Conférences de presse (1994-1995)

Conférences de presse

[QParizeau19941206cp] [(Onze heures vingt-deux minutes)]
[M. Parizeau:] Mesdames et messieurs, c’est avec beaucoup de bonheur et conscient d’un grand sens de la continuité des choses que, ce matin, j’ai déposé à l’Assemblée nationale un avant-projet de loi intitulé «Loi sur la souveraineté du Québec».
Cet avant-projet de loi, à l’article 1, dit: «Le Québec est un pays souverain» et il décrit, dans 15 ou 16 articles, comment ça va se faire, de façon sans doute succincte mais assez précise. Et puis, à l’article 16, l’avant-dernier, cet avant-projet de loi dit: «La présente loi entre en vigueur un an après son approbation par référendum», à moins que l’Assemblée nationale ne fixe une date antérieure. Et, à l’article 17, le dernier article, on y lit: «La présente loi est soumise à la consultation populaire. Elle ne peut entrer en vigueur que si une majorité des voix exprimées par les électeurs, lors d’un référendum tenu conformément à la Loi sur la consultation populaire, s’est prononcée en faveur de la question suivante. La question référendaire est dans le texte et cette question c’est: «Êtes-vous en faveur de la loi adoptée par l’Assemblée nationale déclarant la souveraineté du Québec? Oui ou non?» Question tout à fait claire, tout à fait simple.
Pourquoi un avant-projet de loi et non pas un projet de loi? Pour deux raisons. D’abord, la souveraineté c’est quelque chose qui dépasse un parti politique. Ça appartient à tout un peuple et, dans ces conditions, il faut – et c’est ce que nous allons faire – nous assurer que le plus grand nombre de Québécois possible puissent participer à la discussion de ce projet. Nous allons avoir, nous allons tenir des commissions dans toutes les régions du Québec, et qui vont circuler d’une ville à l’autre, rencontrer le plus grand nombre de Québécois et les inciter à nous dire comment ils voient les choses.
Par exemple, il y a, sur la protection des droits traditionnels des anglophones, des choses qu’on peut faire. Je suis certain qu’il va y avoir des anglophones ou non qui vont venir dire: Nous, on verrait ça différemment, on en voudrait davantage. Et c’est très bien; qu’on vienne en discuter. Il y a là une amorce de définition du droit des peuples autochtones à se gouverner. Mais, parlons-en ! Discutons en !
Sur des choses plus techniques encore, on dit, dans ce texte de loi: La monnaie canadienne va être la monnaie du Québec. On sait bien qu’il y en a qui disent, à certains moments: On préférerait que ce soit le dollar américain. Moi, je ne pense pas que ça puisse se faire. Mais, enfin, s’il y a des gens qui veulent venir exprimer ce point de vue, il faut qu’ils le fassent. C’est en confrontant tous nos points de vue que ce qui deviendra la Loi de la souveraineté du Québec reflètera vraiment ce que les gens pensent et ce qu’ils veulent.
C’est encore plus net, cette intention, quand on voit le préambule à cet avant-projet de loi et ce qui sera le préambule de la Loi sur la souveraineté. Regardez, la page est blanche. Il n’y a rien dedans. Il y a simplement: Préambule et déclaration de souveraineté. C’est là, vous voyez, où les Américains, dans la déclaration de leur indépendance, commencent par: [«We, the people…»], «Nous, le peuple…». Et nous, on voudrait que les Québécois participent à la rédaction de ce préambule.
On dit ceci, en bas, en note, en bas de la page blanche: Cette déclaration de souveraineté sera rédigée sur la base des suggestions qui seront faites lors du processus d’information et de participation qui aura lieu sur l’avant-projet de loi. Elle énoncera les valeurs fondamentales et les objectifs principaux que veut se donner la nation québécoise lorsqu’elle aura acquis le pouvoir exclusif de faire toutes ses lois, de percevoir tous ses impôts et de conclure tous ses traités. Nous allons, cette déclaration de souveraineté, la faire ensemble.
Ces commissions régionales, je souhaite qu’on y participe, en un certain sens, quelles que soient ses options partisanes fondamentales. Il y en a qui peuvent se dire: Mais, moi, puisque je suis fédéraliste, pourquoi je participerais à ça? Mais, parce que c’est normal qu’on participe tous à la discussion démocratique de l’avenir d’un peuple. Mais quand il s’agissait de transformer le Canada, ce qui a donné lieu à Charlottetown, par exemple, ou à l’accord sur Meech, eh bien, les souverainistes, à l’Assemblée nationale, ont participé à toutes les discussions, à tous les comités, à toutes les études, à toutes les enquêtes, de la même façon.
Je dis à tous ceux qui se sentent plutôt fédéralistes, qui ont des convictions de cet ordre: Venez, on va discuter de tout ça. Il n’y a pas d’exclusive. Souvenons-nous que la souveraineté, c’est bien plus grand qu’un parti politique.
Quand ce travail de participation aura été fait, tout ce qu’on aura ramassé comme suggestions, comme propositions va revenir à la commission des institutions, qui est une commission parlementaire formée de députés des deux côtés et de M. Dumont, et, la, on va voir comment on transforme l’avant-projet de loi en projet de loi. C’est là que ce qui est venu du public d’un peu partout, des Québécois eux mêmes va se traduire. On va rédiger, à partir de ça, la déclaration de souveraineté et, alors, dans les 17 articles, on va voir si on en ajoute, si on en transforme, si on précise certaines choses ou on modifie d’autres choses.

Là, ça deviendra un projet de loi, qui sera présenté à l’Assemblée nationale et qui va être voté par l’Assemblée nationale, pas adopté. Comme je le disais tout à l’heure, c’est un peuple du Québec qui va adopter cette loi-là. Nous, les députés, on va voter en Chambre. C’est le public qui, dans ces consultations régionales, aura déjà, en un certain sens, joué le rôle de député qui, là, vont revenir à l’occasion du référendum, c’est le peuple du Québec qui va adopter cette loi.

Ça va être une période remarquablement intéressante de notre histoire. Cette année.1995, je pense que nous ne l’oublierons pas. Il est rare, dans l’histoire d’un peuple – certains peuples ne l’ont jamais connu – que tous sont conviés, ensemble, à définir leur avenir. Merci.
Questions?

[M. Girard (Normand): M. le premier ministre, j’aurais une question. Est-ce que vous avez fixé un temps maximum pour la durée des consultations régionales, et est-ce que vous avez établi un budget pour la tenue de ces consultations régionales?]

[M. Parizeau:] Oui. Il y a un moment, un temps fort. Je ne peux pas dire que c’est limitatif, mais c’est un temps fort, parce que, vous comprenez, on ne peut pas faire siéger ces commissions régionales sans que tous les députés, soit à un endroit ou à un autre, participent à ça. Donc, on ne peut pas faire siéger l’Assemblée nationale pendant le même temps. Ce qui veut dire, donc, qu’il va y avoir un temps entre, mettons, fin janvier, début février et le milieu de mars, là où la session reprend. Il est clair que, pour ces commissions régionales, ça va être le moment fort. Ça ne veut pas dire que ça ne commencera pas un peu avant ou que ça ne se terminera pas un peu après. Mais là, au fond, tous les députés, fédéraux et provinciaux, d’ailleurs, parce que, comprenons-nous bien, tous les députés du Québec vont être invités à participer à ces consultations régionales, d’Ottawa comme de Québec, et quels que soient les partis politiques. Tout le monde est convié.
Tout le monde ne sera pas convié à chacune des 15 ou 16 commissions régionales, mais dans chaque région, tous ceux qui représentent le peuple seront là. Ils ne seront pas tout seuls, il y aura d’autres gens, mais ils seront là.
Pour ce qui a trait au budget, j’ai demandé que l’on mette les crédits supplémentaires no. 1, comme chaque année, qui vont être présentés à l’Assemblée nationale. Alors, dans les crédits de l’exécutif, il y a 2000000 $ qui ont été placés dans ces crédits.

[M. Girard (Normand): M. le premier ministre, j’aurais une autre question, qui découle de la réponse que vous avez donnée à ma première question. Est-ce que les commissions régionales seront formées par la commission parlementaire de l’Assemblée nationale? Autrement dit, est ce que ce seront des émanations directes de l’Assemblée nationale, ou si ce seront des commissions ad hoc qui pourront être formées par un parti ou par l’autre représenté à l’Assemblée nationale?]

[M. Parizeau:] Une motion a été déposée, j’ai déposé une motion, aujourd’hui, au nom de M. Chevrette, qui demande à la commission des institutions de se réunir et de déterminer le meilleur moyen, justement, de faciliter l’apparition de ces commissions régionales. D’ores et déjà, je peux répondre, cependant, sur une chose spécifique: elles seront créées en vertu d’un décret, et la commission des institutions nous éclairera dans les jours qui viennent sur la façon de faciliter ça, de les organiser, de les mettre au point.
D’autre part, bien sûr, avant que ce travail ne commence, je veux consulter les autres partis à l’Assemblée nationale, je veux consulter M. Johnson et M. Dumont, bien sûr.
[M. Girard (Normand): Je vous remercie.

M. Brunet (Claude): M. Parizeau, jusqu’où êtes-vous prêt à aller dans ce processus de consultation? Est-ce que vous pourriez revoir la définition même de la souveraineté?]

[M. Parizeau:] À première vue, je ne – comment dire – ça me paraît bien hypothétique, simplement parce que c’est la seule chose, au fond, sur laquelle tout le monde s’entend au Québec, la définition de la souveraineté. Et quand les libéraux ont présenté la loi 150 qui prévoyait un référendum sur la souveraineté, il y a quelque temps, la définition qu’ils donnaient de la souveraineté, c’est exactement celle qu’on trouve dans le programme du Parti québécois. Et, tenez, c’est exactement la même qu’il y avait dans le rapport de la commission Bélanger-Campeau. S’il y a une chose sur laquelle on s’entend à travers le Québec, à l’heure actuelle, de part et d’autre, j’allais dire toutes forces confondues, c’est la définition de la souveraineté. On est tous d’accords là-dessus.
Alors, ça m’étonnerais, n’est-ce pas, que tout à coup une nouvelle définition apparaisse. Enfin, j’en serais très étonné, en tout cas.

[M. Brunet (Claude): Une deuxième question, si vous me permettez. Est-ce que les Québécois vont connaître le projet de constitution avant le référendum?]
[M. Parizeau:] Il y a des dispositions – comment dire – transitoires, sur le plan constitutionnel, qui doivent être, bien sûr, mises au point avant que le Québec ne devienne un pays souverain. Une constitution en bonne et due forme, pour moi, ça va prendre plus de temps que ça. On sait à quel point… On n’est pas forcés d’être aussi canadiens que les Canadiens sur le temps qu’ils prennent pour monter une constitution. Mais, même si on accélère les choses, on sait que ça prend quand même un certain temps.
Alors, il faut qu’au moment où le Québec deviendrait souverain il y ait un certain nombre de dispositions constitutionnelles transitoires satisfaisantes pour chacune des parties, parce que, dans une société, il y a toujours des groupes et des partis. Mais, quant à savoir si la constitution elle-même sera prête à temps, moi, je ne sais pas. Je le souhaite, mais j’en serais étonné.

[M. David (Michel): M. Parizeau, est-ce que, dans votre esprit, le libellé de la question est amendable?]

[M. Parizeau:] Bien, le libellé… Le problème, j’allais dire, forcément, c’est amendable au sens étymologique du terme, sauf que c’est un avant-projet de loi. Comme je l’ai dit tout à l’heure, un avant-projet de loi, il n’y a rien de coulé dans le béton là-dedans. Il reste néanmoins que tout le monde m’ a l’air de vouloir une question simple. Je ne sais pas très bien comment seraient reçues les propositions qui chercheraient à complexifier ça.
Là encore, nous ne partons pas de rien. Quand même beaucoup de gens ont exprimé beaucoup de positions. Or, tout le monde s’entend pour dire: Et surtout, il faut que la question soit claire. Eh bien, elle l’est, elle l’est.
Alors, encore une fois, sur le plan de mes intentions quant à est-ce que quelque chose peut changer dans cet avant-projet de loi, je dis: Écoutez, on s’en va dans ces discussions avec la population, avec un esprit très ouvert, ce qui ne nous empêche pas d’avoir des convictions comme parti politique. Si vous me demandez: Est-ce que, facilement, vous allez devenir fédéralistes? Je vous réponds: Il n’y a pas beaucoup de chances. Mais, quant au reste, qu’est-ce que vous voulez? Oui, consultons le plus grand nombre, discutons avec le plus grand nombre de Québécois possible, avec l’esprit ouvert et sans – comment dire – dogmatisme, sans préjugés.

[M. David (Michel): Si je peux me permettre une sous-question. Vous avez dit que votre question est tout à fait claire, tout à fait simple. Est-ce qu’elle est, dans votre esprit, aussi claire, simple et neutre que celle que vous avez répétée au moins 200 fois, à savoir: Est-ce que vous voulez que le Québec devienne un pays souverain en date de, oui ou non?]
[M. Parizeau:] Oui. Oui, parce que, oui, cet avant-projet de loi commence par l’article suivant: «1. Le Québec est un pays souverain.». Ça ne peut pas être plus clair.
Et la question, c’est: «Êtes-vous en faveur de la loi adoptée par l’Assemblée nationale déclarant la souveraineté du Québec? Oui ou non?»
Écoutez ! Ça ne peut pas être plus clair que ça.

[M. Thivierge (Jean): M. Parizeau.]

[M. Parizeau:] Enfin, s’il y en a qui trouvent le moyen d’être plus clairs encore, moi, je suis prêt à discuter de ça. Mais, enfin, disons que ça me parait clair. Oui?

[M. Thivierge (Jean): M. Parizeau, si vous permettez. M. Johnson a semblé un peu mal réagir, ce matin, en prenant connaissance de votre proposition. S’il arrivait que, du c8té fédéraliste, on interprète tout le processus que vous mettez en marche comme étant un vaste piège dans lequel ils ne veulent pas tomber, donc qu’ils ne participent pas à tout ça, est-ce que ça n’enlèverait pas beaucoup de légitimité à tout le processus?]

[M. Parizeau:] N’anticipons pas. Laissons les esprits réfléchis réfléchir un peu. Moi, je ne voudrais pas dire quoi que ce soit aujourd’hui qui, de quelque façon que ce soit, implique des soupçons, de la rancoeur ou quoi que ce soit. L’opération qui s’amorce est trop belle, trop importante aussi pour que, par des paroles malencontreuses, on préjuge de quoi que ce soit. Dans mon esprit, nous avançons tous dans cette voie-là avec nos convictions, sans doute, mais ensemble. Et, on va voir, dans les jours qui viennent, comment cela est reçu.
[M. Thivierge (Jean): Si vous me permettez une deuxième question, M. Parizeau, le premier article de l’avant-projet de loi, Québec devient un pays souverain, mais le deuxième article porte sur l’association. Depuis votre discours inaugural, en particulier, il y avait cet élément-là qui est réapparu, le terme d’association c’était un terme qui était un peu disparu du vocabulaire de votre formation politique depuis un certain temps. Le fait d’insister, de mettre comme deuxième article cette nécessité de conclure une association avec le Canada, est-ce que ça ne risque pas de devenir un peu un problème de la même nature qui s’était posé en 1980 où les souverainistes s’étaient liés à la nécessité de conclure une entente d’association avec le Canada?]

[M. Parizeau:] Vous aurez noté que le mot utilisé à l’article 2: «…le gouvernement est autorisé à conclure avec le gouvernement du Canada un accord consacrant le maintien d’une association économique.» Pas une vaste négociation pour changer ou créer une association économique ou quoi que ce soit. Seulement maintenir ce qui est en place. J’espère que, dans l’avenir, on pourra approfondir ces rapports, cet espace économique canadien, comme j’espère que, dans l’avenir, on va approfondir l’espace économique avec les États-Unis, avec le Mexique, que l’ALENA va se développer…
Mais, là, présenté comme ça, ça correspond essentiellement aux voeux exprimés tellement clairement par tous ceux qui se sont présentés devant la commission Bélanger-Campeau, quelles que soient leurs orientations politiques fondamentales. On maintient l’espace économique canadien. Voilà. C’est tout. C’est tout.
À une autre époque, certains pensaient qu’il fallait renégocier l’espace économique. Je ne crois pas. Je ne crois pas. Je crois que la leçon des quelques dernières années est de plus en plus comprise. Elle a été comprise notamment en Europe et depuis longtemps. Ici, elle commence de plus en plus, en Amérique du Nord, à être comprise. C’est-à-dire qu’on peut être un pays relativement petit par sa population, tout à fait souverain, indépendant, et prospérer et se développer à la condition d’appartenir à un grand espace économique, à un grand marché économique. C’est ça que ça reflète. C’est ça que ça reflète, et rien de plus. Il faut comprendre: C’est la grande leçon du XXe siècle, ça.
En 1980, ce n’était pas encore tellement évident que c’est vers là qu’on se dirigeait. Mais, regardez comme c’est intéressant tous ces votes qui se prennent en Europe où certains petits pays disent: Est-ce qu’on rentre dans l’Union européenne? Par référendum, ils disent: Oui. D’autres disent: Non. Mais tous appartiennent à la communauté
économique européenne. Voilà ! Nous, on dit: On veut avoir notre pays. Et, ce pays qu’on veut avoir, et bien, on veut qu’il se situe… Après tout, on a tellement travaillé pour le libre-échange. Tout le monde le sait, sans les Québécois, jamais l’entente canado-américaine de libre-échange n’aurait été passée. Nous, on dit qu’on continue dans cette voie-là. L’espace économique canadien, on le garde. On le maintient. Est-ce qu’on est d’accord avec l’ALENA? Oui, on est d’accord. On a assez travaillé pour le faire passer. On est d’accord avec l’ALENA. Oui, nous sommes libres-échangistes. Pour nous, c’est une condition de prospérité.

[M. Dougherty (Revin): M. Parizeau, Kevin Dougherty, Financial Post. C’est un peu pour faire suite à la question précédente. Dans votre avant-projet de loi, il y a beaucoup de matière qui touche à l’économie, comme l’association, comme le dollar canadien, comme le partage de la dette canadienne. Mais, je me demande… Vous avez signalé tantôt, par exemple, que si quelqu’un veut que ce soit plutôt le dollar américain que le dollar canadien, vous allez vous faire entendre. Mais est-ce que vous allez dire que ce serait peut-être ça dans un projet de loi éventuel? Ça veut dire qu’un Québec souverain va utiliser le dollar américain? Et aussi, juste pour préciser, est-ce que ça veut dire que… Ça dit maintenant que le gouvernement du Québec peut conclure avec le gouvernement du Canada une entente. Estce qu’il va conclure? Est-ce que c’est une priorité? Est-ce que vous pensez que c’est indispensable, même?]
[M. Parizeau:] Commençons par la fin. Oui, c’est indispensable que nous vivions à notre époque. Oui, c’est indispensable que le Québec soit membre du GATT, soit membre de 1’ALENA, que l’espace économique canadien, la liberté de circulation des capitaux, des biens, des services, des personnes, que tout ça continue, vous comprenez? Et s’il y a quelqu’un qui n’aime pas ça, bien qu’il se présente. Qu’il nous dise: Non, non, non. Nous, on ne veut pas le maintien de la libre circulation. Je ne veux pas dire que ça va me convaincre. Mais, des fois, des points de vue comme ceux-là doivent s’exprimer.
Vous parliez de la monnaie. Ça prendrait pas mal de choses pour m’enlever de la tête qu’il faut le dollar canadien. Mais, il reste néanmoins que, de temps à autre, périodiquement, on voit des gens qui disent: Moi, je voudrais faire la démonstration que ce serait mieux le dollar américain. S’ils veulent faire ça. On n’a jamais été capables de leur offrir vraiment une tribune, à ces gens-là, un endroit où ils peuvent discuter de ces choses. Ce n’est pas que ça nous amène nécessairement à changer de point de vue dès qu’il y a un point de vue différent du nôtre mais, on peut tout de même leur donner l’occasion de discuter de ça, de présenter leur point de vue.
À l’heure actuelle, quand quelqu’un dit – comment dire – ne se situe pas dans ce qui est devenu une sorte d’orthodoxie, immédiatement, ça fait des titres énormes dans les journaux, comme si, tout à coup, il avait fait quelque chose de croche. Mais, non ! Mais, non ! Que tout ça soit aéré, que les gens en parlent, qu’on en discute, que les points de vue se confrontent. C’est la maturité d’un peuple devant une décision, c’est par la qualité des discussions qu’il peut entretenir entre ses membres que ça se voit et que ça se marque.
À l’heure actuelle, nous avons trop réfléchi tous ensemble à ces questions pour ne pas être capables de nous en parler en adultes. C’est ça que nous allons faire.

[M. Dougherty (Kevin): Mais, c’est-à-dire que vous êtes un peu… Il y a peut-être des arguments qui pourraient convaincre le gouvernement d’abandonner l’idée de garder le dollar canadien.]

[M. Parizeau:] Moi, pour le moment, je n’en vois pas.
[M. Dougherty (Kevin): Mais, qui va décider, finalement?]
[ M. Parizeau:] Ah, vous savez, le Québec a un gouvernement.
[M. Dougherty (Kevin): Bon.]

[M. Parizeau:] Oui. Forcément. Comment dire? Ce n’est pas… Il y a toujours un moment donné à décider de certaines choses.

[Une voix: M. Parizeau, est-ce que vous pouvez m’expliquer pourquoi vous avez décidé de faire voter les Québécois sur une loi plutôt que simplement sur l’idée que vous avez énoncée plusieurs fois, l’idée même de faire du Québec un pays souverain? Pourquoi inviter les Québécois à voter sur une loi?]
[M. Parizeau:] Parce que, très souvent, on nous dit: Peut-être qu’on serait pour mais on voudrait savoir si telle chose… Comment ça va se faire, ça, qu’est-ce qui va se produire dans tel autre cas?
Je me souviens encore d’une émission, avec M. Mongrain; on recevait des questions des auditeurs et, là, tout à coup, une question me vient – je n’avais jamais pensé que ça puisse être une question, mais c’en était une et parfaitement valable – quelqu’un disait: Si on n’est plus dans le canada, comme le Code criminel est canadien, est-ce que ça veut dire qu’il n’y a plus de Code criminel chez nous? Bonne question. Vous trouvez, sur la continuité des lois dans ce texte de lois, un paragraphe là-dessus.
Les citoyens ont un certain nombre d’interrogations sur la façon dont ça va se passer. Et dans la mesure où on les amène à voter sur un texte de loi, bien, ils vont beaucoup mieux comprendre à quoi ils s’engagent ou, comment dire, pourquoi ils votent oui plutôt que non.
Je ne l’ai pas signalé, d’ailleurs, mais c’est important. Ça, évidemment, ça va être distribué à toutes les portes, on se comprend bien, partout; il va y en avoir des millions de copies qui vont circuler; tout le monde va recevoir ça.
Puis ensuite, quand il y aura un projet de loi, quand ça va avoir été transformé en projet de loi, ça va être pareil. C’est un grand exercice démocratique auquel on convie et, puisqu’il y a des interrogations, bien répondons aux interrogations. Ce sont des interrogations légitimes; c’est pour ça que c’est un avant-projet de loi, puis bientôt un projet de loi.
[M. Vanne (Michel): Justement, en parlant d’exercice démocratique, vous invitiez tout à l’heure les fédéralistes à venir discuter dans le cadre des consultations qui seront menées l’an prochain; cependant, l’avant-projet de loi est assez clair: il n’y a pas d’autre conclusion possible que la souveraineté du Québec. Alors, vous ne pensez pas que les fédéralistes n’auront pas l’impression d’aller perdre leur temps, d’aller participer à des discussions là-dessus si vraiment, pour eux, la souveraineté du Québec n’est pas acceptable?]
[M. Parizeau:] Et pourtant, nous avons participé, nous les souverainistes, à combien d’années de Meech, de Charlottetown ! Ça fait partie de la vie démocratique de participer à la discussion de ce qui se passe; c’est même la responsabilité des partis politiques. Écoutez, que ça a occupé à l’Assemblée nationale, en commissions parlementaires, en débats publics pour aboutir, comme on le sait, à un rejet. Et pourtant, nous avons, nous les souverainistes, participé à chaque étape de ça, à chaque étape.

[M. venue (Michel): Quelle sera la contribution des fédéralistes à ce moment-là à cette discussion, puisqu’ils ne pourront pas changer la conclusion de l’avant-projet de loi?]
[M. Parizeau:] Ah bon, il y a une foule de modalités, il y a une foule de modalités. Vous l’avez vu tout à coup à l’Assemblée nationale ce matin quand on en était à un moment donné rendus à discuter de la définition même de la souveraineté. Il y a eu un moment, à l’Assemblée nationale, assez étonnant – et je pense que tout le monde ne s’en est pas rendu compte en même temps – tout à coup, des gens qui disaient: La question devrait comporter le mot «séparatisme» ou «séparation». Ils ont dit: Pourquoi? Il faut qu’on parle d’un pays souverain puisque nous sommes tous d’accord sur la définition de la souveraineté. Le mot le plus clair, c’est «souverain». Et vous avez vu, il y a eu comme un moment de grâce à l’Assemblée nationale. En fait, un des articles a été adopté ce matin, celui de la définition. C’est ça, la collaboration des partis.

[M. McPherson: M. Parizeau, the avant-projet de loi that was tabled today provides for negotiations with the rest of Canada on a number of subjects. However, a Québec law does not bind the government of Canada or the governments of the other provinces. Additionally, the period that is provided in the avant-projet de loi, a year or less than a year, does not leave very much time for the governments of the rest of Canada to obtain a negotiating mandate, little (?) undertake serious negotiations. What do you intend to do if, on the date that supposing that there is a yes (?) in the referundum and the date for the declaration of Québec sovereignty arrives and there is no agreement on the part of the rest of the country and the government of Ottawa, the federal government in particular, says that «we do not recognize or we will not recognize Québec as a sovereign country nor that we will continue to enforce our laws on the territory of Québec and collect taxes on the territory of Québec», what will you do at that point?
M. Parizeau: Will that happen? Let me, in French… Unfortunately, I have not the English translation… An extract from the memoirs In the Lions’ Den of the present prime minister of Canada. ] «Je me souviens, dit-il, avoir participé à une assemblée tenue à Alma, début des années soixante-dix. À un moment donné, un libéral se leva et me dit: « Chrétien, quand diras-tu aux séparatistes qu’il n’y aura jamais d’indépendance, que le gouvernement fédéral ne permettra jamais que cela se produise? Si les gens du Texas voulaient se séparer des États-Unis, les Marines seraient immédiatement dépêchés pour occuper l’État. » L’auditoire, bien sûr composé en majorité de fédéralistes, se mit à applaudir à tout rompre. Je n’étais pas d’accord, dit M. Chrétien.» Et je réponds: «Nous parions sur la démocratie. Nous convaincrons les gens qu’ils doivent rester dans le Canada et nous gagnerons. Si nous perdons, nous respecterons le voeu des Québécois et nous accepterons la séparation. Vous voyez, c’est ça.
Le peuple du Québec a à se prononcer, à dire ce qu’il veut, et quand un peuple s’est prononcé, c’est très fort, c’est très fort. Monter, là, tout à coup, des scénarios: Et si, dans un an ou dans deux ans… Vous voyez, il est très curieux que l’interrogation que vous…
[Sorry, I will revert to English. It is an odd thing that the question that you have asked was not asked from Bélanger-Campeau when they evoked the perspective of a referendum on sovereignty and concluded: «And Québec viii become a sovereign nation one year day for day after the date of the referendum.» Saine thing will Bill 150, that the Liberals had adopted in this House: Québec would become a sovereign nation one year day for day… Well, frankly, we say just about the saine thing here, huh. So, they have no particular reason. Considering the legitimacy of what we are embarking in, considering the will of the people, I think things will evolve as they should and that the time period envisaged in that law are realistic and appropriate.

M. MacKenzie (Robert): Mr. Premier, since all Quebeckers viii vote on this fundamental text, do you tie the fate of your government to the result?

M. Parizeau: No. It would be rather odd to do this. We were not elected for a term that would last until the referendum; we were elected for a normal terni, and we have, beside a referendum, a few other tasks including getting Québec out of a lingering recession.

M. McKenzie (Francis): …question if I may. Can you say this morning in which season of the year 1995 this referendum viii take place?
M. Parizeau: Ha, ha, ha ! Mr. McKenzie, you have understood everything. You see, in that bill there is the definition, the objective, the question, not the date. And I still keep the date within what I have called the 1995 horizon.

M. Prier (Alan): Mr. Premier, the first words that Mr. Johnson spoke in the House this morning were that it is a sad day for democracy in Québec. How do you respond to their comment?

M. Parizeau: I do not. I think it is the very expression of a profound democratic feeling that permeates our political life in Québec and of all parties and, really, of all walks of life. This is the sort of thing that has been envisaged for so long in our Law of referendum in Québec. We have had one, as you know, for several years. It is a good law and we practice it, and I think we practice it well. That is really my only response.

M. Prier (Alan): A second question, if I may. Why would federalists, if they are going to be true to their own principals, participate in this exercise whose aim, clearly, is to define and facilitate Québec sovereignty? And if they do not, do you not worry that the exercise itself of consultation would become a partisan or a very onesided affair?
M. Parizeau: These regional commissions will be the expression of more than the principle, more than the idea. The reality is that sovereignty is much more than just the cause defended by a political party…
I think the Liberals, I would not say the Liberals, the federalists will help by simply pitting their convictions in their brains without hers, with those of sovereinists in front of Quebeckers who want to know, who want to determine where they should go. And for this, they must have a clear choice. And that is in sole political parties, not only from Québec but from Ottawa. Federal parties should participate in that exercise. People have a right to see how their representatives react and what they suggest and what they propose. That is the essence of democratic life. And in case you will consider that as a bit self-serving, during the years that were in Québec and in this House used to discuss at length at nauseam of Meech, the Meech Accord, and then Charlottetown. The sovereignists, and that was supposed to change the functioning of the federal system, the
sovereignists participated in that exercise at every term, in every commission. Always, always based on the saure idea: People must know, must be as clear as possible about the issues. And the only way for the people to understand what these issues is about is for the representatives from all sides. This is what we are going to show you, our position, our vision, our interpretation of things. That is the essence of what our whole system is about.

M. Gauthier (Noël): Premier, one small clarification regarding the continuity of law section, article 14. In that article, you say: Until the coming into force of the new constitution provided for in section 3, the laws, rules and conventions which govern the internai Constitution of Québec and access to English language schools shall remain in force. Now, I assume that, in the new constitution, you intend to garantee access to English language schools, but what I wanted to know was wether you adopt the formula of along religious lines or linguistic lines?

M. Parizeau: Of linguistic lines.

M. Branswell (Jack): Mr. Parizeau, a couple of questions here. I am just wondering if you could, maybe, say what kind of understanding do you want Quebeckers to coure away today with their future in this process? What would you like somebody sitting in home tonight to be thinking in terms of their future and how they can make… Have some impact?

M. Parizeau: Well, you know, maybe what I would like most for people to say: They said that they would give us the real choice about our future and they are delivering the goods. That is what they are doing. There is so much miscrossed about politicians in our society nowadays that I hope everyone will see as refreshing the fact that we had promised that we would do that, we had said we would do it, we said we would propose that democratically. Look. That is it. I hope it is as democratic as possible. I hope people will just look at us, and not only from one political party, that all the politicians will say: Well, they are clear about what they expect from us the citizens to decide. Yes. I hope people will find that refreshing tonight.

M. Branswell (Jack): What do you say today, perhaps, also to Canadians in the rest of Canada who, perhaps, may be feeling frustrated that this whole process has been defined without any real input for them? What would you say to them today?

M. Parizeau: About who? I am sorry.
M. Branswell (Jack): To Canadians in the rest of Canada who may be feeling frustrated of not having any role to play in this law?

M. Parizeau: I think I should say to Canadians of the provinces: You are looking at a people of whom, often in the past, you have asked: What do Quebeckers want? Well, now they are going to determine that. And they are going to do it with the only way they know: Their votes. . . . through that episode of my Toronto message, you know: Respect each other.
What Québec wants, Québec will say in 1995. Merci. Thank you.

(Fin à 12 h 8)]

[QParizeau19940317cp]
[(Seize heures dix-sept minutes)]
[M. Parizeau:] Je voudrais vous remercier d’être ici après le discours inaugural. Et voici pourquoi je le fais. Et ça, il est important, je pense, qu’on le sache dans le public. En faisant un discours inaugural un jeudi après-midi, on s’assure, en vertu des règles parlementaires, que l’Opposition ne pourra pas réagir avant le mardi suivant en Chambre. Et, dans ces conditions, je ne peux, dans les heures et les quelques jours qui suivent le discours inaugural, que faire appel à vous. Alors, je vous remercie d’être là. La Chambre ne m’offre pas la possibilité de présenter mon point de vue en temps utile.
Nous avons assisté cet après-midi à un exercice cynique, électoraliste et, ce qui est un peu plus surprenant, incompétent. Je vais essayer de l’exprimer de la façon suivante. Le premier ministre se cherche, ces jours-ci, des expressions ou des images qu’il pense être populaires. Par exemple, les emplois. Je vais commencer par ça. Je parlerai ensuite des soins de santé, puis je dirai quelques mots du constitutionnel.
Et, bien sur, les gens sont inquiets. Beaucoup de gens cherchent un emploi. Il y a 840000 adultes au Québec qui sont ou bien sur l’assurance-chômage ou sur l’aide sociale. Donc, il faut parler d’emplois. Bon, encore faut-il qu’il ait la manière. M. Johnson a présidé d’abord à un exercice où il s’est trompé du simple au double dans les emplois qu’il avait l’intention, disait-il, de créer dans les années qui viennent. Ça a commencé par se présenter par 200000; ensuite, c’est venu 400000; ensuite, ça n’avait pas d’importance; ensuite, on revient. Je comprends que son ministre de l’Industrie et du Commerce cherchait à établir les 400000 il y a quelques minutes en «scrum» avec vous. Bon. Enfin. Soit ! Ça démontrait tout le sérieux qu’on avait apporté à l’opération emplois.
Plus que ça, on a commencé à recourir, pour illustrer l’emploi que l’on avait créé, à ce qui était franchement de la supercherie. Le premier ministre est revenu d’ailleurs sur cette supercherie dans son message inaugural. L’annonce de SM 3, comme travaux d’Hydro-Québec, comme démarrage des travaux en 1994 et puis, la ligne de transmission entre Lévis et Windsor, entre Saint-Jean-Chrysostome et Windsor, ces travaux, on le sait maintenant depuis quelques jours, après qu’ils aient été annoncés par le premier ministre, on sait que ces travaux étaient dans la programmation d’Hydro-Québec pour 1994.
Et donc, si on se pose la question: est-ce qu’Hydro-Québec va créer plus d’emplois en 1994 qu’en 1993 ou moins? la réponse devient claire: Hydro-Québec va en créer moins en 1994. Hydro-Québec a investi à peu près 4500000000 $ en 1993, 4400000000 $ et annonce 3900000000 $ pour 1994, 500000000 $ de moins. Ça fait à peu près 3000 emplois pour ce genre de travaux-là. Il y aura donc à peu près 3000 emplois créés par Hydro de moins en 1994 qu’en 1993.
Alors là, commencer à annoncer dans le 3900000000 $ toutes espèces de choses, c’est de la supercherie, parce qu’en fait, le volume de travail à Hydro, cette année, est inférieur à celui de l’année dernière.

Bon ! Aujourd’hui, on recommence. Je vous cite ça au texte parce que je souhaiterais vivement que la copie non révisée des galées – on a l’enregistrement aussi, d’ailleurs, soit dit en passant – du discours inaugural ne soit pas modifiée. Voici ce que dit le premier ministre: «Heureusement, les intentions d’investissement du secteur privé, à près de 20 % d’augmentation par rapport à l’année précédente sont, encore là, un signe d’espoir et de confiance.» Un instant ! Les intentions d’investissement, qui est fait dans toutes les provinces canadiennes par Statistique Canada, qui ont été publiées il y a trois semaines, c’est assez récent, révèlent, c’est que les investissements privés au Québec vont augmenter, en 1994, de 2,6 %. Pas 20 %, mais 2,5 %.
Savez-vous quelle différence ça fait, ça? Ça fait une différence de 3000000000 $. Excusez du peu, 3000000000 $. S’il disait que ça augmenterait de 20 %, ça serait 3000000000 $ de plus que ce que vaut 2,6 %. 3000000000 $ d’erreur du premier ministre, c’est deux fois le programme total d’infrastructures fédérales, provinciales, municipales, au Québec, pour trois ans. Vous vous souvenez? C’est 1600000000 $, ce programme d’infrastructures municipales.
L’erreur du premier ministre, c’est deux fois ça, c’est-à-dire qu’il s’est trompé d’à peu près l’équivalent en emplois-année, c’est quelque part là, dépendant un peu de la nature des travaux, entre 35000 et 40000 jobs dont il s’est trompé en faisant son erreur. Ça n’a pas de sens. Il faut quand même avoir un peu le respect des gens. C’est très joli de vouloir se faire réélire mais, enfin, quand même ! Quand même !
Les soins de santé. Là aussi, on sait bien que les gens sont assez inquiets par les services de santé, par leur avenir, par la
général, mais M. Johnson en particulier, a tout fait, pendant des mois, pour énerver les Québécois quant à l’avenir de leurs services de santé. En collaboration étroite avec le ministre de la Santé de l’époque, on a tout fait, d’abord dans ce document «Vivre selon ses moyens», pour convaincre les Québécois que leurs services de santé coûtaient trop cher et qu’il faudrait faire quelque chose, qu’il faudrait désassurer certains services, qu’on serait obligés de recourir à des tickets modérateurs ou à des coûts à l’usager, et que si on ne faisait pas quelque chose de radical, l’importance des
services, du coût des services de santé dans le budget serait qu’il faudrait éliminer d’autres services à la, population.
On a fait très peur au gens, tellement peur qu’à un moment donné le ministre de la Santé de l’époque en a rajouté pas mal fort en suggérant même de désassurer les services de fibrose kystique en soins externes ou de mettre des tickets modérateurs sur la chimiothérapie.
On s’en souvient. C’est allé jusque-là. Ils ont été même tentés par l’horrible dans cette espèce de psychodrame qu’ils avaient monté.
Et maintenant, on se dit: Puisque les élections s’en viennent – vous l’avez encore entendu aujourd’hui – puisque les élections s’en viennent, bien, tout va très bien. Le congrès libéral, en fin de semaine, cherchait même à imposer au gouvernement l’établissement d’un ticket orienteur. Manifestement, les libéraux de la base avaient cru M. Johnson, président du Conseil du trésor. Ils avaient cru M. Côté, ministre de la Santé, et ils revenaient avec leur ticket orienteur.
Mais là, le gouvernement, qui s’en va en élections, d’abord hésite, en fin de semaine, à adopter, à se ranger à l’avis de sa base, et là, le premier ministre, aujourd’hui, envoie paître son congrès, en disant: Il n’y en aura pas. Mais non ! On s’en va en élections. Il n’y a pas de problème dans le financement des services.

Troisième chose, le fédéral-provincial. L’histoire de M. Johnson, dans ce domaine, commence par – au moment de son élection par acclamation comme premier ministre et comme chef du Parti libéral – I am – il le dit en anglais, donc, je le répète en anglais – a Canadian, first and foremost. Bon, c’était clair.

Ensuite, et un petit peu plus tard à Montréal, à l’occasion de cette rencontre avec le journal The Economist , il dit… Ça, ça n’a pas été très cité et, là encore, c’est en anglais, mais je le tire du journal The Globe and Mail qui l’avait reproduit intégralement ce jour-là. Et c’est M. Johnson qui parle: [«By having more powers] – en ayant plus de pouvoirs – [we would have less financial resources] – nous aurions moins de ressources financières – [This is the nature of federalism as we practice it.]» C’est la nature du fédéralisme, tel que nous le pratiquons.

Évidemment, ça, ça va très loin. Ça va très loin, puis ça explique un certain nombre de choses qui se sont passées, par exemple, la semaine dernière.
C’est une attitude, ça. Saint-Jean. Le gouvernement fédéral, dans son discours sur le budget, en annonce la fermeture. M. Johnson, M. Bourbeau ne trouvent pas ça particulièrement dommageable pour eux. Au moment où ça sort, ils font des bruits à cet effet. L’opinion publique s’enflamme. M. Johnson, alors, demande qu’on maintienne une partie, au moins, de la vocation militaire puis qu’on ajoute autre chose. Le gouvernement fédéral refuse tout ça, annonce qu’effectivement il y aura 1000 emplois directs de moins dans Saint-Jean, qu’on ferme ces services là-bas. Et il va avoir quoi? 800 ou 900 personnes aussi qui vont perdre leur emploi. C’est-à-dire que le soir du discours sur le budget, le gouvernement fédéral fermait les emplois, mais il gardait les bâtisses ouvertes. Il devait assurer le chauffage, payer les taxes. Et là, tout à coup, il dit: Mais j’ai oublié. Je ne paierai plus le chauffage. Je ne vais plus payer les taxes. Je vais refiler ça au gouvernement de Québec qui est tellement bon garçon qu’il va dire oui. Nous apprenons que Québec n’est pas très porté sur la chose. Mais, enfin, il n’a pas envoyé paître le gouvernement fédéral encore. Et le gouvernement de Québec ne s’est pas encore rendu compte que 1000 emplois fédéraux qui vont cesser de payer des impôts au Québec, ils vont les payer ailleurs: grosse perte d’argent, ça, c’est une grosse perte d’argent.

Enfin, jeudi, il s’est passé quelque chose en Chambre ici de remarquablement significatif
toujours dans le sens des deux phrases en anglais que je vous ai citées. Des bruits existent à la suite d’une déclaration de M. Axworthy que le gouvernement fédéral pourrait
toucher aux pensions de vieillesse. Vous vous en souvenez? La période de questions à Québec est antérieure d’une heure à peu près à celle qui va se produire à Ottawa. Je demande à M. Johnson s’il est prêt à demander à M. Chrétien de ne pas toucher aux pensions de vieillesse. Manifestement, M. Johnson ne veut pas gêner M. Chrétien et vous vous souviendrez comment il fait des huit sur la glace. Il refuse de répondre. Il n’a pas clairement reçu, il ne sait pas ce que M. Chrétien est en train de dire à la Chambre des communes. M. Bouchard, à la Chambre des communes demande à M. Chrétien de ne pas toucher aux pensions de vieillesse et M. Chrétien, écoutez, qui est un politicien comme bien d’autres, sait bien qu’à l’heure actuelle les ondes radiophoniques bourdonnent à Montréal de gens qui protestent contre ça. Il ne prend pas de risque et il répond à M. Bouchard: Je ne toucherai pas aux pensions de vieillesse et M. Johnson reste, si vous me passez l’expression, un peu les doigts dans le nez. Il n’avait pas eu le courage. Il pensait que, peut-être, M. Chrétien avec lequel il a toutes ces ententes, toutes ces acceptations ferait des modifications aux pensions de vieillesse.

La glissade était en train de s’accentuer et M. Axworthy avait donné un préavis, a donné un préavis qu’il reprend le contrôle de toute une série d’opérations reliées à la sécurité du revenu dans les provinces. Il n’y a pas eu de manifestation ici à Québec du gouvernement contre ça.

M. Anderson, le ministre du Revenu, a dit qu’il prépare un programme pour une taxe de vente unique. On va sortir le Québec de la taxe de vente. Il n’y a pas eu de protestations. Mais là trop, c’est trop. Hé, il est évident, là, que l’à-plat-ventrisme poussé comme ça devant Ottawa, ce n’est pas rentable électoralement ! Il fallait bien qu’un jour M. Johnson se rende compte qu’en particulier chez les francophones québécois trop, c’est trop.
Alors, nous avons assisté cet après-midi à un autre virage. Le premier ministre n’a jamais signé la Constitution de 1982. Je comprends bien qu’il n’avait pas besoin de la signer, il était dans l’opposition à ce moment-là. Il a voté contre la Constitution de 1982. Oui. Il a voté pour une résolution du Parti québécois qui était au pouvoir à ce moment-là. Certains de ses collègues, d’ailleurs, qui sont encore en Chambre, eux, ont refusé de s’associer à ça. Je regardais attentivement M. Ciaccia, moi, pendant que M. Johnson disait ça aujourd’hui.

Et alors, on va voir ce qu’on va voir. Sans doute il faut s’occuper de l’emploi maintenant, mais à un moment donné on reviendra sur le gouvernement fédéral et puis on tassera le gouvernement fédéral et puis jamais on ne lâchera certaines choses. Cynique ! Tout ça a été, cet après-midi, un exercice cynique, électoraliste, indiscutablement.
Et quant à l’incompétence, ça, je suis forcé de dire à M. Johnson que, vraiment, il ne pourrait pas changer un peu les gens qui sont autour de lui et qui font les calculs pour lui ! Ça n’a pas de bon sens, se tromper aussi souvent en quelques jours. C’est trop ! C’est trop ! Et, en particulier, faire une erreur de 3000000000 $ sur les investissements.

Écoutez, moi, je sais bien comment on a pu suer sang et eau en 1982, en 1983, en 1984, pour augmenter les investissements de 3000000000 $. C’est de l’argent, ça, des investissements de 3000000000 $. On ne peut pas se tromper sur un montant pareil. Ça n’a pas de bon sens ! Qu’il change un peu le personnel autour de lui, je ne sais pas, qu’il change le «pitonneux» ! Et puis, surtout, qu’il se rende compte de ce que c’est que 1000000000 $. Il n’a pas l’air de se rendre compte de ça du tout, des conséquences de ça, lui.

Alors, voilà ce que je voulais dire comme réaction à l’exercice de cet après-midi.
[M. David (Michel): M. Parizeau, est-ce que le discours inaugural d’aujourd’hui vous apprend quoi que ce soit sur le calendrier électoral du gouvernement?]
[M. Parizeau:] Non. Non, parce que je pense qu’il fait lui-même partie de l’exercice, comment dire, du calendrier électoral. C’est en fonction de ce qui va apparaître à la télévision ce soir, dans les journaux demain matin, que ça va être un autre élément qui va amener le premier ministre à décider si c’est, je ne sais pas, avant la Saint-Jean-Baptiste ou bien si c’est au début de l’automne. J’ai l’impression que l’exercice lui-même et ses répercussions dans les heures ou les deux, trois jours qui viennent, font partie de la décision.
[M. Thivierge (4ean): M. Parizeau, quand on rencontrait M. Tremblay tout à l’heure, on essayait de tirer au clair cette bataille de chiffres autour de la création d’emplois que les libéraux promettent. M. Tremblay nous a dit, en définitive – je voudrais avoir votre avis, vous avez dû «pitonner» un peu, vous? Mais, M. Tremblay nous dit qu’en définitive, si on regarde les chiffres du ministère des Finances sans intervention particulière de l’État, la croissance économique devrait nous amener en cinq ans 310000 emplois. C’est la lecture que vous pouvez faire?]

[M. Parizeau:] Je ne fais pas de, je n’avais pas de lecture comme ça.

[M. Thivierge (Jean): …les chiffres du ministère des Finances.]

[M. Parizeau:] Non, mais ça, vous comprenez, l’appréciation de la façon dont l’économie américaine va aller dans trois ans, quatre ans d’ici, j’ai beaucoup d’admiration pour ceux qui savent ça. J’ai beaucoup d’admiration. J’ai beaucoup d’admiration pour ceux qui disent, entre autres le gros client l’Ontario, je sais dans trois, quatre ans, comment ça va aller. Moi je sais.
Écoutez, j’ai pratiqué ce métier-là pendant 35 ans et on y va avec une certaine humilité quand on commence à faire des projections trois, quatre ans plus tard. Alors, quand un ministre dit: Moi je sais ce qui va se produire dans trois, quatre ans et ça va se produire tout seul sans qu’on y touche, je dis: Grand bien vous fasse, monsieur. C’est beau ça. Ce n’est pas à ça que j’en suis. J’en suis à ce qu’ils disent qu’ils vont faire. J’en suis à ce qu’ils disent qui se passe. Mettez les choses au mieux. Dire qu’on lance deux projets d’investissement d’Hydro, alors qu’ils sont déjà dans la programmation d’Hydro de cette année, et ne pas dire qu’en fait Hydro va embaucher moins de monde cette année que l’année dernière, écoutez, au mieux c’est de l’incompétence. Au pire, c’est de la dissimulation.

Se dire, nous allons monter une politique économique pour le Québec de façon à agencer tous les efforts du gouvernement, etc., vous avez entendu le couplet, et s’appuyer pour commencer sur une erreur de 3000000000 $ en un an pour les investissements du secteur privé, c’est quelque chose. Ces gens-là brassent des chiffres, en partie pour des raisons de supercheries et en partie pour des raisons, comme je vous dis, enfin, j’espère que c’est juste de l’incompétence. Il n’y a pas de bataille de chiffres.
Les choses, comment dire, dont on vous parle ici, qu’est-ce que vous voulez, l’augmentation des investissements au Québec, des investissements privés que c’est à 2,6 % plutôt que 20 %, écoutez, il y a un document fédéral qui vient de sortir il y a trois semaines. Ce n’est pas difficile de regarder ça. On parle d’observations, on ne parle pas de calculs, c’est clair, c’est comme ça. C’est comme ça, qu’est-ce que vous voulez que je vous dise.

[M. Thivierge (Jean): Le secteur privé, 2,5 %.]

[M. Parizeau:] 2,6 %.

[M. Thivierge (Jean): 2,6 %, l’année financière 1994.]
[M. Parizeau:] C’est ça.

[M. Thivierge (Jean): 2,6 %.]

[M. Parizeau:] C’est ça. Écoutez, je veux dire, si on veut avoir, comment dire, l’expression visuelle du document, je suis certain que M. Lauzon, de mon bureau, qui est juste derrière vous, se fera un plaisir de vous montrer le document et le chiffre. Il n’y a pas de discussion sur les chiffres, là, c’est… On est capable, même, je ne sais pas, moi, de faire une image agrandie, si on veut, du document.

[M. Pépin (André): … Sainte-Marguerite, depuis la ligne Des Cantons, là, ce qu’il est convenu d’appeler la ligne Des Cantons, ce qu’il dit, c’est qu’il a donné le feu vert à ça. Est-ce que le gouvernement aurait pu le retarder?]

[M. Parizeau:] Oui, il a essayé de le retarder. C’était réglé depuis juillet au BAPE, toutes les audiences publiques avaient été faites, tout était prêt, toutes les autorisations étaient données, c’était prêt depuis le mois de juillet. Et là, je ne sais pas, est-ce qu’il y a quelqu’un qui s’est endormi, comment dit-on, excusez-moi l’expression vulgaire, sur la «switch», là, parce que tout n’arrive pas nécessairement à une vitesse folle sur la table d’un premier ministre? Est-ce quel quelqu’un s’est endormi en chemin? Je pas.
Enfin, quoi qu’il en soit, août se passe, et septembre se passe, et septembre se passe, et les gens d’Hydro commencent à s’énerver, et ils demandent au gouvernement d’aboutir avec ça, parce que c’est dans leur programme de travaux de 1994. Et là, finalement, quelqu’un s’est réveillé, en février, et ce qu’ils ont décidé c’est de dire à Hydro-Québec, qui leur demandait depuis six ou sept mois: Mais voulez-vous peser sur le bouton ! On a dit: Oui, oui, on pèse sur le bouton. C’est leur programmation de 1994.
[M. Thivierge (Jean): Mais, M. Parizeau, on évoquait continuellement, quand il s’agissait, on parle de SM 3, là?]

[M. Parizeau:] Non, non, on parlait de la ligne de transmission.

[M. Thivierge (Jean): Non, mais dans le cas de SM 3, vous dites que c’était dans la programmation d’Hydro-Québec. Effectivement, c’était dans la programmation d’Hydro-Québec, mais on avait toujours l’air de nous dire: On attend les autorisations du fédéral, on attend les autorisations du fédéral. Et quand on regardait du côté fédéral, eux autres n’avaient pas l’air de savoir trop, trop de quoi il était question. Tout était centralisé au bureau du ministre des Transports.]

[M. Parizeau:] On n’est pas plus, écoutez, on n’est pas plus avancé aujourd’hui. Tout ce qui a été déterminé, là, c’est que la route, ça va prendre deux ans à construire la route, alors les travaux sur la route peuvent commencer maintenant, ce qui était dans la programmation d’Hydro, et ce qui ne préjuge en rien de savoir si les deux affluents de la Moisie vont être déversés dans la Sainte-Marguerite ou pas.

Alors, aucune décision vraiment fondamentale n’est prise quant à la consistance du projet, mais il y a deux ans, pour construire une route. Alors, ils vont couper de la branche, et ils vont commencer la route en 1994, comme Hydro prévoyait le faire. Et ça ne préjuge rien de la suite des événements.
[M. Authier (Philip): Juste une question, M. Parizeau. The speech… Some people described it as rather vague on a lot of specifics on what he is going to do. Do you think the speech will win him another election?
M. Parizeau: I do not think it will. I am sure that a lot of people, if not most people, will see through that. It is a cynical exercise, with some traces of rather serious incompetence. The cynicism, I suppose, everyone will see it. It,is, I think, however, the responsibility of some of us to underline the incompetence. This major error of thinking, when you want to be responsible for the economic policy of Québec, and you start on the assumption that this year, private investments in Québec will rise by 20 %, while, in fact, the Statistics Canada survey that came out three weeks ago shows that it will be 2.6 % increase. That is a difference of 3000000000 $. Obviously, he has not the foggiest idea that it represents 3000000000 $. He has no idea what it means in terras of job creation l
that 3000000000 $ of investment. Look, 3000000000 twice the

size of the total program of municipal infrastructures, federal, provincial, municipal, in Québec for the next three years. As far as he is concerned, that sort of order of magnitude cornes into the margin of error. Heavens ! In that sense, you see, there is a cynical exercise on the one hand, and, I think, an exercise, on the other hand, that undermines his credibility, quite strongly.
une voix: ça va?]

[M. Parizeau:] Ça va. Merci. [(Fin à 16 h 44)]
[QParizeau19940531cp]

[(Treize heures une minute)]

[M. Parizeau:] Jeudi, le 26 mai, Mme Frances Lankin, ministre du Développement économique de l’Ontario, a indiqué qu’en raison de demandes répétées venant de milieux d’affaires, un groupe de ministres incluant le premier ministre lui-même, le ministre des Finances et elle-même, commençaient à examiner comment, advenant que le Québec devienne souverain, l’intérêt des entreprises ontariennes pourrait être préservé et comment maintenir les rapports économiques qui existent depuis longtemps entre le Québec et l’Ontario. J’ai essayé de traduire «the longstanding economic relationship» parce que c’est assez intense, en anglais, comme formule.
Elle a souligné à quel point sont nombreuses les banques, institutions financières et entreprises manufacturières qui ont leur siège social et leur principale place d’affaires à Toronto, et des places d’affaires considérables au Québec.
Les pressions des milieux d’affaires dont MmeMme x Lankin fait état, je les ressens moi-même. Encore jeudi dernier, je dînais avec un banquier de Toronto, un vieil ami qui voulait – puisque nous avons décidé de garder le dollar canadien – discuter de l’organisation des opérations de sa banque au Québec. Cela n’a rien d’étonnant et trouve son répondant dans une des constatations fondamentales de la Commission Bélanger-Campeau. Les Québécois aussi veulent maintenir l’espace économique canadien et la liberté de circulation.

En réponse à Mme Lankin, et tout en reconnaissant le caractère sans doute un peu embarrassant pour elle de sa franchise, j e m’engage, tout de suite après les élections – bien sflr si les Québécois nous ont fait confiance en nous portant au gouvernement -de constituer une équipe qui sera l’exacte réplique du groupe de ministres -ontariens et qui sera prête à discuter très rapidement du maintien de l’espace économique de l’Ontario et du Québec, de la libre circulation entre nous et de l’égalité de traitement de nos entreprises.

Je suis heureux qu’au milieu d’un débat, dont on conviendra qu’il est un peu véhément depuis quelque temps, que le sens commun et l’intérêt bien compris prévalent. Bien des Québécois, et depuis longtemps, pensent qu’il en sera ainsi, et nous n’avons qu’à nous féliciter de cette évolution.

Quant au premier ministre du Canada et à sa déclaration, hier, sur la souveraineté du Québec causant une hausse des taux d’intérêt avec toute sa kyrielle de conséquences pour les Canadiens et pour les Québécois, je luis dis: Déposez donc – comme je vais le faire dans un instant – déposez donc les chiffres et constatez donc simplement que si les taux d’intérêt vous paraissent trop hauts, c’est que vos efforts pour réduire le déficit ne semblent pas assez convaincants, pas plus que ceux de l’Ontario, d’ailleurs, et du Québec. Quand le secteur public d’un pays en est rendu à emprunter, ce qui est le cas, presque de 10 % de la production nationale année après année, y a-t-il quelqu’un qui peut penser que les taux d’intérêt vont être faibles?

Alors, voilà ce que j’avais à dire. Je vais demander que les deux graphiques vous soient présentés. Ce sont des graphiques assez intéressants sur l’évolution, depuis une longue période de temps, des taux d’intérêt. Vous constaterez que pour ce qui a trait aux conséquences, disons, du débat politique au Québec sur les écarts de rendements des obligations du gouvernement du Québec -et ceux du gouvernement canadien, presque invariablement, les moments où ces écarts ont été les plus faibles ont été au moment où le Parti québécois était au pouvoir et, singulièrement, en 1979 et en 1980. Un ange passe.
D’autre part, vous verrez que le graphique, quant aux écarts de taux d’intérêt entre le Canada et les États-Unis, on remonte loin en arrière aussi, qu’effectivement un problème, j’allais dire plus permanent, apparaît quant aux écarts de taux d’intérêt depuis 1985, c’est-à-dire depuis l’époque où le gouvernement, canadien a réussi le tour de force, à lui tout seul, en 1984, d’emprunter la moitié de ses revenus. Il faut le faire, l’équivalent de la moitié de ses revenus totaux en 1984. Ça ne s’était pas vu souvent dans les pays dits civilisés.
Effectivement, depuis ce temps-là, il y a un problème, on le voit bien. Mais enfin, voilà. Revenons à Mme Lankin, c’est un engagement que je prends; je crois qu’elle a mis le doigt sur quelque chose qui est très important pour les entreprises. Comme je l’ai dit dans mon texte, de plus en plus on vient maintenant me demander: Comment allez
vous procéder pour ceci, comment allez-vous procéder pour cela? Ça ne m’étonne pas du tout qu’en Ontario, des tas d’entreprises aillent la voir en lui disant: Bien alors, comment ça va fonctionner, au cas où?

Bien sûr, le lendemain, ou l’après-midi même je pense, elle a émis un petit texte pour dire: Mais, je ne remets pas en cause l’unité canadienne. Bien sûr, M. Rae, en revenant de voyage, a dit: Je ne remets pas en cause l’unité canadienne. On comprend-tout ça, le problème n’est pas là. Il faut simplement reconnaître que notre intérêt, bien compris des deux côtés, nous amène des deux côtés à vouloir répondre aux mêmes questions et à essayer d’y répondre à peu près dans les mêmes termes. C’est sur le plan de l’égalité de traitement, de ce qu’on appelle le traitement national des entreprises, sur l’égalité de traitement, dans les deux cas, que se trouvent les voies d’une solution évidente. Tout ça est assez bien connu et je suis heureux, là, que ça chemine dans le bon sens.

[M. Girard (Normand): Alors, M. Parizeau, si on vous comprend bien, vous ne retenez pas les propos de M. Rae, à son retour, quand il a dit que ce n’était pas exact qu’il existe un groupe de ministres ontariens et puis que Mme Lankin a admis avoir commis une gaffe. Estce qu’il a voulu camoufler la gaffe?]

[M. Parizeau:] Je pense que… Vous connaissez les politiciens comme moi, voyons M. Girard, depuis tout ce temps-là. Ce que M. Rae a dit, c’est qu’il n’y a pas de plan; soit. Le problème n’est pas de savoir s’il y a un plan qui s’appelle un plan, le problème consiste
à savoir s’il y a une préoccupation puis un certain cheminement. Et, dans ce qu’a dit Mme Lankin, c’est trop précis, il y a trop de choses… au Toronto Star, ou alors c’est trop articulé. On ne me fera pas croire que… Je comprends qu’un certain journaliste va avoir l’imagination assez fertile mais un journaliste ne peut pas inventer tout ça; il faut bien qu’il y en ait une bonne partie, puis je comprends que c’était embarrassant.

Je comprends que, pour beaucoup de Canadiens anglais, à l’heure actuelle, se dire: Nous commençons à voir comment ça pourrait marcher si le Québec devenait souverain, ils ont l’impression, à leurs propres yeux, des fois, d’être des espèces de traîtres à leur pays; alors, ce n’est pas facile pour eux ce cheminement-là, d’où mon allusion, tout à l’heure, dans mon petit texte, où je disais: Je comprends que ça peut être embarrassant pour elle, de l’avoir exprimé avec une franchise pareille pareille. Mais qu’est-ce que vous voulez que je vous dise, moi, des deux côtés, à l’heure actuelle, les milieux d’affaires ont exactement les mêmes préoccupations. Comment ça va marcher?

[M. Girard (Normand): Maintenant, vous n’avez pas commenté la déclaration qui a été faite par la Banque Royale…]

[ M. Parizeau:] Non, non, Montréal.

[M. Girard (Normand): Montréal, la Banque de Montréal sur l’augmentation des taux d’intérêt et l’incertitude provoquée déjà par le débat?]

[M. Parizeau:] Écoutez, on va attendre qu’elle effervesce encore un petit peu puis là, elle va perdre des clients, comme la Banque Royale, vous vous souvenez, puis là, le président de -la Banque de Montréal se présentera à une assemblée d’actionnaires en disant: je m’excuse d’avoir fait de la politique, j’ai perdu pas mal d’argent. Voyons, voyons. L’histoire de la Banque Royale pendant la campagne référendaire a réglé le sort des interventions de banques dans les affaires politiques: elles seraient mieux de ne pas s’en mêler; elles perdent des affaires, c’est tout ce que ça a comme impact.

Je comprends que la Banque de Montréal devait justifier l’augmentation de son «prime rate» de 0,25 %, qu’elle l’alignait avec les autres en préparation de ce qui pourrait se produire aujourd’hui si le taux des banques monte…

[M. Girard (Normand): J’aurais une dernière question que je voulais vous poser. Est-ce que vous ne commencez pas, comme certains de nous autres – en tout cas, c’est mon cas – à être un peu tanné de voir Lucien Bouchard à la télévision, faire toutes sortes de déclarations concernant l’indépendance du Québec, comment ça va fonctionner après la souveraineté puis ainsi de suite, alors que lui, il est à Ottawa, puis c’est vous qui dirigez le Parti québécois à Québec?]

[M. Parizeau:] Enfin, écoutez, c’est… je comprends très bien que M. Bouchard, engagé à Ottawa, comment je dirais… aux premières lignes de cet affrontement, doit, à certains moments, fournir un certain nombre de réponses sur la façon dont ça fonctionnerait. L’important là-dedans, c’est que nous gardions le contact que nous gardons, qui est excellent, et dans ce sens-là, comment aire, moi, je ne vois pas à l’heure actuelle, je ne vois pas vraiment de problème, et je constate simplement qu’il est sous une pression qui pour lui, qui sur lui, est très forte, très, très forte. C’est, comment dire, moi, c’est peu de choses que je connais ici à côté de ce qu’il connaît, lui, là-bas.

[M. Girard (Normand): Mais aller promettre de construire des écoles pour les francophones à l’extérieur du Québec, à ma connaissance, je n’ai jamais entendu ça dans les 25 ans. d’existence du Parti québécois ou 27 ans, jamais.]

[M. Parizeau:] Non, nous avons, nous, comment dire, jusqu’à maintenant, plutôt mis l’accent sur des bourses d’étude pour les francophones hors Québec. Bon, bourses d’étude, mais d’un autre côté, on aurait pu, j’imagine, à l’époque où nous parlions beaucoup de réciprocité, on aurait pu aussi imaginer des choses comme celles là. On verra, on verra, on ne va pas commencer à faire, comment dire, des querelles d’école, il y en a déjà suffisamment comme ça.

[ Une voix: Michel David.
M. David (Michel): Oui. M. Parizeau, pour revenir au projet de plan de Mme Lankin, est-ce que vous avez appris ça en lisant The Toronto Star ou s’il y a des gens chez vous, officieusement ou officiellement, qui ont eu des discussions concernant ça avec quelqu’un plus ou moins proche de M. Rae?]

[M. Parizeau:] Non, non. Ça, il faut bien comprendre, il n’y a pas de… Avec un parti qui est dans l’opposition, il n’y a pas et il ne peut pas y avoir de discussions qui aient un caractère officiel. Bien s1r, il y a des gens qui font la navette entre les, deux et qui font état de préoccupations, mais qui ne jouent pas de rôle officiel. Ce serait aberrant. Ce n’est pas imaginable. Moi, j’ai appris ça dans The Toronto Star. Et puis je vous avouerai que j’ai été tout à fait content de voir ça. J’ai demandé un peu de temps pour réfléchir. J’ai vérifié avec M. Brassard qui faisait une déclaration cet après-midi-là, seulement pour marquer l’importance de la chose. J’ai fait émettre un petit communiqué à la fin de l’après-midi de quelques lignes pour dire aussi que je trouvais ça fort intéressant. J’ai pris la fin de semaine pour réfléchir à ça. Ça rejoint tellement les préoccupations des milieux d’affaires des deux côtés que je me sens… C’est pour moi quelque chose de naturel, aujourd’hui, de dire: Bravo, Mme Lankin ! Allons-y ! Moi, je fais la même chose. On va se parler dès qu’on sera en situation d’être au gouvernement. Comptez sur nous pour organiser un groupe qui soit exactement le pendant du vôtre et d’ouvrir les discussions tout de suite. La vraie lutte à l’incertitude c’est dans des conversations comme celle-là. Ce n’est pas par des déclarations véhémentes, à l’heure actuelle, comme on en voit. Je commence à trouver qu’il y a bien des coups de gueules, si vous me passez l’expression un peu vulgaire, de ce temps-là. Ça n’aide pas ça.

[M. David (Michel): Mais, M. Parizeau, est-ce que vous pensez sérieusement qu’avant le référendum le gouvernement ontarien va accepter comme ça d’entreprendre des négociations, alors que son intérêt va être, évidemment, d’amener les Québécois à voter non?]

[M. Parizeau:] Moi, je suis convaincu qu’il va y en avoir. Comme plan B, ce ne serait que raisonnable. Un gouvernement doit être responsable au cas où… Mettez-vous du point de vue du gouvernement de l’Ontario. Les rapports entre nous deux… Toronto et Montréal vivent à certains égards comme les banlieues économiques l’un de l’autre. Simplement à titre de prudence, le gouvernement de l’Ontario, comme le gouvernement de Québec doivent se préparer. Quand bien même encore une fois, quand bien même ce ne serait qu’une sorte de préparation très non officielle, très plan B. On ne peut pas se dire qu’on va attendre le jour du référendum, puis là, tout à coup, on va commencer à réfléchir à la façon dont on procède. Ce n’est pas le comportement de gens raisonnables.
Évidemment, depuis un an ou deux au Québec on dit: Mais les anglophones ne seront pas raisonnables, mais les anglophones ont des états d’âme. Et tous les latins du Québec se disent: Extraordinaire ! Les anglophones ont des états d’âme. Bien, oui, c’est normal qu’ils aient des états d’âme, mais ils ont aussi des gouvernements, les anglophones. C’est normal qu’ils aient des états d’âme, puis c’est normal qu’ils aient des gouvernements. Puis, le rôle d’un gouvernement c’est de prévoir les choses. C’est ça qui est en train de se produire, puis c’est très bien comme ça. C’est très bien comme ça, bravo !

[M. Gauthier (Noël): Donc, même avec les remarques qu’on a eues de M. Chrétien puis M. Davidson de la Banque de Montréal – Davidson, oui – vous êtes en train de dire que toutes les discussions qu’on entame maintenant sur la souveraineté n’ont aucun effet sur les taux d’intérêt, les taux d’hypothèque, l’investissement à l’étranger, ici aussi au Canada, puis tout ça. Il n’y a aucun fait, toutes ces discussions-là sur tous ces facteurs-là?]

[M. Parizeau:] Alors, regardez. C’est bien joli…

[M. Gauthier (Noël): Non, je parle maintenant.]

[M. Parizeau:] Non, non. C’est bien joli d’avoir des opinions puis de lancer des affaires en l’air. Là, je vous dis: regardez. Et quand quelqu’un vous dit le contraire, pourriez-vous lui demander ses chiffres? Écoutez, là, les intérêts, ce n’est pas des états d’âme. Les marchés financiers, ce n’est pas des états d’âme, c’est des chiffres.
rendement des obligations à long terme l’écart Québec moins. Les points de base, là, on fait quelques petits commentaires. Il y a des affaires que je n’ai jamais comprises, par exemple,. là-dedans. Pourquoi, en 1970, c’est aussi haut? Il y en a qui diront: C’est à cause des événements d’octobre. Et c’était presque aussi haut que ça dans les semaines qui ont suivi l’arrivée au pouvoir de M. Bourassa, comme si c’était un dangereux révolutionnaire. La moyenne des deux, bien, ça fait 170 points de base que vous voyez là. Pour moi, ça a été la dernière tentative du syndicat de noyer le marché, là, après l’élection de M. Bourassa, mais, enfin, passons. Après ça, ça retombe.
En 1976, 90 points de base, remarquable ! 1977, 1978, 1979, l’année qui précède le référendum. C’est le plus bas taux jamais atteint au cours de l’époque contemporaine dans les taux de rendement entre le Québec et le Canada.

[M. Gauthier (Noël): Sauf l’article de M. Jannard dans La Presse de samedi parle de l’écart entre les obligations du Québec et de l’Ontario.]

[M. Parizeau:] O.K. D’abord, vous voulez l’Ontario? C’est exactement le même portrait.
Puis, vous regardez les chiffres. C’est intéressant.

[M. Gauthier (Noël): C’est le même portrait?]

[M. Parizeau:] Sauf, à moitié chemin. Mais divisé en gros de moitié. C’est le même… Comment dire? La courbe de base, c’est la courbe canadienne. C’est là où est le plus gros marché des obligations. Je vous mets le Québec par rapport au Canada, ou le Québec par rapport à l’Ontario… On vous le fournira. C’est tout calculé, ces trucs-là. Pourquoi est-ce que ceux qui commentent ça ne sont jamais capables de sortir les chiffres, bon Dieu? Parce que les chiffres seraient embarrassants? Pourquoi est-ce qu’on est…
Vous êtes capables, quand vous voulez, dans vos journaux, de sortir des graphiques. Vous les sortez. Pourquoi est-ce que quand il s’agit des taux d’intérêt, vous n’êtes jamais capables de sortir des graphiques? Je ne comprends pas… Je comprends que le taux d’intérêt ait quelque chose de commun comme, comment dire, à évoquer devant tout le monde.
Bien oui, comme le premier ministre du Canada, hier. On peut évoquer et les emprunts à la banque et le crédit hypothécaire. Pourquoi est-ce qu’il ne sort pas ses chiffres? Parce qu’ils seraient embarrassants?
En 1980, l’année du référendum, voulez-vous regarder à quel niveau il est, l’écart?

[Une voix: 35.]

[M. Parizeau:] Et là, il va remonter. Il va remonter quand? Il va remonter en pleine récession. 1982. Et là, il va redescendre, toujours sous le Parti québécois, au fur et à mesure où l’économie du Québec remonte, pour tomber à quoi? À peu près à 40. Et regardez ce qui se passe depuis 1985. Pouvez vous m’expliquez ça? Un gouvernement fédéraliste arrive au pouvoir et reste au pouvoir neuf ans et, pendant neuf ans, les «spreads», l’écart de rendement augmente. Expliquez moi ça. Et, à l’heure actuelle, il est rendu à 108. Je le sais, qu’il est rendu à 108. Il monte depuis 1985. Et là, il y a des gens qui nous disent aujourd’hui: Ah ! … à 108. Mais c’est dû aux séparatistes. Comment, c’est dû aux séparatistes? Ça fait neuf ans que les libéraux sont en place. Ça fait neuf ans que ça monte. Est ce qu’ils pourraient sortir leurs chiffres, au lieu d’affirmer n’importe quoi, sous prétexte que… Il n’y a pas que les politiciens qui font de la politique.

[Une voix: M. Parizeau, je voudrais revenir sur la déclaration du président de la Banque de Montréal. Les préoccupations de M. Davidson semblaient porter davantage sur les huit à dix mois qui doivent s’écouler entre l’enclenchement de la souveraineté, du processus, et le référendum, après l’élection du Parti québécois.]

[M. Parizeau:] Ça, c’est évident que c’est fort intéressant comme période. J’imagine, moi, quand je dis: Je la veux très courte, ça provoque un certain nombre de réactions. Je suis heureux de voir que le premier ministre du Canada est d’accord avec moi. Il faut que ce soit très court. Je suis convaincu, d’ailleurs, que le premier ministre de… que les gens de la Banque de Montréal seraient d’accord. Aïe, ça fait assez longtemps que je dis qu’il ne faut pas que ça traîne. Quand je disais ça, il y a quatre ans, on disait que je rêvais.
Quand j’ai parlé de la troisième période devant vous, il y a quelques mois, de huit, dix mois, aïe, c’est tout un contraste avec ce qui s’est passé avant. À un moment donné, j’ai dit: Il y a des gens, dans mon entourage, qui aimeraient ça que ce soit encore moins de mois que ça. On a dit: Aïe, vous exagérez ! Puis là, tout le monde est en train de dire: Bien, le plus vite ça sera, le mieux ce sera.

Écoutez, moi, je vais me faire faire douce violence. Si vous trouvez que huit, dix mois, c’est trop long… Remarquez que j’ai besoin de huit, dix mois pour faire tout ce qu’il y a à faire. Mais quant à la date d’un référendum, tu sais, si vraiment la demande populaire est telle qu’on trouve que huit, dix mois, c’est trop long, on verra bien. Mais là, pour le moment, on reste à huit, dix mois. Ça va, là? Huit, dix mois, je trouve que c’est déjà pas mal rapide. Mais enfin, si vraiment tout le monde à genoux, les bras en croix me demande de faire ça plus vite…

[M. Jobin (André): Sauf que vous aviez déjà décidé de raccourcir la période, M. Parizeau, puis vous êtes revenu à la case départ.]

[M. Parizeau:] Je n’ai pas décidé ! J’ai toujours dit: Je dois faire très attention. Pendant à peu près un mois. Vous comprenez comme vous êtes rendus frénétiques. Aïe ! trois, quatre mois, ça fait une grosse différence. Puis c’est énorme, c’est gigantesque, mais c’est absolu. Aïe ! Aïe ! Aïe ! Aïe ! J’ai dit: Dans mon entourage, il y a des gens qui disent que peut-être que moins de mois, ça serait mieux. Alors là, il y a eu beaucoup de réactions, à ce moment là. Ce n’était pas encore mûr. Alors, j’ai dit: Bon, bon ! Ça ne plaît pas, quelques mois? Très bien, huit, dix. On revient à huit, dix. Puis là, ça recommence. Les gens disent: Huit, dix, ah bien, c’est bien long ! Pourquoi ne pas faire ça plus court? Continuez de demander ! Demandez et vous serez exaucés ! Qu’est ce que vous voulez que je vous dise?

[M. Béguin (Rhéal): M. Parizeau, vous avez parlé, tantôt, des réactions des milieux des affaires. Est ce que vous croyez qu’il y a une manipulation qui se fait entre les partis politiques fédéralistes à Ottawa et le milieu des affaires, à ce moment ci, pour qu’ils interviennent plus vigoureusement comme ils l’ont fait dernièrement?]

[M. Parizeau:] Non, je ne pense pas. Je crois que, à l’heure actuelle, peut-être pour la première fois, les milieux d’affaires commencent à considérer que le degré de probabilité est assez élevé pour que ça se produise. Certains, avant, l’ont vu. Je pense qu’il y a une sorte de sentiment, dans la communauté des affaires que – non, ce n’est pas la certitude, bien sûr – beaucoup, dans ces milieux là, se consolent encore chaque fois qu’un sondage sort, qu’il y a une grosse différence entre souveraineté, indépendance, séparation, puis ils interprètent ça, puis ils se consolent. Mais il faut quand même… Écoutez, dans le milieu des affaires, il faut qu’on ait un plan B. Quand on commence à considérer que quelque chose devient plus probable, eh bien, on prépare le plan B. Et il est clair qu’à l’heure actuelle, il y a pas mal de gens qui sont en train de faire ça.

[une voix: Je vais poser une question.]

[M. Parizeau:] Bien sûr.

[Une voix: Ce fameux plan B, j’aimerais que vous nous situiez votre comité par rapport aux négociations qui ont cours actuellement sur, justement, la libre circulation des biens, des services, des personnes et des capitaux au Canada. Comment vous le voyez?]

[M. Parizeau:] Nous sommes intéressés, et depuis longtemps, à ne pas brasser la cage sur ce plan. Ça, c’est un domaine, le statu quo. Tu sais, je ne veux pas de vastes négociations. Au moment où le Québec devient un pays souverain, je ne veux pas de vastes négociations économiques ou commerciales avec le reste du Canada. Ce qu’on veut, au fond, c’est de maintenir les rapports entre les provinces en l’état.
Je sais bien qu’on pourrait aller plus loin. Je sais bien, par exemple, qu’on pourrait s’inspirer, comme on vient de le faire dans un cas spécifique, de l’entente canado-américaine de libre-échange et, ensuite, de 1’ALENA, pour améliorer la circulation sur le plan des services, par exemple, ou sur le plan même de certains produits entre les provinces.
Mais n’anticipons pas, ne cherchons pas à aller trop vite. Dans un premier temps, il faut être capables de se rencontrer et de se dire: Bon, on maintient ça comme c’est. Et c’est, d’abord et avant tout, de ça dont les entreprises ont besoin, dans un premier temps. Plus tard, on verra. Dans les années qui suivront, on verra bien jusqu’où on peut davantage développer des négociations. Mais, pour ça, il faudra d’abord que la confiance soit revenue entre les groupes capables de dire: Écoutez, on garde la même monnaie. On va appliquer le fonctionnement de la clause dite – comment dire – du «national treatment», la cause…

[Une voix: Du traitement national.]

[M. Parizeau:] … du traitement national, c’est-à-dire qu’une entreprise canadienne est traitée au Québec exactement de la même façon qu’en entreprise québécoise est traitée au Québec, et viceversa. Cette clause du «national treatment», elle est très importante. Elle est maintenant à la base de la plupart des ententes commerciales, politiques, entre les gouvernements, qu’un certain calme soit revenu. Mais, dans un premier temps, qu’est ce qu’on veut? on veut être avec lesquelles nous fonctionnons. Ça, les gouvernements doivent dire ça à leurs entreprises: Le traitement national sera appliqué. Encore une fois, c’est rien de très révolutionnaire, sauf qu’il faut que les gouvernements puissent converger et se dire: Voilà, voilà les règles du jeu. C’est ça qu’on va faire.

[Une voix: C’est une sous-question. Les ministres sont, actuellement, en train de négocier là-dessus, avec un objectif du 30 juin prochain, donc ce que vous dites, c’est que si les provinces s’entendent entre elles, vous entendez maintenir ce qui sera négocié?]

[M. Parizeau:] Non, non. Écoutez, les négociations auxquelles vous faites allusion, sont des négociations sur la façon dont les secteurs publics, pour certains achats, opèrent ou n’opèrent pas ensemble. C’est tout petit par rapport à ce que je viens de vous dire là, c’est tout petit ça. On parle essentiellement de certaines clauses des marchés publics entre les provinces. C’est une tout autre affaire, je vous assure, par rapport à la question soulevée par Mme Lankin, c’est vraiment pas très important. Si vous me parlez, par exemple, de la façon dont les banques à charte vont fonctionner dans deux pays, puis les compagnies d’assurances. Quand il y a deux pays, pour des entreprises qui sont vraiment, actuellement, pancanadiennes, il faut que les règles du jeu soient claires; et c’est là où National Treatment est absolument fondamental.

[Une voix: En anglais?

Des voix: Rick, Rick.

Une voix: Je n’ai pas de question.

Une voix: Tu n’as pas de question?

Une voix: Mr. Parizeau can continue then. Une voix: We still have time so…

M. Authier (Philip): Mr. Parizeau, I want ask you two other little questions. One, we don’t know whether Mr. Bouchard said this or did not say this, regarding the possible exodus of anglophones if Québec becomes sovereign. We don’t putting that aside. Your opinion on this. Do you think that it would be an exodus of anglophones if Québec became sovereign?

M. Parizeau: Personnally, I think what had to happen from that point of view happened in the seventies. I do not think there is going to be a sort of repeat exodus, I do not think so.

Une voix: It had to happen, sir?

M. Parizeau: Pardon me?

Une voix: Had to happen, sir?

M. Parizeau: No, what had to happen happened in the late seventies, but I do not see a repeat performance if one might use that awful word in that context, but there is no particularly…. I do not see it. I know that some people try to raise this issue rather often by all kinds of surveys of public opinion among youngsters, and that sort of thing. I am all aware of all this but I dont feel it all the way, the way it happened in the late seventies.

M. Gauthier (Noël) : Why is that? Is is that the people that were going to leave have left or why is that do you believe that?

M. Parizeau: Because the atmosphere has changed because we know each other all much better because in spite of all that the politicians have to say, we are probably much less suspicious collectively of each other than we were. You know, in spite of everything, Quebeckers are pretty tolerant people and I would say that of Quebeckers of both languages. We are pretty tolerant people. We… and I think we understand each other a lot more than we did in the late seventies, a great deal more, indeed we do. It does not mean that we all think the saine thing, that is not what I am saying, but we understand each other much better.

Une voix: Yes, Mr. Parizeau, if we can just get a quick comment from you, sir, about what the government has done in terms of the Oka situation, giving the SQ a mandate to intervene? I just wandered…
M. Parizeau: I have not the foggiest idea. We are going to ask a question in the House in a few minutes, just to… and the question will be labelled quite simply: What is going on? I do not know at all what is going on. I have no idea. Some things or rather all… I did not know that, for instance, Mr. Sirros couid require the services of the police, I thought it was Mr. Middlemiss who did that. I do not know what is going on. We will ask in the House.
Une voix: What should be going on, sir?
M. Parizeau: I cannot say what should be going on, if I do not know what is going on.
Une voix: As a possible Premier comming up, I mean, how would you handle the situation?
M. Parizeau: I do not know, I have had no report, remember? When the Mercier bridge started, we had… the situation was considered serious enough so that the leader of the opposition was, I would not say consulted by the government, but at least some people from the government would keep me posted. In this case, I have no idea.
Une voix: I want your opinion, sir, of what…

M. Parizeau: I cannot have an opinion on something I do not know anything about. Why is it that we are still talking about propriety rights over some parts of the golf in Oka? I thought that was the origin of the problem in 1991 and you mean to say that three years later, that has not been settled. I did not know that. Did you? The origin of the problem in Oka, in 1991, was that piece of land. I thought, after a crisis like this, that titles to the land had been settled. And suddenly, I realize from press reports that it is not and that someone is appointed to settle propriety rights on a piece of land that was suppose to have been settled three years ago. I do not know what is going on. Do not ask me.

M. Béguin (Rhéal): M. Parizeau.

Une voix: J’ai une question ici. Mon collègue de la CBC. Ce ne sera pas long Rhéal, je te…

M. Kelley (Mark): I just wanted to go back to where we started from, if we could. Just with your comments about Mr. Chrétien. I am wondering… Are you accusing him of using scare tactics or are you accusing him of even outright lying if he has not seen these figures which you seem to think are quite easily available?

M. Parizeau: It is not fathom. The man has been Minister of Finance, remember? No, no. He is trying to find a way out. And in that sense, he is giving explanations that one has to consider for what they are worth. But, but… I think he is coming in nicely. This idea that the question should be clear… Of course, the f irst formulation of the question was rather ridiculous. But, all right,•why not. … that the question should be settle by a vote. Very good. And now, that the vote should take place early. Very good indeed. It is all right. I mean, he is coming in, nicely. He is barking and kicking, sure. On things like interest rates, he needs scapegoats like anybody else. But he is coming in fine for the last week or so. Same thing with Mr. Johnson, last week, the integrity of the Québec territory. And then, the Québec problem would be settled by Quebeckers. Very nice. Look, it is coming in very well indeed, very well.
M. Relley (Mark): Can Jean chrétien, in any way, contribute to you moving up the referendum date?
M. Parizeau: Oh no. Not by himself. Oh no, no, no. Anything suggested by Chrétien I would be very worry of. Ha, ha, ha ! Indeed. No, no. I was responding to what one of you suggested though, a few minutes ago. By in large, except maybe for a month or so, I have been of this feeling that the referendum on sovereignty should take place something like eight or ten months after the election. That is the sort of time span that we need in any… to prepare everything. At one point, some people were saying: Maybe you should move this ahead a bit, a few months rather than eight or ten. And I wonder publicly about (?) at that point. A lot of people said: No, no, no that it is too early. Wait a minute, if everyone consider that is too early, let us go buy for eight or ten months. Now, if a lot of people want to put on the agenda again, moving ahead the date, I am ready to discuss that. …the intervention of Mr. Chrétien. No, no, not really, it would take more nights…
Une voix: Do you think that it will be at a date before the…
M. Parizeau: No, at the present time that is the sort of time span that I still have them as a project. I think eight or ten months is the sort of realistic date of a referendum, eight or ten months after the election.
Une voix: In the spring 1995, then?
M. Parizeau: For advance, no. I want to coure on this until I know for sure, one, the election will take place in Québec. You know, it can be moved to… What is the latest date? November, 29th of November, I think. Until such time, as I know the date of the election in Québec, I will not put a date in 1995. …will be in 1995, that sort of thing.
M. Béguin (Rhéal): Just… Peter corne, it is about Frances Lankin in Ontario, you said you would have a committee set up to parailel(?) … How soon are we talking about? What king of a time for a committee in place to deal with?

M. Parizeau: I would say: This is so important. The staternent of Mrs. Lanking, even though… Of course, it was rather a sign of embarrassing(?). That statement by Mrs. Lankin is extremely significant. It has to do with the economic relationship of Québec and Ontario, that are really very important for both of us. I want to answer this by saying: As soon as we are elected, we are going to have exactly the saine group. In other words, the Premier, in their case, is a member, the Premier, here, will be. The minister of Finance, the Minister of Finance, here, will be also. And the Québec group will offer to start discussions on this maintenance of our economics links, maintenance of free circulation, maintenance of national treatment will set up right away. Just after the election, we will be ready to discuss these things to maintain them as they are. As they are, in the saure way we have committed ourselves to keep the Canadian dollar. What Mrs Lankin has expressed as a preoccupation, we also have. We will meet them as soon as we are in a position to do something about it.

M. Béguin (Rhéal): I have just one more question, sir. There seems to be an air of inevitability about all of this debate over the last few weeks. Every one seems to be assuming that you are going to win the next election and are already talking about the referendum. Certainly, this must be making you very happy to see that people are playing along those lines and discussing something that still has not… will only be held after the next vote, the next election itself.
M. Parizeau: You know, except that I… I feel that a lot of people are interested these days in the sovereignty of Québec in a tone and with references that, in terms of decibels, are a bit loud. I suppose that is inevitable. And maybe it is not a bad idea that some of that excitement should take place now, rather than further on down the line. But, as far as I am concerned, it does not change the significance that I give to the next election. The next election is fundamentally based on the idea that we have got to get that government out of office. We have got to have people realize what the Federal system costs them and then, afterwards, have a referendum on the sovereignty of Québec.

In other words, whatever is being said at the present time, no matter in the number of decibels in which it is said, our purpose will not change. The second period will be played as a second period and then, there will be a third period.
Une voix: Merci.
(Fin à 13 h 43)]
[QParizeau19940617cp]
[ (Quatorze heures et vingt-neuf minutes)]
[Le modérateur: … la présentation de M. Parizeau et de M. Chevrette, ensuite, on pourra passer aux questions en français, puis en anglais.

M. Chevrette: D’abord, vous me permettrez de vous présenter un peu le bilan de cette session en vous disant que le gouvernement cherchait à gagner du temps, d’entrée de jeu.
Le premier ministre du Québec ne peut être sérieux lorsqu’il déclare avoir hâte aux élections, puisqu’il est le seul maître de la date du déclenchement. En fait, vous avez assisté à une session parlementaire que je qualifierais de purement dilatoire, c’est-à-dire destinée à gagner du temps.
En vérité, le premier ministre n’a qu’à s’en prendre à lui même s’il se retrouve finalement devant le dilemme suivant: gaspiller de l’argent avec des élections partielles ou affecter le droit de vote des citoyens et des citoyennes parce qu’ils sont en vacances.
Comme vous avez pu le constater, depuis le début de la troisième session, le Parlement a siégé à temps partiel. À titre indicatif, alors que l’Assemblée aurait pu siéger 110 heures pendant la session intensive, en prenant pour acquis qu’on pourrait travailler jusqu’à minuit, en prenant pour acquis, donc, qu’on aurait pu siéger 110 heures, nous avons siégé 56 heures, soit 51 % du temps disponible. De plus, au niveau des commissions, depuis de début de cette troisième session, elles ont siégé 352 heures sur une possibilité de 737 heures, c’est-à-dire 47 % du temps.
Il est évident que nous aurions pu accomplir le travail soumis par le gouvernement beaucoup plus rapidement et éviter des élections en plein été et ce, d’autant plus que la minceur du menu législatif ne justifiait d’aucune façon que l’Assemblée poursuive ses travaux jusqu’à aujourd’hui. Une seule conclusion, donc, s’impose: le gouvernement a cherché à gagner du temps pour tenter de faire du neuf avec du vieux.
Pour l’essentiel, la législation donnait suite au discours inaugural et consistait en de simples remembrements et changements de nom de ministères. Nous avions déjà souligné que le gouvernement ne disposait nullement de la légitimité nécessaire pour procéder à une telle réorganisation administrative en fin de mandat. De plus, ces opérations ont engendré de la confusion au sein de la fonction publique et, en bout de ligne, risquent de s’avérer très, très coûteuses. Toutefois, une fois les décisions arrêtées, les projets de loi soumis se résumaient à de la simple mécanique. Et je vous rappellerai que la simple dissociation du ministère des Terres et Forêts et de l’Énergie, à l’époque, avait coûté 30000000 $.
En fait, la seule pièce législative substantielle votée par le Parlement est la réforme du Code des professions, mais vous aurez remarqué que c’est grâce à l’insistance de l’opposition officielle que le projet a finalement été appelé en commission parlementaire alors que le gouvernement tergiversait. Et, là-dessus, je dois féliciter Mme
Caron pour le magnifique travail qu’elle a fait sur ce projet de loi.

Par ailleurs, des réformes importantes sont restées sur le carreau. Malgré un rapport publié en 1987 insistant sur l’urgence d’agir concernant les tribunaux administratifs, le gouvernement n’aura réussi dans ce dossier qu’à reporter la réforme attendue tout en multipliant les nominations partisanes.

D’autres projets de loi ont été relégués aux oubliettes grâce aux interventions de l’Opposition. Je pense ici au projet de loi 123, qui aurait donné le coup de grâce à la loi originale sur la protection du territoire agricole, ou encore au projet de loi 128 sur la sécurité du revenu aux effets négatifs pour les personnes âgées de 60 à 65 ans. Enfin, le projet de loi 412 sur l’Office de l’environnement est allé rejoindre dans les limbes législatifs une autre réforme que le leader du gouvernement n’a jamais proclamée, soit la loi 31, instituant la Commission des relations de travail.

La présentation du discours inaugural, l’étude des crédits et le dépôt du budget auraient dû normalement constituer les pièces maîtresses du gouvernement Johnson dans la mesure où il cherchait à démontrer que nous avions affaire à un nouveau gouvernement et que l’économie constituait sa priorité.

Or, je crois que vous en conviendrez, hormis les relations difficiles entre le bureau du premier ministre et la Tribune de la presse, il n’y a pas grand chose de neuf chez ce
gouvernement.
Le discours inaugural pêchait par son absence de mesures imaginatives et originales, se situant plutôt dans la lignée des quatre premiers discours inauguraux du gouvernement libéral. Quant aux crédits, ils souffraient de la même absence de ligne directrice: un collage de compressions horizontales sans discernement et sans analyse des véritables besoins de la population.
Quant au budget, dans un contexte électoral qui, à l’évidence, a amené le gouvernement à modifier son discours traditionnel sur plusieurs sujets, il a servi bien plus à atténuer quelque peu la sévérité excessive de celui de l’an dernier. La réalité reste cependant la même: un alourdissement de 4200000000 $ du fardeau fiscal des contribuables pour l’année 1993-1994.
En fait, la grande déception du pseudo nouveau gouvernement aura été l’absence totale, à l’exception du plan d’infrastructures qui origine d’Ottawa, de mesures susceptibles d’assurer une véritable relance économique et de redonner espoir aux 800000 Québécoises et Québécois aptes au travail qui vivent soit de l’aide sociale, soit de l’assurance-chômage. Nous aurons plutôt assisté à des fermetures d’usines importantes comme Hyundai à Bromont. Inutile de dire que ce vide s’est traduit par une absence de législation à caractère économique.
Sur le front constitutionnel, bien, le front constitutionnel aura illustré à souhait qu’il est impossible de faire du neuf avec du vieux. À l’instar de son prédécesseur, abdications, renonciations et écrasements au détriment des intérêts supérieurs du Québec auront été l’une des marques de commerce du gouvernement Johnson au cours de la session qui s’achève. Collège militaire Saint-Jean, chantier maritime MIL Davie, formation professionnelle, télécommunication, barrière commerciale interprovinciale, Loi sur les jeunes contrevenants, autant d’exemples d’un statu quo qui bouge, mais dans le sens toujours du contraire de nos intérêts.
Les actions de l’Opposition officielle. Ceci étant dit, j’aimerais également m’attarder quelques instants sur les actions et les gestes de l’Opposition officielle. D’abord, fait important, et dont le leader adjoint et moi même nous sommes fiers, c’est d’avoir réussi à porter la moyenne du nombre de questions de 7,1 à 10,2 par période de questions. Cette autodiscipline aura permis de toucher un plus large éventail de sujets, en plus d’insuffler à la période de questions, un rythme beaucoup plus dynamique en dépit de l’obstruction systématique du leader du gouvernement.

Par ailleurs, vous trouverez en annexe la liste des sujets que nous avons proposés en guise de motion de censure, motion du mercredi ou les interpellations. Vous constaterez que, pour l’essentiel, l’accent fut mis sur les dimensions économiques et budgétaires de la gestion du gouvernement libéral.

J’attirerais également votre attention sur la motion du mercredi qui traitait du processus de privatisation et de l’absence des règles d’éthique régissant ces opérations, comme nous l’avons abondamment illustré avec l’affaire M3i.
Vous aurez également noté que l’action parlementaire fut enrichie par l’interaction entre l’Opposition officielle à Québec et l’Opposition officielle à Ottawa. Je crois qu’en quelques occasions, nous avons réussi des actions communes fort intéressantes.
En terminant, comme il s’agit de mon dernier bilan de la 34ième législature et après neuf ans d’expérience comme leader de l’Opposition officielle, j’aimerais, si vous me le permettez, prendre quelques instants pour vous livrer certaines réflexions sur le fonctionnement du Parlement.
D’abord, sans présumer de rien, bien sûr, il m’apparaît que certains ajustements au fonctionnement de l’Assemblée nationale seraient nécessaires pour permettre véritablement de concrétiser l’esprit de la réforme de 1984. Nous avons commencé à réfléchir sur certains aspects de travail parlementaire qui mériteraient d’être améliorés. Par exemple, il faudra trouver une formule pour s’assurer que l’étude des engagements financiers s’effectue dans les délais requis, et surtout avec un meilleur suivi. L’exécution des mandats d’initiative ainsi que des mandats de surveillance se heurte constamment à la force d’inertie de la majorité ministérielle. Une réflexion s’impose sur les mécanismes privés à cet égard au règlement comme sur l’usage abusif de la motion de suspension des règles de procédures.
Le régime libéral a banalisé cette procédure exceptionnelle au point qu’elle est devenue un palliatif à l’improvisation. Finalement, je ne peux que déplorer que le leader du gouvernement n’ait en aucune façon manifesté la volonté politique nécessaire à l’adoption de nouvelles règles concernant la protection des témoins devant les commissions parlementaires.

Là-dessus, je dois vous dire qu’on a le rapport depuis plus d’un an, et même je dirais deux ans. Je termine en vous remerciant et en vous disant que j’ai apprécié travailler avec la tribune de la presse au cours de ces neuf dernières années. En vous disant aussi que pour ma part, j’espère qu’il s’agit seulement d’un au revoir et que les électeurs de mon comté voudront bien m’accorder le privilège de venir encore vous faire, de temps à autres, quelques déclarations bouillantes.
Le modérateur: M. Parizeau.
M. Girard (Normand): M. Chevrette, j’aurais une question pour vous moi.
Le modérateur: Normand.
M. Girard (Normand): Oui.
Le modérateur: Si tu veux attendre un instant, M. Parizeau devait faire une petite déclaration.
M. Girard (Normand): Je m’excuse. J’ai fait (?) des procédures. Je m’excuse beaucoup.]

[M. Parizeau:] Vous ne devriez pas, M. Girard, parce que justement moi je vais faire une déclaration très courte. J’aimerais beaucoup que justement après neuf ans de ce travail, on mette, enfin, vous mettiez autant que possible l’accent sur certaines des choses qui se trouvent dans son texte cet après-midi.
En particulier, la conclusion quant au fonctionnement du Parlement. Ce sont des choses, moi, qui dans certains cas me troublent depuis assez longtemps. Et je trouve épatant qu’en une seule page, on ait un résumé de certaines des choses dont on constate, on sait tous qu’il y a des problèmes de ce côté là, et qu’il faut les régler. Or, si dans le tohu-bohu qui nous prépare à une campagne électorale, néanmoins on pouvait s’arrêter quelques minutes à réfléchir tous à ça, peut-être que le prochain Parlement marchera mieux.
Je veux dire aussi, merci, M. Chevrette, à la fin de cette session, du travail qu’il a fait comme leader en Chambre. On peut difficilement imaginer deux hommes aussi différents que lui ou moi, mais on peut difficilement imaginer que deux hommes aussi différents s’entendent aussi bien. Je voudrais le remercier de tout ce qu’il a fait.
Bon, cela étant dit, quelques mots pour dire que, bon, maintenant, on prépare la campagne électorale. Je pense qu’on n’est pas beaucoup plus avancé tout à chacun qu’on l’était il y a quelque temps quant à la date des élections. Il faut simplement être prêt. Je ne vous cacherai pas que, de mon côté, je sors des deux ou trois derniers mois assez fier de l’équipe que nous avons réussi à constituer en préparation de cette élection.
C’est une équipe extrêmement diversifiée, venant d’un peu partout, comme on le sait, avec des gens d’une compétence tout à fait remarquable dans un bon nombre de cas, des gens qui laissent une carrière alors qu’ils sont au sommet de ces carrières là, et qui acceptent de venir donner un coup de main pour ce travail de construction d’un pays qui nous paraît tous essentiel. Je suis très fier de ce résultat. Je ne peux pas m’empêcher, vous me comprendrez, pas seulement pour des considérations partisanes, je pense qu’il y a des choses ici dont il faut se rendre à l’évidence, qu’en face de nous, il n’y a plus que des restes d’équipe, de ce qui a été une équipe. On ne voit pas grand chose poindre à l’horizon dans le sens du renouvellement de ce qui fut l’équipe originale de M. Bourassa et dont il ne reste maintenant que des lambeaux.
Nous avons, à travers cette législature, comme parti politique, élaboré un programme. Ça a pris un certain temps pour attirer l’attention. Maintenant que nous nous rapprochons de la fin de la deuxième période, c’est-à-dire l’élection et le début de la troisième
période, c’est-à-dire la campagne référendaire, je trouve fort intéressant de voir autant de gens, pas nécessairement toujours des amis, d’ailleurs, s’intéresser enfin à ce qu’il y a dans le programme du Parti québécois. J’aurai tout essayé, y compris de le sortir en magazine, de le traduire en anglais, de le pousser partout, là, enfin, ça y est, on s’intéresse à ça. J’espère qu’on notera, qu’en face de ce programme, il n’y pas grand chose.
Je constate aussi, comme bien d’autres, que les tentatives de mettre l’accent sur l’emploi que ce gouvernement a déployées depuis deux ou trois mois sont assez pathétiques dans leurs effets. Et, dans ces conditions, moi, je me prépare à une campagne qui va être à la fois classique et originale. Classique parce que je pense que, normalement, il faut vraiment qu’on l’amène, ce gouvernement, à montrer son bilan, à révéler sa performance, à montrer ce qu’il a fait et ce qu’il n’a pas fait. Classique aussi par les priorités que nous, nous allons établir sur le plan du plein emploi, sur le plan de l’égalité des chances, sur le plan du droit à la formation professionnelle, sur le plan du développement des régions, comme une bonne équipe qui veut, comment dire, arriver au gouvernement, mais dans le cadre, évidemment, d’un plan où il y a la souveraineté au bout de l’exercice, après référendum. Et, la souveraineté va nous donner, et ça aussi on va en parler, mais, bien sûr, il faut être capable de parler de la souveraineté dans ce qu’elle va nous donner. Elle va nous donner le contrôle de nos impôts. Nous donner le contrôle de nos lois. Elle va nous permettre de faire des choses qu’à l’heure actuelle on ne peut pas faire, comme province. Alors, donc, classique par l’attaque du gouvernement et un certain nombre de lignes de force de priorités qu’on a, original, par le fait que ce serait, si ça marche, tout ça, ça sera la dernière élection avant que le Québec ne devienne un pays souverain, grâce à un référendum qui aura lieu huit, 10 mois après.
J’ai bien vu la tentative qu’il y a eue pendant quelque temps, de traîner l’exercice référendaire dans le portrait et de faire en sorte que tout le monde s’excite au sujet du nombre de mois que ça pourrait prendre et de la forme exacte que ça prendrait ou que ça ne prendrait pas, ou de sortir certains éléments du programme du Parti québécois en disant: Oh, comme c’est curieux. On n’avait jamais vu ça avant. Et puis, je me disais: Il ne faut quand même pas que ça détourne l’attention du fait que ce gouvernement a présenté sa performance au public, jusqu’à ce que, hier matin, le programme constitutionnel du Parti libéral fut dévoilé dans le Soleil. En même temps que le soleil se levait, le programme apparaissait. On présentera Meech. On représentera Meech dans trois ans. Il y a, comme ça, des moments historiques… Vous comprendrez que je mets le point d’ironie, hein, qui est censé manquer dans la langue française, le point d’ironie, en parlant de… Mais ça va être merveilleux, comme opération, pendant la campagne électorale, ces discussion byzantines et constitutionnelles.
Ils veulent remettre ça. Ce n’est pas beau. Est ce que le mot «distincte» dans «société distincte» a des implications d’ordre juridique ou pas? Aïe ! ce n’est pas vrai. On ressort l’avis juridique, vous vous souvenez, qui était annexé à Meech? J’espère que vous allez faire des entrevues nombreuses avec M. Wells, qui était le principal exégète de ces avis juridiques. Aïe ! ce n’est pas des farces. Avec 12,4 % de chômage, on recommence les arguties sur la société distincte.
Comme disait un de mes collègues au Conseil des ministres autrefois, soit ! Soit ! Si M. Johnson veut s’embarquer dans les affaires constitutionnelles, moi, je vais lui mettre au moins une couple de personnes après lui, pour discuter de ces questions avec passion. Je dois dire que, pendant la campagne électorale, je pense que j’aurai d’autre chose à faire que ça.
Alors, voilà, quand ça, ça va tomber, je n’en sais rien. Pas plus vous, que moi. On verra bien. L’important, c’est d’être prêt à foncer le plus rapidement possible et puis, si tant est que les électeurs nous font confiance pour prendre le pouvoir, bien, d’essayer de remettre le Québec, de redonner au Québec une orientation claire, des buts précis, le goût de bouger, faire aboutir les choses. C’est dans cet esprit qu’on va se préparer.

[M. Girard (Normand): Ma question était pour M. Chevrette et ses réflexions de conclusion sur le fonctionnement du parlementarisme. Est ce que vous ne croyez pas que les 2 ou 3 éléments de réflexion que vous mettez dans votre conclusion peuvent difficilement s’appliquer dans le contexte actuel d’un régime politique traditionnel, d’inspiration britannique, où le Parlement est quelque peu à la remorque de l’exécutif, quand bien même qu’on le voudrait et qu’on ne le voudrait pas? C’est le cas. Est ce que vous ne croyez pas que vos éléments de réflexion sont de nature à s’appliquer uniquement dans un régime présidentiel comme celui que le Parti québécois préconise après la souveraineté du Québec?]

[M. Chevrette: Non. Je vais vous répondre non pour les motifs suivants. Il y a beaucoup de mandats d’initiative, par exemple, où il avait unanimité chez les 2 groupes de parlementaires. Il y a beaucoup de mandats de surveillance des 2 partis entre députés qui jasaient entre eux, qui parlaient entre eux, étaient d’accord, puis ça a toujours été l’imposition de l’exécutif et, manifestement, les parlementaires se voyaient contraints à une solidarité ministérielle qu’ils ne partageaient pas, dans les faits, parce qu’il y avait des échanges entre les vice-présidents et présidents, entre parlementaires.
Vous savez, entre députés, on parle beaucoup, puis ils disaient: Bien, ce point là… Je vais vous en donner, des exemples concrets. Lemieux a eu le courage d’aller en cour avec M. Lazure, de percer ça puis de dire, de s’imposer un peu plus. Mais ce n’est pas tous les présidents qui oseraient braver la solidarité ministérielle. Ça, c’est clair. Et je vous dis qu’il y a possibilité, s’il y a une déclaration
au Parlement, je songe à des formules, en tout cas, je vous ai dit que j’ai commencé à y réfléchir, mais je pense à une formule où on pourrait faire des déclarations. Ça ne met pas en péril la vie de l’exécutif que des parlementaires étudient une société d’État et le comportement d’une société d’État, les critères de gestion d’une société d’État ou qui prennent un mandat d’initiative. Ça a été, à chaque fois, des votes tranchés un contre un, puis… avec beaucoup d’abstentions, quand on participe aux petites sessions de travail. Moi, je me souviens, sur Urgences-santé d’avoir participé à une commission. On demandait un mandat d’initiative précisément puis ça été non, parce que le ministre a envoyé précisément son attaché politique dire à ses commettants, un après l’autre: il ne faut pas voter pour ça.]
[M. Girard (Normand): Mais, est ce que ça ne serait pas le même cas qui pourrait se présenter avec un gouvernement du Parti québécois dans le régime parlementaire actuel que nous avons?]
[M. Chevrette: C’est plus difficile. Je reconnais que c’est plus difficile, M. Girard, mais si les partis politiques se présentent avec le discours officiel disant qu’on va favoriser le travail parlementaire, puis qu’on ne s’y objecte pas à la première occasion venue, moi, je pense qu’on peut faire des pas importants. C’est un changement de mentalité ça qui s’impose dans un Parlement. Si le pouvoir exécutif ne permet pas ce changement de mentalité là, je reconnais que c’est plus difficile dans le type de parlementarisme dans lequel on vit mais, il n’en demeure pas moins que c’est inconcevable que sur neuf ans on ait réussi à peine deux ou trois mandats, c’est impossible. Et, comme par hasard, il y a la commission du budget et de l’administration qui, à chaque année, s’est taillée un mandat, mais au risque de quoi? Vous le savez. Allez demander à Lemieux à quel risque il a fait ça. Il va vous dire, bien, Jean Leclerc a été nommé avant moi.
Le modérateur: M. Venne.]

[M. Parizeau:] Peut-être, juste un mot dans ce sens là. Quand la réforme du Parlement, des institutions parlementaires, est amené par le Comité Vaugeois… c’est quoi? C’est 1984?

[M. Chenail: C’est l’étude de Richard Guay.]

[M. Parizeau:] … sous la présidence de Richard Guay, la décision est prise de renforcer les commissions parlementaires considérablement et, je vais, moi, dans les derniers mois, comme ministre des Finances, sentir déjà le changement, alors que dans les commissions jusqu’à maintenant, aïe, ministre des Finances, j’entrais là-dedans, je faisais la pluie et le beau temps. Là, tout à coup, on me disait: vous allez venir quand on décidera que vous venez et’ ce n’est pas vous qui mènerez le jeu, vous allez être en somme un témoin. Là j’ai senti… quand je suis revenu cinq ans plus tard au Parlement, cet esprit là était défait. C’est possible… c’est difficile, je suis d’accord avec M. Chevrette, mais c’est possible, si on le veut possible. Il va falloir réessayer ça, réhabiliter le travail des commissions.
Maintenant, juste une petite chose, vous allez me permettre mon commercial sur le programme du Parti québécois, le programme du Parti québécois ne prévoit pas de régime présidentiel. Ce fut le cas autrefois dans d’autres programmes antérieurs mais, à l’heure actuelle, il est muet là-dessus. Non, mais ça me permet de mettre en valeur à nouveau le programme du Parti québécois.
[M. Chevrette: Après ça, ils diront qu’on veut le cacher.
Des voix: Ha, ha, ha !
M. Girard (Normand): Ça va être quel régime?]
[M. Parizeau:] Pour le moment, on continue. Ce sont des institutions qu’on connaît bien. Peut-être qu’à un moment donné, dans un autre programme, il y aura autre chose mais, pour le moment, n’est ce pas, j’allais dire: qui ne dit mot consent.
[Le modérateur: Michel Venne.
M. Venne (Michel): M. Parizeau, sur un sujet particulier, hier, le gouvernement a annoncé la vente du Mont-Sainte-Anne, et je pense qu’un de vos députés, là – je n’en suis pas certain, je n’ai pas eu le temps de vérifier – mais on m’a dit qu’il y avait un de vos députés qui avait suggéré que la vente du Mont-Sainte-Anne pourrait être annulée si jamais le PQ prenait le pouvoir. Vous, quel est votre opinion là-dessus? Est ce que la vente du Mont-Sainte-Anne pourrait être annulée si vous prenez le pouvoir?]
[M. Parizeau:] Le député qui a dit ça, là, l’a dit d’ailleurs, à mon sens, très correctement. Il dit: Si c’est moi qui décidais, voilà ce que je ferais.

[M. Venne (Michel): Moi, je demande: Vous qu’est ce que vous allez faire?]

[M. Parizeau:] Moi, je suis en train de regarder les conditions de cette vente telles qu’elles apparaissent dans le mémoire confidentiel du Conseil des ministres. Et, moi, ça me rappelle des tas de choses, c’est merveilleux d’avoir l’information dans les mains comme on l’avait, comme je l’avais autrefois, moi, dans une autre capacité, un mémoire bien fait, là, je retrouve ma gang. Ça, je vois à peu près où ça a été fait aux Finances, ce mémoire là, c’est bien fait, c’est bien analysé. Je suis en train de le regarder. Comment dire? J’ai encore des hésitations sur le plan des transactions portant sur les terrains, sur les prix payés, des choses comme ça. Mais là, donnez moi le temps. On est dans la viande. Je ne trouve là-dedans rien d’énorme – avec un h. Si j’étais au pouvoir, j’imagine que j’aurais posé un certain nombre de questions, mais mon analyse n’est pas terminée. Sauf que… Aie, là, je suis en train de me rencontre que beaucoup de ces mémoires confidentiels, ça arrêterait bien des discussions si c’était rendu public. Ça n’a pas de bon sens de les garder confidentiel comme ça. Vous l’avez vu, lisez le ce mémoire là, il est très intéressant.
[M. Girard (Normand): Mais ce que vous avez vu jusqu’à maintenant ne vous fait pas tomber de votre chaise?]

[M. Parizeau:] Non, non, ce que j’ai vu jusqu’à maintenant ne me fait pas tomber de ma chaise, ce qui ne veut pas dire que je donne une sorte de bénédiction urbi et orbi, là, mais ça ne me fait pas tomber de ma chaise.

[M. Lessard (Denis): Est ce que c’est un engagement que vous prenez de rendre ce type de mémoire là confidentiel éventuellement si…]

[M. Parizeau:] Non. Ça, ce n’est pas un engagement que je prends. Je dis que c’est intéressant, surtout quand on est dans l’opposition.

[M. Chevrette: Sauf qu’au pouvoir, M. Lessard, on peut exercer notre jugement, puis rendre ces parties intéressantes, là, publiques.

une voix: C’est ça.

M. David (Michel): Oui, j’avais deux questions, M. Parizeau, totalement différentes. La première, sur le sondage de ce matin, Léger & Léger. Depuis la mi-avril le Parti libéral se maintient, je ne sais pas si c’est un plafond, mais enfin il y a ni augmentation ni baisse par contre, le Parti québécois a baissé de cinq points. Est ce que ça vous inquiète?]
[M. Parizeau:] Mais, non, pas si…

[M. Chevrette: Je ne sais pas où vous prenez vos informations. M. David (Michel): On parle de 51 à 41.]

[ M. Parizeau:] Ah, oui, vous prenez…

[M. Chevrette: Oui, il prend le dernier.]

[ M. Parizeau:] Mais, écoutez…

[M. David (Michel): C’était 51-41 à la mi-avril, c’est 40 …]

[M. Parizeau:] …tout le monde l’avait… Bien, oui, mais…

[M. David (Michel): …c’est en haut de 40 maintenant, là.]

[M. Parizeau:] Tout le monde mettait, vous vous souvenez, ça nous
a tous surpris le 51.

[M. Chevrette: Tous les autres sont 45(?)]

[M. Parizeau:] Écoutez, souvenez vous des commentaires qui ont été faits sur le 51. Tout le monde disait: Aie, c’est fort. D’ailleurs, quand vous prenez la liste de tous les résultats, on voit bien que c’est le 51 qui est assez exceptionnel, pour le reste.
[M. David (Michel): Alors, 45, c’est…]
[M. Parizeau:] Bien non, ce n’est pas 45, c’est 46, 47, je ne sais pas moi, dans ces coins là. C’est comme ça depuis combien de temps? Deux ans?
[M. Chevrette: Depuis 18 mois. C’est le seul 51 qui détonne. Faites vous donner les chiffres par ceux qui les possèdent, je ne les ai pas, mais je les ai regardés hier soir, moi, puis ce matin, puis le seul point qui détonne, c’est le 51. Le reste, ça joue entre 45, 47, 46, 45, 47, 46. Vous regarderez ça.
M. David (Michel): Bon, l’autre question portait sur M3i. Maintenant que l’Assemblée ajourne et que le gouvernement va gouverner, disons, d’une façon moins publique, on ne sait pas trop ce qui va arriver avec ça. Si le Parti québécois est élu, est ce qu’on peut prendre pour acquis que les démarches qui ont été entreprises pour faire restituer les actions détenues par M. Bertrand vont être poursuivies?
[M. Parizeau:] Je ne le sais pas, je ne sais pas ce qui ce sera passé d’ici là. Commençons d’abord par voir; c’est hypothétique en diable et puis je n’aime pas beaucoup faire de l’hypothétique sur quelque chose qui affecte une personne en particulier. Il y a des avocats des deux côtés qui se parlent et qui se rencontrent. Écoutez, je ne peux pas… Là, on désigne une personne en particulier; laissez quand même le débat entre les deux équipes se faire puis on va voir qu’est ce qui sera décidé puis qu’est ce qui aboutira; puis, quand les élections auront lieu, on verra où on en est. Mais, laissez d’abord les choses se dérouler. Moi, je ne suis pas au courant de ce qu’ils se disent.

[M. David (Michel): Mais, quand même M. Chevrette a été le premier à désigner, plutôt deux fois qu’une, cette personne là. Alors, la question me semble tout à fait…

M. Chevrette: Non, monsieur…]

[M. Parizeau:] Désigner une situation, ce n’est pas pareil.

[M. Chevrette: Et dans mon esprit, M. David, moi, je ne visais pas
M. Bertrand plus que M. Côté. Si vous vous rappelez tout mon questionnement des premiers jours, c’est exactement le contraire.]

[ M. Parizeau:] Exactement.
[M. Chevrette: C’est qui a recommandé, avec les deniers publics payés, de se faire donner des actions puis qui avait pris le poste, c’était Marcel Côté, ce n’était pas Bertrand. C’est le gouvernement qui a réagi en disant: Je demande à Hydro-Québec de poursuivre Bertrand pour le remboursement puis en blanchissant puis en bénissant Marcel Côté. Relisez les galées. J’ai redemandé, après, s’ils étaient en train de négocier les avis juridiques. Ça, à mon point de vue, quand le gouvernement donne une directive ou une voie à suivre, c’est rare qu’il s’assoit par après puis qu’il accepte de renégocier sa position qui a été très radicale. Fouillez donc du côté du règlement de compte au sein du parti libéral avant.]

[M. Parizeau:] Dites moi… Ça me rappelle une chose. N’oubliez pas, quand il a commencé M. Chevrette sur M3i, qui est ce qui était dans le collimateur, c’était Côté bien plus que, Bertrand. Parce que, là, il y avait un problème qui semblait être un conflit d’intérêts clair. Non, non, ne commençons pas à faire les hypothèses. À l’heure actuelle, il y a des gens qui cherchent à Hydro Québec à aboutir à quelque chose. On va bien voir ce à quoi ils vont aboutir. Puis on réexaminera ça, puis on reportera un jugement au point où on en sera à ce moment là.

[Le modérateur: Robert MacKenzie.

M. MacKenzie (Robert): Oui, M. Parizeau, dans la campagne électorale qui va commencer bientôt, là, est ce que vous souhaitez un débat télévisé des chefs? Et, dans ce cas, selon vous, qui devrait être admis à y participer?]
[M. Parizeau:] Ouf ! Écoutez, qui doit être admis, ça, on laissera ça aux négociateurs. Mais, moi, il y a une chose qui me paraît claire: c’est que, au fond, le public, il a droit à des débats comme ça. À notre époque, le public a droit à ça. Puis il est évident que, moi, je vais proposer, à un moment donné, un débat comme celui là. Je pense que c’est le droit démocratique des gens de voir, maintenant, à notre époque où on polarise tellement l’attention sur les chefs, qu’un débat ait lieu à la télévision ou la radio, comme on voudra, entre les chefs. Les gens s’attendent à ça, les gens ont le droit de voir ça puis, quand c’est utile pour le processus démocratique, c’est correct. Alors, quant aux modalités, bien là, vous permettez, les brefs ne sont pas encore émis. On verra !
[Le modérateur: Suzanne.
Mme Ouellet (Suzanne): M. Parizeau, vous disiez tout à l’heure: 12,4 % de chômage, on recommence les arguties sur la société distincte. Est ce que vous ne relancez pas la balle, finalement, à Daniel Johnson qui, lui, dit vouloir parler d’emploi alors que, vous, vous voulez parler de souveraineté?]

[M. Parizeau:] Mais, madame, ce n’est pas pourquoi qui ai ouvert Meech. Je vous assure ! Aie ! Moi, ça fait longtemps que, cette cannelà, je l’avais fermée. Souvenez vous, il n’y a pas encore si longtemps, M. Chrétien disait: Même si Parizeau gagne les élections, je ne lui ferai pas des propositions constitutionnelles. Cher M. Chrétien, je n’en veux pas ! Et là, tout à coup, je vois le premier ministre du Québec qui trouve qu’on n’a pas encore perdu assez de temps depuis 30 ans, et singulièrement depuis les cinq dernières années, et qui dit: Je vais essayer encore. Mon Dieu ! Mais ce n’es pas moi qui ai ouvert ça. Et je vous ai dit d’ailleurs, madame… Mais, pendant la campagne, je n’ai pas l’intention de m’occuper de ça mais je vais mettre une couple de bon gars après le premier ministre, là. Avec son Meech, on va lui faire faire des huit sur la glace avec ça.
[Le modérateur: Dernière en français, Rhéal Séguin.
M. Béguin (Rhéal): M. Parizeau, vous avez parlé tantôt d’une campagne à la fois classique et originale. Dans quel sens vous pensez que cette campagne ci va être plus originale que les autres?]
[M. Parizeau:] Elle est classique dans le sens de… Bon. Un gouvernement, après 8 ans de pouvoir et en particulier – 9 ans de récession, a une performance qu’il nous faut dénoncer. Ça, c’est notre travail. On doit bien ça aux gens qui, comment dire, ont perdu leur pouvoir – au cours des 4 dernières années, depuis le début de la ré qui, comment dire, ont perdu l’espoir d’améliorer leur vie ou ont perdu, enfin, ont perdu pas mal de choses. C’est la moindre des choses qu’on leur doit, de dire: Regardez donc ce que le gouvernement a fait.

D’autre part, il va falloir, quand même, comme dans une campagne classique, dire: Et voici, nous, le genre d’objectif qu’on veut donner, le genre d’orientation qu’on veut donner aux choses. Ça, c’est une campagne classique. Elle est très originale en ce sens que là, pour la première fois, apparaît la possibilité à court terme de récupérer tous nos instruments pour bouger. Pas seulement d’opérer avec les instruments d’une province, mais de dire rapidement, pas: On va en discuter au cours des 10 prochaines années; rapidement, avec un référendum, la possibilité de récupérer les instruments qui nous manquent pour atteindre ces objectifs. Ça, c’est très original, comme situation, au Québec.
C’est la première fois qu’elle se présente comme ça. Et bien sûr, on va dire: Écoutez, quand on aura tous nos impôts, avec une partie de nos impôts, voilà ce qu’on peut faire. Quand on va avoir tous nos impôts, voici, ce qu’on va faire. À l’heure actuelle, on ne peut pas passer des lois sur certaines choses. Quand on va être capable de passer toutes nos lois, regardez ce qu’on va faire. À l’heure actuelle, on ne peut passer des lois sur certaines choses. Quand on va être capable de passer toutes nos lois, regardez ce qu’on va faire.

Ça vaut la peine de regarder MIL, ici, le plus gros employeur privé de la région de Québec, de regarder MIL avec les yeux d’un gouvernement provincial puis dire: Bon, avec un gouvernement d’un pays souverain, qu’est ce qu’on fait avec ça? … de perspective différente en diable. C’est pas pareil. Si vous pensez un instant qu’avec un gouvernement de pays souverain, on laisserait la décision de construire un traversier entre chez nous et chez nous, un autre gouvernement…
[Le modérateur: On va passer en anglais, Peter?
M. Chevrette: Moi, je voudrais m’excuser, parce que fin de session m’oblige à être en Chambre à 3 heures.
Une voix:
M. Chevrette: Ce n’est pas parce que je crains les questions en anglais, je me suis amélioré.
Des voix: Ha, ha, ha !
M. Gray(?): Mr Parizeau.
M. Parizeau: Yes.
M. Gray(?): In referring to an original and a classic election campaign. I assume your are basically outlining the way the PQ will be dealing with the campain on a liberal’s record and how things will improve under sovereignty. Will those be the 2 teams of the election campaign as from the PQ perspective?
M. Parizeau: It is a classical campaign in the sense that… Obviously, we are going to discuss the performance of the government. That is our job. As the Opposition, after 9 years of power of the liberal, particularly in these 4 years of recession that we have known, they will have to answer of their performance. And, that is a classical exercise.
Secondly, we are going also to have to say: Well, that is where we want to go. And tell to voters, I mean: Do you agree with us. We want to strive towards… full employment. And this is how we are going to master everything we have in that direction.
In terms of equality of opportunity, we think that professional training, technical training is a right in a society like ours and this is what it implies as far as change is concerned. And the regions of Québec, they are in a sorry state, this is how we see the future. This is a sort of thing that we will say and that is all very …
At the same time, we will say… As a provincial government, there is so many of these things that we can achieve. This is how far we can go, as a sovereign country and we will have a decision to take
on this, within, let us say 10 months after the election. As a sovereign country, we would have all our taxes to administer, we would have all our laws, of … would allow to do things that we cannot do as a provincial government. And that is the original part of the campaign.

Une voix: And on that point, just if I can bring you back to that poil shows again that the majority of Quebeckers are not in favor of sovereignty. How can that affect the PQ strategy on the eve of an election when your campaign is exactly as well as the 9 years record but it is well on that sovereignty question. People are against it, the majority are against it.
M. Parizeau: Oh, yes? The poli you are mentioning, this morning, shows a very slight majority against sovereignty decided through a referendum that will take place next week. I find that a remarkable result. The question being asked in thoses terms, it is a remarkable result. After all that has been said, last several months by two governments and all that has been said in the last few weeks, a question like that, a referendum to decide on sovereignty next week… I say 10 months after the election. The question is: next week. 48-52. Good Show ! Good Show ! And now, the same pole asks, people: Do you think Quebecers should control all their taxes? 74 % says yes. Phew ! Do you think Quebecers should control all their laws? What is it? 70 %, 71 % says yes. And do you think Quebecers should sign international treaties? Something like 73 %, I think, say yes. Amazing ! They have just defined sovereignty.

In other words, there is a large group of people who are… A very large, a huge majority of Quebecers that are now ready to buy sovereignty retail, and that have some hesitation to buy it wholesale. Good show ! I am very encouraged.
M. Boivin (Gilles): Jack?

M. Branswell (Jack): I want to know, Mr Parizeau, talking about the election campaign, I mean if we take the starting point that the Liberals have been trailing you in the poles for quite a while and sonie of the stuff that Mr Johnson has been pulling out, do you expect this to get pretty dirty?

M. Parizeau: To get what?

M. Branswell (Jack): Do you expect the campaign will get pretty dirty?

M. Parizeau: One has always has to be prepared for this. It is not inevitable. But one has to be prepared.
You see, I am assuming that whenever the ultimate decision, not necessarily the decision of that election, but the ultimate decision of a debate like ours, like the one that has taken place for so many years, when the answer is now near, or close, and the question is so important as the one we are fundamentally raising, some people get excited, and the campaign can become quite dirty. That is… I mean, what else is new? Well… You know, the first campaign that I have known in 1970 was probably the dirtiest that I have seen.
In a sense, I would say things, on the long period, you know, over the last quarter of a century, things have improved. 1 find it… Maybe it is because I am getting older, I do not know. But I find that things are somewhat less dirty than they were.
M. Branswell (Jack): Do you think that Mr Johnson has given you the argument that if you win the election, that you will have the mandate? I mean, it seems what he was saying in St. Johns, this weekend, was that if you win the election, you have the mandate to begin to negotiate sovereignty? Did you hear that?
M. Parizeau: Oh, I have, yes ! I have de mandate to do what the program of the Parti québécois had been signed for two years. It is very odd that the Premier of Québec, suddently, has decided to read the program of the Parti québécois. I cannot over it ! It is so clear. What mandate do we have? The mandate is there. I mean, why do not everyone read it? It says, quite clear, it is on sale at 2,95 $ everywhere ! For heaven sake !

I gather that he wants a mandate that was not written anywhere, since yesterday. He wants the mandate, if he wins the election, to reopen the Meech discussions withe the rest of Canada within three years. Lovely ! That is a new mandate, I had not idea that he wanted a mandate on this and I am sure that most liberals in Québec have not the fogiest idea that he was going to ask that mandate: If I win the election, I will not reopen the major decision of knowing whether Québec is a distinct society or not, in a situation where unemployment is at 12,4 %. The sex of angels ! My God !
M. Boivin (Gilles): Sandro.

Une voix: Mr. Parizeau, what role do you see Mr. Lucien Bouchard playing in the …

M. Parizeau: He will play exactly the saine role with respect to me, as I played with respect to him during the federal campaign. He had the national campaign and I went into all Canada, small places, local radio stations. It was great fun. I mean, it took me f ive or six weeks of campaign. It was a campaign, in a sense, behind him. And the saine sort of thing is being prepared, with an additional role that is an essential one, in terms of hockey, he has to cover Chrétien !

M. Boivin (Gilles): Ray Kalb.

M. Kalb (Richard): Mr. Parizeau, there has been some discussions, the last f ew days, about the number of votes that are required for you to have a mandate to declare sovereignty. Mr. Bouchard got involved. And I would like to hear from you what you think you need to have the moral authority to declare Québec an independent nation and have it stick together?

M. Parizeau: But why discuss that about the electoral campaign, though? We take power during that election…
M. Malb (Richard): An I talking about a referendum vote.

M. Parizeau: …and if we have the largest number of seats, with respect to the sovereignty debate, what percentage doies it take? You have asked me that question four years ago, three years ago, two years ago, six months ago, three months ago. Ail this gives the saure answer. But, Ghislain Dufour never holds up and therefore every, four years ago, three years ago or six months ago, last week, he said: It is more than 50 %. You can grow this thing as often as you want.
But, all I say is that: For God sake ! Can I have six weeks of peace with that question? I always give the saine answer, and you always ask the saure question. And that is what we are talking about. The referendum will take place 10 months after the election. At the present time, we are talking of election in Québec. And who wins the election? Those who win the election, are those who take the largest number of seats in that.

Une voix: Sir, I am sorry, but the question was not precise. I am talking about de referendum itself. Assuming that you take power, when you hold the referendum, there has been some question about what percentage of the vote is required?

M. Parizeau: Not in my mind, not in the program of the Parti québécois, not for those people in Québec. In the minds of two or three people, usually … of the Conseil du patronat who finds amongyou a loud speaker for a few minutes. Every three months. They would like more. They are the only one to like more. I do not blame them for wanting more. They are federalists. And therefore, if it could be 102 %, they would prefer that. But that is not the rule of the democracy.

Le modérateur: Réal Séguin. Patricia? Non.

M. Béguin (Réal): …this month, the Trade Minister signed an agreement to lift the barriers on interprovincial trade. How would this issue way into the campaign as you can see? How would this be used by your party in order to promote Canadian economic union in the Southern Québec?

M. Parizeau: I cannot really answer you,•Mr Séguin. There seems to be some rather (?) elements that were discussed. Because of that mess of the internat postal system in Government, yesterday, I revealed a report that was highly interesting about the subjects that were discussed in Fredericton by the Trade Ministers, on June 5th and 6th. But they have had another meeting on the 15th and 16th. And there is still discussion going on and they are trying to reach something on the 30th. There has been some talk among business people that seem to be disappointed by the result as it would stand today.
But you have to realize that the 200 page document that is an involving document, as things go on, the Government has been setting tight on it here. I have not got a copy. There seems to be copies circulating in some circles, particularly in some business and academic circles in Ontario. I am going, in the next few days, I hope, get a copy from someone from outside Québec, just to try to know what on earth is going on. And until then, I can not comment. The subjects are very interesting. I am not trying just to shove the thing away. From what we hear, from what is written by some analysts in the newspapers, it would seem, for instance, that the dispute settlement mechanism would be far less than what exists in terms of cohesion, of what exists in NAFTA or in the Canadian American Trade Agreement. If that is so, it is a pity ! Last December, when that commercial fight started between Ontario and Québec, we should have had one.
We are going to live as a sovereign nation in a North American market where the various pieces are linked by trade agreements of various sorts that require to operate properly dispute settlement mechanisms. We have got one with the US, we have another one for US, Mexico and Canada, we just do not have one between the Canadian provinces. And there was an attempt to get that one. And I gather, from the various things we hear, that it will not be what it should be. But I can not say, I have not seen the bloody 200 pages. i mean, if anyone in Canada can send me a copy, I would like to see it. My own Government refuses to circulate anything about the subject here … at the time of the Charlottetown Agreement. Voters should know what is going on. Hide(?) the thing. I will try to get a copy and then be more explicit in my reaction to you.

Une voix: Les deux dernières questions, Patricia et Barry ..

Mme Enborg (Patricia): Yes. Mr. Parizeau, Ycur party has been ready for a long time for this election and no one knows exactly when it will corne. How do you keep the morale up, the get ready to go to the poles?
M. Parizeau: …it is not the moral, really, it is the energy on…it is quite a job, you know, to have thousand s and thousands of volonteers and keep them from week to week always saying: Look, it is
beautiful thing. I do not think we have ever been as well organized as we are now in any previous election that I have known.
Mr. Parizeau, what are your thoughts today, I am wondering. Evidently you think you sat in the Opposition leader’s chair for the last time and that when you corne back to Québec City, you will be in a different seat, I wonder if you could check…

M. Parizeau: Thank you sir.

Des voix: Ha, ha, ha !
Une voix: Do not say that, that is what you think, my opinions
energy level up to coming. Ha, ha, hal Some are getting pretty restless of these volonteers. There are thousands of people in the Tanks, it is a are not important.

Des voix: Ha, ha, ha !

Une voix: I am wondering, could you share what kind of thoughts that might be running through your mind today as you leave this legislature.

M. Parizeau: Look, I will be very candid with you, when I saw about half an hour before coming in this room, the conclusions of Mr. Chevrette on the workings of Parliament, I said, by God, that is it. I mean, yes indeed. If there is one thing today, after the end of the session that was, by enlarge, a useless session, that we should ask ourselves, at the end of this, is how can we… what are the lessons of the last few years that we can craw to have ‘our Parliament work as well as possible. And I am very candid, you may not believe me but
that is exactly the kind of thoughts that are draw at the end of that session, at 20 minutes past three.

(Fin à 15 h 23)]
[QParizeau19941221cp]
[Douze heures deux minutes)]
[ Chevrette: Je vous ferai la lecture d’un cours communiqué, et, par la suite, M. Parizeau fera un bilan plus exhaustif.
Tout d’abord, comme vous le savez tous, c’est le 29 novembre dernier que nous avons commencé cette session. Mais vous verrez que, à la lecture du bilan, nous n’avons pas chômé en ce qui regarde, en particulier, la réalisation multiple de nos engagements électoraux.
En fait, les travaux de la Chambre ont été marqués plus particulièrement par des événements majeurs, notamment, le discours d’ouverture du premier ministre, le dépôt de l’avant-projet de loi sur la souveraineté et le projet de loi démontrant la ferme volonté du gouvernement d’aller de l’avant avec ses engagements.
La Chambre, ayant été convoquée après le 15 novembre, eh bien, le gouvernement était conscient qu’une bonne partie de sa législation ne pourrait être adoptée sans le consentement de l’opposition. on le savait au départ.
Par ailleurs, forts de notre mauvaise expérience dans l’opposition officielle, nous avions promis de ne pas suspendre les règles de procédure et, comme d’habitude, nous avons respecté nos engagements en ce qui nous concerne. Il n’y a pas eu de bâillon; il n’y a pas eu de suspension de règles.
Le gouvernement a présenté un nombre restreint de projets de loi, ais, ce faisant, il axait son action dans le sens de la réalisation de ses promesses électorales.
Il y a eu le dépôt d’un projet de loi visant à instaurer une liste électorale permanente, déplafonnement du Fonds de solidarité de la FTQ, abolition de la loi 142, abolition de la loi 198, qui a été déposée ce matin, changement de structures à l’organisation de la Caisse de dépôt et Hydro-Québec, modifications législatives permettant un meilleur contrôle du jeu illégal. Voilà autant d’exemples d’un gouvernement qui a le goût de bouger, et, qui, en moins d’un mois, a mis sur la table sept projets de loi visant à concrétiser ses engagements.
Par ailleurs, à cette liste, on peut ajouter d’autres pièces législatives importantes, telles que la Loi sur les accords de commerce international; la Loi modifiant l’organisation policière en matière de police autochtone; la Loi modifiant le Code de procédure civile, qui vise à réduire les délais devant les tribunaux; la Loi annexant un territoire de la ville de Chicoutimi, qui était un projet de loi au nom d’un député, mais qui vient régler un problème qui perdure depuis des années, et, la Loi sur la fiscalité municipale, qui vient apporter des correctifs à la loi 145, adoptée par le précédent gouvernement.
Évidemment, quelques projets de loi viennent donner suite à des mesures présentées par l’ancien gouvernement. On pense ici, par exemple, aux suites du budget Bourbeau, aux permis de conduire avec photo, ou, encore à la Loi modifiant la Loi sur les normes de travail. Ça découlait du dernier budget Bourbeau.
Ayant décidé de ne pas suspendre les règles de procédure, vous comprendrez que le nombre de projets de loi adoptés est plutôt restreint. Rappelez vous l’année où les libéraux au pouvoir avaient adopté plus de 20 projets de loi, et une seule motion avait été nécessaire, c’était un bâillon global à la fin, pour vider leur feuilleton.
Cependant, ayant à l’esprit la session de 1985, qui a été amorcée le 16 décembre et au cours de laquelle nous, comme opposition officielle, avions donné notre consentement pour l’adoption de huit projets de loi, ou encore, celle de 1989, qui ressemble étrangement à la session actuelle, alors que les travaux débutaient le 28 novembre 1989 et que nous avions adopté 21 projets de loi de consentement. Inutile de vous dire, donc, que je m’attendais à plus de collaboration de la part de l’opposition.
Alors que le gouvernement avait le goût de bouger, l’opposition, elle, souhaitait faire du surplace, et ils ont tout fait pour mettre les bâtons dans les roues à la liste électorale permanente; 43 députés sur 47 ont parlé, malgré le consensus qui, pourtant, s’était dégagé depuis 1992 entre les deux formations politiques. Ils ont refusé le consentement pour adopter les suites des lois présentées par leur adopter un projet de loi visant à réduire les délais devant les tribunaux. Ils ont refusé le consentement pour apporter des modifications à la Loi sur la fiscalité municipale qui, pourtant, corrige les iniquités flagrantes de la loi 145 et la loi 26 de M. Ryan. Ils ont parlé au-delà d’une vingtaine de députés contre et, ce matin, ils se sont levés pour voter pour, parce que, sachant qu’ils auraient l’air fou devant les unions municipales.
Ils ont refusé le consentement pour étudier un tout petit projet de loi de deux articles qui modifiait le Code de sécurité routière afin de préciser le pouvoir des municipalités de réglementer le trafic lourd. Et ils ont refusé également le consentement pour étudier un projet de loi qu’ils avaient eux mêmes proposé: le permis de conduire avec photo. Il faut le faire ! Ils ont monopolisé le temps de la Chambre en faisant parler, comme je le disais tantôt, 43 députés sur le projet de la réforme électorale ou encore, 46 députés sur la loi de la construction, 22 députés sur la loi de la fiscalité municipale, la loi 45.
Le gouvernement, je pense, a démontré son goût de passer à l’action en présentant, d’autre part, quatre déclarations ministérielles, celles de MM. Ménard sur les vidéopokers, Rochon sur le financement triennal des organismes communautaires, Campeau sur les mesures fiscales concernant l’achat d’une première maison, et la mienne sur la mise en place d’un programme d’achat-rénovation pour le logement social.
De son côté, l’opposition officielle a réussi, en invoquant un peu toutes sortes de motifs, à se défiler de l’étude des engagements financiers. Ce sont leurs propres engagements financiers que nous voulions réaliser avant Noël. Ils ont tout bousillé ça.
Quant à la période de questions, je puis vous rappeler qu’à l’époque où l’ancien premier ministre, Robert Bourassa, nous accusait de ne pas parler d’économie à la période de questions, on peut dire que son dauphin n’aura guère appris la leçon puisque – vous l’aurez constaté – les questions économiques ont été, à toutes fins pratiques, absentes de la période de questions, pas plus, d’ailleurs, que celles touchant l’environnement, d’ailleurs. Je crois qu’il n’y a même pas eu une question, sauf sur une étude pour la Baie-James au ministre de l’Environnement.
L’opposition a plutôt cherché à justifier son boycott du processus de consultation constitutionnelle. Il a inventé des épouvantails avec des soi-disant listes de noms et s’est acharné sur le sort de la députée de Sherbrooke.
Je pense qu’un autre aspect positif de la session au point de vue parlementaire, outre l’absence de motion de suspension des règles, est le fait que nous n’avons que très rarement siégé passé minuit. C’est la présence à la période de questions des ministres et des députés en Chambre puisqu’à aucun moment il n’y a eu appel au quorum. Pas un
appel au quorum dans cette session, c’est fantastique, et nos ministres, jamais plus que un ou deux, et c’était à cause de missions. En un mot, il y a eu un excellent travail de la «whipperie», que je tiens à remercier, et je dois vous dire que je suis très heureux
d’avoir réussi à ne pas siéger, sauf une nuit où on leur a offert à minuit et demi de ne pas siéger, et ils ont refusé le consen
tement, ils voulaient se faire plaisir. Nous avons donc eu le respect de nos engagements, et j’en suis très fier.]
[M. Parizeau:] Alors, je voudrais dire quelques mots, moi aussi. Le 4 janvier, le gouvernement aura été en place depuis 100 jours. Alors, puisque les congés des Fêtes arrivent, on vous a distribué aujourd’hui ces 100 jours du gouvernement sous forme, simplement, d’indications de ce qui a été fait, par grands thèmes. Je suis très fier de ça.
Nous avons reçu le mandat, en étant élus, d’abord, de déboucher, de faire aboutir les choses et, d’autre part, d’enclencher le processus menant à la souveraineté. Bien, nous avons fait les deux. Je voudrais d’abord parler de ces décisions, de ces réalisations qui font, là, qu’un certain nombre de choses se sont mises à bouger à nouveau.
D’abord, au titre du fonctionnement du, gouvernement, il y a plusieurs choses dans la note qui vous est présentée, mais je voudrais mettre l’accent sur quelques unes d’entre elles seulement. La décision a été prise de redonner aux gestionnaires des ministères, c’est-à-dire d’abord et avant tout aux sous-ministres, sous la direction des ministres, l’administration de leur budget. Quatorze ans de compressions budgétaires avaient amené un immobilisme incroyable dans l’autonomie des ministères de gérer leurs propres affaires. Le Conseil du trésor en était rendu à contrôler l’affectation des attachés-cases et des agendas dans les ministères, directement.
Pour ceux qui ne sont pas au courant de la machine – mais vous l’êtes, vous la connaissez – ce qui vient d’être fait par Mme Marois est quelque chose de majeur dans le sens de l’administration de l’ État québécois. On va déterminer maintenant des enveloppes dans chacun des ministères et sujets, évidemment, à l’application des lois et des conventions collectives. Les gestionnaires, dans ces ministères, sous la conduite de leur ministre respectif, vont voir comment c’est affecté.
Cela entre en vigueur dès la prochaine année. Et, déjà, c’est en train d’être mis en place. On ne tourne pas ça en 24 heures. Il est entendu, d’autre part, que les enveloppes… Il n’y aura plus, comme ça, d’annonces de crédits périmés en plein milieu de l’année où le verbe «périmer» devient transitif direct, je périme, tu périmes, il périme, là. Il y en aura des crédits périmés. On verra bien où est ce qu’ils sont à la fin de l’année. Mais chaque ministère reçoit une enveloppe et la totalité des enveloppes de programme sera, en 19951996 au même niveau qu’en 1994-1995. Il y en a qui disent: Vous n’allez pas assez loin. Bien, moi, je réponds seulement: Ça ne s’est jamais produit, ça. Ça va être la première fois.
D’autre part, du côté de la machine des revenus, de l’organisation des revenus, nous avons décidé d’appliquer la loi 84, qui avait été adoptée en Chambre il y a un an et demi, à l’égard des vidéopokers. Le Québec perd 250000000 $ par année parce que cette affaire là n’est pas réglée. L’argent qu’on ne va pas chercher de ce côté, il faut aller le chercher chez les contribuables ordinaires. Il n’y a pas de raison. Donc, c’est mis en place. L’opération est en train de se faire.
La lutte à la contrebande d’alcool a été – comment dire? – non seulement activée, mais complètement changée. Le cadre d’instructions qui est donné à la S1 reté du Québec et au ministère du Revenu fait que les résultats devraient se faire sentir sur les finances gouvernementales rapidement. Ce que je peux dire par rapidement: Pendant la saison de Noël, on devrait voir une amélioration très sensible. On perd 200000000 $ par année. L’argent qu’on ne va pas chercher dans l’alcool à cause de la contrebande d’alcool, faut aller le chercher chez les contribuables. Il n’y a pas de miracle là-dedans.
Il était stupide que l’ancien gouvernement, désespéré de trouver de l’argent, de limiter les sorties d’argent du gouvernement, laisse chez eux les quelques centaines d’employés occasionnels, les quelques centaines d’employés occasionnels qui, chaque année, reviennent faire de la vérification de formules d’impôt. C’est vrai qu’il gagnait ainsi quelques dizaines de millions, mais il en perdait 120000000 $. On a ramené ces équipes là immédiatement au travail. Ce qui est en train de se produire, en somme, c’est un changement dans le fonctionnement du gouvernement.
J’ajoute, évidemment, un certain nombre d’autres décisions qui ont été très importantes, comme, par exemple, la décision de la présidente du Conseil du trésor, qui est responsable de tout le premier volet dont je parlais tout à l’heure et qui a décidé, aussi, de faire aboutir cette entente avec le syndicat de la Fonction publique sur l’équité salariale. C’était prêt depuis déjà un bout de temps ça, sauf que le gouvernement cherchait encore à négocier des choses à ces sujet.
Alors, la présidente du Conseil du trésor, Mme Marois, a tranché et puis, ces clauses, qui avaient été négociées, sur l’équité salariale, comme vous le savez, ont été mises en vigueur très rapidement. Dans un bon nombre de cas, ce n’est pas tellement une question de passer de nouveaux projets de loi, c’est une question seulement d’appliquer les choses.
Sur le plan économique, il’ s’est fait beaucoup de choses. Là, ce que vous avez devant vous n’inclut pas l’annonce de ce matin sur le programme de déductibilité des intérêts pour la construction domiciliaire, mais ça vient s’ajouter aux crédits achat-rénovation qui ont été décidés. Dans le domaine du logement, on avait pris deux engagements, ces deux engagements là sont déjà réalisés. Le plan de démarrage des entreprises, avec les garanties de prêts fournis par le gouvernement mais administrés par les institutions financières, ce plan de démarrage, c’est le cas de le dire, a démarré dans les 13 premiers jours d’application, les 13 premiers jours ouvrables. Il y a au-delà de 200 prêts, 210 prêts, à ce que les institutions financières nous ont rapporté, qui ont été conclus, finis, terminés. Jamais une machine gouvernementale n’a démarré aussi vite que ça. On se comprend bien. Ce n’est pas du tout un rythme de fonctionnement là, c’est juste les premiers jours, la rampe de lancement.
Nous avons, dans des petites choses comme dans des grandes, cherché à activer. À cause de la réforme Axworthy, des premières normes canadiennes Axworthy, le service de recherche d’emploi, dans ce magnifique carrefour Jeunesse emploi de Gatineau, qui traite 4000 cas par année, par lesquels passent, comme cas réussis chez les jeunes, 3000 jeunes ont un emploi à travers cette machine là chaque année. Tout le service de recherche d’emploi a été mis en péril parce que le fédéral a simplement retiré ses subventions. En huit jours, on a sauvé ça. Les avis de licenciement, les gens étaient à pied; huit jours après ils étaient de retour au travail. Et par une formule, sans doute, comment dire, d’urgence, et d’ici le 31 mars, on va trouver une façon correcte de faire fonctionner cela.
Je dois dire, d’ailleurs, que la formule, ça nous a amenés à nous intéresser tellement à cette formule là que j’espère bien qu’elle va pouvoir essaimer ailleurs au Québec. Mais à l’opposé, en termes géographiques, regardez ce qu’on a réussi à faire en Gaspésie et dans le Bas-du-Fleuve, Donahue Matane est rouvert, Cartons Saint-Laurent qui est juste à côté à Matane passe du carton recyclé – parce que c’est devenu trop cher là-bas – au bois, fin de cette année. C’est plusieurs centaines d’emplois là-bas.
M. Gendron a littéralement, pour un coût zéro – oui, enfin, un avion aller-retour – sauvé le plan forestier de l’Est du Québec. Le gouvernement fédéral menaçait de se retirer de ce plan forestier, 10000000 $ par année pour à peu près 6000 producteurs de bois dans cette région. M. Gendron a simplement annoncé que si le fédéral se retire le 31 mars, le gouvernement de Québec se substituera à lui. Ça a suffi pour que le fédéral reste dans le dossier. C’est sauvé pour un billet d’avion aller-retour, une conférence de presse à Rimouski.
Des interventions de cet ordre là sont en train de se produire un peu partout au Québec. J’en suis très content. Enfin, comment dire, on bouge. Évidemment, il faut que je note parce que c’est très important sur le plan de la relance économique du Québec, le lever du plafond applicable au fonds de solidarité qui était rendu à 100000000 $ et qu’on a simplement levé dans le sens de ce qui a été indiqué. Je pourrais mentionner bien d’autres choses, mais je me limite à un certain nombre de choses qui me paraissent exemplaires.
L’éducation et la culture, pas mal de choses sont en préparation. On le voit déjà. Mais je suis très heureux que le ministre de l’Éducation ait procédé à cette série d’expériences de sauvetage de petites écoles dans les petites communautés, les petites collectivités. L’histoire de Batiscan, ensuite celle de Saint-Jean-Eudes de Jonquière et maintenant Lefebvre, dans les Cantons de l’Est, trois formules différentes pour sauver la dernière école de village ou la dernière école de quartier. Il y a quelque chose de plus que symbolique ici. Il y a la recherche d’une formule qui reconnaît l’école, la dernière école, comme un centre communautaire essentiel.
Nous avons fait sauter la taxe à l’échec au niveau collégial. Nous avons, comme nous l’avions annoncé – c’était un engagement de la campagne électorale – implanté l’Institut national de l’image et du son à Montréal, un certain nombre, donc, de réalisations et, surtout, la préparation de cette transformation profonde de la formation professionnelle à laquelle nous allons continuer de travailler dans les mois qui viennent.
Du côté de la santé et des services sociaux, nous avions annoncé qu’un certain nombre de changements importants seraient faits dans la répartition des ressources financières, entre les ressources lourdes, les ressources plus légères. Comme vous avez pu l’entendre ce matin, à la période de questions, le ministre de la Santé est maintenant prêt à procéder. On devrait voir, dans les deux mois qui viennent, une série de déclarations à être faites quant à des nouvelles orientations profondes de ce côté là.
Il est clair aussi qu’on a fait sauter une série de choses un peu ridicules; non, pas ridicules, odieuses, comme ces tickets modérateurs suspendus au-dessus de la tête des gens et simplement arrêtés sur les traitements en chimiothérapie ou des choses comme celles là; on a tout balayé ça.
Les relations avec les autochtones. Il s’est dit beaucoup de choses pendant ces trois mois. Je voudrais simplement souligner qu’indépendamment de la rhétorique, là, nous avons signé une entente tripartite sur la prestation des services policiers dans les communautés cries de la Baie-James; c’est fait, c’est signé; je suis très heureux que ça soit signé. Comme quoi, quand on prend les dossiers un par un, on peut avancer.
D’autre part, après deux ans de négociations intenses de la part de M. Guy Coulombe avec les nations attikameks et montagnaises, on en était arrivés – et ça, donc, sous trois premiers ministres; il y a une continuité, ici, tout à fait remarquable. Sur la recommandation de M. Guy Coulombe, nous avons décidé de procéder à la préparation d’une offre globale. Important, je pense, c’est la première fois, depuis l’entente de la Baie-James, qu’une démarche analogue est faite à ces deux nations. Elle leur a été présentée, comme vous le savez, la semaine dernière et je pense que… Je croyais, quand je l’ai annoncé, que c’était une bonne base, un bon départ de négociation dans ce cadre global. Puis je pense, vous voyez, que les échos qu’on eus jusqu’à maintenant, ça a l’air d’être une bonne base de départ.
J’accorde beaucoup d’importance et d’attention au fait que, sur des choses concrètes, on puisse faire pas mal de progrès avec, sinon toutes, en tout cas, un bon nombre des nations autochtones du Québec. Je suis heureux qu’il y ait des espèces, une sorte de déblocage contre ça.
Finalement, sur les relations intergouvernementales, eh bien, nous avons procédé à un certain nombre de choses, comme récupérer 34000000 $ du gouvernement fédéral sur le référendum de Charlottetown; il était temps. M. Landry a assuré ce que je luis avais demandé de faire, c’est-à-dire la reprise, là, des liens tout à fait privilégiés entre le Québec et la France. Je dois avoir l’occasion, à la fin du mois de janvier, d’ailleurs, d’aller en France – comment dire – participer à cet exercice là. Mais le virage s’est pris très vite.
Je comprends que vous trouverez pas mal plus de choses dans ces pages mais, sur certains, on nous avait dit: Vous promettez de bouger, bougez. On l’a fait.
Deuxième volet, maintenant. Ce sera plus brièvement, nous avons déposé un avant-projet de loi, vous le savez, sur la souveraineté du Québec. Ce projet de loi a été expédié partout, à toutes les portes. L’intérêt est considérable. La raison pour laquelle la ligne 1-800, hier, n’a pas fonctionné pendant quelques heures, c’est qu’en dépit du fait qu’il y ait 10 téléphonistes dessus, on était rendu au rythme de 1 200 appels par jour, et ça a craqué. Alors, quelques heures plus tard, on recommençait avec encore davantage de lignes. Il y a un intérêt considérable. On le sait, on le sent.
Je suis heureux de constater aussi que l’élargissement que nous avons voulu donner à l’éventail politique, dans le sens large, là, a trouvé une première acceptation chez M. Dumont. Nous en sommes maintenant à l’étape de la préparation des commissions régionales pour le mois de février. J’ai annoncé, ce matin, les deux grandes présidences, celle de Montréal et celle de Québec. Au cours des jours qui viennent, j’en annoncerai d’autres, au fur et à mesure où les jours passeront.
D’autre part, nous nous sommes entendus, évidemment, sur – comment dire – la préparation de ces commissions. Une bonne partie du mois de janvier va être consacrée, pour un bon nombre d’entre nous, à la préparation, effectivement, de ces commissions de février, mars.
Voilà à peu près, j’ai l’impression que, en trois mois, on a avancé pas mal de choses. J’ai l’impression qu’on a tenu un rythme qui, d’autre part, est soutenable. Ce que je dis ici par ça, c’est qu’il y a encore énormément de choses dans les «pipelines», là, de choses à faire aboutir. Il ne faudrait surtout pas s’imaginer que c’est la fin de ce grand mouvement. Au contraire, en un certain sens, ça n’est qu’un début. Il ne se passe pas de journée sans qu’on examine des choses à décrocher, des choses à changer, des choses à modifier, des choses à faire avancer. C’est tout à fait soutenable comme rythme, et, ça va continuer.
D’autre part, sur le plan de la préparation du référendum, là, nous nous sommes donné des calendriers très astreignants, ce qui est bien. Parce que, dans le mesure, justement, où ça attire, à ce point, l’attention, ça veut dire que beaucoup de gens vont se renseigner, vont lire ce qu’on va continuer de leur envoyer. Parce que l’avantprojet de loi, c’est un début, ça. Ce n’est pas la fin.
Je pense qu’on va être capable, en relativement peu de temps, de réaliser l’engagement que nous avions pris, et, de dire: Voilà, c’est sur la table. Regardez, et, après ça, votons. Merci.

[M. Kelley (Mark): O.K. On va commencer. Gilles Morin.

M. Morin (Gilles): Oui, M. Parizeau, première question. Vous avez annoncé deux nominations ce matin. Avez vous demandé au président du Mouvement Desjardins, M. Claude Béland, de présider la commission de consultation?]
[M. Parizeau:] La grande commission? Non. Il n’y a pas de… Il y aura une commission nationale…
[M. Morin (Gilles): Oui, oui, c’est ça.]

[M. Parizeau:] …pas de tous les présidents régionaux…
[M. Morin (Gilles): Oui, oui.]

[M. Parizeau:] …tel qu’on l’a annoncé, mais, celle là, c’est moi qui la préside.

[M. Morin (Gilles): Bon. Alors, M. Béland n’a pas été approché, d’une façon ou d’une autre.]

[M. Parizeau:] Comment?

[M. Morin (Gilles): Vous n’avez pas approché M. Béland, d’une façon ou d’une autre.]
[M. Parizeau:] Non, pas pour une présidence régionale, non.

[M. Kelley (Mark): Claude Brunet.

M. Brunet (Claude): M. Parizeau, est ce que vous voulez vraiment que les libéraux du Québec participent à vos commissions régionales, et, si oui, qu’est ce que vous êtes prêts à leur offrir de plus que ce que vous avez déjà offert à M. Johnson?]
[M. Parizeau:] Ça m’est très difficile de répondre à cette question là, parce que je ne sais pas exactement ce qu’ils veulent. Et, quand on me dit: On voudrait pouvoir discuter de nos propositions, bien, j’ai dit: Sans doute ! Lesquelles? Ils passent leur temps, en même temps qu’ils demandent, qu’ils, semble t il, posent des conditions, ils passent leur temps à se demander s’ils vont organiser des commissions pour définir leur position ou pas. Vous le savez, moi, l’avenir du fédéralisme ou le changement à apporter au fédéralisme? Je n’en ai pas la moindre idée.
Alors, on nous dit: Est ce que vous accepterez que tout puisse être discuté à ces commissions? Bien sûr, voyons ! Mais, une fois que vous avez dit ça une fois, deux fois, trois fois, dix fois, en public… Je ne sais pas très bien ce qu’ils veulent. Moi, je suis prêt. Je leur ai tendu la perche à bien des moments. Je vais continuer de croire – et si on ne peut pas le faire officiellement, on va le faire officieusement auprès des libéraux – je continue de croire que ça n’a pas de bon sens qu’on nomme des représentants sur ces commissions venant de régions au Québec où presque tous les députés sont libéraux, sans que les libéraux soient consultés, j’allais dire, activement consultés quant à ces nominations de membres ou de vice-présidents, la présidence.
Mais, qu’est ce que vous voulez? Je leur tends des perches comme ça, et ils disent: Non, non, non. Alors, qu’est ce que vous voulez? Je vais continuer de tendre des perches. Je vais continuer de les vous, ce qu’ils veulent, les libéraux, sur le plan, je ne sais pas, écouter. Peut-être que maintenant que la Chambre ne siège pas, il y aura moyen, je ne sais pas moi, dans un registre moins fort, vous savez, de façon un peu officieuse, d’établir certains ponts. En tout cas, moi, je le souhaite vivement.

[M. Kelley (Mark): Michel David.

M. David (Michel): M. Parizeau, j’ai une question au sujet du calendrier référendaire: Est ce que vous êtes en mesure de nous assurer qu’il y aura le dépôt d’un budget avant la tenue du référendum?]

[M. Parizeau:] Moi, ça me paraîtrait… Écoutez, ça me paraîtrait assez scabreux qu’on ne présente pas de budget avant le référendum. Ce ne serait pas… En tout cas, ça ne serait pas correct à l’égard de la population, ça. Non, moi, je pense qu’il vaut mieux envisager
J’avouerai que je n’y avais pas pensé dans ces termes là, mais puisque vous soulevez la question, oui, je pense que ça serait tout à fait dans l’ordre que ça soit… qu’il y ait un budget avant.
[M. David Michel): Si je peux me permettre une autre question sur un autre sujet. Hier, vous avez…]
[M. Parizeau:] Excusez moi juste un instant.
[M. David (Michel): Oui.]

[M. Parizeau:] Je réfléchis, mais il y a la question, comment dire, des motions privilégiées. Ça va pouvoir s’arranger, ça.
[M. David (Michel): Alors, très bien. O.K.
Deuxième question, hier, vous avez repris à votre compte, disant trouver l’idée intéressante, celle qui a été émise par les jeunes péquistes, une question à deux volets, là: votre option et celle de sérieusement, ou si c’était juste comme ça, là, au fil de la discussion?

[M. Parizeau:] C’est une attitude d’esprit, M. David. Je ne suis pas commis à chaque ligne ou à chaque disposition, même importante, de cet avant-projet de loi. Bien, c’est à condition qu’on ne le revire pas à l’envers, que ça ne devienne pas une profession de foi fédéraliste. On se comprend. Et c’est vrai que, quand les jeunes ont sorti ça, il y en a certains que je rencontrais, là, du Parti québécois, qui disaient: Ah, mais les jeunes se dissocient de nous. Ils ne se dissocient pas du tout. C’est très intéressant, ce qu’ils disent là.
J’ai d’autres propositions que j’ai entendues qui ont peut-être été moins, comment dire, moins annoncées publiquement, mais qui sont intéressantes aussi, et je veux garder l’esprit ouvert jusqu’à ce que l’autre camp. Est ce que c’est quelque chose que vous considérez les commissions régionales aient siégé et aient présenté leurs rapports à cette commission nationale et, ensuite, en commission parlementaire. Je trouve ça… c’est très important de garder l’esprit ouvert.
Alors, je ne vais pas me commettre sur… dire: Ah, la deuxième formulation, moi, je la trouve tellement meilleure, je vais la prendre par rapport à la première. Non. J’ai dit: Voici ce que je pense, là, que pourrait être la question. Voulez vous en discuter, et on va s’en parler. Et au fur et à mesure où je vais avoir d’autres questions qui me paraissent intéressantes, d’autres formulations de la question, je vais le dire, je vais le dire comme je l’ai dit pour les jeunes. Ça ne veut pas dire que je l’adopte, ça veut dire que je le trouve intéressant.
Maintenant, combien est ce qu’on en aura, de textes de question auxquels -comment dire? -qui, finalement, «percoleront» à travers tout ça? Cinq ou six? Peut-être, peut-être, et moi, ça ne me choquera pas et, un moment donné, bien, il va falloir décider.

[X. David (Michel): Mais si les libéraux, si vous me permettez, savaient que leur option pouvait se retrouver sur le bulletin, ils seraient peut-être plus enclins à participer consultation.]
[M. Parizeau:] Ils m’ont l’air d’être très méfiants, oui. Alors, je ne pense pas que des gestes, comment dire, concrets comme ça, à l’exercice de déposés spontanément sur la table, ça serait une bonne façon de procéder avec eux; en tout cas, ils ne me donnent pas cette impression là. Et, d’autre part, mon engagement à l’égard du public québécois qu’il participera vraiment à l’exercice, il se trouverait en un certain sens violé si je me gelais, comme ça, sur une formulation pour faire plaisir aux libéraux pour avoir leur participation. Je suis sérieux quand je dis que je veux avoir l’opinion des gens là-dessus. On va le solliciter certainement plus que ça a jamais été le cas sur quoi que ce soit au Québec. Remarquez que c’est la première fois qu’on se met clairement devant la question de la souveraineté, ça vaut la peine de le faire.
[M. Girard (Normand): M. le premier ministre, sur le même sujet, ça, ça veut dire que, donc, quand on a annoncé à la population que la question à laquelle elle aurait à répondre lors du référendum était celle qui figurait dans l’avant projet de loi, on ne lui a pas dit tout à fait la vérité avec exactitude, ça peut être une autre question.]

[M. Parizeau:] C’est d’abord dans ce que j’ai dit à l’Assemblée nationale puis, d’autre part, dans mon message d’accompagnement qu’on a distribué à toutes les portes, c’est dit clairement. S’il y a une sorte de consensus qui s’établit, si les gens pensent que tel article, plutôt que de se présenter comme ça pourrait se présenter autrement, je suis capable de le reconnaître.
[M. Girard (Normand): Bon, alors, ça veut dire que la question qui figure à l’avant projet de loi, comme vous l’avez indiqué à M. David, pourrait être modifiée dans le sens d’y ajouter, les jeunes péquistes le proposent, un certain nombre d’autres volets. On pourrait avoir une question qui porterait sur votre souveraineté, sur le statu quo, sur le fédéralisme renouvelé, sur…]

[M. Parizeau:] Je vous assure que, ce qu’il y a d’important, c’est de savoir ce que les gens pensent et non pas ce que quelqu’un cherche à pousser. Il peut y avoir bien des choses. Moi, je veux simplement m’assurer que, dans les semaines et les quelques mois qui viennent, des gens disent, après avoir bien réfléchi: On vous suggérerait ceci. Et, que nous, on est capable de voir quel genre de consensus, s’il y en a un, qui s’établit dans la population. Ou, si on a des propositions alternatives, de dire, après avoir’ tout regardé, on en revient à l’énoncé de la question qu’il y avait dans l’avant projet de loi, ou bien, on y ajoute un volet, comme les jeunes veulent le dire. Je ne sais pas, moi, est ce qu’on peut garder l’esprit ouvert? C’est ça que j’ai promis que je ferais, puis c’est ça que je vais réaliser. Dans cela, ne venez pas me dire que je ne dis pas la vérité, quand vous savez très bien que j’ai déposé cette affaire là à l’Assemblée nationale, j’ai dit ça va être discuté…

[M. Girard (Normand): Je n’ai pas dit que vous…]
[M. Parizeau:] … on va s’entendre. Vous m’avez entendu hier dire, c’est moi qui ai évoqué la question des jeunes, en disant que je trouve ça intéressant, puis ce n’est pas vrai que je vais fermer la porte à des gens qui voudraient discuter d’autres libellés de questions et qui voudraient nous les soumettre. C’est ça l’exercice de la démocratie.

[M. Girard (Normand): M. le premier ministre, je voudrais préciser quelque chose. Je n’ai jamais voulu dire que vous ne disiez pas la vérité. J’ai simplement signalé que nous, quand nous avions utilisé le texte de l’avant projet de loi, nous n’avions pas informé notre population, nos lecteurs avec exactitude, parce que vous laissez la porte ouverte à l’inscription de plus d’un volet à la question référendaire qui figure à l’avant-projet de loi. C’est juste ça que j’ai voulu dire. Pour nous faire préciser la question posée par M. David.

[M. Parizeau: Mais c’était tellement clair, au moment où j’ai fait cette espèce d’adresse aux Québécois, à la télévision, que tout ça pouvait être discuté. Vous vous souvenez que je l’avais dit. Le jour même, j’ai déposé ça à l’Assemblée nationale et, mardi soir, je disais ça en français et en anglais, à part ça.]

[M. Girard (Normand): Alors, c’est nous qui n’avons pas tenu compte de discuter.]
[M. Parizeau:] Je ne sais pas.
[M. Girard (Normand): Voilà ! ]

[M. Parizeau:] Je ne peux pas juger votre…

[M. Authier (Philip): M. Parizeau, juste pour continuer sur le même sujet. Est ce que, avec toute la machine qui est en marche maintenant, est ce qu’on pourra se trouver en référendum au printemps, en voyant que ça roule assez vite? Il y a beaucoup d’intérêts, comme vous avez dit.]

[M. Parizeau:] Je ne veux pas, maintenant lancer de spéculations. Alors, il vaut mieux que je me taise sur ce sujet. Je pense que c’est la meilleure façon d’éviter que ça se mette à effervescer dans un sens ou dans l’autre. Nous prenons… C’est ça. [«We shall see.»]

[M. Authier (Philip): Et pour poursuivre, est ce qu’il y aura un danger pour votre formation et votre option de donner l’option aux Québécois de voter sur le statu quo comme les suggèrent?]
[M. Parizeau:] Je ne comprends pas, je m’excuse. C’est la même question que M. David?
[M. Authier (Philip): Non. Mais est ce qu’il y aura un danger pour votre option d’offrir aux Québécois l’option de voter sur le statu quo?]
[M. Parizeau:] En même temps?

[M. Authier (Philip): Oui.]

[M. Parizeau:] Je ne sais pas. Pourquoi? Ça se regarde. Quand je dis que c’est intéressant, je ne vais pas plus loin que ça. Je peux te dire: Tiens, c’est une question intéressante. Je ne dis pas que c’est la seule qu’on va choisir. Je ne dis pas que c’est celle qui, au bout du compte, prévaudra. Mais est ce qu’on est capables d’avoir l’esprit suffisamment ouvert pour dire: Tiens, c’est intéressant, ça.

[M. Chevrette: Vous pouviez demander à M. Johnson s’il trouve ça astucieux.

M. Houle (Robert): Dans les échanges entre M. Landry et M. Chrétien hier, c’était un peu académique, mais tout de même il y avait une dynamique intéressante. M. Landry, hier, a précisé que le jour où les Québécois vont dire oui à votre question, de facto le Québec va devenir un pays souverain et indépendant, va se comporter comme tel,
même si la souveraineté ne sera proclamée qu’un an plus tard. Je voudrais savoir si c’est exact que si on vote la question telle qu’elle se présente actuellement, c’est le jour où les Québécois vont dire oui, effectivement cette journée là le Québec, de facto et de lege sera souverain, à votre point de vue. Comme l’a dit M. Landry hier.]

[M. Parizeau:] Pas tout à fait. Non, ce n’est pas ça qu’il a dit. Il va se conduire … Évidemment, là il y a une question de dynamique politique. Après un référendum gagné, vous comprenez que ce gouvernement de Québec, il se prépare puis, c’est évident, il se
référendum où c’était encore une province. Il faut quand même avoir le réalisme de constater que, voyons, les rapports politiques ne sont plus du tout du même ordre.
Quant à l’aspect juridique de la chose, le Québec n’est un pays souverain qu’au moment, à la date décidée par l’Assemblée nationale, au plus tard un an après le jour du référendum. Sur le plan juridique, il faut qu’il y ait une date. Et quant au comportement, bien oui, il est vrai que dans un bon nombre de domaines, imaginez, là, que les conférences fédérales provinciales n’ont plus tout à fait la même couleur le lendemain.

[M. Boule (Robert): Donc, le jour où les Québécois disent oui, le Québec ne se conduit plus comme une province mais se conduit comme un pays souverain…]
[M. Parizeau:] Non, non.

[M. Houle (Robert): …dans ses rapports avec Ottawa…]

[ M. Parizeau:] Non, non.

[M. Houle (Robert): …dans ses…]

[M. Parizeau:] Bien, non, comment dire, dans les rapports, dans les domaines où il peut le faire. Il est clair que dans certains autres domaines, non, il faudrait que ça attende la date formelle. Mais, on parle de comportements, là.

[M. Houle (Robert): Deuxième question. Il semble que même M. Landry a dit qu’il serait peut-être souhaitable que M. Chrétien ne soit pas là pour négocier avec un Québec souverain ou qui veut devenir souverain. Ça veut donc dire que, dans votre esprit, vous admettez qu’il pourrait y avoir une période de flottement du côté canadien, et ce qui fait que les négociations pourraient retarder beaucoup. Est ce que vous admettez qu’il y aura une période de flottement après un vote pour le oui et quelles seraient les conséquences de cette période de flottement?]

[M. Parizeau:] Moi, je vous avouerai que ça, c’est une chose que les gens, au gouvernement fédéral, auront à déterminer entre eux. Flotteront ils ou ne flotteront ils pas? Écoutez, entre nous, une fois le référendum passé avec oui, ici, je vous avouerai qu’on va avoir assez de travail, nous autres, puis nous occuper de nos affaires sans qu’en plus de ça on soit forcés d’évaluer le degré de flottaison du fédéral.

[M. Relley (Mark) : O.K. On en a deux autres en français, s’il vous plaît. Pierre April.

M. April (Pierre): M. le premier ministre, lorsque vous étiez à Batiscan il y a deux, trois semaines et que M. Bouchard venait tout juste de passer à travers le pire de sa maladie, vous avez dit: je ne veux pas discuter de cette chose là avec lui, ce n’est pas le temps. Mais on sait qu’il a repris du mieux, M. Bouchard, et depuis que vous avez déposé votre avant-projet de loi sur la souveraineté duquel vous avez dit: Il a participé deux, trois mois avant. Est ce que vous vous êtes enquis auprès de lui pour essayer de savoir si, d’après lui, tous ceux qui lisent les journaux puis qui écoutent les nouvelles, s’il pense que le processus est bien lancé?]

[M. Parizeau:] Écoutez, là-dessus, sans lui mettre des mots dans la bouche, je peux vous dire oui. Il est bien content puis il est bien heureux et il a, comme vous le savez… Le comité conjoint du Bloc et du Parti québécois devaient commencer à fonctionner; il a commencé à fonctionner au moment où c’était prévu. M. Bouchard passe par le
truchement de M. Duceppe sur ce comité, les choses roulent bien et roulent… Parce que le secret a été si bien gardé, certains d’entre vous s’en étonnent encore, autour de l’avant-projet de loi, ça ne veut pas dire qu’on n’en a pas discuté longuement pendant des mois avant.
Alors, dans tout ce qui se déroule à l’heure actuelle pour M. Bouchard, il en a discuté aussi longtemps que moi, hein ! On a participé au même genre d’exercice et, là, en un certain sens, par rapport à toute cette première phase, c’est un aboutissement qui se produit, là. Ah, évidemment, si vous me demandez, est ce qu’il est content, bien je comprends donc.

[M. April (Pierre): En tout cas, vous nous confirmez que vous lui avez parlé et qu’il est très heureux de la façon dont ça se déroule.]

[M. Parizeau: Moi, je… Non, j’essaie de le déranger le moins possible et, comment dire, nous avons, de mon côté, puis de son côté, deux personnes en qui nous avons tout à fait confiance et qui se parlent, qui s’échangent, et l’un qui le voit physiquement, alors, comme ça on garde un contact constant.]

[M. April (Pierre): Le connaissant bien, M. Bouchard, il doit avoir hâte de pouvoir en parler…]

[M. Parizeau:] Bien, écoutez… Il m’a contacté tard un soir pour me dire, à propos de la réunion… Non, écoutez, il s’intéresse à ça. Vous savez, le petit mot qu’il écrivait, bien ça continue, continue. On remplit le mandat qu’il nous a donné.
[M. Rajotte (Dominique): M. le premier ministre, pour revenir à la nomination de messieurs Masse et Lallier, je voudrais savoir qu’est ce qui a guidé votre choix pour aboutir à ces nominations là?]

[M. Parizeau:] Ce sont, l’un et l’autre, des personnalités qui ont eu une très grande expérience et connaissance du processus politique et gouvernemental. Ce sont deux hommes qui ont une expérience très longue de ces choses et pour qui la complexité des états, des rapports des états avec les citoyens, sont des choses, cette complexité leur est familière. Ils comprennent ça. Et, dans notre société, il n’y en a pas tant que ça des gens qui ne font plus de politique active, soit au niveau de Québec, soit au niveau d’Ottawa, et qui ont cette expérience et une expérience relativement, enfin, substantielle, et qui s’intéressent et qui continuent de s’intéresser à la chose publique. Parce qu’il y en a qui auraient de l’expérience mais qui ne veulent rien savoir, vous le savez, bon. Et eux continuent, et un et l’autre, à s’intéresser à la chose publique. Et, dans ce sens là, vous comprenez, moi, je suis très heureux que et l’un et l’autre aient non seulement accepté, mais accepté avec une telle, j’aurais dit, une telle simplicité. Je pense que ce sont… On ne pouvait pas imaginer, pour ces deux commissions, on ne pouvait pas imaginer mieux.
[M. Rajotte (Dominique) : Est ce que c’est… Ils ne sont pas issus des rangs péquistes, ni M. Masse…]

[M. Parizeau:] Non, non.

[M. Rajotte (Dominique): … ni M. L’Allier, est ce que c’est – comment dire – un prérequis pour devenir président de commission régionale? Est ce que vous allez vous laisser guider par ça?]

[M. Parizeau:] Non. Je ne veux pas me laisser guider par quelque autre principe qu’une ouverture d’esprit de la part de ces présidentes et présidents, une ouverture d’esprit très grande. Ça ne veut pas dire que j’exclus des péquistes, là. On se comprend bien. Ce n’est pas parce qu’on est péquistes qu’on n’a pas d’ouverture d’esprit. Mais, alors, je ne dis pas: Ils le seront tous ou aucun d’entre eux ne le sera. Ce n’est pas le critère de choix.

[M. Kelley (Mark): O.K. Let us go on doing (?) we got a lot of naines on the list and let us try to keep into one question, if you want ail your collegues to get their questions in.
Peter Ray.

M. Ray (Peter): Mr. Parizeau, just a pursuit as (?) of the referendum question itself, you said earlier that everything can be discussed at the commission and you said you f ound the proposai of the young pequists interesting. But how much further are you prepared to go, in terms of changing the actual question itself, so what it does not become too complicated for Quebeckers?

M. Parizeau: I do not know. I am listening. I propose, i put on the table and send to every door this draught bill, and said: Now, all right, we will organize a remarkable operation to sound off, as much as we humanly can, the population. We will listen. And, then, after that, it will all corne back to the National Assembly, and, we will have to decide whether, on this or that section of the draft bill, well, we keep it as it is. Or, well, there has been a sort of consensus, here and there, that another formulation might be better. We will decide at that time. I put a proposal on the table. I said: Let us discuss it. Well, if you would say: Let us discuss it, it means that you are ready to accept sonie changes, not,•of course, a complete change in the purpose of the draft bill. I do not want that to become a profession of faith in federalism, indeed. But, besides(?) that, I
am listening.

M. Ray (Peter): Including the question itself, that can be…

M. Parizeau: Everything. Already, I have heard people discuss various sections, and, except for the purpose of the law, to bring Québec to become a sovereign nation, I am listening.
M. Kelley (Mark): Ralph Noseworthy.
M. Noseworthy (Ralph): Sir, is that one of the reasons you would
like the Liberals kick in, participate?
M. Parizeau: In sonie instances, the fact that the Liberals do not want to cooperate, is – I am trying to be respectful but – slightly ridiculous. There are some areas in Québec where most of the representatives, most of the MNA’s are Liberals. We will need members of the commission from those areas, a president of a commission. After all (?) , such nominations like this, it would be rather odd not to have the point of view of the elected representative from these areas. Even if only on that basis, frankly, I have difficulty understanding what the Liberals are doing at the present time. But I will let the rhetoric fall by and we will try to see what we can do on an unofficial basis when the rhetoric has blown over a littie.

M. Kelley (Mark): Bernie Saint-Laurent.

M. Saint-Laurent (Bernard): Mr. Premier, I would like to ask a supplementary question before I ask my principal, if that is possible. You said in French and in English the notion of the… referring to the notion, the proposai presented by the young «péquistes». I am wondering why you find that formula particularly interesting.
M. Parizeau: Why? Because instead of «Yes», «No», you have «Either», «Or». Some people suggest to me: You should not say, ask for a «Yes» or «No», but, «In favour» or «Against», a different formulation. As I say, I am just listening, but… And it is when this process will have taken place, and as many people as possible will have had a go(?) at that draft bill, the various formulations, that we will see whether… what we do not change in that draft bill and what we change in that draft bill, and that is it. I just keep an open mind, but do not change the purpose of the bill.

M. Saint-Laurent (Bernard): I was wondering, a few weeks…

M. Kelley (Mark): Bernie, I am sorry. He is going to leave in four minutes, and I have got like five other people who want to ask him a question.

M. Parizeau: Sorry. I have a caucus and then, a Cabinet meeting.
une voix: oui.
M. Kelley (Mark): Rick. I am sorry, Bernie.
M. Kalb (Richard): Will you be the president of the «either
committee»(?).
Une voix: …should watch your time !
M. Kalb (Richard): I would like to get your feeling, your assessment of how your scenario is playing out, because you unveiled the process two weeks ago. Could you just give us your assessment of how it is working for the Parti québécois and its option?
M. Parizeau: For the Parti québécois, I suppose, everything is unfolding as a lot of people thought they would unfold, but you see, I am rather impressed – maybe I should not be because, after all, I participated in the planning of all this – I am very impressed, a) at the way we managed to keep to the schedules and the way things actually are unfolding, at the interest in the public over that, at
such simplicity, Mr. Masse and Mr. L’Allier shôuld have said: Yes, by all means, we will do it. It is developing well. I put a great deal of emphasis on the fact that this is going to be an exercise in consultation among ourselves of collective preparation, and I think we have made a great deal of headway, and quickly. Look, it is a massive organization that is involved in this, massive. …(?)

M. Kelley (Mark): Tom Kennedy.

M. Kennedy (Tom) : Mr. Premier, how do you assess so far, with things like you have heard coming out of Ottawa, out of Québec City the answers that we get, remarkable that in such little time, with from your opponents and front other premiers? What is the federal strategy that you are seeing so far, and how do you assess that side of it?
M. Parizeau: There does not seem to be a – what shall I call it? – a sort of permanent or stable strategy from Ottawa. All kinds of strategic elements always corne by every three days, but in ail kinds of directions. They obviously have sonie difficulty in putting their act together. You see, fundamentally, the question that they
obviously do not know how to handle is: Is it not very, very risky for them to of fer to Quebeckers: Either it is sovereignty, or it is a status quo just about nobody in Québec wants. And they have a great deal of diff iculty getting out of this. So, you see, Francis(?), either the Liberals in Québec, or Mr. Johnson, say: Well, we will not change anything until there is a No; and then, we will make proposais. (?) looks at them and say: You are not serious, no? Trudeau did the
saine once in 1980. You will not try that one again. And they say: Oh, my God ! What did we say? So, now, it goes back to Ottawa. Ottawa understands(?) the saure week that it should not get involved in this. So, they say: No, no, we will not make any constitutional proposais to Québec. We will show that federalism works. For instance, the Axworthy reform. And they look at the reaction, here, and they say: Oh ! My God ! We goofed again. I think they just have not put their act together. Eventually, they will. I am sure. There is never… It is not a desperate cause, I suppose, for them. But, look. Time is moving. I think they will have to have a strategy sooner or later, that someone understands(?).
Une voix: One last question, Rhéal Séguin.
M. Béguin (Rhéal): We get the impression that you are cornering them into a position where you are isolating the provincial Liberals and the federal Liberals in the saine corner by naming Mr. Masse, the former federal Tory minister, you naine Mr. L’Allier, former liberal minister. Is it that the impression is that the heart of your strategy at this stage is to corner them and to make sure that they are isolated? And what you say yourself is that the symbol of what is status quo federalism.
M. Parizeau: Let me see. I would much .have you intervert my strategy then comment it in front of you. There is obviously… You have understood a number of things. But, shall we say? It is not that terni. It is a bit a side aspect of some of the things that you mentioned. What I mean to say is this. It is true that his morning, someone around me said: But you know, I thought Mr Masse was a minister in the Union nationale in Québec, then a minister in Ottawa, and that Mr L’Allier was a liberal minister here in Québec city. It just dawn on me this morning. It is not really for that purpose that I had discussed that with them. But it is true, it is true that it looks that way. You have just given me some ideas by stating your question.
Une voix: C’est terminé.
Une voix: You told the Parti québécois that… was the biggest part… As you go into 1995, I am wondering what you assess as your biggest… to realize sovereignty for Québec?
M. Parizeau: I will answer you that one when, shall we say, the federalist strategy is more intelligible that it seems to be now. For the moment, I would be hard put to give you an answer.
(Fin à 13 h 2)]
[QParizeau19950207cp]
[(Quinze heures trente minutes)]
[M. Parizeau:] J’ai voulu préparer ou faire préparer un sondage sur le thème de [«What does English Canada want?»]. Au moment où les commissions engagent leurs travaux, je dois dire très bien, vraiment, la journée d’hier a été, je pense, remarquable à tous égards. Il y a eu, dans les quelques commissions qui ont siégé hier, toutes n’ont pas commencé, il y a eu 2000personnes hier, une soixantaine de mémoires dans les quelques commissions qui ont siégé. C’est vraiment très, très bien parti. J’ai pensé que, dans ces commissions, dans le cadre de ces commissions, mais dans le cadre aussi de notre cheminement à travers ces commissions ce ne serait pas mauvais d’essayer de voir comment le Canada anglais réagit à ce qui se passe ici et aux perspectives qui pourraient s’amorcer après un référendum.
Alors, j’ai fait, puisque je me considère au moins aussi valable que le journal The Globe and Mail, j’ai demandé aux sondeurs du The Globe and Mail, c’est-à-dire Léger & Lége de me préparer un sondage à cet effet. Et voici un certain nombre de graphiques ou de tableaux, si vous voulez, qui sortent de ce sondage.
Il y a une douzaine de questions. De cette douzaine de questions, huit seulement ont été retenues dans les graphiques. Cependant, les résultats des autres questions apparaissent dans le dossier que vous avez devant vous. J’aurai l’occasion d’intervenir à un moment donné, là, pour faire apparaître une autre question que les huit dont je vais présenter les tableaux. D’autre part, le texte anglais, évidemment, ça a été fait en anglais, ce sondage, le texte anglais des questions apparaît aussi dans votre graphique. Je vais utiliser le libellé français des questions, mais ça a été posé en anglais. Et c’est important que vous puissiez voir le texte anglais des questions qui apparaît aussi dans votre dossier.
Alors, commençons par… Oui, bien, là, je n’ai pas les… Oui, voilà, très bien, j’y suis. Commençons par le premier graphique. Selon vous, le Québec devrait il être considéré au même titre que les autres provinces canadiennes, avoir un statut particulier à l’intérieur du Canada ou devrait il devenir souverain? Considéré au même titre que les autres provinces canadiennes, 80,4 %; statut particulier, 10,6 %. Pays souverain, 4,2 %. Je pense que c’est la première fois qu’on illustre de façon aussi claire l’idée qu’il y a 10 provinces au Canada et que le Québec est une province parmi d’autres. Et il est remarquable de voir que les pourcentages sont à peu près les mêmes dans les quatre grandes régions retenues. Vous verrez qu’au Québec, c’est un blanc. On n’a pas fait le sondage au Québec, bien sur. On a fait le sondage dans les autres régions canadiennes. 78 %, Colombie-britannique. 80 % dans les Prairies. 83 % en Ontario. 74 % dans les Maritimes.
Le statut particulier qui a eu tellement d’impact dans le passé au Québec, qui a fait tellement rêver de Québécois, ne lève pas. Il n’a jamais levé dans le reste du Canada. Ça n’existe pas dans le reste du Canada. C’est 10 %. Et quant à un Québec souverain, bien sûr que c’est nulle part. Dans l’optique des Canadiens anglais, le Québec est une province comme une autre.
Passons au deuxième. Dites moi avec laquelle des affirmations suivantes êtes vous le plus en accord? Le gouvernement du Canada ne devrait pas offrir plus de pouvoirs au Québec, quelle que soit l’issue du référendum. 72 %. Le gouvernement du Canada devrait offrir plus de pouvoirs au Québec, uniquement si cela permet de garder le Québec au sein du Canada. 17 %. Le gouvernement du Canada devrait offrir plus de pouvoirs au Québec, quelle que soit l’issue du référendum. 5,5 %, 6 %. C’est-à-dire que même dans l’optique où ça prendrait plus de pouvoirs au Québec pour garder le Québec dans le Canada, la réponse est non. Non.
Pour beaucoup de gens qui au Québec se disent, mais peut-être qu’en montrant les dents de temps à autres, en faisant peur au Canada anglais, ça leur ferait tellement peur qu’ils nous donneraient plus de pouvoirs tout en nous gardant à l’intérieur. La réponse, elle est claire. C’est, non. Non.
Troisième graphique. Si au prochain référendum, les Québécois votaient contre le projet de souveraineté, est ce que le gouvernement du Canada devrait offrir de nouveaux pouvoirs au Québec ou devrait maintenir la situation actuelle, c’est-à-dire le statu quo constitutionnel: maintenir la situation actuelle, 77.5 %; offrir de nouveaux pouvoirs, 14 %. Un non veut dire un oui? Allons donc. Un non voudra dire un non. Le reste du Canada n’offrira rien, si c’est non, rien du tout. Là encore, il n’y a pas de rêves à avoir, là. Des majorités de 78 % à 14 %, c’est clair pour n’importe quel homme politique ou femme en politique dans le reste du Canada. Les anglophones du Canada, à supposer que les Québécois disent non, n’offriront rien, rien.

Là, encore, c’est plus net en Colombie-Britannique que dans les Maritimes. Vous voyez, en Colombie-Britannique c’est 84 %, qui veut le statu quo. Dans les Maritimes, 72 %, le maintien du statu quo après un non au référendum. Il faut comprendre… Toute la signification d’un vote comme celui là, ou, comment dire, d’un sondage comme celui là, là, devrait faire réfléchir tous ceux qui s’imaginent qu’il y a dans le non un instrument de négociations. Il n’y a pas d’instrument de négociations. Le non est un instrument de reddition.

Le graphique suivant. Si, au prochain référendum, les Québécois votaient en faveur de la souveraineté du Québec, est ce que le Canada devrait ou non reconnaître la souveraineté du Québec? Assez surprenant: Oui 49 %, non 42 %. Une majorité – vous me direz: Ce n’est pas une grosse majorité, mais la question est de taille – une majorité de Canadiens anglais disent: Bien, si les Québécois votent en faveur de la souveraineté du Québec, il va bien falloir qu’on reconnaisse ça. Il n’y a pas lieu de s’étonner des résultats du voyage de Paris. Il ne faudrait pas en demander… Il ne faudrait pas qu’on demande aux Américains plus que ce que les Canadiens anglais sont prêts à nous donner. Les Canadiens anglais, eux mêmes, majoritairement, reconnaissent que si les Québécois votent en faveur de la souveraineté, c’est réglé. Ah ! Ce n’est pas les majorités qu’on voyait dans les graphiques précédents, bien sur. L’enjeu est différent.

[Une voix: …]

[M. Parizeau:] Comment?

[Une voix: …observer, c’est serré en Ontario.]

[M. Parizeau:] C’est très serré en Ontario. Comme Charlottetown. Si, au prochain référendum, les Québécois votaient en faveur de la souveraineté du Québec, est ce que le Canada devrait ou non maintenir une association économique avec le Québec? Ça là, vraiment, on est au coeur de la question. On se comprend bien. Si les Québécois votaient en faveur de la souveraineté du Québec, est ce que le Canada devrait ou non maintenir une association avec Québec? Là, ce n’est pas à des Québécois qu’on pose la question, c’est au Canada anglais qu’on pose la question. Et la réponse est: Oui, 58 %, non, 36 %. C’est tout à fait clair. Le sens commun que j’invoque depuis tellement d’années, il est là, le sens commun. Il assez étonnant de penser que la majorité, cependant la plus faible, est en Ontario, 57 % à 36 %. La Colombie-Britannique aussi. C’est intéressant pour la raison suivante, parce que c’est l’Ontario qui a le plus à gagner au maintien d’une association économique avec le Québec. Il ne faut pas oublier que l’Ontario a une balance commerciale favorable de 3500000000 $, par année, avec le Québec. Ils nous vendent plus qu’on leur vend, jusqu’à concurrence de 3500000000 $. 57 %, dans ce sens là, est encore un peu bas. Mais le sens du mouvement est très clair. Il y a à peu près 20 points de différence, de gens qui disent: Mais oui, bien sur, il faut maintenir une association économique avec le Québec.
On vient à des questions, comment dire, plus pointues. Vous qui, avec nous, suivez ce débat là depuis tellement d’années, regardez la question suivante. Seriez vous d’accord ou non à ce que le gouvernement du Canada accorde au Québec les points suivants: La reconnaissance de la société distincte du Québec, le droit au Québec de nommer trois juges sur neuf à la Cour suprême du Canada – ça ne vous rappelle rien? – un droit de veto au Québec sur les institutions, le droit de retraite du Québec des futurs programmes fédéraux, cinq des pouvoirs partagés entre Ottawa et Québec en matière d’immigration. C’est Meech, puis vous voyez que c’est plus que M. Harper qui a amené l’échec de Meech, 75 % des Canadiens anglais disent non, pas question. Il y a seulement 16 % qui disent oui. 16 %. Et on s’est imaginé qu’on gagnerait Meech? 16 % seulement étaient d’accord.

Le tableau suivant: Selon vous, est ce que les Québécois ont le droit ou non de décider par référendum s’ils veulent ou non cesser de faire partie du Canada? Le droit. Tout le débat, est ce que c’est légal, c’est pas légal? Oui, 66 %; non, 28 %. C’est clair dans l’esprit d’une très forte majorité d’anglophones que les Québécois ont le droit de décider par référendum s’ils veulent ou non faire partie du Canada. Et là, l’avance de la Colombie-Britannique est surprenante. En Colombie-Britannique, c’est presque 80 % qui disent: Mais oui, c’est clair, si c’est réglé par référendum, c’est réglé par référendum. Je dois vous dire cependant qu’il y a une question où c’est plus serré que ça et qui n’est pas reproduite dans les graphiques, c’est la question 11, si je me souviens bien. Et je m’en voudrais de ne pas vous la signaler. La question 11: À votre avis, est ce que la démarche référendaire proposée par le gouvernement du Québec est une démarche démocratique ou non?
Là on ne parle pas du droit, on parle du caractère de la démarche. Alors, c’est oui, 36 %; non, 43 %. Alors, il y a quelque chose ici d’un peu curieux en ce sens qu’une grosse majorité de Canadiens anglais disent: Oui, ils ont le droit. Mais, la démarche, telle qu’on le leur a présentée depuis 15 jours ou trois semaines, ils disent: Non, non, ce n’est pas démocratique. Je parle de l’avant-projet de loi. Ça, ça démontre qu’il faut… ou ça montre qu’il faut leur démontrer qu’effectivement le caractère de la démarche en question, et je tenais à vous le signaler, parce que ça a quand même une certaine importance par rapport à la question que je viens de vous présenter.

Continuons. Là, vous voyez, c’est le fond de la question. C’est sur cette question là que le Canada casse. Selon vous, les Québécois forment ils ou non un peuple distinct du peuple canadien? C’est le fond de la question. Nous, ça se traduit dans nos sondages au Québec depuis 20 ans par: Est ce que vous vous définissez comme Québécois, Canadiens-Français, Canadiens? Là, on dit: Est ce que les Québécois forment un peuple distinct du peuple canadien? Non, 66 %; oui, 30 %.
Là, il y a quelque chose d’irrémédiable là-dedans. Qu’est ce que vous voulez? Il y a quelque chose de fondamental qui tient à l’identité des peuples. Ça ne veut pas dire que leur perception est mauvaise pour ça, mais elle est tellement différente de la nôtre qu’on voit bien qu’on ne peut pas s’entendre, là. Les Québécois qui se sont toujours définis… Pensez à tous nos manuels d’histoire qui définissaient le Canada comme basé sur la dualité, sur deux peuples fondateurs. Vous vous souvenez? Là, on dit: Non, non, non. Il y a un peuple canadien, puis le… Enfin, les Québécois en font partie. Là-dessus, vous touchez à l’identité des gens. Vous ne pouvez pas… si vous voulez passer ça, on tire l’échelle, là.

Encore une fois, ce n’est pas un blâme. Puis, ça ne sert à rien de… Comment dire, ça ne sert à rien de blâmer l’histoire. C’est l’histoire. C’est tout. Ça nous a amenés là. Ça nous a amenés là et puis, il faut maintenant en tirer les conclusions.

Voilà les tableaux, les graphiques qui ont été préparés à partir du sondage. C’est, j e pense, important que chacun au Québec se pénètre bien de ces chiffres là. C’est à la fois un constat, un diagnostic puis, en un certain sens, une feuille de route.

Voilà ce que je voulais vous présenter cet après-midi. Je suis entre vos mains.
[M. Morin (Gilles): Avec votre permission, ça ne portera pas sur le sondage, mais plutôt sur l’actualité. Vous me permettrez.]
[M. Parizeau:] Ha, ha, ha !
[M. Morin (Gilles): Le sondage, bon, est clair; les chiffres sont là. Je voulais revenir à la déclaration de M. Jean Campeau à l’effet que le Québec souverain pourrait refuser de payer sa dette s’il jugeait que la portion qu’on veut lui attribuer nuirait à son développement économique. Ce n’est pas un peu contradictoire avec ce que vous avez déjà dit à l’effet que, oui, le Québec pourra toujours garder le chèque si on ne réussit pas à s’entendre sur le partage entre Ottawa et Québec, entre le Canada et le Québec?]
[M. Parizeau:] Non. Ce qui pouvait peut-être y avoir comme ambiguïté a été clarifié par la déclaration, par la note de M. Campeau qui a été rendue publique hier soir, et qui s’appelle «Le Québec souverain assumera sa juste part de la dette fédérale». Lisons ça. C’est parfait, ça coïncide absolument avec ce que j’ai souvent dit
dans le passé. Oui.
[M. Vanne (Michel): Sur le même sujet, M. Parizeau, est ce que la notion de nuire à l’économie canadienne serait un critère pour établir l’équité dans le partage de la dette avec le Canada?]
[M. Parizeau:] Nuire à l’économie canadienne?
[M. Vanne (Michel): Québécoise pardon, excusez ! ]
[M. Parizeau:] Ah bon !

[M. Vanne (Michel): Je reprends l’expression de M. Campeau qui, lui même, a utilisé cette expression là dans son discours.]

[M. Parizeau:] Non, mais encore une fois, là, vous voyez, je voulais parler d’un sondage, là. On veut m’entraîner sur – comment dire – une interprétation d’une déclaration de M. Campeau que lui même a précisée hier soir. Comment dire, c’est tellement limpide, cette note là. Je comprends que c’est sorti assez tard, c’est daté de 22 h 10 hier soir, mais, enfin, relisons ça, c’est tout à fait clair.

[Le Modérateur: M. Paul Larocque.
M. Larocque (Paul): M. Parizeau, permettez moi d’insister, parce que ça a soulevé une tempête un peu partout. Â Ottawa, tout à l’heure, Paul Martin a dit que ces propos là étaient tout à fait irresponsables. Ça a été repris par M. Bélanger, tout à l’heure, et M. Johnson également. J’aimerais vous entendre là-dessus. Quelle est la juste part du Québec de la dette fédérale et qu’est ce que vous répondez?]

[M. Parizeau:] Ça a été longuement… D’abord, c’est moins la juste part de la dette fédérale, comme je le répète toujours, du service de la dette fédérale, et ça a été longuement examiné dans le rapport Bélanger-Campeau. Ça ne se promène pas entre zéro et 100 %, n’est ce pas? Certains voudraient pousser ça jusqu’à 22 % ou 23 %, d’autres ramèneraient ça plutôt à 18 % ou 18,5 %, vous vous souvenez. Tout ça a été publié dans Bélanger-Campeau. Ces études là ont été longuement préparées, examinées, discutées par la suite. On se trouve dans cette fourchette là.
À cet égard, je voudrais dire quelque chose. Je me suis rendu compte que ces études remarquables de Bélanger-Campeau – c’est le même Bélanger, soit dit en passant, mais c’est le Bélanger de 1991, on se comprend, ces études qui ont été faites sous la Commission BélangerCampeau, leur tirage est épuisé depuis longtemps. C’est une publication de l’Assemblée nationale du Québec.
J’ai demandé qu’à sa prochaine – c’est à la fin de la semaine, là – réunion, le Bureau de l’Assemblée nationale demande une réédition de ça. C’est épuisé depuis longtemps. On fait toujours référence à ces études de Bélanger-Campeau en disant: Ah oui, mais ça disait… ça se promène entre 18 % et 23 %. Puis ceux qui veulent aller regarder ça,
ils ont toutes les difficultés du monde. Ça fait deux ans que c’est épuisé. Il n’y a pas de raison pour ne pas rééditer, c’est fort intéressant, et ça garde, comment dire, le même genre d’actualité.
Alors, moi, j’en suis là. Regardons ça. On va sortir une autre… Enfin, on va rééditer ces études, et tout le monde commencera à discuter. Mais comprenons nous bien. Encore une fois, le partage ne se promène pas entre 0 % et 100 %. Ça se promène entre les bornes, c’est bien connu.
[Le Modérateur: Michel David?

M. David (Michel) : Oui, c’est sur le sondage, M. Parizeau. Est ce que la question 11 ne met pas un sérieux bémol aux autres réponses, dans la mesure où si les gens ne reconnaissent pas que votre question est suffisamment claire pour que les Québécois aient dit nettement que c’est oui en faveur de la souveraineté, de la séparation, est ce que leurs autres réponses tiennent toujours, dans votre esprit?]

[M. Parizeau:] Bien oui, elle tiennent… Toutes les réponses tiennent. Ce que vous êtes en train de me dire, c’est que sur 12 ou 13 questions, tout n’est pas parfaitement aligné. Oui, c’est vrai. On leur dit, à ces gens là, depuis trois semaines: Ce n’est pas démocratique. On leur demande: Est ce qu’ils ont le droit de sortir par un référendum de la… Ils disent: Oui.
La démarche dont on vient de vous parler, est ce qu’elle est démocratique? Tout le monde leur dit qu’elle ne l’est pas. Bien oui, bien, ça se partage. Je trouve ça intéressant. Ça démontre, au fond, que les gens suivent l’actualité pas mal plus qu’on ne pourrait l’imaginer.
Mais, qu’est ce que vous voulez, moi, ce que j’ai à faire, c’est de démontrer aux Québécois que c’est démocratique. C’est ici qu’ils vont voter. Ce n’est pas ailleurs. Et j’espère être capable, au fur et à mesure où, justement, les commissions vont travailler – puis ça va se faire – de démontrer que c’est un grand exercice démocratique. Ça ne contredit pas… Tout ce que ça veut dire, c’est que… qu’est ce que vous voulez? De temps à autre, les gens écoutent ce que leurs politiciens leur disent.

[M. David (Michel): Si vous me permettez une sous-question, est ce que – toujours la question 11 – la perception que le Canada anglais a de la démarche que vous proposez pourrait influer sur l’éventuelle liberté de la question, c’est-à-dire, la rendre plus claire de façon à ce que son résultat soit moins contesté?]

[M. Parizeau:] Ah non, moi, ce n’est pas… comment dire, il faut une question claire. Non, on n’a pas besoin de me persuader, par des résultats de sondage, qu’ils font une question claire. Bien sûr qu’ils font une question claire. Cependant, si vous voulez tirer de ce sondage une conclusion, c’est que les jeunes du Parti québécois, avec leurs questions à deux volets, j’ai déjà dit que c’était intéressant. Ha, ha, ha ! À la lumière de ce sondage là, je confirme que c’est très intéressant des jeunes qui disaient: Demandez donc aux gens qu’est ce qu’ils choisissent entre la souveraineté et le statu quo. Là, le statu quo, ce n’est pas une hypothèse avec ce sondage. C’est une certitude. Si c’est non, rien ne changera. Rien ! Rien ! Rien !

[M. April (Pierre): Un instant, s’il vous plaît. Madame.
Une voix: Ça va dans le même sens.
M. April (Pierre): O.K. Mme Gallichan aussi, c’est dans le même sens.
Mme Gallichan (Gisèle): Moi aussi, c’était en sous-question, dans le fond, pour vous amener à préciser davantage, M. Parizeau: Si les Canadiens-Anglais présentement dans leur perception remettent en question la légitimité de votre procédé, ils vont également à ce moment là dire que, même s’ils reconnaissent le droit de décider par référendum, ça n’a pas été fait de façon légitime.]
[M. Parizeau:] Non, pas légitime.
[Mme Gallichan (Gisèle): Ils vont remettre ça en cause constamment.]
[M. Parizeau:] Pas constamment puisqu’ils reconnaissent qu’on a le droit, par référendum, de sortir du Canada, moi, ça me suffit. Le reste, bien, le reste, c’est une chose à décider entre nous: si le degré démocratique est suffisant ou pas. Et une chose qui est claire qu’ils nous passent, comme message, vous avez le droit, par référendum, de sortir, mais on vous dit: Si vous votez non et que vous restez, vous n’aurez rien.
[M. April (Pierre): M. Houle.]

[M. Parizeau:] Ce message là, moi, me suffit. M. [April (Pierre): M. Houle.

M. Houle (Robert): Pourquoi cherchez vous à «antagoniser» le reste du Canada et le Québec à ce moment ci? Je veux dire, vous cherchez à faire une démonstration qu’il y a un antagonisme foncier ou fondamental entre les Québécois et le reste du Canada, à ce moment ci.]

[M. Parizeau:] Antagonisme. Ils ont, ces gens là ont, comme je l’ai dit souvent, une vision de leur pays qui ne correspond pas à la nôtre. Celle que nous avons ici, on n’a pas à la comparer avec l’autre en disant: il y en a une de bonne et une de mauvaise. Ce sont deux peuples, deux identités, deux cheminements. Ce que je dis cependant aux Québécois qui rêvent que peut-être le Canada anglais a changé, que peut-être l’échec du fédéralisme est remédiable, ça n’a pas changé. Ces deux visions là sont toujours face à face exactement comme elles l’ont toujours été. Ne rêvons pas en couleur, n’imaginons pas un seul instant que le Canada anglais a changé de vision quant à son pays. Il le voit d’une façon qui est très nette, qui n’est pas celle que nous avons au Québec. Et ne nous imaginons surtout pas qu’il y a où que ce soit là-dedans une autre dernière chance.
Je pense que c’est ça, finalement, la grande leçon. Il n’y a pas où que ce soit une dernière chance du fédéralisme. Même dans la question 11, il n’y en a pas. Il n’y a pas de chance, il n’y a pas de dernière chance du fédéralisme. Il y a un choix. On fait la souveraineté ou bien on rentre dans le rang canadien. C’est ça le message.

[M. Houle (Robert): Est ce que vous allez entrer dans le rang si le non l’emporte?]

[M. Parizeau:] Vous savez, je suis toujours, je suis d’un optimisme que j’aime bien. Que j’aime bien. Moi je pense que le oui va l’emporter. Je pense qu’on va avoir notre pays. Je pense qu’enfin là nous allons avoir ce que beaucoup d’entre nous voulons depuis très longtemps d’ici très peu de temps.
[M. April (Pierre): Est ce qu’il y a d’autres précisions sur le sondage présentement?

Le Modérateur: Éric Tétreault.

M. Tétreault (Éric): On peut penser, M. Parizeau, qu’il y a beaucoup de Québécois qui ne seront pas nécessairement surpris par ces chiffres là, malgré les nettes contrariétés qui s’y retrouvent et qui n’appuieront toujours pas votre projet. Je pense, en particulier, aux nationalistes mous qui ne seraient pas tentés par votre projet, en sachant très bien qu’il n’y a pas grand chose devant eux. Il y a quand même beaucoup de Québécois qui vont être tentés de penser ça. En quoi ce sondage là peut vous aider à les convaincre?]
[M. Parizeau:] L’espoir chez beaucoup de Québécois que le système canadien pourrait changer a toujours été assez tenace. Remarquez, à une certaine époque, ça pouvait jouer sur plus de la moitié de l’opinion publique. Maintenant, ça joue probablement sur un pourcentage beaucoup moindre. Mais ça reste tenace. Ça reste tenace.
Un sondage comme ça indique que non, les portes sont fermées. On se comprend bien là. Quand vous avez à des questions comme celles là des oui, 80 %, non, 18 %, qu’est ce que vous voulez? Ce n’est pas des écarts qui se renversent. Ce n’est pas des écarts qui se renversent. L’espoir que le système fédéral va changer pour faire plaisir aux Québécois, il n’existe pas. Il n’existe pas.

[M. Tétreault (Éric): Vous permettez. Précisément, est ce qu’on n’est pas en train, quelque part, de sous-estimer le nombre de Québécois qui sont prêts à se contenter du statu quo plutôt que du projet souverainiste? Est ce qu’il n’y a pas un risque à poser la question dans ce sens là?]

[M. Parizeau:] Pas du tout.
[Une voix: …]

[M. Parizeau:] Non, non, non. Attention, là ! Vous me parliez de nationalistes. La caractéristique du nationaliste québécois, quels que soient les adjectifs dont on l’affuble, la caractéristique du nationaliste Québec, c’est qu’il n’a jamais accepté le statu quo. Ah, il y en a qui acceptent le statu quo, bien sûr, écoutez, on le sait bien, il y en aura toujours, mais la caractéristique du nationaliste québécois c’est que non, le statu quo, lui, il pense toujours que l’on pourrait changer ça. Et c’est donc à lui que je m’adresse, là, en disant: Quels que soient, encore une fois, les adjectifs dont on peut entourer le mot nationaliste, le nationaliste québécois qui pense qu’un bon jour, le Canada va comprendre ce que lui appelle le bon sens, ou le sens commun, non, c’est toute une conclusion, c’est toute une conclusion.
[Le Modérateur (M. April): Dernière question en français, Paul Larocque, sur le sondage.
M. Larocque (Paul): C’est sur un autre sujet. une voix: oui.
M. Larocque (Paul): M. Parizeau, une petite question, enfin ça aura sûrement un air de déjà vu pour vous. Tout à l’heure M. Johnson et M. Bélanger vous ont mis au défi de publier, tout de suite ce printemps le budget de l’an 1. Qu’est ce que vous leur dites?
[M. Parizeau:] Ha, ha, ha ! Pourquoi, pourquoi? Nous avons publié Bélanger-Campeau qui comporte déjà, à cet égard, toute une série de projections encore tout à fait valables. Alors, ce que je leur annonce, c’est une réédition des études de Bélanger-Campeau. J’espère que ça va lui rafraîchir la mémoire, à M. Bélanger. Il y a là-dedans, par exemple, sur le service de la dette, et son importance par rapport au budget, justement, comparé à d’autres pays du monde, des chiffres extrêmement intéressants. On va republier ça. Vous allez voir comme c’est intéressant. Bien sûr, au fur et à mesure où le temps va passer, on va, il y a bien d’autres études qui vont être sorties. Mais pourquoi me demander, à l’heure actuelle… moi, c’est M. Bélanger qui me gêne un peu là-dedans, pourquoi me demander des chiffres auxquels il a, enfin, participé quant à leur montage, si activement, avec autant d’intelligence en 1991. Les charges budgétaires auxquelles un Québec souverain va avoir à faire face, ça a été très élucidé, sous sa commission.

[Le Modérateur (M. April): Dernière, dernière question en français, Suzanne Ouellet, et ensuite c’est Ralph Noseworthy.

Mme Ouellet (Suzanne): M. Parizeau, est ce que la déclaration de M. Campeau n’est pas malheureuse, au moment où le dollar canadien est en difficulté sur les marchés financiers?]

[M. Parizeau:] Non, il remonte justement. Et le dollar canadien, depuis quelques jours, remonte. Et comme vous le savez, les taux d’intérêt hypothécaire ont un peu baissé, depuis 24 ou 48 heures. Je ne sais pas si c’est dû à la déclaration de M. Campeau. J’en doute.

[Mme ouellet (Suzanne): Est ce que ça ne risque pas d’ajouter à l’incertitude entourant le dollar sur le…]

[M. Parizeau:] Je ne sais pas. L’incertitude… À l’heure actuelle, c’est plut8t optimiste. Depuis 48 heures, le dollar canadien monte et les taux d’intérêt hypothécaire baissent. Mais, encore une fois, j’insiste sur le fait que je doute que ce soit la déclaration de M. Campeau qui a causé ça. Seulement, ça devrait toujours nous ramener à une certaine prudence dans l’interprétation des déclarations, et leurs effets, surtout.

[M. Nosewortby (Ralph): Sir, I have two questions. The f irst one. What is the message, or what do you conclude from this poli?

M. Parizeau: What I conclude, really, is that English Canadians, have defined their own country, the Charter of rights, the way they see the provinces, in their equality, and that is quite incompatible with the sort of hopes that still exist in some quarters in Québec, whereas if there is a no at the referendum, English Canada will suddenly see the light and change, and accept to change the rules of Canadian federalism. I think, what cornes out of that poli is that, no way, the sort of definition that English Canadians have given of themselves, they insist in keeping. They find themselves a country and there is only one choice for Quebeckers. Either they accept that country, or they set up a country of their own. I think that is a lesson of that poli. Either get in the ranks with all the others and accept the rules, or have your own country. I think there is a remarkable lesson, again, for those in Québec who still feel that there is a possibility that Canadian federalism could be changed or renewed, or whatever.

M. Noseworthy (Ralph): My second question, Sir. With regard to the federal debt, is there a situation where sovereign Québec might have to give second thought to either paying their share or perhaps, just the interest?

M. Parizeau: Non, non. It is not paying our share. We shoulder
– and we have the shoulder, I think it is a moral obligation – we shoulder a part of the Canadian debt burden, simpiy because part of it was incurred in our narre. And that, I have never changed. I have said that for 20 years.
Now, Mr. Campeau yesterday raised the question of if some insisted into blowing up our share or putting in front of us. impossible conditions. He gave a precise twist to his talk yesterday, last night. And for that, I agreed, but that is more an obligation I have always stressed for so many years stiil exists that part of that debt was incurred in our name and therefore we should shoulder the burden of that.
M. Noseworthy (Ralph): Of what percentage?
M. Parizeau: I have asked the studies of the Bélanger-Campeau commission which are so remarkable in that regard, are out of prints and I have asked that a new edition, a new printing be required shortly, because I think you will find in there that the Gatt, shall we say the range where we will discuss is now between 0 % and 100 % of that burden. The Bélanger-Campeau commission came out with something like 18 % or 18,5 %. Others would say: You will have to go to 22 % or 23 %. It is within that range of discussions that have taken place and I do not think they have gone beyond that range for the last three or four years. But I think it is a good idea to have
the reprint of the Bélanger-Campeau studies, so that Mr. Bélanger can remember what he wrote, what he accepted as being the sort of bail game figures at that time.
une voix: …
Mme Lindgren (April): Mr. Parizeau, (?) ask you: Why your government commissioned this (?)considering the results are so predictable? Is this an appeal to the soft nationalists that there is no hope for federalism?
M. Parizeau: Predictable. They are predictable. I had no idea that we would corne out with the results of a question maybe precise of that question where… I will have to use them in English, sorry, I have got the english labeling of questions. If, at the next referendum, Quebeckers vote for sovereignty, should Canada recognize Québec sovereignty, yes or no? Remarkable, these results: 49 %, yes; 42 %, no. Remember, just about every Canadian politician outside Québec, and the Bloc québécois, of course, has said that that should not be, that Québec should not be recognized in that case. 49 to 42, hein? I did not expect that. Not that sure everything was said in the last few weeks.

If Québec vote, if Quebeckers vote in favor of sovereignty, should Québec maintain an economic association with Québec? 58 % in favor; 36 % against.

For two years now, the politicians have tried to impress on English Canadians that should not be so. And, by a 20 point margin, English Canadians say: Well, yes; if they decide that they want sovereignty, then, we should keep an econornic association with them. Well, I did not expect that. I am sure there is a number of people who did not.

Have Quebeckers have the right to decide by referendum to leave Canada? 66 %, yes; no, 28 %. Here (?) you, I am not surprised. We all know that, after all,.dernocratic traditions are pretty much in grain arnong English Canadians. But, the margin is considerable. Look, that is nearly 40 points. Oh no ! I did not expect ail those results. Some yes. Sonie, frankly, I expected that English Canada did not like the Meech Lake Agreement. I am not surprised. Ha, ha, ha ! I said that ail for them in the past.

Mme Enborg (Patricia): But, just to get by the f irst part of my question, sir. I just wanted to know why you did this… why you had this commission?

M. Parizeau: Anyone goes through that kind of exercise. We stili have, we are going into, I think, a remarkable exercise of consultation of public. We know that sonie Quebeckers still say: Maybe, if we said no, they change in English Canada. Maybe, if we said yes, conditionally, they might change. Well, what cornes out of this is no way, no, no.

M. April (Pierre): Très rapidement, le temps passe. Mark Kelley, s’il vous plaît.

M. Kelley (Mark): I am wondering if you have the result to question 9.

M. Parizeau: Well, you have them with you answers to all questions 9… Oh yes, well, that may give you the English labelling of 9. Personally, do you want Québec to no longer be part of Canada and forming independent country? There is no surprise there. Yes, 7 %; no, 91,5 % to say, personally, do you want Québec not to be part of Canada? Of course, ail these Canadians say no, we will prefer to remain that way, for sure.

M. Relley (Mark): That does not impress upon you in anyway that there is any kind of feeling that people do not want Québec to go.

M. Parizeau: It just says that, that Canadians would prefer their country to remain whole, yes, of course. Of course, I can understand what they are saying, sure.

M. Kelley (Mark): What is the poli cost and again, for a Premier that always says he does not comment on polis, why did you stand this morning?

M. Parizeau: I think I am just as curious as the Globe and Mail. I think it is interesting to know how English Canada reacts. I mean, after ail, it is not always Quebeckers that have to be polled. Maybe we should ask people, well, across the Ottawa river or in the Maritimes what they feel about these things, well we did. How much it costs? It is probably around something like 25000 $, around that.

Le Modérateur: Jack Branswell.

M. Branswell (Jack): Mr. Parizeau, I stili have a couple of questions here for you. And, the first is: You were saying in French that, again, you had repeated the ides that this whole poil for you boils down to the status quo.
M. Parizeau: Oh yes !
M. Branswell (Jack): And you were repeating again… M. Parizeau: So clearly !
M. Branswell (Jack): Right ! And you were repeating again your interest in the youth… your youth wing’s sovereignty versus statusquo option. Are you saying today that you are advanced, more advanced in considering putting that on the ballot or is your position the saure?
M. Parizeau: No, but I, shall we say, f ound the youth wing a question… I always said I find it interesting. I find it more interesting in the light of that poil. There is no doubt it becomes very, very clear, for a number of people, that the choice is between sovereignty or no change, nothing, the status quo !
M. Branswell (Jack): Will you make Quebeckers… Will that be the choice for Quebeckers on the ballot?
M. Parizeau: Oh no, no, no ! I’m listening to… I have put a
question in that draft bill, and this viii be discussed for a month and a half. I am listening. Oh, I will not make any commitment other than I am listening. But I am bringing, shall we say, my contribution to the debate, among other things, by that…]

[Le Modérateur: Bernard Saint-Laurent.

M. Saint-Laurent (Bernard): Oui. Mr. Premier, considering that 45 % of the people polled think that your referendum process is undemocratic, as shown in question 11, is it not possible to interpret the 58 % to believe that they would maintain an economic… that Canada should maintain an economic association with the rest of Canada somewhat tenuously in the sense that there are very different types of economic associations, as you well know, sir, that are possible.
How does this poli show that this economic association could be mutually beneficial or in any way beneficial to Quebeckers?

M. Parizeau: Another question asked: Have Quebeckers the right, by referendum, to decide to leave Canada?
And the answer is overwhelmingly yes. And then, the question is asked: If Quebeckers vote in favour of the sovereignty of Québec… We are talking of a vote. Everyone understands what a vote is. Should an economic association be maintained with Québec? Maintained ! Not created, not negotiated, maintained. And here you see the surprising result is the casting, the range between the yeses and the noes. It is 58 % yes, and ways to understand what an economic association… I have enough knowledge of poles to realize that. But you have got a 22 % range. And you are asking people: Should we maintain the economic association? Maintain !
In other words, what you are asking from them is: on the basis of what they know, do you want to go on that way? And by 22 % range, they say: Yes. I am not asking more than that. I mean, as far as I am concerned, that is enough.]

[M. April (Pierre): Dernière question. M. Séguin.

M. Béguin (Rhéal): Mr. Parizeau, is there any reason why a question was not put in this poil regarding the rest of Canada’s
Québec, should you win the upcoming referendum? Is there any specific reason why this question was not put to them?

M. Parizeau: Oh, I think that is… I think maybe it should be a next step. Once here what we want to show is that, as far as the Canadian federal system is concerned, no way it should be changed. No matter what happens, no to Meech, no to Charlottetown, no to anything that would set Québec in a different situation than any other Canadian 36 % no. That is 22 points. You will tell me there are all kinds of reaction to a possible new political association with a sovereign province. That is the lesson of this one.
Of course, you can well imagine, maybe we should have added a question on: And now, do you think that, to satisfy the request of Québec, English Canadians should accept the third level of government? Maybe we should have. Maybe we will, as a matter of fact. I mean that is not a definite poli. At 25000 $ a short, I can have a few. Why not? What I am saying, you see, is that, look, Quebeckers are polled like probably no other people on earth these days. I want to put the spotlight on English Canada to see how they react. You have a good idea. Maybe I should go into that poli or maybe The Globe and Mail, maybe we should share the cost of that… We are using the saine house, you know, Léger & Léger.

M. Béguin (Rhéal): Just a final question, sir, on the fact that 51.2 % say they are very preoccupied by what is going on in Québec on the referendum. In you view, is that a significant… could that become a significant factor in the emotional debate that will be… that we will probably go through in the upcoming months? Do you think that this, the emotions will get higher in the rest of Canada and that this could influence the vote in Québec?

M. Parizeau: I do not think so. Some people have been trying to whip public opinion as much as they could, for now quite some time. And undoubtedly a number of English Canadians are worried about this, but the remarkable thing is that in spite of their worries, they corne out with two common sensible reaction: one, we are what we are, we are not ashamed to be what we are, and we will go on being what we are, and good for them. And the second, we are not nitwits, if Quebeckers have their own country, we are going to maintain an economic association with them, because that is prosperity for both sides. These are two remarkable f indings. I mean, in spite of politicians, people do practice common sense. They will not change their country simply because Quebeckers are a pain in the neck. And secondly, they are not, they realize very well that we live in a era of free trade, that the NAFTA exist, that the Canadian economic space exists, and that it is advantageous for all sides. It is the victory of common sense.

Le Modérateur: Merci beaucoup.] [M. Parizeau:] Merci. [(Fin à 16 h 24)]
[QParizeau19950622cp]
[(Onze heures quarante-neuf minutes)]
[M. Chevrette: Vous constaterez que c’est avec bonne humeur et fierté, une fierté certaine, que nous vous rencontrons aujourd’hui pour livrer le bilan législatif du gouvernement. D’abord, de la bonne humeur, parce que la conférence de presse a lieu aujourd’hui plutôt que mercredi ou jeudi prochains. Et, me dit on, cette bonne humeur serait contagieuse chez les membres de la Tribune de la presse.
Encore une fois, il a toujours été de mon intention de faire en sorte que le calendrier de l’Assemblée s’ajuste à la législation et non la législation au calendrier. Aussi, nous avons tout fait pour éviter de présenter une motion omnibus de suspension des règles qui aurait permis de nettoyer le feuilleton dans les derniers jours. La fierté vient du bilan législatif que je qualifierais d’abondant.
Ainsi, c’est plus d’une cinquantaine de projets de loi qui ont été présentés lors de cette session. L’Assemblée aura procédé à l’adoption de 36 d’entre eux. Et si je me permets d’inclure les projets de loi adoptés lors de la séance extraordinaire de janvier et février, c’est 48 projets de loi publics qui auront été adoptés à ce jour en 1995.
Vous trouverez en annexe, d’ailleurs, la liste des projets de loi publics et privés qui ont été présentés à l’Assemblée nationale. J’éviterai de vous en faire une nomenclature exhaustive. Cependant, vous me permettrez d’attirer votre attention sur un certain nombre d’entre eux.
Pour les besoins de l’exercice, j’ai regroupé les projets de loi en deux grandes catégories, ceux qui donnent suite à des engagements électoraux et ceux qui démontrent l’intention du gouvernement d’assurer une saine gestion de l’État québécois.
Tout d’abord, en ce qui regarde les engagements électoraux, 11 projets de loi témoignent de la volonté expresse de notre gouvernement de respecter ses engagements qu’il a pris, au cours de la dernière campagne électorale.
Le projet de loi 40, d’abord, sur l’établissement de la liste électorale permettra enfin au Québec de se doter non seulement de listes électorales de qualité, mais d’un outil moderne engendrant l’efficacité et des économies substantielles. Il y a le projet de loi 45, la Loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale et d’autres dispositions législatives, qui est venu corriger certaines aberrations qui découlaient du projet de loi 145 de M. Ryan.
Il y a le projet de loi 46 qui est la loi qui modifie les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’oeuvre dans l’industrie de la construction et modifiant d’autres dispositions législatives qui aurait contribué à rétablir la paix sociale dans le secteur de la construction, le projet de loi 52, Loi sur les caisse de dépôt et placement du Québec et 53, la loi modifiant la Loi sur Hydro-Québec qui ont modifié les structures dirigeantes à la Caisse de dépôt et à Hydro-Québec, tel que nous nous y étions engagés.
Il y a le projet de loi 55, la Loi modifiant la Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics et l’imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d’organismes publics qui a été aboli, comme vous le savez, en gardant le secteur imputabilité. C’était la loi 198 que nous avons modifiée.
Le projet de loi 60 facilitant le paiement des pensions alimentaires, quant à lui, constitue évidemment une pièce législative importante du gouvernement. Les mesures étaient nécessaires et attendues depuis des années et des années.
Le projet de loi 63, la Loi sur la Société Innovatech du sud du Québec représente la réalisation, également, d’un engagement formel de la dernière campagne électorale et l’illustration de la capacité de l’actuel gouvernement de débloquer des dossiers.
Le projet de loi 90, dont le vote vient tout juste d’avoir lieu, Loi favorisant le développement de la formation professionnelle concrétise un autre engagement majeur de la dernière campagne électorale et un point central de notre programme politique, soit celui d’accroître de façon substantielle la formation professionnelle afin de faire face aux nouveaux défis de la transformation de notre économie. Il y a la loi 94, Loi sur la Commission de la capitale nationale qui permettra de consacrer et d’intensifier le rayonnement de Québec comme capitale. Ça concrétise également un engagement électoral. La loi 96, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l’environnement permettra, comme on s’y était engagés, de soumettre à l’évaluation environnementale les grands projets industriels. Et, finalement, dans la lignée des engagements électoraux, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation a déposé ce matin même un avant-projet de loi sur le droit de produire.
À peine neuf mois après l’élection, la liste des engagements réalisés au plan législatif est impressionnante. Nous sommes loin de la bataille sur la couleur de la margarine. Quant aux projets de loi découlant d’une saine gestion, il y a par ailleurs onze engagements électoraux de notre gouvernement qui aura démontré qu’on pouvait les réaliser par des législations.
Quant à la loi 65, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d’assainissement des eaux, elle visait à remettre de l’ordre dans ce programme et elle visait à faire redémarrer le programme d’assainissement des eaux dans des limites et dans des contrôles financiers plus acceptables. La loi 70, Loi sur certaines mesures relatives aux services de garde à l’enfance a été adoptée hier soir en soirée et elle constitue un moratoire pour remettre également de l’ordre et éviter le développement chaotique que l’on connaissait dans ce réseau. Le projet de loi 83, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux a fait l’objet du seul bâillon officiel qu’il y a eu en Chambre, mais qui s’imposait et qui vise, encore une fois, au redéploiement de la richesse et de l’argent dans la domaine de la santé, pour le plus grand bien des bénéficiaires. La loi 95, Loi modifiant la Loi sur les établissements d’enseignement de niveau universitaire assurera que les établissements de niveau universitaire rendent compte de leur gestion. La loi 107, Loi concernant l’impôt sur le tabac et la Loi sur la taxe de vente du Québec adoptée hier introduit des mesures additionnelles visant un meilleur contrôle de la contrebande du tabac, donc, encore une fois, la gestion des finances publiques était pour beaucoup dans ce projet de loi.
Dans le secteur de la justice, on peut également mentionner que les projets de loi 75, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur, la Loi modifiant le Code de procédure civile et la Loi sur la Régie du logement qui est la loi 76, la loi 79, Loi sur la Commission des droits de la personne et de la protection des droits de la jeunesse proposent diverses mesures qui engendrent également des économies importantes.
Dans un autre ordre d’idées, un certain nombre de projets de loi sont venus améliorer la qualité de vie de nos concitoyens et concitoyennes. J’ai particulièrement en tête les projets de loi 67, la Loi modifiant, en matière de sûretés et de publicité des droits, la Loi sur l’application de la réforme du Code civil et d’autres dispositions législatives, la loi 68, qui était une Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d’autres dispositions législatives; ce sont des allégements. La loi 72, Loi modifiant la Loi sur les forêts, la 80 sur les huissiers, la 100 sur les caisses d’épargne et de crédit et la 196, qui crée le fonds de capital de risque, le fonds d’actions et le fonds de capital de risque et de développement de la Confédération des syndicats nationaux.
Donc, outre la législation, je crois que les parlementaires ont été occupés par deux pièces maîtresses de l’action gouvernementale, à savoir le dépôt et l’étude des crédits ainsi que la présentation et l’étude du budget du gouvernement. Je ne veux pas y revenir indûment, mais je me contenterais de dire que, dans leur ensemble, ces deux grandes opérations se sont révélées globalement des plus positives pour le gouvernement.

Quant à l’ensemble du déroulement des travaux de l’Assemblée nationale, j’aimerais vous souligner que l’Assemblée aura siégé environ 160 heures en session intensive, ce qui représente une session chargée, certes, mais pas nécessairement exceptionnelle, puisqu’au printemps 1990 et au printemps 1992, nous avions siégé respectivement 155 et 172 heures. Notre séance la plus longue aura 18 heures, alors que les records de 19 heures et plus ont été établis sous l’ancien gouvernement. La durée moyenne des séances s’élève à 11 h 3 0 par jour, ce qui est à peine plus que ce que nous avons connu sous les libéraux. Compte tenu du nombre de législations adoptées ainsi que du nombre de députés de l’opposition actuelle, cela m’apparaît tout à fait respectable, d’autant plus qu’elle a présenté, en une session, pratiquement autant de motions de report, c’est-à-dire cinq, que l’opposition péquiste en cinq sessions: six motions en cinq sessions.
J’ai glissé un mot au début sur l’engagement d’ajuster le calendrier des travaux de l’Assemblée et d’éviter, dans la mesure du possible, les motions de suspension des règles. J’imagine que le leader de l’opposition insistera, dans son bilan, sur les deux occasions où le gouvernement a dû employer des moyens extraordinaires: d’abord, la motion de suspension des règles sur le projet de loi 83. Je crois qu’elle était nécessaire compte tenu des enjeux financiers, mais découlait aussi du fait que, peu importe la volonté du leader du gouvernement d’ajuster le calendrier aux travaux, la lutte engagée par l’opposition officielle se serait étirée à l’infini. Dois je rappeler que nous avions passé 28 heures en commission sur des motions dilatoires sans même aborder l’article 1? Quant à la loi 40, comme ministre responsable et leader, j’ai tenté tout ce qui était humainement possible pour en arriver à un compromis et éviter une motion de clôture. J’ai multiplié les amendements, nous avons passé un temps considérable en commission parlementaire mais, au fur et à mesure des compromis, l’opposition changeait d’idée et multipliait les volte-face, témoignant ainsi d’une évidente mauvaise foi. Il est important, je pense, de mentionner que la motion de clôture mettait fin aux travaux en commission, mais que d’aucune façon les temps de parole des députés libéraux n’ont été limités en Chambre.
En conclusion, je vous dirai que la session aura témoigné de l’engagement du gouvernement à faire bouger les choses et, comme leader, je reconnais cependant qu’au cours des dernières semaines l’image de l’institution parlementaire en a pris pour son rhume et plusieurs d’entre vous ont écrit sur cet aspect. Je constate qu’il est donc devenu urgent de s’attaquer à une réforme de notre règlement et je compte y déployer toute l’énergie que vous me connaissez. En attendant, je demeure convaincu que le meilleur moyen d’accroître la crédibilité des politiciens et des politiciennes auprès de la population, c’est encore de réaliser les engagements électoraux, les promesses électorales. Cet aspect aura guidé et guidera toujours mes choix de priorités quant à la réalisation du programme législatif du gouvernement. Je vous remercie.]
[M. Parizeau:] Quelques mots de portée un peu plus générale. Nous nous étions engagés, pendant la campagne électorale, à éliminer au bout de deux ans, de deux budgets le déficit des opérations courantes. Nous avons maintenu cet engagement, même si on s’est rendu compte que, comme d’habitude, les libéraux avaient sous-évalué le déficit et que ce ne serait pas 4500000000 $, ce ne serait pas loin de 6000000000 $, le déficit total. Nous avons donc… nous nous sommes attelés à la tâche, le premier budget reflète, une réduction très importante du déficit. En fait, le déficit des opérations courantes est réduit presque de la moitié. Moody’s a dit: On ne vous croit pas, parce que, jusqu’ici, le gouvernement se trompait toujours; Standard & Poor’s nous a dit: Oui, c’est un nouveau gouvernement, on va le croire. Alors, l’un a décoté puis l’autre n’a pas décoté. On s’est retourné puis on a dit à Moody’s: Écoutez, dans ces conditions, cependant, si nos projections sont bonnes à la fin de l’année, vous nous recotez; ce qui est la logique même. Si c’est à cause du manque de crédibilité du précédent gouvernement qu’on perd notre cote quant à ce qu’on annonce, si ce qu’on annonce se réalise, bien, là, on s’attendra à ce que la cote soit remontée.
On avait dit: On va faire ça sans augmenter les taxes sur les particuliers ou les impôts sur les particuliers. On l’a réalisé. Et puis, d’autre part, depuis longtemps on parle des économies possibles si un jour on remplace le fédéralisme canadien par un seul gouvernement au Québec. On en a fait une première démonstration en fusionnant la taxe de vente du Québec puis la TPS dans une seule taxe, ce qui a permis aux entreprises de faire une économie de l’ordre de – je ne sais pas, là, là je me fie à ce que le président de l’Association des entreprises indépendantes disait – 300000000 $ à 400000000 $ des entreprises auraient été fournies(?). On ne pouvait pas faire meilleure démonstration de ce que ça rapporte que d’éviter les chevauchements d’une taxe au lieu de deux. Voilà le résultat.

Sur le plan de la création d’emplois il est évident que le ralentissement actuel de l’économie nord-américaine à laquelle on assiste, là, n’aide pas à créer autant d’emplois qu’on le voudrait. Mais on a pris un certain nombre de moyens dont certains se révèlent très rapidement, là, très créateurs d’emplois. Après six mois d’existence, le plan Paillé, là, comme on l’appelle, a quand même provoqué l’apparition de presque 6 500 petites entreprises, presque 35000 emplois. C’est 580000000 $ d’investissement qui découle de ça et uniquement avec des garanties. On se comprend bien, là. C’est juste des garanties de prêts fournies aux banques. On avait raison de dire: Que le gouvernement cesse donc de jouer au banquier puis que les banques fassent leur travail. Il y a des choses qui vont démarrer, là, comme par exemple les fonds régionaux du Fonds de solidarité de la FTQ. Ça correspond à une entente que nous avons avec eux, mais ça veut dire 16 fonds régionaux, chacun doté de 6000000 $ de capital de risque. Ça va démarrer, ça.
Bon, quoi qu’il en soit, regardons le «score». Le «score» c’est que depuis le début de l’année il s’est créé 23000 nouveaux emplois au Québec – davantage que ça en emplois permanents d’ailleurs – et ça représente 61 % des 38000 emplois créés au Canada. Alors, c’est décevant parce que c’est 23000 emplois, mais c’est pas mal compte tenu de la performance canadienne dans son ensemble. Même chose si on veut reculer jusqu’en septembre dernier. Depuis septembre dernier il y a 51000 nouveaux emplois au Québec c’est-à-dire 58 % des 88000 emplois créés au Canada. Il faut bien prendre, donc, les chiffres tels qu’ils sont. Encore une fois, j’aimerais que les chiffres absolus soient plus élevés que ça, mais on voit tout de même à quel point, là, le Québec a pris une sorte d’avance, par rapport au reste du Canada, qui n’est pas négligeable.
Sur deux plans, les choses ont bien avancé dans les grandes priorités qu’on se donne. La formation professionnelle d’abord. Moi, je suis, oui, convaincu que ça sera un des éléments majeurs de ce
gouvernement, que de dire: On a complètement réorganisé la formation professionnelle au Québec. Je sais bien que le fait que le gouvernement fédéral refuse de lâcher son bout n’aide pas les choses, et donc que, par exemple, la loi 90, qui vient de passer ce matin, là, d’être adoptée, va permettre de réorganiser certaines choses dans la formation professionnelle, et pas autant qu’on le voudrait. Mais, au moins, ça va nous permettre de faire un bout.
Et, d’autre part, il y a quelque chose qui a peut-être attiré moins l’attention, mais qui, pour moi, est tout aussi important, sinon davantage encore, on a amorcé la transformation de l’enseignement secondaire pour les jeunes, dans le sens de la formation professionnelle. Vous savez, je l’ai répété suffisamment souvent, ce qui s’est passé dans les commissions scolaires à l’égard des jeunes est une tragédie nationale sur ce plan-là. Qu’il n’y ait plus que 7000 personnes dans l’enseignement professionnel, sur 500000 élèves au secondaire, c’est une tragédie. Et alors, le ministre de l’Éducation a autorisé les commissions scolaires, à partir de septembre prochain, d’ouvrir, pour les élèves de secondaire IV et de secondaire V, des options professionnelles, des cheminements professionnels. Ce que je veux dire par cheminements, c’est qu’on va être capable d’alterner formation et stages en entreprise, ou alors, d’adopter des voies qui sont celles de l’apprentissage sur les lieux de travail, avec, en secondaire V, au bout, un diplôme. À l’heure actuelle, il y a des formes comme celles là qui sont possibles, mais il n’y a pas de diplôme au bout. Ça va être une façon de, comment dire? faire reculer le décrochage, mais aussi, fondamentalement, de donner, dès le départ, rapidement, aux jeunes, une formation professionnelle intéressante.
Ça, je suis très content que ça ait évolué comme ça. C’est quelque chose à laquelle j’accorde une importance considérable et,
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CONFÉRENCE DE PRESSE
moi, je ne décrocherai pas de cette préoccupation sur la formation professionnelle. C’est un des deux pivots d’une économie moderne, avec la recherche et le développement.
La recherche et le développement, oui, il y a eu encore, comment dirais je? un certain nombre de progrès de fait, peut-être pas suffisamment, mais, en tout cas, avec persistance. Le Fonds de l’autoroute, en particulier, commence à produire quelque chose, à donner des résultats. Jusqu’en septembre dernier, le Fonds de l’autoroute, ce n’était qu’une annonce. Il n’y avait rien d’autre. Là, on commence à aider.
On avait d’abord aidé un certain nombre d’entreprises, sur le plan financier, d’entreprises assez considérables. On nous en a fait grief, à juste titre, pendant deux ou trois mois, mais maintenant, sur le plan de ce fourmillement de petites entreprises qui travaillent sur les contenus, sur le software, sur les logiciels,, on commence à donner
de sérieux coups de main. J’avais deux exemples hier, dans la région de l’Outaouais. Ça commence à sortir. Mais il reste encore pas mal de travail à faire.
Vous comprenez, quand on se rend compte qu’on n’était pas sur Internet il y a quelques mois à peine et puis qu’il y a un paquet de gens qui ne savaient même pas ce que ça voulait dire, on a du chemin à faire, et comme gouvernement et comme société, là-dedans. Voilà.
En même temps, nous avons amorcé une très grande réforme de la santé. Elle s’imposait depuis longtemps. Je suis heureux de dire, moi, à quel point je trouve que, non seulement le Dr Rochon mène bien cette réforme, mais que, d’autre part, elle est de mieux en mieux comprise. Les appuis qui, depuis 48 heures, apparaissent d’un peu partout, sont très intéressants. Ça manifeste que de plus en plus de gens comprennent exactement dans quel sens on veut aller. Ce sont des réformes qui sont extrêmement difficiles, on le sait.
Mais reconnaissons aussi une chose, dans plusieurs autres provinces canadiennes qui ont un régime analogue au nôtre, ça s’est fait et certains des premiers ministres de provinces canadiennes me disent: Écoutez, chez nous, c’est terminé depuis trois ans mais ça laisse encore des traces. C’est sûr, c’est très pénible d’avoir à faire ça mais il faut avoir le courage de le faire. Le Québec ne l’avait pas commencé encore. On était suspendu devant un problème qu’on considérait comme très sérieux puis on ne faisait rien.
Là, on commence à avoir des gens du métier là-dedans qui disent: Les coupures aveugles à travers… où on réduisait chaque année simplement le poids général du système de santé, ça ne pouvait pas continuer, ça allait lâcher d’un peu partout. Il fallait réorienter les choses, réorienter les établissements, réorienter les dépenses. C’est ce qui est en train de se faire. C’est une très grande opération. Des opérations comme celle là, à un moment donné, il faut se dire, compte tenu des besoins des Québécois, c’est ça qu’il faut faire et c’est ça, je pense, qu’on est en train de faire.
Un mot, pour finir, sur les commissions. Ça, c’est la préparation, le cheminement vers le référendum. Je ne vais pas rentrer dans le détail ici, sauf à dire une chose: Ces commissions régionales sur l’avenir du Québec, la Commission des aînés, la Commission des jeunes ensuite la Commission nationale représentent – je l’ai souvent répété et je ne suis pas le seul à l’avoir répété – le plus grand exercice de consultation démocratique auquel on se soit livré. Au Québec, jusqu’à maintenant, de cette nature là, on n’en a pas vu. Certains ont dit: Oui mais, enfin, tout ce monde là parle pour rien, parce que le gouvernement fera à sa tête. Bien, vous l’avez vu déjà que non seulement il ne fait pas à sa tête, le gouvernement, mais qu’il regarde ses conclusions, qu’il voit à quoi cette consultation a mené.
Alors, ce sont des choses qui sont très spécifiques dans le cas de certaines régions. L’idée, là, d’avoir une véritable région, une région réelle en Gaspésie, c’était la première recommandation, hein. Il a été annoncé que ça se ferait. Les gens de l’Outaouais disaient: On n’est pas certains des Québécois à part entière dans leurs rapports. J’ai essayé de les rassurer, de façon très concrète là-dessus hier, hier soir. Et d’autre part, il ressortait de toutes ces commissions cette idée de: Bon, très bien, faisons la souveraineté. Mais gardons un contact avec le Canada. Tendons la main. Enfin, on verra bien ce qui se passera. Mais, au moins, gardons ça ouvert.
Bon, ça s’est traduit par l’entente, là, des trois parties. Alors, oui, ces commissions ont servi à quelque chose. Oui, ceux qui ont participé aux commissions doivent savoir que c’est grâce à eux que toute une série de choses sont en train de se faire, parfois, encore une fois, concrètement dans chacune des régions, une à une, parfois, sur le plan du cheminement de l’ensemble des Québécois vers le référendum.
D’autre part, il y a d’autres conclusions auxquelles il faut donner un aboutissement de ces commissions, en particulier, projet de société et puis le préambule, le préambule, n’oublions pas ça. Il y en a eu des centaines de propositions de préambules. On sent l’intérêt – et qui est tout à fait raisonnable – de gens qui disent: Oui, la souveraineté, mais à quelles fins? Définissez nous ça mieux que vous l’avez fait jusqu’à maintenant. Et ça aussi, on les a écoutés. On aura maintenant à traduire ça de façon concrète.
Alors, voilà un peu pour l’arrière-plan de cette session.

[M. April (Pierre): Tout en se rappelant que M. Parizeau doit quitter, au plus tard à 12 h 30, Normand Girard, première question.

M. Girard (Normand): Ma question s’adresse à M. Chevrette. Vous avez terminé votre exposé, M. le leader parlementaire, en manifestant votre intention de vous attaquer à une réforme du règlement. Est ce que vous ne croyez pas que c’est davantage le respect du règlement actuel qui ne se fait pas que la nécessité de modifier le règlement pour en arriver à un comportement meilleur en Chambre?

M. Chevrette: Bon, il y a des deux. Je crois qu’il y a des règlements. Il y a des articles du règlement qui, lorsque poussés à son extrême, son utilisation n’en finit plus. Je prends l’exemple du dépôt des pétitions. On peut être trois quarts d’heure sur des dépôts de pétitions, avant une période de questions. Si un médium d’information voulait diffuser une période de questions, par exemple, à une heure assez fixe, pour une circonstance particulière, ça peut être décalée complètement d’une heure. Ça n’en finit plus. Il y a la question des motions de blâme, par exemple, qui sont quasi converties en motions de félicitation, vous le savez, depuis des années, les motions du mercredi. Je pense, par exemple, à des formules où il peut y avoir des nombres d’heures limite si on ne veut pas que le Parlement se dégrade, des maximum d’heures pour des motions dilatoires, par exemple, et je pense que tout le monde y gagne parce que ça vient que ça sombre dans le ridicule. Et quand on ne retrouve plus, qu’on manque d’originalité et d’imagination, ça sombre quasiment dans le ridicule et ceux qui y assistent…
Il y a une série de choses qu’on peut apporter avec la collaboration des deux côtés de la Chambre, j’en suis sûr, si ce débat là se fait dans une période relativement calme intersessionnelle. C’est de ça que je veux profiter.

M. Girard (Normand): Mais les motions, c’est-à-dire les pétitions, M. le leader du gouvernement, est ce que ce n’est pas une façon, pour les citoyens, dans l’ensemble de la population, de s’exprimer face au Parlement? J’ai remarqué qu’aux Communes ce sont des députés qui ont une période qui dure aussi longtemps qu’ici pour présenter leurs doléances avant d’atteindre la période des questions proprement dite. Alors, est ce que, si on touche aux pétitions, on ne risque pas d’imposer une sorte de bâillon à l’ensemble des citoyens, au monde ordinaire?

M. Chevrette: C’est loin d’être dans le sens d’un bâillon. Ça nous obligerait, je pense, si on fixait des moments fixes, comme à Ottawa, par exemple, c’est une demi-heure, trois quarts d’heure, si on fixe un moment précis, ce n’est pas un bâillon. Ça permet de planifier un peu mieux la présentation. C’est plutôt dans ce sens là. Exact. Parce que… Prenez un horaire. Les ministres ne sont pas prévenus, par exemple, qu’il y a dix, douze ou quinze pétitions et ils ont des rendez-vous. Ils calculent. La période de question commence à 10 heures, ça finit vers 11 heures 15. Tu programmes quelque chose à 11 heures 30, tu en sors à midi moins quart quand ce n’est pas midi. Je pense que si on peut se comparer à d’autres parlements et trouver des formules assez statutaires qui ne permettent pas de bâillon, qui permettent une expression, mais un cadre.

M. April (Pierre): M. Paul Larocque, s’il vous plaît.

M. Larocque (Paul): M. le Premier ministre, si vous permettez. Il y a une publication ce matin du premier sondage fait depuis la conclusion de l’entente avec le Bloc et l’ADQ. Est ce que les résultats qui donnent le Non en avance par trois points ça vous étonne ou ça vous déçoit? Et si les choses ne changent pas d’ici la fin de l’été, certains observateurs, certains expérimentés de la scène politique disent qu’il n’y aura pas de référendum si les choses ne changent pas. Qu’est ce que vous leur dites?]
[M. Parizeau:] Écoutez, pas à chaque sondage. Quand le sondage est bon, ça rentre dans un silence complet et, quand il est moins bon, alors, là, on dit: Aïe ! qu’est ce que vous allez faire? Ha, ha, ha !

Regardons ça, là. Quoi ! il y a un mois ou deux, combien nous donnait on d’appuis à la souveraineté sur un référendum? 42 %, 43 %. Là, qu’est ce qu’on nous donne? Entre quoi, 48,5 % et puis… ou 48 % et 50 %, 55 %? Bien, ce n’est pas mal comme progrès, hein. D’autre part, ça a l’air que les fédéraux, là, si on lit La Presse de ce matin, ça a l’air que les fédéraux, eux, ont des sondages qui nous mettent pas mal plus hauts que ça. Alors, disons simplement qu’il y a une fourchette, à l’heure actuelle, qui est assez importante. Moi, j’ai des sondages internes qui ont l’air de me… mais qui, comment dire, ont été faits il y a déjà quelques jours. Alors, on va en faire faire un autre, là, qui nous placerait à peu près entre le grand pessimisme des fédéraux dont faisait état ce matin La Presse, et puis le Léger et Léger. Disons simplement que ça fluctue à l’intérieur de cette marge là, mais c’est pas mal plus haut que ce qu’on avait il y a deux, trois mois, pas mal plus.
[M. April (Pierre): Robert Houle.
M. Houle (Robert): Est ce qu’il est possible, M. Parizeau, que vous procédiez à un remaniement ministériel d’ici l’automne? Il y a certains de vos ministres, tout de même, qui n’ont peut-être pas rempli adéquatement les tâches auxquelles vous les aviez conviés. Je
états généraux, a créé plus d’embarras, souvent, au gouvernement qu’autre chose. Est ce que vous ne souhaitez pas, est ce que vous ne devrez pas faire un remaniement ministériel?]
[M. Parizeau:] Bien, la question du remaniement ministériel, je n’en ai pas, comment dire, en tête à l’heure actuelle. Ce n’est pas dans les cartes. Il y a une chose à laquelle il va falloir que je pense, cependant, c’est que je ne vais rester indéfiniment ministre de la Culture, là. J’avais dit que je remettrais les choses, et là,
pour quelques mois avec moi, mais qui tenait absolument à ce que je mette dans le décret qu’à la fin de juillet, là, il retournait à son cher musée, il retourne à son cher musée. Alors, là, il y a, comment dire, il y a probablement des changements qui vont se produire de ce côté là. Est ce que ça aura un effet sur d’autres? Je n’ai pas encore vraiment, à l’heure actuelle, de position arrêtée là-dessus.
Mais, pour ce qui a trait à celui dont vous parlez, là, M. Garon, encore une fois, n’oublions pas une chose. Moi, je lui avais donné le mandat de changer la formation professionnelle, deux mandats: de changer la formation professionnelle dans les écoles au niveau secondaire. Les premières portes sont ouvertes et la machine est en train. Et je lui avais dit, d’autre part: Sauvez moi les petites écoles, et puis il a fait une série d’expériences extraordinairement intéressantes à cet égard. Puis, vous savez, à d’autres moments, il a provoqué pas mal d’esclandre, à la suite, je ne sais pas, par exemple, de sa déclaration sur l’université sur la rive sud de Québec.
Là, je suis intervenu en disant: Envoyez donc tout ça aux états généraux. Bon, alors, ça a été envoyé aux états généraux. Vous avez vu les résultats hier? où les états généraux passent à Lévis et là, on se rend compte que le consensus de la région Beauce et rive sud, que le consensus de 1990, il tenait encore, que tout le monde dans la région y tenait, qu’une fondation avait été créée pour lancer cette université et que ça, ça ne tenait pas, comment dire, à cause de la personne de M. Garon, ou du député de Lévis, ça tenait… Et, ce matin, dans Le Soleil, là, vous avez une demi-page, de M. Fortin, je pense? le président de la Fondation de l’université de la rive sud, qui est… On se rend compte que c’est un projet très articulé. RapidCam(?), c’est…
on parle d’un certain nombre de choses qui sont fondamentales ici, et un des problèmes qu’on a, qu’on a eus et qu’on va avoir encore, c’est que quand on cherche à changer les choses, forcément, on se trouve à gêner des intérêts en place, qui avaient une certaine façon de voir les choses et qui trouvent ça gênant, le mouvement, quel qu’il soit, surtout quand il n’y a pas eu de mouvement pendant bien longtemps.
J’ai un problème majeur, vous le savez, là, avec, comment dire, le projet de loi de l’aide juridique et puis la question du Code des professions. Ça, ça va être rediscuté, là, en commission au mois d’août. Là, vous avez un cas typique où il est clair qu’il y a des intérêts qui sont en cause. Personne n’aime perdre de l’argent. Alors, ceux qui perdent de l’argent disent: Ce n’est pas bon. Entre nous, dans beaucoup d’autres mouvements qu’on cherche à faire, on a des choses comme ça.

Puis, d’autre part, on nous présente des arguments qui, eux, ont l’air d’être, comment dire, intelligibles, qui vaillent la peine qu’on y pense un peu. Il faut tout démêler ça, et ce n’est pas facile de démêler ça. Plus on veut bouger rapidement, plus c’est difficile à démêler. Qu’est ce qu’il y a de valable? Qu’est ce qu’il y a d’intéressant et, d’autre part, qu’est ce qui représente simplement des lobbys qui disent: Aïe ! écoutez, là, on est assis sur notre position, nous autres. Enlevez nous rien ! C’est ça, et dans le cas de…

Là, vous avez un cas typique avec l’aide juridique. Toutes les critiques qui ont été adressées à ce projet de loi qui, soit dit en passant, est un projet de loi qui avait été adopté par tout le Conseil des ministres d’abord. On se comprend bien, là? On est collectivement impliqué là-dedans.

Il y a certains des arguments qui nous ont été présentés qui ne sont pas à négliger, qui ne sont pas à pousser du revers de la main puis, à part ça, il y a l’expression de lobby pure et simple, on ne se fera pas d’illusions, il faut démêler ces choses là, c’est compliqué. Alors, avant de me dire: Tel ministre… un tel, il a fait telle déclaration, enlevez le donc de là. Moi, je dis: Un instant ! Un instant ! Voulez vous regarder le portrait complet?

[M. Venne (Michel): M. Parizeau, est ce que, d’après vous, il peut y avoir un impact sur la façon dont les Québécois vont voter référendum, est ce que le bilan de votre gouvernement peut avoir impact sur la façon dont les gens vont voter au référendum? Et,
oui, quels sont les éléments de ce bilan qui militeraient en faveur d’un vote pour le oui? Quels sont les éléments qui pourraient nuire à une victoire?]

[M. Parizeau:] Écoutez, inévitablement, la performance du gouvernement, la façon dont il opère a un impact sur une décision comme celle qu’il y a à prendre à l’occasion du référendum, ça va de soi, ça, parce que c’est dans la performance du gouvernement qu’il y a confiance ou non; la confiance, c’est important là-dedans. Il y a des gens qui veulent savoir entre les mains de qui ils se mettraient s’ils votent oui au référendum et, donc, la performance de ceux qu’ils ont devant eux comme gouvernement, c’est important, ce n’est pas du tout négligeable. Cette performance cependant – là, je reviens à mon affaire de lobby – ça dépend comment on veut la juger. Est ce que, compte tenu de la situation économique générale en Amérique du Nord, est ce que ce gouvernement fait une bonne job sur le plan de la création d’emploi? Est ce que, sur le plan du déficit, il le réduit de façon crédible puis évite d’emprunter pour payer l’épicerie ou pour payer les salaires? Emprunter à 10 ans pour payer les salaires la semaine prochaine. Il a promis de le faire, est ce qu’il le fait? Il avait promis de le faire sans augmenter les impôts et les taxes sur les particuliers. Est ce qu’il l’a fait? Est ce que, dans les gestes qu’il pose sur le plan de la formation professionnelle ou bien de la performance des entreprises, est ce que ça marche? C’est ça qu’il faut amener et il faut qu’on le présente bien, qu’on présente bien ces éléments là, ce sont les éléments de performance fondamentaux de ce gouvernement.
À côté de ça, il y a des gens qui diront: Écoutez, on nous a enlevé quelque chose; vous êtes des «pas gentils». Votre performance est très mauvaise, parce que, moi, j’avais quelque chose puis je ne l’ai plus ou je ne l’ai qu’en partie. Bien, ça, qu’est ce que vous voulez, ça sera toujours le débat de société où on veut imprimer un changement quelconque. L’alternative, c’est le statu quo à tous égards, à tous égards: Il fait chaud, on est «ben» puis on change rien.

[M. Kalb (Richard): On passe maintenant en anglais. M. Morin (Gilles): Si c’était possible… M. Kalb (Richard): Bien, rapidement.
M. Morin (Gilles): Oui. En période de questions vous aviez dit que vous n’étiez pas au courant de l’invitation du Point. Est ce que vous avez été mis au courant? Est ce que vous acceptez?
[M. Parizeau: Ha, ha, ha ! C’est assez curieux. Hey ! C’est du 21 juin, donc d’hier. Alors: «Monsieur, je souhaiterais par la présente vous inviter à un débat entre vous et le chef de l’opposition officielle, M. Daniel Johnson, sur l’entente de principe entre le PQ, le Bloc québécois et 1’ADQ conclue le 9 juin dernier – le 21 juin, tout à coup, là – et la proposition constitutionnelle qui en découle. Je vous propose que ce débat se tienne le dimanche 25 juin prochain.» Quatre jours après ! Vous avez déjà vu ça, vous? Bien, Jean Pelletier, le rédacteur en chef du Point. Ha, ha, ha ! Je n’ai jamais vu une invitation être faite comme ça. Écoutez, j’en ai tenu des débats avec M. Bourassa. Ha, ha, ha ! On ne fait pas ça comme ça. C’est quoi? C’est téléguidé cette affaire là?
En somme, là, ça devenait embarrassant pour M. Johnson que cette façon de ne pas être capable d’abord d’attaquer M. Dumont, puis en réponse à la demande de M. Dumont d’en débattre avec lui de ne pas savoir comment se sortir de là. Entre nous, s’il ne voulait pas une offre de débat avec M. Dumont il n’avait qu’à ne pas l’attaquer. Bon. Il l’attaque. Il se fait présenter une demande de débat. Il ne se sait pas comment s’en sortir puis là je reçois ça, moi. Ha, ha, ha !
[M. Houle (Robert): Mais quand vous dites que c’est téléguidé, accusez vous la Société Radio-Canada de…]
[M. Parizeau:] Je ne vous reproche rien. Écoutez, moi je ne vais pas commencer à sonder les reins et les coeurs. Je vous dis simplement que je n’ai jamais vu une affaire comme ça. Ce n’est pas comme ça qu’on procède, voyons. Quatre jours avant. Ha, ha, ha ! Ce n’est pas une discussion…
[M. April (Pierre) : Il faut passer absolument en anglais puis très rapidement, puis je trouve ça difficile, là. M. Bernice Saint-Laurent.
M. Saint-Laurent (Bernard): Bernard Saint-Laurent. Mr. Premier, I am wondering what you figure you need to do to convince more Quebeckers that Québec should become a sovereign country?
M. Parizeau: Explain, discuss, present, do things. Look at yesterday night in the Outaouais, 1 500 people around and that is a bit on the conservative side, but in my mind by counting chairs there were more than that, but let us say 1 500 people at a public meeting in Hull in 25 years of political life. I have never seen that. At a meeting before, there were 600 in overall, 600 majors counsellors, school commissioners, industrial commissioners, people from local Chambers of Commerce, 600, I have never seen that before. And the first topic was, of course, the Federal civil Service, and that is understandable. And we discussed that at length and they were surprised to hear that since… well for the few months where we have been in Office, we already are preparing a sort of memorandum of understanding with unions, particularly the Alliance des fonctionnaires fédéraux, representing something like 40000 federal civil servants. That helps. That helps to get support for the referendum. We have got to show that: a) we are serious about our intentions and we are serious about the way we want to handle that situation. I think we are doing it.
Now we have got several months of session behind us, we have got a good record in terras of legislation, now we got to go and present that legislation to people and say: Look, that is what we… We have done that, we want to do more of the saine, we want to do far more than we have achieved until now but the decision is next fall. In terras of professional training, vocational training which, for me, is one of the essential move that we have got to make we cannot finish it as long as the Federal Government is so pigheaded about this and considers that what Quebeckers, all Quebeckers want that is the Federal Government to move away from that field is a whim, as Mr. Chrétien said.
We can go a long way but, past a certain point, we need one government and not two.

Le Modérateur: Peter Ray, s’il vous plaît, rapidement.

M. Ray (Peter) : Mr. Parizeau, speaking of the referendum, you were saying earlier this year that would be, après l’entrée, à l’automne, I just wonder if you have any ides or could give us any indication now exactly what time table you have in mind. I know that we will be back here probably earlier than usual.

M. Parizeau: If i really win, I will want to announce a date I will have a Press Conference, fully dressed on this. In the mean time, all I can say is: Be patient.

M. Béguin (Rhéal): Why hold the secrecy? M. Parizeau: Pardon me? Des voix: Ha, ha, ha !

M. Parizeau: It usually happens that way in our parliamentary system where elections and a fortieri referendums are not held at fixed dates well-known in advance.

M. Béguin (Rhéal): I asked for the referendum date, but when you will be tabling the law?

Une voix: La loi.
M. Parizeau: Well, when I will be tabling the law, you would know. You can count like anybody else. That would be another way for me to tell you at what date.

M. April (Pierre): Dernière question, M. Noseworthy.

M. Noseworthy (Raiph): Sir, getting back to the polis, so you are not overly concerned or upset about this recent poli. You have your own internai poils?

M. Parizeau: It is no… Mainly, I also have the polis of the feds as La Presse this morning was showing them. I gather that the feds think that we would win the referendum by 57 % of the vote. Look, that is a great improvement over the last, say, two months. Two months ago, everyone was convinced that we had support or the assent of 42 or 43 %. Now, everyone is wondering whether we have support in between 48.5 % and 57 %. Weli, a good improvement.

M. April (Pierre): Merci beaucoup, m. le premier ministre. M. Parizeau: Voilà, merci.

(Fin à 12 h 33)]
[QParizeau19950907cp]
[(Seize heures deux minutes)]
[M. Parizeau:] Mesdames, messieurs, la question suivante a été inscrite ce matin au feuilleton de l’Assemblée nationale: «Acceptez vous que le Québec devienne souverain après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique dans le cadre du projet de loi sur l’avenir du Québec et de l’entente signée le 12 juin 1995?»
Le dépôt de cette question marque la fin d’une longue évolution qui a commencé dans ce salon rouge avec vous le 6 décembre dernier. Nous avions, à ce moment là, déposé, vous vous en souviendrez, un avant-projet de loi. Nous avions distribué cet avant-projet de loi partout au Québec, dans chaque logement, chez chaque contribuable, ou plutôt électeur; c’est souvent la même chose. On avait engagé un grand débat en indiquant clairement que c’était amendable, cet avant-projet de loi, ça pourrait être profondément changé. On ne changerait pas le but, l’objet de la loi, c’est-à-dire de faire du Québec un pays souverain, mais on était prêts, d’autre part, à modifier très profondément tout cela à la suite de ces consultations.
Il y a eu, par la suite, au début de l’année 1995, les commissions régionales. Ces commissions qui, regroupant dans 18 commissions différentes 288 commissaires, ont circulé dans toutes les régions du Québec, ont présenté leurs rapports. Ces rapports ont été examinés ensuite par une Commission nationale présidée par Mme Vézina, qui avait d’abord présidé la Commission des aînés. Il est ressorti de cet exercice un certain nombre de choses dont, je vous avouerai, moi, je ne m’y attendais pas. Je ne croyais pas, par exemple, que, à notre époque, après cet exercice auquel 53000 Québécois ont contribué directement, on arriverait avec des conclusions du genre suivant: Oui, il faut des chartes des droits et libertés, mais il faut aussi une charte des devoirs des citoyens les uns à l’égard des autres. On avouera qu’à la fin du XXe siècle, il y a de quoi surprendre.

Presque partout on a, en dépit du fait que ça n’est pas considéré comme particulièrement politiquement correct, on a vu un grand nombre de gens dire: Et le projet de société, ce sera quoi? Oui, on a dit: Vous n’utilisez pas l’expression juste. On ne devrait pas parler de ces choses là. Oui, mais enfin, il reste qu’on a trouvé un désir profond, chez les Québécois, qu’on dessine un peu les voies de l’avenir.

Je sais bien que, parmi les observateurs ou les commentateurs, on trouve que cela est, bon, naïf. Mais j’aimerais rappeler, à cet égard, que ce ne sont pas les commentateurs qui ont raison quand les gens veulent vraiment quelque chose. Ce sont les gens qui ont raison.

On a trouvé, bien sur, un appui important à la souveraineté dans ces commissions. Mais, presque partout, on nous a dit: Il ne faut pas faire comme si tout était terminé avec le Canada. Réalisons la souveraineté, oui, mais gardons la main tendue. Offrons un
partenariat, sur le plan économique, politique, nouveau au Canada. Cet espoir que ce nouveau partenariat puisse exister, on l’a entendu à travers tout le Québec.

D’autre part, reflétant ces choses, ces questions, ces conclusions des commissions, des discussions ont été amorcées entre le Parti québécois et le Bloc québécois et avec 1’ADQ. Trois partis politiques ont réussi à s’entendre sur un texte qui a mis fin à certaines querelles de doctrines, dont certaines duraient depuis 20 ans, entre les souverainistes eux mêmes, entre ceux qu’on considérait comme, je ne sais pas, moi, des souverainistes purs et durs, comme on disait et, d’autre part, des gens qui avaient, disaient ils, l’esprit plus ouvert. on sait à quel point ces débats ont été très durs dans le passé et là, tout à coup, à partir de l’entente du 12 juin, reflétant tout ce qu’on avait entendu dans les commissions, l’entente s’est faite. Elle est très explicite, cette entente du 12 juin. Elle est très claire, et elle est entièrement dominée par cette préoccupation: on va réaliser la souveraineté et on va proposer au canada un nouveau partenariat économique et politique. C’est ce qui explique la base même de la question. Cette entente a joué un r8le déterminant et, là, il fallait se présenter ou présenter un projet de loi puisque, le 6 décembre, ici, au salon rouge, à l’Assemblée nationale, par un message que j’avais télévisé un peu partout au Québec, on présentait l’avant-projet de loi. Bien, là, il fallait le dire qu’est ce qui va arriver de cet avant-projet de loi, comment il va se transformer en projet de
loi.
Il y avait une première étape à franchir, c’était de remplir la fameuse page blanche et faire une déclaration de souveraineté; et nous avons entendu ce très beau texte, hier, et un peu plus tard, nous avons formellement, au Conseil des ministres, décidé d’en faire le préambule du projet de loi. Et puis, le projet de loi lui même, le corps du projet de loi, a, après avoir donné lieu à beaucoup de discussions – parce que c’est un document important, il dessine la façon dont la souveraineté va apparaître, la façon dont ce partenariat va être offert; c’est un texte important ce projet de loi – a été finalement inscrit au feuilleton aujourd’hui et déposé en chambre.
Demain, à 10 heures, comme vous le savez, M. Louis Bernard rencontrera ceux d’entre vous qui veulent une sorte d’exposé technique sur ce projet de loi. Il reprendra les articles les uns après les autres pour en tirer toute la moelle et tout le sens et toutes les nuances. M. Louis Bernard, vous le savez, a été, en plus d’être secrétaire général du Conseil exécutif, mon principal conseiller juridique constitutionnel depuis très longtemps à travers l’ensemble de cet exercice. Ce projet de loi représente un remaniement important par rapport à l’avant-projet de loi. Quand nous avons promis, le 6 décembre dernier, d’écouter et de tenir compte de ce qu’on entendrait, c’est ça que nous avons fait. L’on peut bien, à l’heure actuelle, j’allais dire, un peu juger les coups, dire: Tiens, ça, c’est un virage, ou: Ça, ce n’est pas un virage. Tout ça n’a pas, au fond, beaucoup d’importance. On a écouté; on a été plusieurs, je pense, de bonne foi, à écouter ce que les gens avaient à dire et on a cherché à le traduire aussi bien qu’on le pouvait.

Je voudrais terminer en disant ceci: Le texte de loi, le projet de loi 1 sur l’avenir du Québec, comporte un préambule, qui est cette déclaration de souveraineté d’hier. Il comporte le texte de loi proprement dit et, en annexe, le texte de l’entente entre les trois partis politiques du 12 juin dernier. Ce sera distribué aussi rapidement que possible, ça ne va pas traîner, partout au Québec, dans tous les foyers. Tout le monde pourra y voir le sens du projet. Il y en a, évidemment, une copie anglaise qui est disponible et qui sera disponible. J’incite tous les Québécois à examiner ce texte.

Ce texte, il veut définir notre avenir et il nous concerne tous. Je veux cependant remercier, d’ores et déjà, la presse quotidienne qui, ce matin, a reproduit intégralement le préambule, ce qui est devenu le préambule, la déclaration de souveraineté, sans attendre que l’ensemble ne soit distribué; c’est, je pense, faire oeuvre utile. Il faut exposer le plus grand nombre de Québécois à tout ce qui leur permet de dessiner et de mieux dessiner leur avenir.

Et maintenant, nous allons nous engager dans le débat à propos de la question référendaire. Je pense que nous allons assister à un exercice, à un chapitre démocratique, profondément démocratique des citoyens du Québec, appuyé sur leur Assemblée nationale, dont nous avons fêté le 200e anniversaire l’an dernier. Nous avons un vieux système parlementaire, une démocratie qui fonctionne bien, nous allons décider de la souveraineté du Québec d’ici quelques semaines. Voilà.

[La Modératrice: Questions?

[ M. Vanne (Michel): M. Parizeau…
La Modératrice: Michel Venne.
M. Vanne (Michel): …si vous permettez, j’aurais deux questions. La première est la suivante: Je sais que ce n’est ni dans l’entente, ni dans le projet de loi, mais pourriez vous envisager qu’advenant un Oui après les négociations avec le Canada sur un nouveau partenariat puisse être tenu un second référendum pour permettre au peuple québécois, soit d’entériner les résultats de la négociation, ou de confirmer leur désir de faire du Québec un pays souverain?]
[M. Parizeau:] Bien, non. Pourquoi? Non, non, non. Là, je ne vois pas à quoi ça servirait. Il y aura, plus tard, une consultation populaire qui est prévue au sujet de la constitution du Québec souverain. Ça sera très bien comme ça. Non, non, ce n’est pas nécessaire de multiplier, comment dire, les étapes. Vous voyez, la réalisation de la souveraineté et l’offre de gens, en votant à ce référendum ci, sachent à quoi, dans quoi ils s’engagent. Ils vont le savoir.
[M. Vanne (Michel): Ma deuxième question est la suivante: Vous avez souvent parlé, vous parlez souvent, et vous l’avez encore répété tout à l’heure en Chambre, de l’importance d’un rassemblement autour de ce projet, d’une coalition
Dans ce contexte, que pensez vous de la décision de l’ancien premier ministre du Québec et chef du Parti québécois, M. Pierre-Marc Johnson, de ne. pas participer à cette campagne, et même tout en critiquant la démarche gouvernementale?]
[M. Parizeau:] On me permettra de ne pas commenter. Je suis probablement celui qui est le plus mal placé pour commenter ça. Ha, ha, ha ! Simplement parce que je suis son successeur.
[M. Morin (Gilles): M. Parizeau, si on fait des recoupements entre l’annexe, c’est-à-dire l’entente du 12 juin et l’article 26, est ce que ce serait mal vous interpréter que de vous demander si vous avez arrêté votre choix définitif sur la date du 30 octobre 1995 pour la tenue du référendum?]
[M. Parizeau:] Comme vous le voyez, il est clair que la probabilité que ça soit le 30 octobre a augmenté considérablement. Ha, ha, ha !
[M. Tétreault (Éric): M. Parizeau, on peut tirer comme conclusion des commissions sur la souveraineté, qu’on a tenues au printemps, que les Québécois, effectivement, comme vous l’avez dit, ont tendu la main au Canada anglais et pourraient adhérer au projet d’un Québec souverain en autant que le Canada coopère, et je le prends dans le sens le plus vaste du terme.
Est ce pour cette raison que le mot «pays» n’apparaît pas dans la question, parce qu’on a peur qu’à tout choisir, qu’à être obligé de choisir, on choisisse un seul pays et qu’on choisisse le canada avant le Québec?]
[[M. Parizeau:] Ah non !
[M. Tétreault (Éric) : On ne se trouve pas, avec cette question là, à pouvoir choisir les deux pays à la fois?]
[M. Parizeau:] Non, non, non, parce que non, ça, ça ne serait pas possible et, d’autre part, on s’entend depuis si longtemps pour dire ce que c’est que la souveraineté.

Je sais bien qu’il y a des gens qui ont pensé, comme ça, pendant quelques années, qu’on pouvait, vous savez, être des deux côtés à la fois. Vous vous souvenez, il y a quelques années, certains se moquaient du fait que, dans des sondages, on voyait que des gens qui se disaient souverainistes pensaient qu’après la souveraineté, on pourrait quand même envoyer au Québec des députés à Ottawa. Vous vous souvenez de ça, il y a sept ou huit ans? Et puis, tout le monde disait: Bien, oui, le cheminement s’est fait. La compréhension a pris un certain temps et, maintenant, tout le monde comprend très bien: Un Québec souverain, c’est un pays, et on va choisir le Québec souverain comme son pays, et quand on choisit le Québec comme son pays, bien, on ne choisit pas le Canada comme son pays. Il faut choisir, et ça fait des années que, petit à petit, on s’approche du choix. Mais oui, c’est un choix. C’est un choix important.

Le message que les Québécois nous ont passé par les commissions régionales ne comporte pas d’ambiguïté. Ça comporte quelque chose qu’on avait déjà trouvé sous une certaine forme à la Commission Bélanger-Campeau, c’est-à-dire, l’espace économique canadien. Bon, bien, ça, il faut le maintenir. L’espace économique, ça ne correspond pas aux frontières d’un pays, ça. Il y a un espace économique européen à l’heure actuelle où ils sont plusieurs, un grand nombre de pays. L’ALÉNA, c’est un espace économique. Il y a trois pays dedans.

Là, les Québécois nous disent: L’espace économique actuel, au Canada, ça, il faut préserver ça. Bon, on dit: Très bien, d’accord. On vous a compris. On dit, d’autre part: Il y a, à l’heure actuelle, entre les pays, toute espèce d’arrangements politiques, un peu partout dans le monde. Pourquoi, avec le Canada, où nous sommes depuis si longtemps, pourquoi est ce qu’on ne pourrait pas essayer un arrangement comme ça? On dit: Vous avez raison. C’est ça qu’on va faire. Mais chaque fois qu’un Français se dit: Il faudrait qu’on essaie de s’entendre avec l’Allemagne sur telle ou telle chose, il ne s’imagine pas qu’il est moins français pour ça. Puis l’Allemand qui répond: Bien, oui, je suis d’accord pour m’entendre avec vous. Il n’est pas moins allemand pour ça.

Oui, nous allons choisir d’être Québécois et, d’autre part, on va faire des efforts
importants pour arriver à ce nouveau partenariat avec le Canada.

[M. Tétreault (Éric): Si on est si prêt, M. Parizeau, pourquoi le mot «pays» n’apparaît il pas dans la question? C’est simplement ça.]

[M. Parizeau:] C’est, comment dire… pourquoi oui, pourquoi non. Le Québec est souverain, le Québec est un pays souverain, ça n’a pas de, comment dire, pour moi, ça veut dire exactement la même chose et… Là, je sais bien que le chef de l’opposition voudrait bien que dépasse un peu. Ce qu’il veut dire, cependant, c’est qu’il est prêt à approuver un oui à la condition que je mette le mot «pays» dedans. Bien, là, je le ferai volontiers; mais, pour moi, comment dire, c’est bonnet blanc, blanc bonnet.
[M. McKenzie (Robert): M. le premier ministre, j’aurai deux questions sur l’échéancier. Je pourrais peut-être les poser séparément. Dans le cas d’un oui, est ce que la préparation de la nouvelle constitution se mettrait en branle en même temps que les négociations qui seraient entreprises avec le Canada?]
[M. Parizeau:] Oui, j’imagine… je ne sais pas. Je vous avouerais que je n’ai pas réfléchi à ça, je ne peux pas vous garantir que ce sera la même date mais il est évident que la loi fondamentale du Québec, ça va demander pas mal de préparation, ça va… À notre époque, on sait le temps que ça prend. On a des dispositions constitutionnelles transitoires qui, elles, peuvent être faites assez rapidement mais je pense que, assez rapidement, après un oui au référendum, il faut s’atteler à la tâche de la préparation d’une constitution permanente. Mais, encore une fois, il ne faut pas lier cette loi fondamentale du Québec, cette constitution permanente, à une échéance de réalisation de la souveraineté ou d’entente avec le Canada. Ça se poursuivra, ça, indépendamment de l’agenda
préparation de la constitution. Je ne peux pas vraiment vous dire à l’avance combien de temps ça prendra pour mettre au point une constitution qui reçoit un appui très général dans la population. On prendra le temps que ça prend.

[M. McRenzie (Robert): Cette deuxième consultation, ce deuxième référendum, pourrait il intervenir avant la fin des négociations?]

[M. Parizeaus :] Ah non, je ne pense pas, ah non, non, non. Écoutez, à notre époque, on sait bien à quel point une constitution reflète des équilibres à l’intérieur de la société qui sont très très délicats. Ah non, moi je serais vraiment le plus surpris du monde. Pour moi, cette consultation populaire, pour approuver une constitution permanente, moi je pense qu’il n’y a aucune chance que ça se fasse, mettons, dans l’année qui suit un oui.
[M. McRenzie (Rob ,ert): Ma deuxième question. Vous envisagez la création d’un comité d’orientation et de surveillance des négociations éventuel. Avez vous l’intention de nommer ce comité avant que le référendum ne se tienne?]

[M. Parizeau:] Je suis à discuter avec mes collègues, M. Bouchard et M. Mario Dumont, oui la possibilité sinon de nommer tout le comité, au moins d’en nommer quelques uns pour qu’on voit bien de quel genre de personnes, qui on envisage, de qui il pourrait s’agir, vous voyez. Alors, ça ne serait pas nécessairement tout le comité qui serait nommé mais on va essayer de voir si c’est possible. Alors, on est en train de discuter ça entre nous. Une des raisons fondamentales, je pense, pour laquelle on ne pourrait pas nommer tous les membres avant le référendum est la suivante. C’est qu’il faut, sur ce comité de surveillance, il faut être en mesure de rallier ceux du non au dessein commun quand le oui va gagner. Et il faudrait que eux puissent, après un oui au référendum, voir certains des leurs siéger sur ce comité. Une fois que la poussière sera retombée, une fois qu’on pourra se parler correctement, disant: Bon, bien, oui, il a gagné, voilà, voici dans quelle voie on s’engage, travaillons tous pour la même cause, bien il faudrait garder un certain nombre de sièges pour ces gens là. Ça me parait très important, très important pour l’équilibre de l’exercice. Oui?

[Une voix: M. Parizeau, pourquoi ne pas vous engager à faire adopter le projet de loi avant le référendum pour que les Québécois puissent se prononcer sur une loi et non pas sur un projet de loi qui peut être modifié?]
[M. Parizeau:] Ah mais pour une raison très simple. C’est que, longuement, bien j’ai pensé que peut-être on pourrait… et faire porter… C’est prévu dans la Loi sur les consultations populaires, on peut voter sur un projet de loi ou on peut voter sur une question – et pendant un certain temps, moi, je me suis dit: Tiens, ça pourrait être sur un projet de loi qu’on voterait… pas sur un projet de loi, sur une loi, hein, qu’on voterait, ou sur un projet de loi dont l’adoption serait assez avancée, ou je ne sais pas, là, vous voyez, peut-être dont le principe aurait été accepté par l’Assemblée nationale, quelque chose comme ça. Et au fond, à force d’y penser et de consulter – et puis maintenant, on est plusieurs, on se parle là-dessus; les trois chefs, là, on se voit toutes les semaines – il apparaissait tellement clairement que, pour que les gens aient une vue claire des choses, là, il fallait pouvoir ramasser dans quelques lignes leur choix, et finalement, on s’est dit: On va voter sur une
question. C’est ça où… Je pense que tout le monde se sentira plus à l’aise de voter dans le cadre d’une question courte; quelques lignes, ce sera bien plus simple que de voter sur un projet de loi, qui présente toutes espèces d’aspects, c’est le cas de le dire, toutes espèces d’aspects. Alors, ça a paru, au fur et à mesure où le temps passait, ça apparaissait de plus en plus sage. C’est tout.
[La modératrice: Les deux dernières questions, Paul Larocque et i
Mme Pitre.
M. Larocque (Paul): M. le premier ministre, le projet de loi que vous présentez, évidemment, élabore beaucoup sur les suites d’une victoire du oui. Permettez moi de vous poser une question. Comme chef de gouvernement, dans le cas contraire, M. le premier ministre, est ce que votre avenir politique, vous, est lié au résultat du référendum?]
[M. Parizeau:] Ha, ha, ha ! Vous allez d’abord poser la question à M. Jean Chrétien et à M. Johnson: Qu’est ce qui se passe si le Oui passe? Et quand j’aurai leur réponse, je vous donnerai la mienne. Ha, ha, ha !
[Mme Pitre (Nathalie): M. Parizeau, que répondez vous à Daniel Johnson, qui prétend que c’est une illusion que votre gouvernement puisse négocier un partenariat avec le reste du Canada dans le contexte actuel?]
[M. Parizeau:] Je pense que non seulement ça n’est pas une illusion, mais que ça va se produire. Ah ! il ne faut pas être gouverné par les sondages, mais enfin, quand même, les sondages ont un certain sens. Chaque fois qu’on demande au Canada anglais par sondage: Si le oui gagne, est ce qu’on garde l’espace économique canadien – les questions varient le marché commun canadien, les rapports économiques, est ce qu’on fait une entente économique avec le Québec? Chaque fois, c’est quoi? 70 % des anglophones du reste du Canada disent «Oui», une grosse, grosse majorité. Des chefs politiques, comment dire, qui, à certains moments, s’énervent un peu par la perspective d’un Oui et qui font circuler les cavaliers de l’Apocalypse, là, comme ça se présente fréquemment, ils n’iront pas contre ça, hein, ils n’iront pas contre le fait que 70 % des Canadiens en dehors du Québec veulent une association économique sous une forme ou sous une autre avec le Québec si le oui l’emporte. Il y a une sorte de sagesse des nations là-dedans. Qu’est ce que vous voulez, nous avons des intérêts qui sont tellement étroits, étroitement liés les uns aux autres que moi, je suis convaincu qu’ils vont accepter de négocier. Est ce qu’on s’entendra? Bien, là, je ne le sais pas. Notre projet est fait de façon à ce que, proclamant la souveraineté du Québec, sur le plan des rouages essentiels, sur le plan économique, on préserve ça. C’est la raison pour laquelle on garde la monnaie canadienne. Mais toute forme plus élaborée d’association économique, moi, je crois que oui, les dirigeants politiques, même s’ils n’aiment pas toujours ça, vont être poussés par leur population pour que, effectivement, ça se fasse correctement.

[La modératrice: O.K. Questions en anglais, s’il vous plaît.

M. Béguin (Rhéal): Mr. Premier, what is it about the partnership with Canada that will make sovereignty more acceptable to those hesitant voters out there?

M. Parizeau: People do not change abruptly their vision of things. More and more Quebeckers have chosen Québec as their country in their minds, and when you ask – and you know that(?) in ail kinds of public opinions poils – when you ask Quebeckers: Are you Quebeckers? How do you define yourself? As a Quebecker, a FrenchCanadian or a Canadian? You know what the score is these days, about 60 % of people here say: I am a Quebecker. And that is about double what it was a few years ago. I mean, the identity question in Québec is gradually getting solved.
Now, it does not mean that people say: Well, we want to abruptly end the links we have had for Canada for so long. And we find that. We have been hearing that ail winter and ail spring. And that is why we tried to translate it into the question and into the bill.
People are wiser than a lot of commentators give them credit for, I think. I think.

M. Béguin (Rhéal): You spoke earlier today about the evolution that took place in your mind with respect to this new partnership with Canada. How can you characterize that?

M. Parizeau: I am sorry. I did not grasp that.

M. Béguin (Rhéal): You spoke earlier today in the National Assembly about this evolution that took place in your own mind regarding…
M. Parizeau: Oh yes.
M. Béguin (Rhéal): …the partnership with Canada. How would you describe it or characterize it?
M. Parizeau: In the following sense: For several years, I have been working at a design where the essentials of the Canadian economic space could be maintained irrespective of acceptance by Canada.

Sonie times, when I went to Toronto, for instance, at the Canadian Club or similar places, and I described the scheme as I did for a few years, either(?) I would be looked at with somewhat less than enthusiasm. But it was my starting point. I wanted that to be secure, and I think it is.

Now, obviously, Quebeckers want to maintain, if possible, other links, links that would go further than what I have just called the essentials. Why not? If Quebeckers want a good try at this, alright. I am not the one who is right, they are. If they tell me: try, alright, we will accompany you to achieve sovereignty, but try something in that order(?). Well, it is airight, let us try. of course, I am not – I have said that very often – necessarily the most credible guy … in English Canada to advance in that direction and that is why that committee of orientation and surveys of the

negotiations is an essential part. That came from my associates, M. i
Bouchard and M. Dumont. I think you are right. We cannot try to do

this all clone the conducts or, at least, the surveillance of these negotiations. We will not necessarily be always credible. So, we will
negotiations and report to the public and say: Well, these guys are still negotiating in good faith and are trying hard. All right, I will try.

Une voix: O.K.

Une voix: Mr. Parizeau, today you finaily were able to present the bill, the question. This has been your target for 25 years. I wonder if you can tell me. Are you not feeling terribly relieved in a sense or satisfied? What is it that you experience when you stood up to present that bill?

M. Parizeau: I am not sure I can comment after the observations of some of you about me yesterday. I was very moved yesterday. You are quite right, I have been trying for years and I am not alone. Yesterday, at the Grand Théâtre, they were hundreds of people who have been in the saure drive, for the same objective, as many years as I have. It is a very moving moment and, you know, to try to orient once life after all towards having and building once country, I think it is a worthwile purpose…
ask people who are credible in our society to follow
these
J
M. Branswell (Jack): Earlier, in his news conference, M. Johnson
suggested that the question itself is a trick to trying convince Quebeckers to vote yes. This is a two part question here and I want to know what your feelings are on his statement about it being a trick. The other part is: Why, specifically, the word «country» is not… «sovereign country» is not mentioned in the Bill?

M. Parizeau: Because it is the saine thing to say: Québec will become sovereign. It does mean «a country», it cannot mean any other thing. We have reached the point where one must choose a country. You find that expression in the Bill and you find it in the Preamble, you find it ail over the place. So, I think it is largely immaterial. However, I could not resist the temptation, in the House, to say to Mr. Johnson: If, to get your support for sovereignty, ail it implies is that I accept your proposai and add the word «country» in the question, you will not have to propose that amendment, I will. Ha, ha, ha ! But it really…

La Modératrice: Trois…

M. Parizeau: I was… I knew the answer.

M. Bransweli (Jack): So, you do not agree with his version that
it is trickery?
M. Parizeau: No, no. It is not in any way tricky. We have been defining, ail of us, including the federalists, the def inition of sovereignty now for years. If there is one thing over which all Quebeckers agree, it is the definition of sovereignty. Sovereignty means all our taxes, ail our laws, all our treaties. The Parti Québécois has defined it that way years ago. When the Bloc québécois was born, it defined sovereignty exactly along these lines. The Bélanger-Campeau Commission defined it in exactly the saine ternis. Bill 150, that the Liberals presented in 1992 when they were in power in the House, uses the saine definition. We all agree about what it means, sovereignty. So, pass that point.

[La Modératrice: O.K. M. Parizeau va répondre à trois dernières questions.
Mme Rouleau (Marie-Paule): M. Parizeau, vous avez ajouté dans ce
constitutionnels existants des nations autochtones. Je voudrais savoir, dans un premier temps, est ce que vous faites référence aux droits tels que définis dans la Constitution canadienne, donc droits ancestraux et issus de traités, et pourquoi cet ajout, aussi?]

[M. Parizeau:] Là, je ne veux pas référer, comment dire, à la Constitution canadienne. Ça, ça vise à avoir notre propre constitution et nos propres engagements. Mais oui, ça a trait, comment dire, aux traités, aux droits historiques, au maintien de ça. C’est important.
C’est important, parce qu’il ne faut pas laisser quelque vide juridique que ce soit à cet égard. Ces gens ont des droits traditionnels, historiques et il faut qu’ils soient maintenus. C’est ça que ça, comment dire? que ça désigne. C’est bien ça, M. Bernard? Bon !
Il faut être absolument clair là-dessus, de façon que, d’aucune espèce de façon, on puisse imaginer, chez les autochtones, qu’on perd quoi que ce soit par ce déplacement. Tous leurs droits historiques et traditionnels doivent être maintenus.
[M. Ray (Peter): Mr. Parizeau, just to get you on the record: First of all, on the date of the referendum, there was a littie bit of «astuce» today in the way it was presented. I mean, it is in the bill, but the question has not been formally tabled. Can we safely assume at this point that October 30th is definitely going to be the date or are you still going to wait around until the last minute before you finally table the date?
M. Parizeau: Frankly, you see, you have had so much news today that I will not confirm the date today. However, please consider that, today, the probability of October 30th has increased immensely.
M. Ray (Peter): And if I could just ask you about the question itself, the referencé to an of fer to the rest of Canada, coupled with sovereignty. Are you expecting that there will not be any declaration of sovereignty before these negotiations are completed? M. Dumont earlier indicated to us that he is of the impression that there will not be any move towards independence until after the negotiations with the rest of Canada are completed.
M. Parizeau: The law is very explicit… the bill is very explicit on this. It works this way: We give ourselves, Quebeckers, through their institutions, we give ourselves a year to complete this new partnership with Canada. If a little more time is needed, the National Assembly in that bill is empowered to decide that a little more time will be available.

However, should the negotiations lead nowhere, then, and after asking for the advice and diagnosis, if I may say so, of the surveillance and monitoring an orientation committee for these negotiations that I have mentioned previously, af ter asking them, that committee, their advice on this, the National Assembly is empowered to proclaim the sovereignty of Québec. So, both possibilities are envisaged in that bill quite explicitly. See, what the question means again, clearly, is that we are committed to achieve the sovereignty of Québec after having offered to Canada a new partnership, a new economical and political partnership. sovereignty, the achievement of sovereignty, is not conditional on the acceptance by Canada of that partnership. We will offer formally a new partnership to Canada and, I mean, if things run well, if negotiations are fruitful, then sovereignty would combe a year later, after the referendum, possibly a little later if the National Assembly is hopeful and thinks that there is a good chance of achieving a good result. If not, the National Assembly is empowered to say: Well, we have tried, nothing has corne of it, Québec is a sovereign country.
La modératrice: O.K., la dernière.
M. Kalb (Richard): Premier, I understand that we will have a full briefing on the bill tomorrow but I would like to ask you a question on section 21. It deals with agreements with the Government of Canada, agreements and contracts with the Government of Canada, and makes Québec the successor government to those contracts but it also gives the Government of Québec the power to renounce any of those contracts and sets the upset date for those contracts at October 30th 1995. Can you explain to me the reason for this section and why the upset date is set at the 30th?
M. Parizeau: There must be some sort of date where new contracts passed by the Federal Government in what will become our narre in short order cannot be renounce if, obviously, they have been accepted or moved by the Federal Government just to either embarrass us or put us in an impossible situation. So, what we say is: Ail contracts that have been signed, accepted before October 30th are … good. After that, please, we will be prudent in the sort of contract that we would accept to you Federal Government. It is essentially a measure of prudence.
M. Kalb (Richard): Would that have the effect of stopping commerce between the Government of Canada and Québec businesses?

M. Parizeau: No, no, no. Not at all. Prudence and good faith do exist and I am sure everything will be run properly and that the Federal Government will act after October 30th in a responsible fashion. But I have got to have some dispositions in the bill in case.

(Fin à 16 h 47)
[QParizeau19951031cp]
[(Dix-sept heures)]
[M. Parizeau:] Alors, mesdames et messieurs, il y a sept ans, j’ai fait un pari fou, le pari de reprendre un combat que plusieurs disaient vain, que plusieurs disaient fini, foutu. J’ai fait le pari que les Québécoises et les Québécois ne se contenteraient jamais d’être autre chose qu’un peuple et que la seule façon que nous ayons d’être un peuple, c’est d’avoir un pays à nous.
Pendant sept ans, petit à petit, les événements ont donné raison aux héritiers de René Lévesque. Pendant sept ans, petit à petit, la souveraineté a repris ses forces. Elle a essaimé dans d’autres partis, sur d’autres tribunes, elle s’est renouvelée dans son contenant comme dans son contenu.
D’autres sauront mieux que moi faire le bilan de ces sept années. Pour ma part, je retiendrai quatre choses: d’abord, le fait qu’une nouvelle génération de Québécois ait repris le flambeau de la souveraineté avec un enthousiasme et une ardeur sans pareils. C’est pour moi la plus grande réalisation que le mouvement souverainiste pouvait accomplir: se donner une nouvelle jeunesse, s’inscrire définitivement dans la durée, puis le fait que la souveraineté se soit étendue à toutes les générations de Québécois. Cette année, il y avait des indépendantistes aux cheveux encore plus blancs que les miens. Nous avons donc réalisé pour la souveraineté le mariage de la sagesse et de la fougue de la jeunesse, donc, de l’expérience et de l’énergie. Une cause qui réussit cette jonction ne pourra jamais mourir.
J’ajoute que nous avons su donner aux femmes une voix plus forte au sein et à la tête de notre parti et de notre gouvernement. C’est pour moi une grande victoire.
Aussi, ces dernières années, la voix souverainiste s’est enfin fait entendre sur la scène fédérale, là où elle n’avait auparavant pas droit de cité. C’est un changement majeur qui modifie toute la donne.
Finalement, nous avons su, il me semble, donner un contenu nouveau à la souveraineté, un nouveau contenu économique en mettant au coeur de notre projet la nouvelle réalité d’une planète qui est aujourd’hui presque un seul grand marché, un nouveau contenu social car nous avons su concilier notre instinct de solidarité et d’entraide et les rigueurs actuelles de la situation économique et financière.
Notre souveraineté, nous en avons fait un projet aussi humain que politique et économique, aussi individuel que mondial, nous l’avons enrichi et diversifié, et c’est pourquoi, je pense, il a réussi à toucher autant de gens.
Pendant les semaines extraordinaires que nous venons de vivre, je dois dire que ce sont les gens qui m’ont le plus impressionné. Avec nous et autour de nous, des milliers de sympathisants, de militants et de porte-parole, d’artistes et de grands politiques, de religieux et de professionnels, ont exprimé la richesse et la sincérité du Québec. Il y a des gens qui ont pris des risques terribles avec leur
carrière pour dire publiquement «oui». Il y a des gens qui ont mis leur crédibilité au service d’une cause qui nous dépasse tous. Je voudrais les nommer, mais il y en a des cent et des mille. Je veux, du fond du coeur, tous les remercier. Parmi eux, il se trouvera demain, c’est une certitude, des leaders qui sauront faire franchir à la souveraineté de nouvelles frontières.
Il y a une de ces frontières que, bien humblement, j’ai été incapable de franchir. Je n’ai pas réussi à faire en sorte qu’une proportion significative de nos concitoyens anglophones et allophones se sentent solidaires du combat de leurs voisins. René Lévesque s’était épuisé en vain sur ce même clivage; Gérald Godin avait réussi
à se faire beaucoup d’amis dans ces milieux, mais bien peu de convertis. C’est pour moi une déception très grande, car je sais les efforts que nous avons tous mis depuis sept ans à transformer cette réalité. Cela explique aussi que j’ai pu, hier, formuler cette déception dans des termes qui auraient pu être beaucoup mieux choisis.
J’ai aussi parlé hier de l’argent, et je vous dirai que nous entendons appliquer avec toute la vigueur dont elle est capable la Loi sur la consultation populaire. Le camp du Non a réussi à dépenser en une journée presque la somme totale respectée par le camp du oui pour toute la campagne. Les infractions massives infligées à notre cadre démocratique ne seront pas oubliées.
Mais, assez parlé du passé. Une des magnifiques nouvelles de la journée d’hier fut le taux de participation de 94 % et la sérénité du vote, qui témoignent que nous avons ici une population qui ne connaît
pas d’égale sur le globe quant à sa maturité démocratique. Je salue tous les électeurs et toutes les électrices. Il s’est produit hier une autre chose extraordinairement importante: les Québécoises et les Québécois ont signifié à leurs voisins et au monde qu’ ils doivent être reconnus comme peuple. Les hochets symboliques de «société distincte» et d’«ententes administratives» doivent être remisés dans les cercueils de Meech et de Charlottetown, c’est leur place. Les Québécois ont dit hier qu’ils veulent une véritable reconnaissance et qu’ils n’accepteront rien de moins que l’égalité.
Il faut être clair: hier, le Québec s’est levé debout. Il s’est levé pour de bon, et on ne pourra jamais le faire reculer. Hier, le Québec s’est levé debout, il lui reste un pas à faire. Il a l’élan voulu, il en a la capacité, il ne lui manque maintenant que l’occasion. Elle viendra bientôt, j’en suis profondément convaincu.
Comment ce pas doit il se faire? Par où passe le chemin qui mènera au nouveau et inévitable rendez-vous avec la souveraineté? Ce n’est pas à moi de le dire, ce n’est pas à moi de le faire. Avec mes qualités et mes défauts, j’ai contribué à conduire ce grand projet au résultat du 30 octobre. D’autres, maintenant, lui feront franchir la dernière frontière. J’annonce aujourd’hui qu’à la fin de la session parlementaire de l’automne je libérerai les postes de premier ministre, de président du Parti québécois et de député de L’Assomption, que les Québécoises et les Québécois m’ont fait l’honneur de me confier. Dans l’intervalle, comme premier ministre, je m’emploierai à faire avancer plusieurs dossiers importants pour la bonne marche du gouvernement et pour l’avenir de nos compatriotes. Des décisions importantes, certaines difficiles, doivent être prises; j’y veillerai.
Je remercie tous ceux et toutes celles qui ont fait avec moi ce bout de chemin et je sais qu’ils seront encore plus nombreux dans les mois et les années qui viennent. Je ne serai certes plus à leur tête, mais ils peuvent compter sur moi, je serai toujours à leurs côtés. Merci.

[Mme Gagnon (Marie-Josée): J’aimerais rappeler que nous allons accepter quatre questions en français et deux questions en anglais.

M. Tétreault (Éric): Deux courtes questions, M. Parizeau…]

[ M. Parizeau:] oui.

[M. Tétreault (Éric): … M. le premier ministre, deux courtes questions. J’aimerai savoir, d’abord, quand avez vous pris votre décision de quitter? Aujourd’hui ou avant?]

[M. Parizeau:] Depuis quand? Ha, ha, ha, il y a longtemps. C’était tout à fait clair que, si le oui ne passait pas, alors je partais tout de suite, et que si le oui passait, eh bien, là, je prenais le temps de mettre la locomotive sur les rails, comme on dit. J’ai fait une entrevue avec Stéphane Bureau hier midi qui, je pense, résume assez bien tout ça. Il y a un embargo dessus, je ne sais pas si l’embargo a été levé.
[M. TStreault (Éric): Autre question, concernant le vote ethnique, puisque tous les gens en parlent aujourd’hui. Vous avez vu les réactions. Est ce que ces propos d’hier que vous dites regretter aujourd’hui n’ont pas fait resurgir les vieux fantômes de nationalisme ethnique qui semblaient disparus du discours même de vos adversaires depuis quelques années?]
[M. Parizeau:] Oh, non, non, non. Les mots, écoutez, les mots étaient, comme je l’ai dit dans mon texte, trop durs hier, mais ça ne change rien à la réalité. Je ne reviens pas sur cette réalité que j’ai décrite et que tout le monde connaît bien.
[Mme Gagnon (Marie-Josée)s Christine Saint-Pierre.
Mme Saint-Pierre (Christine): M. le premier ministre, est ce que, hier soir, vous aviez préparé un texte en cas de défaite? Et, si oui, pourquoi vous ne l’avez pas lu? Pourquoi vous avez préféré cette voie?]
[M. Parizeau :] Parce que j’aime, à la fin d’une campagne – c’est la quatrième – procéder comme ça, comment dire, sans texte, des choses courtes. Donc, il n’y a rien, je veux dire, de bizarre ou de différent.
[Mme Saint-Pierre (Christine): Est ce que vous regrettez ce que vous avez dit au sujet des ethnies?]

[M. Parizeau:] Au sujet de?

[Mme Saint-Pierre (Christine): Des communautés culturelles?]

[M. Parizeau:] Ah non, non ! Encore une fois, les mots sont trop durs. Mais ils ne changent pas la réalité des choses. Quand 95 % des gens d’une même communauté votent du même côté, il y a une réalité, là, qu’on déplore sans doute, mais, enfin, qui est ce qu’elle est.

[Mme Gagnon (Marie-Josie): Paul Larocque.

M. Larocque (Paul): M. le premier ministre, si vous permettez? Comment vous voyez la suite des choses à partir de maintenant? Hier, dans votre discours, M. Bouchard, également, disait, bon, en quelque sorte: Â la prochaine ! Et elle viendra bientôt. La loi des consultations, au Québec, interdit deux référendums dans le même mandat. Comment ça pourrait se faire, là, ce rendez-vous que vous dites très rapproché?]

[M. Parizeau :] Ah, là, ce n’est plus à moi de le dire, ça ! Une situation nouvelle est apparue depuis hier. Puis, là, il faut, pour l’étape suivante, des nouvelles stratégies, des nouvelles directions. Et on va – moi, j’en suis convaincu – voir apparaître ça très tôt. Je serais vraiment étonné qu’en étant aussi proche du but, comment dire, des années se passent sans qu’il ne se produise rien.
Et, là, ce n’est plus moi qui vais peser sur les boutons ! I1 y aura des gens qui auront la tache de définir les orientations.

[M. Larocque (Paul): Est ce qu’une élection référendaire, par exemple, serait indiquée, selon vous?]

[M. Parizeau:] Moi, je n’ai pas… Encore une fois, ce n’est pas à moi, maintenant, de proposer des pistes comme celle là. J’en ai proposé pendant bien des années – sept ans maintenant – des orientation; ça n’a pas trop mal marché, mais on n’est pas à 50 %. Alors, étape suivante, stratégie suivante, personnes différentes aussi.

[Mme Gagnon (Marie-Josée): Une dernière question, Rhéal Séguin.

M. Béguin (Rhéal): Selon vous, m. Parizeau, quelle devrait être la stratégie à suivre pour réussir à franchir cette barre de 50 % dans les mois à venir?]

[M. Parizeau:] Dans les mois à venir, M. Séguin, je pense qu’il va falloir protéger le Québec de façon extrêmement vigilante. On nous a bien avertis des conséquences du non. Là, il va falloir essayer, je ne peux pas dire de minimiser les attaques du fédéral, elles vont être très fortes, mais, au moins, d’essayer d’en limiter les conséquences ou de limiter les dégâts. Ça, je pense que, dans les semaines et les mois qui viennent, ça va être une tâche, ça va être la tâche majeure. De cette situation, qu’est ce qui va apparaître comme stratégie? Encore une fois, comme je le disais tout à l’heure, ce n’est pas à moi de le définir. Mais, là, dans l’immédiat, il faut défendre le Québec et les Québécois.

[M. Béguin (Rhéal): Et, selon vous, existe t il un danger de retarder le prochain rendez-vous trop longtemps?]

[M. Parizeau:] Non, ça, je ne le sais pas. Comment dire, ma boule de cristal ne va pas jusque là. Tout ce que je sais, c’est que, quand on est aussi proche du but, il serait étonnant que quelqu’un ne se lève pas en disant: Bon, alors, une dernière poussée puis on y va !

[Mme Gagnon (Marie-Josée): En anglais, Barry Wilson et Rick Kalb.

M. Wilson (Barry): Premier, last week in Québec City, when speaking about the minorities in Québec, you said: «They are us.» Last night, what you said seemed to go against that, and I am wondering if you regret what you said and how you feel about leaving under such a cloud?

M. Parizeau: I used words that were strong, last night. But they underline a reality that exists. And I an sorry that it exists, and God knows if René Lévesque and Gérald Godin and myself and others have tried to do something about this. But one has to say the results are close to nil. I regret that but that’s the way it is. It does not change the reality even though, yes, the words I used last night were rather strong words.

M. Ralb (Richard): Premier, you said in your statement that your words could have been better chosen. Last night, after your speech, on the open line radio programs and in a comment from former Ontario Premier Bob Rae, there was the question of alcohol raised. Was your usually good judgment clouded by alcohol last night?

M. Parizeau: No.

M. Kalb (Richard): What then lead a gentleman of your usual careful choice of words to say something like that? Why did you go over the line?

M. Parizeau: Oh ! I suppose I was very sad about this. You know, we, in spite of what is often said, I and others before me have tried very hard to do something about that situation. It is not healthy in a society such as ours that groups, particularly when they corne from specific cultural communities, vote 95 % in the same direction. That is not… I mean, it is not very healthy, and that is what I tried to underline. The words were too strong but’the reality does not change. I mean you know that is the way it is, and I cannot change the reality in spite of the fact that God knows if I tried.
Mme Gagnon (Marie-Josée): Merci. ]
[M. Parizeau:] Voilà ! Merci.
[(Fin à 17 h 19)]

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