Discours du trône, Québec, 7 janvier 1925

Louis-Alexandre Taschereau, 1920-1936

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

L’année qui vient de s’écouler nous invite à être particulièrement reconnaissants envers la Providence.

Notre province s’est de nouveau distinguée par le calme et l’esprit d’ordre de sa population. Malgré la dépression économique qui sévit depuis la guerre et qui est parvenue jusqu’à nous, le capital et le travail ont continué, au sein de notre province, à vivre dans un harmonieux accord.

Une très bonne récolte a couronné les travaux de nos cultivateurs et, si les prix du marché n’ont pas été des plus rémunérateurs, l’abondance des produits a suppléé dans une certaine mesure à ce désavantage.

Le courant d’émigration que des conditions incontrôlables avaient créé en ces dernières années est pratiquement enrayé. .Beaucoup des nôtres qui s’étaient laissé attirer vers les États-Unis reviennent à leurs foyers. Ils ont constaté que 1la vie était aussi difficile là-bas qu’ici, et qu’elle offrait moins de compensations. L’appel qu’a fait le gouvernement semble avoir été entendu de ceux qui s’apprêtaient à suivre un malheureux exemple.

Mon gouvernement veut s’appliquer énergiquement à conserver, et à développer chez nous, nos immenses ressources naturelles. Nos forêts, notre houille blanche, nos mines et nos pêcheries constituent un patrimoine national dont dépend en partie l’avenir de notre province. Pour cette raison, il importe de sauvegarder jalousement ce patrimoine et de l’exploiter judicieusement, ayant égard à l’avenir tout autant qu’au présent.

La nouvelle organisation que le gouvernement a inaugurée pour la préservation de la forêt contre les incendies, et les sommes considérables qu’il a consacrées à cette fin, ont eu un excellent résultat. Les associations de concessionnaires forestiers se plaisent elles-mêmes à le reconnaître. C’est l’intention du gouvernement de rendre cette organisation de plus en plus efficace.

Non content de pourvoir à la sécurité du domaine forestier, le gouvernement s’occupera d’activer le reboisement en remettant en valeur les sols qui ont été ruinés par des cultures épuisantes ou par le feu, en développant la pépinière de Berthierville, dont la capacité sera augmentée chaque année de plusieurs millions de plants, en faisant lui-même des plantations sur les terres appartenant à la Couronne, et en encourageant les particuliers à boiser leurs friches et les terrains improductifs.

Mon gouvernement désire également assurer le progrès de la province en donnant une attention toute spéciale à la colonisation, à l’agriculture, à l’instruction publique et aux problèmes ouvriers.

Les principales routes de la province seront bientôt parachevées. Je suis heureux de constater les remarquables résultats que le ministère de la voirie a obtenus dans l’entretien des grandes routes. Le fardeau est lourd au point de vue financier, mais cette politique nous vaut des chemins qui rivalisent avec les plus beaux du continent, et elle soulagera considérablement les municipalités auxquelles incombait l’entretien de ces chemins.

Il convient d’observer que le service d’inspection et de vérification de la comptabilité municipale, institué à notre dernière session, est maintenant parfaitement organisé et justifie pleinement son existence.

Quatre commissions importantes ont terminé, ou sont sur le point de terminer les travaux qui leur avaient été confiés. Ce sont les commissions chargées de la refonte des statuts, de l’étude de la loi des accidents du travail, du rajustement des traitements et de la classification des fonctionnaires civils, de l’examen des conditions scolaires de l’île de Montréal. Les rapports de ces diverses commissions vous seront soumis, ainsi que la législation requise pour leur donner effet.

Il me fait plaisir de vous informer que les négociations entre mon gouvernement et celui de l’Ontario, relativement, au double paiement des droits sur les successions, semblent devoir se terminer bientôt par un accord satisfaisant. Cet arrangement diminuera quelque peu le montant que prélève actuellement chaque province, mais il mettra fin à une anomalie dont avaient à se plaindre plusieurs contribuables.

Vous serez appelés à légiférer sur divers sujets d’intérêt général.

Le fonctionnement de notre loi du jury laisse à désirer. Trop de personnes bénéficient du privilège d’exemption, et la formation du jury n’est pas aussi bien ordonnée qu’elle devrait l’être pour les fins de la justice. Vous serez invités à remédier aux défauts que l’on a constatés.

Mon gouvernement vous demandera d’affecter un certain montant à l’instruction, dans nos écoles primaires, des enfants d’ouvriers que la mort de leurs pères, survenue alors que ceux-ci étaient au travail, a laissés sans ressources.

D’autres mesures, d’un intérêt moins général, réclameront également une étude attentive.

Messieurs de l’Assemblée législative,

Rapport vous sera fait de la situation financière de notre province. Les revenus excèdent considérablement les dépenses et notre province conserve ainsi la position enviable qu’elle s’est acquise depuis quelques années. Il vous incombera de voter les crédits du prochain exercice.

Honorables messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Selon la tradition parlementaire dont vous vous inspirez, vous saurez consacrer aux projets de loi qui vous seront présentés toute votre attention. Je prie la Providence de bénit vos travaux pour qu’ils contribuent au progrès et au bonheur de notre province.

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