Louis Olivier Taillon, 1887 et 1892-1896
Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,
C’est avec bonheur que je vous souhaite la bienvenue au siège du gouvernement et que je vous vois réunis pour commencer les travaux de la troisième session de la présente Législature. Je vous remercie de votre empressement à nous apporter le concours de vos lumières et de votre expérience.
Depuis la dernière session de la Législature, Son Excellence le comte de Derby, gouverneur-général du Canada, a vu finir son terme d’office et s’est éloigné de notre pays, après avoir donné, dans plus d’une circonstance difficile, la preuve de la sympathie qu’il portait aux Canadiens et de son zèle éclairé pour la gloire et les intérêts noblement entendus de Sa Majesté et de l’Empire.
Son Excellence le comte d’Aberdeen, que Notre Gracieuse Souveraine a envoyé au Canada pour lui succéder, a déjà su conquérir l’estime et l’affection de toutes les classes de notre population. Sa nomination au poste élevé qu’il occupe est la continuation de cette heureuse politique coloniale qui a valu au Canada l’avantage d’être gouverné par des hommes choisis entre les plus illustres, de l’Angleterre, dont les noms sont restés justement populaires parmi nous.
Un rapport de la Commission chargée de la préparation, de l’envoi et du classement des articles destinés à l’exposition universelle de Chicago vous sera soumis, et vous aurez la satisfaction de constater que la province de Québec s’est fait remarquer très avantageusement dans ce concours ouvert à toutes les nations du monde, spécialement par son exposition scolaire, son exposition forestière et minière, et les produits de ses industries agricoles. Parmi ces derniers, le fromage a obtenu la plus haute distinction.
Vous serez encore appelés pendant cette session à aider mon gouvernement dans l’oeuvre de l’amélioration et du perfectionnement de notre agriculture, qui est la base même de notre propriété nationale. Le nombre des syndicats de l’industrie laitière a doublé depuis l’an dernier; l’école centrale établie à Saint-Hyacinthe pour développer cette industrie a reçu plus de deux cents élèves; dans toute la province les cercles agricoles ont surgi comme par enchantement ; en un mot l’agriculture a fait des progrès considérables; mais, si satisfaisants que soient les résultats obtenus, il y a encore lieu à améliorer et à perfectionner, et les effort de mon gouvernement se sont particulièrement tournés de ce côté.
La législation adoptée à la dernière session, concernant les compagnies de chemin de fer, a eu l’effet désiré. Elle a conservé aux compagnies sérieuses et de bonne foi tous les droits et privilèges qui leur avaient été conférés; elle a opéré l’administration des compagnies incapables de mener à bonne fin les entreprises dont elles s’étaient chargées; enfin elle a débarrassé la Province d’obligations éventuelle qui nuisaient à son crédit. Grâce à la libéralité de la Législature, la Province s’est créé un réseau de voies ferrées amplement suffisant pour les besoins actuels de la colonisation et de l’immigration. Il n’est que juste que votre sollicitude et vos efforts se portent maintenant vers le développement des régions fertiles que les chemins de fer ont ouvertes aux diverses industries.
Les anciens propriétaires de l’Asile de Beauport ont vendu cet établissement à une communauté religieuse appelée les Sœurs de la Charité; et mon gouvernement a fait un contrat avec cette communauté pour l’entretien des aliénés. Ces deux contrats vous seront soumis.
Les prévisions budgétaires de mon gouvernement pour l’exercice 1892-93 se sont réalisées: grâce au soin apporté à la perception du revenu, grâce aussi à l’économie pratiquée dans toutes les branches du service public, les recettes ordinaires, y compris le produit des taxes imposées l’an dernier, ont excédé les dépenses ordinaires proprement dites; cet excédant, relativement considérable a servi à solder des dépenses extraordinaires et à diminuer la dette flottante. De sorte que le rétablissement de l’équilibre dans le budget ordinaire est pratiquement accompli.
Il y a donc lieu d’espérer que non seulement les impôts ne seront plus augmentés, mais qu’ils seront même diminués graduellement dans un avenir rapproché. Cette perspective devra encourager le peuple de la Province à exécuter fidèlement les lois édictées pour faire face aux exigences de la situation financière.
Vous aurez à étudier de nouveau le système de taxation qui a été adopté en 1892, afin de voir quelles modifications il convient d’y apporter. L’expérience acquise par le fonctionnement de ce système et les observations faites par tous ceux qui se sont occupés de cette importante question vous aideront sans doute à trouver une solution satisfaisante.
Mon gouvernement, eu égard à la crise intense qui s’est fait sentir sur le marché monétaire, a dû se borner à des arrangements temporaires pour solder l’emprunt de vingt millions de francs contracté en 1891 et remplir les autres engagements de la Province. Ces arrangements vous seront soumis. Quoiqu’il y ait lieu d’espérer que les effets de cette crise cesseront bientôt, mon gouvernement vous soumettra des projets de loi qui lui permettront d’utiliser certaines ressources dans le cas où cela serait plus avantageux.
Je vous engage à examiner sérieusement la situation financière; vous vous convaincrez de la nécessité de pratiquer la plus stricte économie, de ne plus ajouter aux engagements de la Province, et de les diminuer chaque fois que l’occasion s’en présentera. Cette politique s’impose; sans elle vous ne réussirez pas à inspirer en notre crédit toute la confiance que doivent commander les vastes ressources de notre territoire et l’industrie de notre population.
Messieurs de, l’Assemblée législative,
Les comptes publics vous seront soumis, selon l’usage, et vous serez appelés à voter de nouveaux crédits pour les besoins du service public.