à 500 millions $. C’est parce qu’un parachèvement immédiat hâterait davantage l’épuisement du fonds, que le refinancement devrait se faire dans quelques mois au détriment des priorités auxquelles s’est déjà attaché le gouvernement du Québec sans même que tous ses fonds disponibles suffisent, que nous avons décidé de retarder d’au moins un an le début des travaux.
[QLVSQ19780210]