Honoré Mercier, 1887-1891
Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,
En ouvrant officiellement, au nom de Sa Majesté, la première session de la septième Législature de cette province, je crois devoir vous offrir à tous la plus cordiale bienvenue, et vous féliciter, en même temps, de l’ordre remarquable qui n’a cessé de régner pendant les dernières élections générales. J’aime à croire que les discussions et les luttes que ces élections ont provoquées n’ont laissé de mauvais souvenirs dans le cœur d’aucun d’entre vous, et que vous êtes tous bien disposés à remplir vos devoirs officiels consciencieusement et patriotiquement.
Des propositions, d’une nature confidentielle, ont été faites pour la conversion de la dette, autorisée par la loi de 1886; mais mon gouvernement a cru prudent de ne rien décider finalement avant de faire amender cette loi, qui parait incomplète sous certains rapports. Je me flatte de l’espoir que les changements qui vous seront proposés, à cet égard, rencontreront votre approbation.
L’emprunt autorisé en 1887 n’a pas suffi à rencontrer toutes les obligations de la dette flottante d’alors et les nouveaux subsides de chemins de fer votés en 1888; de sorte que vous serez priés d’autoriser l’émission de nouvelles débentures, tant pour faire honneur à ces anciens engagements et rembourser les avances faites relativement à l’affaire des biens des Jésuites ; aux anciens subsides de chemins de fer ; à la construction des ponts en fer; à celle de certains travaux de colonisation; ou pour payer les montants légitimes dus sur les réclamations en rapport avec la construction du palais législatif et du palais de justice et de prisons, dans les comtés d’Ottawa et de Pontiac; à la construction ou l’achat d’un ou plusieurs asiles d’aliénés, en temps utile pour l’expiration des contrats actuels d’affermage; aux nouveaux subsides de chemins de fer qui vous seront demandés, et qui sont indispensables au couronnement de la politique sanctionnée par les Législatures précédentes; au maintien des écoles gratuites le soir, crées pour l’instruction des cultivateurs et des ouvriers; à l’augmentation des subventions des écoles élémentaires, dans le but d’assurer un salaire plus élevé aux instituteurs et une assiduité plus satisfaisante de la part des élèves; aux grosses réparations qui se font actuellement, à Montréal, aux écoles normales Jacques-Cartier et McGill; à la construction, devenue nécessaire, de l’école normale Laval, à Québec; aux engagements pris, à la dernière session, relativement à la construction d’un pont, reliant les deux rives du Saint-Laurent à ou près de Québec ; à l’empierrement des chemins dans les campagnes ; à l’abolition des péages sur les ponts et les barrières; à l’établissement d’une école centrale d’agriculture, répondant aux besoins actuels ; et enfin à plusieurs autres dépenses, imposées par les circonstances, et imputables au capital.
Si la nécessité d’un emprunt est regrettable, il est consolant, toutefois, de pouvoir constater qu’il est requis en grande partie, par des travaux publics qui augmentent la valeur des propriétés en cette province, en même temps que la prospérité générale, et constituent des placements permanents propres à développer les ressources et la richesse nationales.
Cet emprunt, que vous serez appelés à autoriser, pour tous ces objets d’importance majeure, augmentera le service des intérêts annuels. Mon gouvernement vous demandera d’augmenter les revenus ordinaires pour faire face à cette dépense additionnelle, en élevant le coût des licences pour la vente des liqueurs enivrantes, en prélevant un droit spécial pour l’exploitation de nos mines et en assurant d’autres nouveaux revenus nécessaires à maintenir l’équilibre entre les recettes et les dépenses ordinaires.
J’ai le plaisir de vous annoncer que la loi relative au mérite agricole a été exécutée d’une manière satisfaisante, et produit déjà d’excellents résultats en encourageant les cultivateurs à adopter les meilleures méthodes modernes; et que les lots accordés, par la loi, aux pères ou mères de douze enfants vivants, seront bientôt distribués aux nombreux intéressés.
J’ai aussi le plaisir de vous informer, que les membres du comité protestant du Conseil de l’Instruction publique ont accepté la somme votée par la Législature, en faveur de la minorité de cette province, comme compensation, en rapport avec le règlement de la question des biens des Jésuites; et j’ai raison de croire que cette acceptation, de la part des représentants autorisés de la minorité, en cette province, aura pour effet de faire cesser toute agitation à ce sujet.
Des explorations, faites avec soin, par des ingénieurs compétents, ont prouvé que la construction d’un pont, reliant les deux rives du fleuve à, ou près de Québec, était non seulement possible, mais même désirable; et il est à espérer que la capitale de la province ne sera point privée de l’avantage incontestable de cette construction par le défaut de concours, ou de la corporation de la cité de Québec, ou du gouvernement fédéral, conformément au statut de la dernière session, 53 Victoria, chapitre cent onze.
De nombreuses et importantes expositions régionales ont eu lieu, cet automne, dans plusieurs endroits de la province, et ont donné les meilleurs résultats; vous serez appelés à voter un crédit spécial pour encourager davantage ces expositions et créer, par là, au sein de nos populations agricoles, une émulation salutaire.
L’application de la loi de la dernière session, relative à l’augmentation du salaire des magistrats de district, a été, suivant les déclarations de mes aviseurs, limitée aux deux magistrats de district de la cité de Montréal. Mais plusieurs des salaires actuels des magistrats de district étant insuffisants, vous êtes appelés à faire connaître votre opinion, à cet égard, et à dire si plusieurs de ces salaires ne devraient pas être augmentés, dans les circonstances.
La loi de la dernière session (53 Victoria, chapitre 41) autorisant à faire, avec toute communauté religieuse de femmes ou d’hommes, ou toute autre institution, ou toute personne, des arrangements pour la garde, la nourriture, l’entretien et le traitement des idiots, pourvu que le coût de chaque patient n’excède pas cinquante piastres par année, commence à recevoir son application, et produira, je l’espère, d’excellents résultats, tant pour ces pauvres malheureux que pour les finances de la province; et l’institution de Montréal, dite « l’Hôpital protestant des aliénés, » incorporée par l’acte de cette province, 44-45 Victoria, chapitre 53, ayant obtenu le certificat voulu par la loi et offert de recevoir les aliénés auxquels elle s’intéresse particulièrement, des résolutions vous seront soumises pour autoriser un arrangement, à cet effet, à la condition expresse, toutefois, que l’État prenne et conserve le contrôle absolu du service médical, condition qui devra être imposée, sans exception, dans tous les contrats qui pourraient être faits, dans l’avenir, à cet égard.
Messieurs de l’Assemblée législative,
Les comptes publics ainsi que le budget supplémentaire pour l’année courante et le budget ordinaire pour l’année prochaine, vous seront soumis sans retard.
Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,
Quelques autres projets de loi, aussi d’un intérêt général, vous seront proposés, surtout sur les matières suivantes : la cour du banc de la reine, siégeant en appel ; l’instruction publique ; les lots accordés aux pères ou mères de douze enfants vivants ; l’inspection des manufactures et la protection des ouvriers, en certains cas.
Je fais des vœux pour que vous donniez à tous ces sujets importants la considération qu’ils méritent, et que vos délibérations soient conduites avec calme, inspirées par le patriotisme et productives de bons résultats pour la province.