Discours du trône, Québec, 28 mai 1880

Joseph-Adolphe Chapleau, 1879-1882

Honorables Messieurs du Conseil Législatif,
Messieurs de l’Assemblée Législative,

Je vous souhaite, avec plaisir, la bienvenue au siège du Gouvernement, où je vous vois réunis pour vous occuper des affaires de la Province.

J’ai confiance que la représentation parlementaire vient commencer ses travaux législatifs, avec l’esprit d’entente et d’harmonie, nécessaire au bon fonctionnement de nos institutions politiques et au progrès de notre pays.

Je suis heureux de me joindre à vous pour témoigner à Notre Gracieuse Souveraine, de nos sentiments de reconnaissance et de loyauté à l’occasion de la visite de Son Altesse Royale, le prince Léopold. Son Altesse est le cinquième membre de la famille Royale, qui ait honoré notre pays de sa présence, et nous aimons à trouver dans sa visite une nouvelle preuve de l’affection que nous porte Notre Auguste Souveraine.

Nous devons tous nous réjouir à la pensée que le malaise général qui se fait sentir depuis quelques années dans toutes les branches de l’industrie, commence à disparaître. L’exploitation de nos forêts et le développement de nos ressources minières avaient été paralysés par cette crise ; mais vous serez heureux d’apprendre qu’il y a tout lieu d’espérer que l’impulsion nouvelle donnée à ces industries, apportera un large contingent à la richesse nationale, en même temps qu’elle augmentera d’une manière sensible, les revenus de la province.

Deux entreprises que la législature et les gouvernements précédents avaient spécialement entourées de leur protection, l’exploitation des phosphates et la fabrication du sucre de betterave, ont reçu l’attention toute particulière du gouvernement, et sont en voie de réaliser les espérances des amis de l’agriculture et de l’industrie dans cette province.

Une exposition générale de la puissance sera tenue dans la province de Québec, durant le cours de cette année. Mon gouvernement a cru devoir encourager particulièrement ce grand concours agricole et industriel, et j’ai confiance que vous approuverez ce qui a été fait dans cette direction.

Depuis la prorogation des chambres, le 31 octobre dernier, le gouvernement a pris possession de la Section-Est du chemin de fer de Québec, Montréal, Ottawa et Occidental, et a réuni, sous une seule direction, les deux sections de ce chemin.

Les états qui vous seront soumis à ce sujet, vous démontreront que les revenus de cette entreprise ont augmenté dans des proportions encourageantes pour l’avenir ; ce qui, joint aux avantages multiples que la province devra retirer de ce chemin, sera une compensation pour les sacrifices qu’elle s’est généreusement imposés pour mener cette oeuvre à bonne fin.

Les frais encourus pour la construction de ce chemin de fer Provincial ayant épuisé le fonds consolidé des chemins de fer, et absorbé les subsides réservés aux compagnies privés, et ayant, en outre, nécessité des emprunts temporaires sur le crédit de la province, il est devenu nécessaire de pourvoir au remboursement de ces sommes. Dans cette vue, mon gouvernement a cru devoir négocier les préliminaires d’un emprunt suffisant pour faire face aux besoins actuels, sans, toutefois, outrepasser les limites des ressources de la province. Vous apprendrez avec satisfaction que cet emprunt doit se faire dans des conditions très avantageuses, et vous serez appelés à lui donner votre approbation.

La province a contracté des obligations considérables, pour compléter les grandes améliorations qu’elle a cru devoir entreprendre pour s’assurer, dans la Confédération, une position en rapport avec son importance politique. C’est un devoir national pour tout bon citoyen de travailler d’un commun accord, pour faire face à ces obligations et conserver intact le crédit de la province. J’ai le ferme espoir que vous donnerez à mon gouvernement une assistance loyale pour accomplir cette tâche.

La constitution ayant restreint dans des limites assez étroites nos sources de revenus, il nous importe de veiller, avec le plus grand soin, à l’économie dans les dépenses publiques et à la perception active de ce qui revient au Trésor, si l’on veut arriver à équilibrer le budget des recettes et des dépenses.

La dette au fonds d’emprunt municipal s’est accrue, depuis plusieurs années dans de grandes proportions. Une mesure vous sera soumise pour régler cette dette de manière à faire bénéficier le Trésor, tout en ayant égard aux exigences de la position des diverses municipalités intéressées.

Vous aurez à vous occuper des réformes à faire à l’acte des licences et d’un projet de loi, ayant pour objet de faire contribuer les bureaux publics au revers de la province.

L’acte concernant les asiles d’aliénés, en rapport avec les dépenses qui autorise, requiert des amendements et vous aurez à vous occuper de cette question.

Des modifications sont requises dans la législation qui régit nos mines, tant au point de vue du revenu public, que des facilités à donner au développement de cette importante industrie.

La refonte de l’acte des chemins de fer de la Province, dans un but d’assimilation avec l’acte des chemins de fer de la puissance, est d’une haute importance et une loi vous sera soumise à cet effet.

La consolidation des lois qui concernent l’éducation et l’agriculture, sont des sujets sur lesquels vous serez consultés dans le cours de cette session.

Vous serez appelés à considérer des projets de loi, concernant la refonte des statuts de la province, les modifications à faire à la constitution de la Cour Supérieure et de la Cour du Banc de la Reine, et pour l’emploi des prisonniers détenus dans les prisons communes des différents districts de la province.

Messieurs de l’Assemblée législative,

Les comptes publics de la dernière année fiscale, ainsi qu’un état complet des recettes et des dépenses pour l’année courante, vous seront soumis.

Les estimés pour l’exercice fiscal de l’année prochaine seront également déposés devant la Chambre pour votre approbation. Ces estimées ont été préparés avec toute l’économie que peut permettre l’efficacité du service public.

Les subsides nécessaires au service du gouvernement de Sa Majesté vous seront demandés.

Il ne me reste plus qu’à vous prier de mettre dans l’accomplissement des devoirs importants qui vous incombent, le zèle, la sagesse et le patriotisme que le pays doit attendre de vous ; et je supplie Dieu de guider vos conseils et d’accorder les meilleures faveurs à notre peuple.

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