Discours du trône, Québec, 21 octobre 1922

Louis-Alexandre Taschereau, 1920-1936

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Vous avez été appelés à vous réunir pour légiférer sur d’importantes questions qui réclament instamment votre attention, et il m’est de nouveau donné de vous souhaiter la bienvenue au nom de notre Souverain.

Si la Providence nous a accordé cette année une abondante récolte, qui nous permet d’envisager l’hiver avec moins d’inquiétude que l’an dernier, notre province a été, cependant, fort éprouvée par les incendies de forêts, et par la disette de charbon dont souffrent présentement notre population et nos industries.

La menace d’une guerre européenne semble heureusement dissipée, et nous devons des grâces à Dieu d’avoir épargné au monde les horreurs d’un nouveau conflit.

Le chômage, dû aux conditions économiques d’après-guerre, prend fin peu à peu. La confiance se rétablit, l’industrie renaît dans nos centres manufacturiers, la construction redevient active, et nos ouvriers n’ont plus les mêmes causes d’appréhender l’avenir.

Depuis la dernière session, l’agriculture a réalisé dans notre province de notables progrès. L’ouverture de chemins dans toutes nos nouvelles régions a donné un puissant essor à la colonisation, qui bénéficiera également de la politique inaugurée par mon gouvernement d’offrir aux colons des terres en partie défrichées, où sont érigés les maisons et autres bâtiments dont ils ont besoin pour leur première installation.

La régie des alcools a pleinement répondu aux espérances du gouvernement, au point de vue tant moral que financier. Les abus d’autrefois disparaissent rapidement, et le premier exercice de la Commission des liqueurs se solde par un fort excédant de recettes.

D’importants travaux de voirie ont été exécutés en maints endroits de la province. Mon gouvernement s’est surtout appliqué à réparer nos routes et à les maintenir en bon état. Il y a employé les sommes considérables que vous aviez votées à cette fin.

Plusieurs projets de loi vous seront soumis.

La crise du combustible, qui dure depuis un certain temps et qui peut se répéter une autre année, nécessite la création d’un contrôle pouvant au besoin s’étendre aux comestibles, si les circonstances venaient à l’exiger. Il vous appartiendra de définir la forme et l’étendue de ce contrôle.

L’état actuel des finances provinciales permet au gouvernement de poursuivre encore plus efficacement la réalisation de son programme de voirie. Il vous demandera de modifier la Loi de l’entretien et de la réparation des chemins, de telle sorte qu’il puisse se charger entièrement de l’entretien de certaines routes provinciales et régionales, et assurer ainsi une exécution plus rapide, mieux ordonnée et plus parfaite des travaux qui s’imposent, tout en soulageant les municipalités d’un lourd fardeau.

Le dernier recensement fédéral a donné lieu à des plaintes réitérées, et les autorités municipales de plusieurs villes persistent à croire qu’il s’y trouve de nombreuses omissions. Un recensement défectueux étant de nature à nuire à la province et à la faire perdre une partie de ses revenus, mon gouvernement désire se faire autoriser à recommencer dans quelques villes le dénombrement de la population afin de vérifier l’exactitude du relevé qui vient d’y être fait.

Il sera présenté un projet de loi tendant à mettre en valeur les pêcheries du Saint-Laurent, qui peuvent devenir pour notre population un élément précieux de richesse et contribuer au développement rapide de la Côte-Nord et de la Gaspésie.

Comme la fabrication de la pulpe et du papier constituent une de nos industries les plus importantes et les plus profitables, il convient de former en notre province des techniciens et des ouvriers-experts qui puissent en diriger l’exploitation. Vous serez en conséquence invités à approuver l’établissement d’une école de papeterie.

En vue de rendre encore plus efficace la conservation de nos forêts et de compléter l’enseignement forestier qui se donne à Québec, il vous sera aussi proposé d’instituer une école de gardes-forestiers.

Le gouvernement vous invitera à multiplier les bourses qu’il accorde aux jeunes gens les mieux doués pour les aider à compléter en Europe leurs études littéraires, artistiques ou scientifiques.

Conformément au programme qu’il s’est tracé de favoriser le plus possible le développement de l’enseignement supérieur et universitaire, mon gouvernement a généreusement doté nos universités et nos collèges. Pour activer davantage les progrès de l’instruction publique, il vous demandera d’accorder cette année des octrois considérables aux écoles primaires.

Afin de conserver les collections qu’il possède déjà, de profiter des occasions qui s’offrent d’en acquérir d’autres, et de procurer à nos étudiants et à notre populations toutes les facilités de s’instruire, le gouvernement vous suggérera d’ériger dans la ville de Québec un musée d’histoire naturelle.

Il sollicitera l’autorisation d’organiser des colonies agricoles et industrielles pour remplacer les écoles de réforme, et enseigner l’agriculture à ceux qui pourraient y prendre goût et s’y employer.

Mon gouvernement projette d’augmenter les crédits de l’agriculture, et il se propose particulièrement d’en affecter une plus large part à l’amélioration de l’élevage et de l’industrie laitière. Le montant attribué à la colonisation devra aussi être sensiblement accru, pour mener à bonne fin l’œuvre entreprise en ces dernières années.

La loi des cités et villes, dont vous avez commencé l’étude à la dernière session, vous sera soumise de nouveau.

Il vous sera demandé de réglementer sévèrement le commerce des vins médicamentés dont on abuse en notre province, et de prendre les mesures les plus énergiques contre le trafic des narcotiques.

Messieurs de l’Assemblée législative,

En étudiant le rapport financier, vous aurez la satisfaction de constater que les recettes de la dernière année financière excédent les dépenses de l’administration dans une mesure que même notre province n’avait pas connu jusqu’ici. Vous serez priés de voter les crédits du prochain exercice.

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Vous aurez à délibérer sur diverses questions d’intérêt général. Je prie la Providence d’éclairer vos travaux et de répandre ses bénédictions sur notre province.

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