Discours du trône, Québec, 7 novembre 1951

Maurice Duplessis, 1936-1939 et 1944-1959

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

A l’aube de la quatrième session de notre vingt-troisième législature, il me fait plaisir de réitérer à notre gracieux Souverain, Sa Majesté le Roi, nos meilleurs souhaits de santé.

La population de la province conserve un agréable souvenir de la visite de Leurs Altesses Royales la Princesse Elisabeth et le duc d’Édimbourg. Ce mémorable événement a mis, une fois de plus, en relief la cordiale hospitalité et la traditionnelle loyauté du Québec.

A l’heure où plusieurs nations sont rongées par des idéologies malsaines et désastreuses, qui n’ont pas de place dans notre province, Québec jouit d’une prodigieuse prospérité et donne au monde l’exemple d’une stabilité exceptionnelle, solide fondement de la véritable sécurité. L’invincible attachement à nos saines et excellentes traditions et la pratique, par le gouvernement, d’une politique familiale, sociale et nationale, qui nous convient, demeurent de solides garanties de bien-être réel et de prospérité grandissante.

Nous savons que la sécurité scolaire, municipale et nationale est intimement liée à la sécurité constitutionnelle. Il est juste et nécessaire que notre province, en tout temps et spécialement à l’occasion des développements prodigieux dont elle bénéficie et qui s’annoncent de plus en plus merveilleux, puisse jouir, dans leur plénitude, des droits, prérogatives et libertés qui lui appartiennent légitimement et que lui reconnaît la constitution canadienne. C’est pourquoi le règlement définitif des problèmes constitutionnels est plus à l’ordre du jour que jamais.

L’atmosphère d’amicale et mutuelle compréhension dans laquelle s’est tenue, en 1950, la conférence de Québec, réunion historique et sans précédent à laquelle ont participé les premiers ministres des onze gouvernements du pays, est de bon augure. Elle a permis aux gouvernements fédéral et provincial de favoriser une entente qui sera soumise à votre approbation et en vertu de laquelle les personnes âgées de 65 ans et plus recevront une assistance financière et les aveugles, un traitement plus approprié.

Nous avons l’intime conviction que le gouvernement responsable et démocratique et la véritable unité nationale nécessitent un système confédératif, approprié et juste, qui accorde aux autorités fédérales, provinciales, municipales et scolaire, chacune dans leur sphère respective, les facilités et les moyens d’exercer tous les pouvoirs essentiels: législatifs, administratifs et financiers.

C’est la ferme et agréable intention de mon gouvernement de coopérer au règlement définitif et juste des problèmes vitaux constitutionnels. Nous sommes certains que la fidélité de notre province à ses traditions religieuses et nationales, auxquelles nous tenons comme à la prunelle de nos yeux, constitue, pour le pays, un actif précieux et particulièrement remarquable.

Nos saines traditions s’opposent, avec raison, au paternalisme d’État que nous considérons comme une menace pour le régime démocratique et une source de désastres irréparables.

Aussi mon gouvernement est-il convaincu que l’initiative personnelle et sa meilleure manifestation, l’entreprise privée, constituent un système progressif et démocratique bien adapté aux besoins de notre province, conforme à ses meilleurs intérêts et capable d’assurer à notre jeunesse de brillantes et fructueuses carrières.

Parmi les entreprises privées, le premier rang revient à l’agriculture, forteresse de l’ordre et fondement de tout progrès durable. Mon gouvernement entend lui conserver la place prépondérante qui lui appartient, à bon droit, dans notre économie.

C’est pourquoi vous serez appelés à voter des sommes considérables pour perpétuer l’œuvre salutaire du prêt agricole provincial, pour compléter l’électrification rurale qui favorise grandement l’activité agricole et contribue beaucoup au bien-être du cultivateur ainsi qu’au règlement de plusieurs de ses problèmes.

Le gouvernement vous demandera aussi de mettre à sa disposition les argents nécessaires à la mécanisation des travaux de la ferme, à l’expansion du domaine arable et au perfectionnement des communications rurales. En outre, vous sera soumis un projet de loi dont le but est de faciliter la vente des produits agricoles et de rendre pleine justice aux cultivateurs sans léser les droits des consommateurs.

Mon gouvernement entend appliquer la meilleure politique de colonisation possible dans les circonstances actuelles. Il est persuadé que la colonisation est indispensable à la véritable prospérité de notre province.

Le gouvernement est d’opinion qu’une juste et loyale coopération entre le Capital et le Travail est synonyme de progrès et de prospérité et conforme à l’intérêt public. Il fera tout en son pouvoir pour que les droits de tous et chacun soient entièrement sauvegardés, en particulier ceux des ouvriers.

Pour toutes les classes de la société, la santé, celle du corps et celle de l’esprit, est le plus précieux de tous les biens terrestres. Pour protéger la santé physique, mon gouvernement s’efforcera de compléter la politique efficace et progressive qu’il a instaurée en multipliant les hôpitaux et les sanatoria et en appliquant les meilleures méthodes de sauvegarde et d’hygiène.

Quant à la santé de l’esprit, elle est conservée et développée par une saine éducation. Mon gouvernement est toujours d’opinion que le progrès de l’éducation, à tous ses paliers, est le moyen indispensable d’assurer l’établissement permanent et profitable de notre jeunesse dont le succès lui tient bien à cœur.

L’enseignement primaire, l’enseignement secondaire, l’enseignement spécialisé et l’enseignement universitaire ont une place de choix dans les préoccupations de mon gouvernement. Il se propose de réaliser de nouvelles et importantes améliorations et de maintenir, dans leur intégrité, les droits de la province dans ce domaine vital.

La multiplication des facilités éducationnelles permet et permettra à notre jeunesse, en particulier, de jouer un rôle de première importance dans le développement de nos immenses ressources naturelles que mon gouvernement est toujours décidé à mettre en valeur de la façon la plus efficace et la plus juste.

Mon gouvernement est conscient de la grande richesse qui découle de nos forêts et s’occupera toujours d’en assurer la permanence et d’obtenir l’utilisation complète des produits forestiers.

La mise en valeur de nos richesses minières, particulièrement dans l’Abitibi, le Saguenay, la Gaspésie et le Nouveau-Québec, et la construction d’une voirie minière adéquate contribuent et contribueront puissamment au progrès et à la prospérité de notre province. Dans ce domaine important mon gouvernement continuera et améliorera, s’il v a lieu, sa politique progressive.

Mon gouvernement continuera à attacher beaucoup d’importance à la voirie rurale et à la voirie en général et s’emploiera à assurer le succès de la grande industrie du tourisme qui a pris un essor considérable en ces dernières années.

La petite propriété est un gage de bien-être et de paix sociale. La crise du logement, née de conditions étrangères au gouvernement de la province, s’est sensiblement améliorée, mais mon gouvernement vous demandera de l’autoriser à faire davantage à ce sujet. Il vous proposera des améliorations à la loi concernant les rapports entre locataires et propriétaires.

Il aidera au progrès de la petite industrie, favorisera la décentralisation industrielle désirable et encouragera la diversité d’entreprises.

Dans le domaine important des pêcheries maritimes et des pêcheries sportives, mon gouvernement adoptera les meilleures méthodes pour obtenir à nos pêcheurs des marchés avantageux, leur en ouvrir de nouveaux et faire en sorte qu’ils bénéficient de ces grandes richesses, pleinement et d’une manière constante.

Plusieurs projets de loi, susceptibles d’améliorer le sort de toutes les classes de notre population, vous seront soumis.

Messieurs de l’Assemblée législative,

Les comptes publics de la dernière année fiscale vous seront communiqués et vous voudrez bien voter les subsides nécessaires à l’administration.

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Je demande à la divine Providence de bénir et de féconder vos travaux et de répandre ses bienfaits sur notre chère province.

[Texte électronique établi par Denis Monière (Université de Montréal) 1999]

Share