Discours du trône, Québec, 17 décembre 1923

Louis-Alexandre Taschereau, 1920-1936

Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Depuis qu’il a plu à notre Gracieux Souverain de m’appeler à remplir les fonctions de lieutenant-gouverneur, c’est la première fois qu’il m’est donné de vous rencontrer. Après vous avoir dit tout le plaisir que j’en éprouve, je crois me faire l’interprète de la législature et de notre population en rendant hommage à mon prédécesseur. Il a mis au service de la province ses éminentes qualités d’homme d’État et de juriste. A Spencerwood, il a exercé l’hospitalité avec autant de distinction que d’affabilité. Je suis sûr que vous garderez de ses relations avec vous le meilleur souvenir.

En dépit de crises internationales et économiques des plus graves, l’année qui se termine a vu tous les peuples occupés à réparer les désastres de la guerre.

Dans cet effort universel, Québec a noblement fait sa part. Si, par son esprit d’ordre et de labeur, notre province s’est tenue au premier rang, elle ne peut échapper, comme membre de la Confédération canadienne, au très lourd fardeau qui pèse sur tout le Dominion. Nous avons heureusement, pour alléger ce fardeau, une récolte abondante dans son ensemble, une situation financière florissante, un développement rapide de nos ressources naturelles, un peuple hardi et travailleur.

Mon gouvernement compte assurer, à l’heure présente, le progrès de la province par une aide énergique à la colonisation et à l’agriculture, une exploitation sage et prévoyante de nos forêts, la mise en valeur de nos chutes d’eau, le développement de nos pêcheries, la diffusion de l’instruction publique, une campagne vigoureuse en faveur de l’hygiène et des travaux de voirie qui répondent aux besoins les plus urgents.

Les rapports des ministères vous feront voir les résultats déjà acquis dans chacun de ces domaines.

Un grand congrès de colonisation vient d’avoir lieu à Québec. Les colons et les concessionnaires de coupes forestières y ont pris part. La discussion des problèmes difficiles que présentent la colonisation et l’exploitation de la forêt, s’y est faite dans le meilleur esprit. Les congressistes ont émis des vœux que mon gouvernement s’appliquera à réaliser, notamment en ce qui concerne la séparation effective du domaine forestier des terres propres à la colonisation, la protection de la forêt contre l’incendie et le rapatriement des nôtres.

Vous serez heureux de constater que les initiatives récemment prises par le gouvernement sont couronnées de succès. Il convient de mentionner entre autres la régie des alcools par l’État, l’assistance publique et la création d’écoles des beaux-arts.

La Commission que le gouvernement a instituée pour étudier la loi des accidents du travail, et la rendre aussi avantageuse que possible pour l’ouvrier sans trop obérer l’industriel, poursuit activement ses travaux. Le résultat vous en sera communiqué.

Vous serez appelés à légiférer sur divers sujets d’intérêt général.

Les circonstances exigent un contrôle plus efficace des finances municipales. Tout en laissant aux municipalités leur pleine autonomie, le gouvernement sent le besoin de créer un système de comptabilité et de vérification propre à maintenir leur crédit, et dont il pourra s’autoriser pour coopérer avec elles dans l’exécution de travaux qui réclament son concours.

Mon gouvernement désire également protéger l’épargne populaire contre certaines entreprises dont elle a eu maintes fois à souffrir. Il ne se propose nullement d’intervenir dans les affaires légitimes, ni d’entraver les opérations financières, mais il croit devoir les subordonner à des restrictions qui rassurent et sauvegardent le public.

Dans Québec, l’autorité gouvernementale a toujours tenu à pratiquer, en matière scolaire, la plus stricte équité à l’égard des deux groupes dont notre population se compose au point de vue religieux. Comme le surintendant de l’instruction publique appartient à la majorité, il semble juste de donner à la minorité protestante un fonctionnaire qui ait plus d’autorité pour résoudre les problèmes qui se présentent. Ce fonctionnaire devra rester soumis au surintendant, à qui est confiée la haute direction de l’instruction publique.

Mon gouvernement se propose de modifier la loi relative aux droits sur les successions de façon à la rendre moins onéreuse en certains cas. Il entend aussi réduire l’impôt sur les voitures automobiles en remaniant le tarif de la contribution.

Messieurs de l’Assemblée législative,

Rapport vous sera fait de la situation financière de notre province. Les revenus excèdent considérablement les dépenses et notre province conserve ainsi la position enviable qu’elle s’est acquise depuis quelques années. Il vous incombera de voter les crédits du prochain exercice.

Honorables messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,

Divers projets de loi relatifs à la colonisation, à la voirie, à l’agriculture et à l’administration de la justice vous seront soumis au cours de cette session. Vous saurez leur donner toute l’attention qu’ils méritent. Je prie la Providence de bénir vos travaux pour qu’ils contribuent au progrès et au bonheur de la province.

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