Discours du trône, Québec, 4 décembre 1917

Lomer Gouin, 1905-1920

Messieurs du Conseil législatif et de l’Assemblée législative,

Vous avez été appelés dans la capitale pour reprendre vos travaux parlementaires, et il m’est agréable de vous souhaiter une cordiale bienvenue.

Il y a maintenant quarante mois que la guerre se poursuit en Europe. Les armées alliées, si elles n’ont pas encore remporté la victoire décisive, se montrent tout aussi héroïques et ardentes qu’aux premiers jours ; nos volontaires canadiens ne cessent de se distinguer dans cette terrible étreinte, et il nous fait plaisir de constater que les combats qu’ils ont livrés en ces derniers temps, à Vimy, à Lens, à Passchcudaele, ont encore ajouté à l’enviable réputation qu’ils s’étaient déjà acquise. Il convient de se réjouir aussi de ce que nos puissants voisins se soient jetés dans la mêlée aux côtés des Alliés : les immenses ressources que les États-Unis mettent au service des peuples de l’Entente ne peuvent manquer d’assurer le succès de la cause qui nous est chère.

On a dit que les canons et les fusils seraient impuissants gagner la bataille sans l’aide de la charrue et que le cultivateur pouvait devenir un des artisans de la victoire. En effet, il ne suffit pas de ravitailler nos soldats, il faut aussi nourrir les pays alliés. Cette nécessité, mon gouvernement l’a comprise, et c’est pourquoi, le printemps dernier, il demandait aux cultivateurs de cette province d’augmenter leur production, il leur procurait des grains de semence et il établissait un bureau de placement en vue de pourvoir aux besoins de la main-d’œuvre agricole. Nos cultivateurs, je me plais à le proclamer, ne négligèrent aucun effort pour accroître les produits de leurs fermes, et c’est l’intention de mes ministres de leur faire prochainement un nouvel appel et de prendre toutes les mesures possibles pour faciliter leur tache.

Jusqu’ici la statistique ne rendait pas entièrement justice à l’agriculture de notre province. Il appartenait au bureau des Statistiques de remédier à cet état de choses, et c’est dans ce but qu’il a, au cours de l’été dernier, fait distribuer par toutes nos campagnes un questionnaire relatif à notre industrie agricole. Les réponses qu’il a reçues sont suffisantes pour établir d’une façon presque exacte la superficie des terres en culture, le nombre et la valeur des animaux de la ferme, ainsi que le rendement en céréales et en légumes ; elles serviront également à démontrer jusqu’à quel point les cultivateurs mettent en pratique les conseils du ministère de l’agriculture et se conforment à ses instructions.

A cette heure où l’on se plaint un peu partout de l’insuffisance des transports, mon gouvernement a cru devoir poursuivre la politique qu’il a inaugurée en 1912 relativement à l’amélioration de notre voirie rurale. C’est pourquoi, pour satisfaire aux besoins de la florissante région qui s’étend depuis les Trois-Rivières jusqu’à Grand-Mère, il a commencé la construction d’une route qui, suivant toute probabilité, sera terminée l’été prochain. De plus, il vous soumettra une loi à l’effet de pourvoir d’une façon plus efficace à l’entretien et à l’amélioration des voies carrossables.

Vous avez appris le parachèvement du pont de Québec et vous vous êtes sans doute réjouis du succès qui a couronné cette gigantesque entreprise. Ce travail fait honneur au pays tout entier et il contribuera largement, j’en suis certain, à servir ses intérêts économiques.

Il est une autre entreprise qui sera bientôt terminée et dont l’importance est aussi fort considérable : je veux parler des barrages qu’on a établis à la tête du Saint-Maurice et du Saint-François en vue d’emmagasiner les eaux de ces rivières et d’en régulariser le débit. Mon gouvernement, en construisant ces deux réservoirs, a voulu accroître les forces sur lesquelles repose en grande partie le développement industriel de notre province et il a réalisé là une œuvre dont la population peut s’enorgueillir à juste titre.

Il me fait plaisir de vous signaler les excellents résultats de l’établissement d’une pépinière forestière à Berthier. Pendant la seule année qui s’achève, on a distribué un demi-million de plants qui ont été en grande partie utilisés dans des régions dévastées par le feu et impropres à la culture. C’est l’intention de mes ministres d’encourager de plus en plus fortement le reboisement de ces terres.

Il est d’une sage administration de veiller soigneusement à protéger nos forêts contre les incendies et de travailler à améliorer sans cesse nos moyens de protection. Grâce aux nouvelles associations qui viennent d’être formées avec le concours du ministère des terres, une partie importante des forêts en affermage se trouve déjà soumise à une surveillance des plus efficaces et il y a lieu d’espérer que, dans un avenir rapproché, ce système de surveillance sera en vigueur par tout notre domaine forestier.

La colonisation est plus active que jamais et il est encourageant de constater les progrès remarquables qu’elle fait, notamment dans l’Abitibi et dans la vallée de la Matapédia. Le gouvernement se propose de pousser activement, comme il l’a fait l’an passé, la construction de routes nouvelles dans les centres où il convient de diriger et de grouper les colons.

Vous serez sans doute heureux d’apprendre que mes ministres ont décidé de concéder gratuitement des terres à tous les soldats qui revenus du front, manifesteront le désir de se livrer aux travaux des champs.

J’attire votre attention sur le développement minier de la province et sur l’importance que l’industrie minière a prise chez nous depuis quelques années.

Il est devenu nécessaire, à raison de l’accroissement des opérations des corporations publiques, de créer un département des affaires municipales. En conséquence, une loi vous sera soumise à ce sujet.

Comme vous avez pu le constater, la classe ouvrière a tiré de grands bénéfices de l’enseignement technique, et je suis heureux de vous annoncer que mon gouvernement est sur le point de conclure des arrangements avec la cité des Trois-Rivières pour l’établissement d’une école technique dans cet endroit.

Messieurs de l’Assemblée législative,

Les comptes de l’année écoulée seront déposés devant vous. Vous y verrez avec satisfaction, sans doute, que les recettes ont excédé les dépenses. Vous serez appelés à voter les crédits nécessaires pour le prochain exercice.

Messieurs du Conseil législatif et de l’Assemblée législative,

Vous aurez à légiférer sur plusieurs matières d’ordre public et l’on vous demandera, notamment, d’amender la loi des accidents du travail. Je prie la Providence de bénir vos travaux et de les rendre fructueux et utiles à notre chère province ; je la prie également de faire triompher les armées de notre roi et de ses alliés.

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