[QLDRY20020213cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Le mercredi 13 février 2002]
[ M. Landry:] Bonne journée à tous et à toutes! Je veux d’abord vous annoncer que la lieutenant-gouverneur, ce matin, a assermenté un certain nombre de membres du Conseil des ministres eu égard à de nouvelles fonctions devenues nécessaires à cause du départ du député de Berthier du Conseil. Alors, voici de qui il s’agit, et avec les titres officiels. François Gendron, député d’Abitibi-Ouest, a été assermenté comme ministre des Ressources naturelles; Michel Létourneau, député d’Ungava, a été assermenté comme ministre délégué aux Affaires autochtones, ministre délégué au Développement du Nord québécois, ministre responsable de la région de la Côte-Nord et ministre responsable de la région Nord-du-Québec; Rémy Trudel, qui est le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, a été assermenté comme ministre d’État à la Population, aux Régions et aux Affaires autochtones, ministre des Régions, ministre des Relations avec les citoyens et de l’Immigration, ministre responsable des Affaires autochtones, ministre responsable du Développement du Nord québécois, ministre responsable de la Politique de la natalité, président du Comité ministériel des affaires régionales et territoriales, ministre responsable de la région de l’Abitibi-Témiscamingue; et enfin, Mme Louise Beaudoin, car elle était à Porto Alegre lors du dernier remaniement et n’a pas été assermentée à une nouvelle fonction qu’elle exerce maintenant, Louise Beaudoin, députée de Chambly, elle est ministre d’État aux Relations internationales, ministre des Relations internationales, ministre responsable de la Francophonie, mais également ministre responsable de l’Observatoire de la mondialisation.
À cause de l’importance du phénomène, le gouvernement, vous le savez — les détails seront communiqués plus tard — va créer un observatoire de ce qui se passe autour de la mondialisation, de ses aspects positifs et négatifs, et c’est Mme Beaudoin qui en sera responsable.
Je voudrais vous dire aussi que le Conseil des ministres est revenu sur les derniers événements et que, de tous les membres et de toutes les membres de ce Conseil, sont venues des affirmations claires et nettes de solidarité, et plusieurs — d’ailleurs, ils vous l’ont déjà dit — démentent formellement tout ce qui pourrait ressembler à une concertation qui serait contraire à la solidarité ministérielle. Et, en particulier, la vice-première ministre a été claire, comme elle l’avait été déjà avec vous, nous avons constitué depuis des mois un solide tandem Landry-Marois; ce tandem existe toujours, il est peut-être, si possible, consolidé et rendu plus solide par les derniers événements. Toujours dans la foulée de ces événements, mais par ailleurs dans la foulée avec la restriction suivante — je parle du lobbying — il y a trois mois, j’ai demandé au Conseil du trésor, puis au ministère de la Justice par la suite, de préparer les grandes lignes d’une législation et d’une réglementation pour faire face au phénomène du lobbying qui, après avoir déferlé sur l’Amérique et le Canada, a déferlé sur le Québec. Nous avons ces grandes lignes. Je vais vous les communiquer, mais le ministre de la Justice sera à votre disposition pour vous en dire davantage. Nous allons proposer, donc, une loi à l’Assemblée nationale dès qu’elle sera convoquée, comme il avait été question de le faire à l’issue d’une commission parlementaire. Mais vous savez qu’avec des objections formelles et écrites, que vous avez entre vos mains, le Parti libéral s’y était opposé. Nous avons eu tort de tenir compte de l’opposition libérale à ce moment-là. Pourquoi est-ce qu’on l’a fait? Parce qu’on se disait: Une réforme institutionnelle de cette sorte, ce serait beaucoup mieux qu’elle soit adoptée à l’unanimité, etc. Nous n’aurions pas dû avoir ce scrupule et on aurait dû foncer. On ne l’a pas fait. Cette fois-ci, j’espère qu’ils vont nous appuyer et qu’ils vont revenir sur leurs hésitations, plus que leurs hésitations, leurs objections de la dernière ronde et qu’ils vont appuyer ce dont je vais vous parler et ce que le ministre de la Justice vous expliquera plus en détail. Donc, loi dès l’ouverture, et adoptée suivant les procédures le plus vite possible.
Mais, plus que ça, à partir de lundi prochain, tout ce qui peut être mis en place immédiatement et qui découle de ces grands principes sera affirmé par le secrétaire général du gouvernement à tous les cabinets, toutes les instances ministérielles, les instances publiques susceptibles d’être touchés par la loi sur le lobbying. Donc, on n’attend pas la loi. On émet des directives et toutes les directives qui peuvent être mises en place sans qu’on ait la loi. Donc, les principes vont s’appliquer à partir de lundi prochain, et le secrétariat général du gouvernement rédige déjà les textes qu’on vous communiquera d’ailleurs sans difficulté. Qu’est-ce qu’il y aura, en gros, dans ces textes? D’abord, on a essayé de s’inspirer des législations les plus avancées et aller au-delà. Alors, ce qu’on va proposer, ça va aller plus loin que la loi fédérale, par exemple, et plus loin que plusieurs autres lois qui sont dans le monde.
En particulier, le projet de loi interdira au personnel des cabinets ministériels de travailler comme lobbyistes pendant une période donnée après la fin de leur mandat, donc une période d’éloignement, période de carence.
Elle interdira également toute forme de rémunération conditionnelle à l’obtention d’un résultat donné. Vous voyez ce que je veux dire. La rémunération au résultat sera interdite. On rémunérera à l’heure, enfin toutes les méthodes de rémunération qui ne sont pas liées au résultat. Il sera donc interdit de rémunérer un lobbyiste à pourcentage en fonction du montant d’une subvention ou d’un contrat.
Les principaux moyens mis de l’avant dans le projet de loi seront, outre un mécanisme d’enregistrement des personnes — ça, c’est classique, aux États-Unis ça a été la base de tout au début — mécanisme d’enregistrement des personnes, groupes ou firmes qui s’adonnent au lobbying, et l’enregistrement des personnes et entités auprès desquels le lobbying est fait. Alors, le ministre de la Justice vous donnera les détails techniques, mais vous voyez déjà où on s’en va.
En plus, la loi comportera la nomination d’un conseiller en éthique et non pas nommé par le premier ministre. Donc, ce n’est pas inspiré d’Ottawa. Ce conseiller en éthique sera nommé par l’Assemblée nationale. Et la loi aussi ouvrira la voie à l’élaboration et l’application d’un code ou de règles d’éthique, toujours sous la responsabilité du conseiller en éthique. Les personnels des cabinets ministériels et les fonctionnaires seraient soumis par ailleurs à l’application des règles d’éthique de façon à prévenir toute situation de conflit d’intérêt. Alors, ça s’applique au ministre, ça s’applique aux députés de l’opposition aussi. On se souvient, on a parlé beaucoup d’un voyage au Mexique récent mais il y en a eu un plus ancien, vous savez, où le chef de l’opposition officielle payé par un lobby, lui, ses dépenses payées par un lobby, est allé au Mexique. Alors, ça va s’appliquer non seulement aux députés de la majorité gouvernementale, mais aussi aux députés de l’opposition. Alors, voilà les grandes lignes. Je suis prêt à répondre à vos questions, ensuite je prendrai congé de vous pour aller travailler avec les gens d’affaires du Québec à la promotion de nos intérêts économiques à Moscou, mais le ministre de la Justice sera à votre disposition pour vous entretenir de tout ce qui pourrait vous intéresser dans ce que je vous ai dit.
[ Journaliste: Un conseiller à l’éthique, M. Landry…]
[ M. Landry:] Il serait désigné par l’Assemblée nationale et le Vérificateur général est déjà désigné par l’Assemblée nationale. Alors, c’est une discussion qu’on va avoir, ce n’est pas exclu.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Ce n’est pas exclus, mais ça pourrait poser des problèmes. On en a discuté au Conseil. Parce que le Vérificateur, lui, c’est le Vérificateur ultime. Alors, s’il est le conseiller ab initio, puis le Vérificateur ultime, ce n’est peut-être pas la meilleure formule. En tout cas, à étudier.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Je crois que ça va être la plus avancée du monde. En tout cas, c’est notre objectif, puisqu’on est allé prendre à droite et à gauche dans toutes les législations, on est sûr d’une chose: ça va au delà de la législation fédérale. Vous le verrez vous-mêmes, là, le ministre vous donnera des exemples.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Oui. Ça, il n’en est pas question.
D’abord, parce que du lobbying au Québec, il s’en fait depuis des années et des années. Alors, si on voulait être juste et équitable, il faudrait faire une vaste enquête sur le lobbying jusqu’à nos jours. Et, comme je vous l’ai dit, moi, je reçois beaucoup plus de lobbyistes libéraux que j’en reçois de péquistes parce qu’ils ont été dans ce commerce avant que nos gens y viennent. Alors, il faut être juste et équitable et, quant à l’affaire récente, bien, je vous ferai remarquer, j’ai lu ça, je pense, dans Le Devoir, ce matin: Les faits sont connus. Bréard a démissionné. Avec la nouvelle loi, ce qu’il a fait, comme ce qu’ont fait beaucoup d’autres depuis des années, ne serait plus permis. Sauf que, quand il l’a fait, c’était permis. Et il faut aussi regarder là l’élément sociétal. Notre société n’a pas vu peut-être assez vite se développer le problème d’éthique lié au lobbying. La meilleure preuve? C’est que le directeur général du Parti libéral était directeur général de la Société du parc des îles, société qui est membre du regroupement. Cette Société du parc des îles a employé Oxygène9 et a même fait sa louange dernièrement en disant: Pourquoi les employer? Parce que c’était les plus efficaces et les moins chers. Ça, c’est M. Bibeau qui parle. Et je dois présumer de sa bonne foi, comme les 17 membres de ce regroupement: le Carnaval de Québec, Tennis Canada, enfin, 17 qui signent, avec une firme de lobby les engagements que l’on sait et la rémunération que l’on sait sans qu’aucune de ces personnes, y compris Pierre Marc Johnson, ancien premier ministre du Québec, ne voit le problème d’éthique. En d’autres termes, ça n’était pas suffisamment passé dans notre culture. Les événements qui sont arrivés et que je suis le premier à déplorer et qui ont eu une sanction grave sur au moins Raymond Bréard, qui a dû quitter son emploi, qui a démissionné de son emploi, ces événements-là nous ont fait accélérer, je vous ferai remarquer qu’on avait commencé depuis des mois quand même et qu’on l’aurait déjà il y a quelques années si les libéraux ne s’étaient opposés, mais là, au moins, on va le faire et avec un retard évident. Notre société avait pris du retard en cette matière, là elle va prendre une avance considérable comme quand René Lévesque a proposé la Loi sur le financement de partis politiques. Notre société avait été en retard, avec Lévesque elle a pris de l’avance. Alors, notre voeu c’est que ça soit la même chose en matière de lobbying.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Bon, quelqu’un me faisait remarquer ce matin, au Conseil, il a regardé des vieux journaux du temps des libéraux, il y avait les mêmes genres de choses, et ce n’est pas mauvais en soi. Moi, je veux que l’entourage, comme l’ensemble de l’administration publique, soit scruté, soit transparent, et c’est normal.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Je vais l’attribuer lundi prochain.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Le DG, ce n’est pas moi qui attribue, l’exécutif national est à la recherche d’un remplacement pour le DG et ça devrait se faire aussi la semaine prochaine.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] On ne veut pas perdre de temps.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] On s’en va vers ça — le ministre vous en parlera. C’est à discuter, là, il y a des ajustements à faire, mais la tendance, c’est un an, et les politiques, deux.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Les élus, deux.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] C’est visé. Il faudrait que ça soit…
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Non, mais il faudra qu’il soit déclaré, il faudra… On va distribuer un papier, là, où tout ce que vous avez là va être là, les listes des exclusions et les inclusions.
[ M. Larocque (Paul): (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Moi, des tourbillons, là, j’en ai déjà vu, ce n’est pas la première fois de ma vie. J’en ai vu dans le gouvernement Lévesque, j’en ai vu dans d’autres gouvernements. Et, encore une fois, les chiffres que nous avons recueillis quelques jours avant le tourbillon étaient à l’effet qu’une petite minorité de Québécois, une minorité de Québécois souhaitait des élections au printemps. Et rien ne me fait croire que cette situation a changé. Puis est-ce que c’est bien honnête aussi, en période de tourbillon, de faire des élections, parce que les électeurs ne doivent pas être dans une période beaucoup plus sereine et beaucoup plus calme. Alors, tout ça fait que je maintiens ce que j’avais dit et je ne me sens pas bousculé à faire des élections. Je l’ai dit au conseil national il y a quelques jours, je le redis encore.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Une société active, une société vive, une société où la démocratie compte est appelée à vivre des choses de ce genre, et ce qu’il faut considérer, comme en toutes choses, c’est la fin. À quelque chose, malheur est bon. Je romps la Loi sur le lobbying et l’éthique la plus avancée du monde. Ça ne sera pas fait sans souffrance, ça ne sera pas fait sans agitation mais on aura ça comme consolation.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Mme Beaudoin répondra à toutes ces questions quand on fera les annonces sur l’Observatoire de la mondialisation.
[ M. Landry:] Merci.
[QLDRY20010412cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec, et de M. Maxime Arseneau, ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation Démarrage des activités de la Financière agricole du Québec Le jeudi 12 avril 2001 Quinze heures quarante-quatre minutes) ]
[ M. Arseneau: Alors, bonjour, M. le premier ministre, M. Pellerin, M. Dicaire, membres de la tribune de la presse. Tout d’abord, je veux vous dire que je suis très heureux d’être ici aujourd’hui, en compagnie du premier ministre du Québec, M.
Bernard Landry, et de M. Laurent Pellerin, afin de m’adresser à vous au sujet de La Financière agricole.
Alors, d’entrée de jeu, je dois vous dire que le
premier dossier dont on m’a parlé dès mon arrivée au MAPAQ a été celui de La Financière, et le premier
geste que j’ai posé comme ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation a été celui justement qui concernait La Financière, celui de nommer M. André Dicaire président-directeur général de l’organisme. Alors, je salue M. Dicaire qui est juste ici.
Quand on m’a présenté aussi le dossier de La Financière, on me disait: C’est une révolution dans le monde agricole. On me disait aussi: C’est un modèle de partenariat unique. Et on ajoutait: C’est un dossier très important pour les productrices et pour les producteurs agricoles, et il faut que vous régliez ça. Alors, aujourd’hui, je suis donc heureux de vous annoncer que les activités de La Financière agricole débuteront le 17 avril prochain. La mise en oeuvre de La Financière agricole du Québec résulte d’un processus de modernisation des outils financiers destinés au secteur agricole amorcé lors de la Conférence sur l’agriculture et l’agroalimentaire québécois qui s’est tenu en mars 1998 à Saint-Hyacinthe. En mars 2000, lors du discours sur le budget, le gouvernement
du Québec a précisé le cadre financier réservé aux outils de financement agricole. On parle ici d’une enveloppe budgétaire de 300000000 $ par année sur une
période de sept ans débutant à l’année financière 2001-2002.
Suite à un processus de consultation avec l’UPA,
le projet de loi visant à créer La Financière agricole du Québec a été déposé en juin dernier. Notre partenaire, l’UPA, a ensuite consulté ses membres sur cette base et, en décembre dernier, la Loi sur La Financière agricole du Québec a été adoptée par l’Assemblée nationale.
La mission de La Financière agricole du Québec est de
soutenir et de promouvoir, dans une perspective de développement durable, le développement des secteurs agricole et agroalimentaire afin, bien sûr, de contribuer à l’essor économique et à la création d’emplois.
Cette société participera à la croissance des entreprises en mettant
à leur disposition des produits et services en matière de protection du revenu, d’assurance et de financement agricole, des programmes adaptés à la gestion des risques inhérents à ces secteurs d’activité.
L’agencement des programmes de sécurité du revenu
assurera
aux agricultrices et aux agriculteurs une protection à trois niveaux, à trois paliers: D’abord un compte de stabilisation du revenu agricole accessible à toutes les entreprises; un deuxième palier, des programmes complémentaires dans le programme actuel d’assurance stabilisation des revenus agricoles; et enfin un programme d’aide en cas de catastrophe sera accessible. La Financière agricole regroupera les actifs et les effectifs de la Société de financement agricole et de la Régie des assurances agricoles du Québec. On pourra donc compter sur les connaissances et l’expertise, bien sûr, des ressources humaines des deux sociétés dont l’expérience est appréciable, ce qui contribuera à
assurer une transition harmonieuse pour les producteurs et pour les productrices. Récemment, le Conseil des ministres a procédé à la nomination des personnes qui seront appelées à diriger ce nouvel organisme. Dans un premier temps, il y a eu la nomination de M. André Dicaire qui, avec les compétences que nous lui connaissons, contribuera certainement, j’en suis persuadé, à l’atteinte des objectifs et au succès de l’organisme.
Nous avons ensuite procédé à la nomination des
membres du Conseil d’administration, nominations qui ont été approuvées, hier, par le Conseil des ministres. Je tiens en outre à préciser
que, dans la Loi instituant la Financière agricole du Québec, il est stipulé que cinq des 11 membres du conseil d’administration, dont le président, doivent être choisies parmi les personnes désignées par l’Union des producteurs agricoles. Ainsi, M. Laurent Pellerin, président de l’UPA, occupera le poste de président de ce conseil d’administration. Vous avez entre les mains les noms des autres membres du conseil d’administration, dont certains sont ici présents avec nous aujourd’hui. Avec la nomination des membres du conseil d’administration, un pas de plus a donc été franchi vers la réalisation de l’implantation d’un nouveau partenariat entre le gouvernement et l’Union des producteurs agricoles.
Comme je l’ai mentionné précédemment, les sommes consacrées
aux productrices et aux producteurs agricoles dans le cadre des programmes de la Financière sont de 300000000 $ par année, pour une période de sept ans. C’est donc un montant de 2100000000 $ qui leur est garanti pour les sept prochaines années.
Aujourd’hui, j’ai le plaisir d’annoncer une contribution supplémentaire de 122000000 $ du gouvernement du Québec à la Financière
agricole. Ces sommes permettront d’assurer une transition harmonieuse entre les programmes actuels et ceux de la nouvelle société. Par ce geste, le gouvernement veut s’assurer que les activités de la Financière démarreront sur le bon pied afin de permettre et de mettre toutes les chances du côté des agriculteurs et des agricultrices du Québec afin que cet outil aussi puisse leur bénéficier au maximum.
Je tiens à profiter de l’occasion pour annoncer que le gouvernement injecte 24000000 $ supplémentaires dans deux programmes destinés aux productrices et aux producteurs agricoles. Ainsi, afin de les soutenir et de les accompagner dans leur effort visant à prendre le virage agroenvironnemental, l’enveloppe dédiée au programme Prime-vert est bonifiée de 20000000 $, portant ainsi à 62000000 $ — puisqu’elles étaient de 42 dans les crédits annoncés — les sommes consacrées à ce programme pour l’année 2001-2002. Ce montant additionnel permettra d’accélérer la mise en conformité environnementale des entreprises agricoles et de promouvoir des mesures visant la réduction de l’impact des activités agricoles sur la qualité de l’environnement. C’est donc un geste important du MAPAQ en faveur de l’environnement et du développement durable. Cette priorité est d’ailleurs partagée par les intervenants du monde agricole.
Par ailleurs, un montant additionnel de 4000000 $ sera accordé au
programme d’Amélioration de la santé
animale afin d’assurer aux productrices et aux producteurs agricoles l’accès à des services d’intervention en santé animale à un coût abordable, uniforme et des plus compétitifs sur l’ensemble du territoire québécois. Ce montant porte à 16000000 $ l’enveloppe budgétaire allouée à ce programme en 2001-2002 et permettra le renouvellement de l’entente relative au programme ASAQ pour une période de trois ans.
Unique en Amérique du Nord, le programme ASAQ démontre clairement l’importance que le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation accorde à la protection sanitaire des élevages québécois. C’est donc un montant total de 146000000 $ de plus que le gouvernement du Québec consacre au secteur agricole. Cet effort additionnel du gouvernement répond aux priorités mises de l’avant par le milieu agricole québécois en ce qui a trait à la protection du revenu, à l’agroenvironnement et à la qualité des aliments.
Je cède maintenant la parole à M. Laurent Pellerin.]
[ M. Pellerin (Laurent): M. Landry, M. Arseneau,
c’est, je
dirais, exceptionnel de participer à un événement comme celui d’aujourd’hui, de participer à un événement aussi enthousiasmant, à savoir la création, le démarrage de cette société, La Financière agricole.
Pour les plus vieux producteurs agricoles, ils se
souviendront sûrement, aujourd’hui ou demain matin, en lisant les journaux, que, depuis au-delà de 20 ans, les producteurs agricoles rêvent au moment où ils seront capables de coadministrer, de cogérer cette société dans laquelle ils contribuent annuellement pour au-delà de 200000000 $ de dollars en primes d’assurances diverses. La petite histoire retiendra sûrement aussi que quelques conversations avec un ministre des Finances de l’époque, il y a deux ou trois ans, trois ou quatre ans, en préparation du Sommet de Saint-Hyacinthe a été l’élément déclencheur. L’idée a souri à M. Landry à cette époque-là et je pense qu’il en a fait une excellente présentation au premier ministre de l’époque qui a assisté aux délibérations de la conférence de Saint-Hyacinthe, et de ce Sommet-là a découlé la formation d’un comité qui a travaillé ardemment à la création, à la naissance, à l’imagination de cette société-là. Longtemps l’UPA s’était opposée au regroupement administratif des deux unités qu’étaient la Régie des assurances agricoles et la Société de financement agricole. On attendait le moment où le regroupement provoquerait cette nouvelle synergie pour aller encore plus loin, puis je pense que c’est ce que La Financière agricole nous donne comme occasion. Donc, c’est pour ça qu’on a supporté entièrement les dernières démarches, les dernières négociations de la dernière année.
Il faut dire que les deux dernières semaines ont été particulièrement intensives. M. Arseneau est arrivé à la barre du ministère de l’Agriculture récemment. Le budget n’a pas pu inclure les annonces qui sont faites aujourd’hui parce que les discussions n’étaient pas terminées. Mais je pense qu’il faut saluer le travail des 15 derniers jours, autant avec le nouveau ministre que
le président-directeur général, qui avait été nommé à
cette époque-là, pour finir de convaincre vos confrères et vos consoeurs de l’opportunité — je pense que le premier ministre les a déjà convaincus — de lancer cette société-là le plus rapidement
possible et surtout avec les moyens financiers qu’elle avait besoin pour faire un bon démarrage.
C’est une entente de sept ans, les producteurs y croient, on va y participer activement mais je pense que l’image qu’on a voulu donner, c’est d’accepter ce poste de président du conseil d’administration de La Financière avec toutes les responsabilités qui incombent mais aussi toute l’énergie et l’enthousiasme qu’on y mettra à travailler pour développer cette société-là. Et le rêve qu’on peut y coller, c’est d’en faire un outil financier, un levier qui sera aussi percutant et puissant dans notre société que d’autres leviers auxquels vous avez contribué, M. Landry, en particulier le Fonds de solidarité de travailleurs, si on n’ambitionne pas beaucoup, mais si on devenait un jour aussi visible que le Fonds de solidarité peut l’être dans l’opinion publique québécoise, on serait extrêmement satisfait. Alors, beaucoup de travail devant nous mais du travail enthousiasmant. Merci.]
[ M. Landry:] Je suis aussi enthousiaste que le président de l’Union des producteurs agricoles devant l’annonce que nous faisons aujourd’hui. Comme lui, -mais pour des raisons différentes, j’ai toujours été passionné d’agriculture, d’abord parce que je sais que même à un niveau de modernité extraordinaire d’une économie, l’agriculture est toujours une composante majeure d’une économie contemporaine. Et l’agriculture elle-même, dans bien des aspects de sa gestion, représente la modernité et la haute technologie. La première puissance du monde, les États-Unis d’Amérique, ont comme première industrie en vérité l’industrie agricole et agroalimentaire, alors c’est une leçon pour tous les autres.
Donc, on ne prend pas à la légère les questions agricoles quand on veut une économie solide. Le gouvernement du Québec traditionnellement — et notre parti en particulier — a toujours mis de l’avant des moyens innovateurs pour soutenir et aider à l’expansion de notre agriculture qui, au cours des dernières années, s’est en plus orientée largement vers l’extérieur, la valeur ajoutée, l’exportation de produits de plus en plus intéressants pour les consommateurs d’ici et d’ailleurs.
Ce qu’on fait également aujourd’hui, c’est qu’on ajoute un fleuron au modèle québécois, et c’était un chaînon manquant, d’une certaine manière. Le modèle québécois qui est basé sur la concertation entre le secteur public, le secteur privé et le secteur associatif n’avait pas, en termes d’économie agricole, une chose aussi prestigieuse et aussi importante que celle qui va naître aujourd’hui. On a bien eu le Centre d’insémination, puis on a eu toutes sortes de choses intéressantes, mais là, on entre dans les ligues majeures et on le fait, en même temps, en déchargeant l’État de certaines tâches dont il s’occupait directement, pour les confier à un partenariat avec le secteur associatif. C’est une illustration de ce que j’ai dit dans quelques discours du budget et dans le discours inaugural: Moins d’État, mieux d’État. Ces activités ne seront plus directement liées à 100 % au secteur public, mais elles seront menées d’une façon plus souple, avec une mentalité d’affaires, avec un dynamisme et des possibilités d’innovation qu’on ne retrouve que difficilement dans le secteur purement étatique, par la force des choses, par la nature des choses. En plus, vous savez que le monde agricole est aujourd’hui scruté quotidiennement, si je peux dire, par des organisations internationales ou tout simplement des concurrents, pour voir si l’action étatique est compatible avec les règles du commerce international. En confiant ces tâches essentielles à La Financière agricole, bien on met plus de distance entre l’action directe du gouvernement et les effets sur le marché et sur les exportations, ce qui devrait nous permettre de faire meilleure figure devant les instances internationales.
Alors, ça faisait beaucoup de raisons pour que nous nous réjouissions, d’autant plus que j’ai presque de semaine en semaine accompagné la naissance de cette Financière agricole. Je ne peux pas dire que ça a commencé dans mon bureau, mais presque. Ça a culminé au Sommet de Saint-Hyacinthe, et c’est vrai que Lucien Bouchard n’a pas été difficile à convaincre. Les arguments étaient très forts. Et puis, mon collègue a mené à bien l’entreprise, avec son prédécesseur, il faut bien le dire.
[ M. Arseneau: Oui. Ça n’a pas été difficile non
plus de vous
convaincre.]
[ M. Landry:] Non.
[ M. Pellerin (Laurent): Alors, j’enchaînerais
immédiatement
avec un petit toast à cette image qui représente toutes nos productions animales du Québec, la production laitière étant le fer de lance de cette activité agricole et tout notre secteur végétal, pourquoi pas.]
[ M. Landry:] On n’est pas l’Écosse, mais ça se boit quand même.
[ Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Poirier (Dominique): On va prendre les questions en français, en anglais sur La Financière d’abord. Lionel Levac.
M. Levac (Lionel): J’aurais une question pour M. Landry. M.
Landry, est-ce que La Financière agricole va pouvoir, dès le départ, remplir pleinement son mandat même sans les quelque 200000000 $ réclamés d’Ottawa et dont vous n’avez toujours pas de nouvelles à titre de compensation pour les dépenses supplémentaires dans les assurances agricoles?]
[ M. Landry:] Non, je pense que ça va aller, mais la pression sur Ottawa est très, très vive et de part et d’autre.
[ M. Arseneau: Dans le fond, ce qui… de la façon
dont on fonctionne au Québec en regard des programmes que nous avons pour nos agriculteurs, nos agricultrices, si je comprends bien, et comme on me l’a expliqué, nos
programmes assurent un niveau de sécurité qui fait que lorsque le fédéral intervient via ses programmes, ça ne s’ajoute pas en dessus mais ça vient compenser pour ce que fait actuellement le gouvernement du Québec pour les agriculteurs et les agricultrices. Nous demandons et avec les associations et les producteurs et nos partenaires, nous demandons que le fédéral ajoute des sommes. C’est vrai dans l’ensemble du Canada. Actuellement, il y a 500000000 $ qui sont sur la table. Il y a une partie qui vient au Québec de ça, mais, La Financière, nous lui avons assuré, pour sept ans, une stabilité en assurant La Financière d’un montant de 300000000 $ par année sur sept ans et les producteurs mettent leur part, elle devrait aller et voguer de ses propres ailes.]
[ M. Landry:] L’argent des fédéraux s’ajoutera à ça.
[ M. Pellerin (Laurent): Il faut reconnaître que
dans la loi
qui a été adoptée au mois de décembre, il y a une clause… et dans la convention qui l’accompagne et qu’on signera dans les prochains jours, il y a une clause qui prévoit qu’à l’avenir tous les argents du fédéral qui vont rentrer en sécurité du revenu seront versés à La Financière. Donc, il y a comme une assurance pour l’avenir que ces choses-là sont réglées. Puis je pense que c’est un plus pour autant la partie gouvernementale que la partie du producteur feront des représentations conjointes pour s’assurer que le Québec est traité équitablement dans ces interventions de sécurité financière là.
M. Levac (Lionel): Mais si Ottawa ne versait pas les sommes réclamées, est-ce que ça compromet pour autant l’expansion de
l’assurance stabilisation ou de la nouvelle stabilisation à de nouvelles productions?
M. Pellerin (Laurent): Ce qu’on a fait dans les
deux
dernières semaines, je pense que c’est justement ce bout-là de sécuriser les deux dernières interventions du fédéral pour qu’ils soient versés à La Financière agricole et ce sont les montants qui sont annoncés aujourd’hui, parce que certains de ces montants-là avaient déjà été encaissés dans la dernière année. D’autres sont à venir pour la prochaine année et ce qu’on annonce aujourd’hui, c’est que c’est confirmé. Ces montants-là seront versés à La Financière agricole en montants de transition, donc pour assurer ce bon démarrage-là.
M. Levac (Lionel): Et éventuellement, toutes les productions
seraient couvertes.
M. Pellerin (Laurent): Ça règle tous les dossiers
du passé, pour l’année d’imposition 2000, c’est prévu à la convention aussi, toutes les productions agricoles sont couvertes. Donc, pour certaines productions qui n’avaient aucune couverture, rétroactivement sur leur rapport d’impôt 2000, pour les gens qui ont vécu des catastrophes en l’an 2000, je pense aux producteurs de sucre et sirop d’érable qui sont en pleine campagne de production, mais dont plusieurs d’entre eux n’ont pas encore été payés pour leur récolte de l’an passé, ils auront accès à un programme de sécurité du revenu pour l’année d’imposition 2000.
Mme Poirier (Dominique): Paul Larocque.
M. Larocque (Paul): M. Pellerin, vous serez donc président du
CA du chaînon manquant. Est-ce que vous restez à l’UPA?
M. Pellerin (Laurent): Bien sûr, il faut, et c’est dans le
règlement qu’on a adopté à l’UPA, quand on nous a demandé d’acheminer nos cinq noms, les 38 membres du conseil général de l’UPA de façon
unanime ont dit: Oui, on va nommer, on va suggérer au gouvernement cinq noms, mais le mandat de ces personnes-là se terminera au moment où elles terminent leur mandat dans les différentes fédérations affiliées à l’UPA, et la même chose à la présidence de l’UPA.
M. Larocque (Paul): Est-ce que ce n’est pas un peu incompatible à
l’UPA? Votre mandat c’est de défendre strictement les intérêts des producteurs agricoles. Là, bon, vous faites partie d’une organisation à deux têtes, si on veut. Est-ce que ce n’est pas un peu incompatible comme un verre de lait et manger une pomme en même temps?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pellerin (Laurent): Si vous saviez comme nos producteurs
ne sont pas incompatibles dans leurs propres cerveaux, parce que des fois il va y avoir des producteurs de lait qui sont pommes et vice versa. C’est rare le producteur du Québec qui ne fait qu’une production. Il y a différents compartiments sur son disque dur, je
dirais.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Larocque (Paul): Les saveurs se mélangent, là,
M. Pellerin.
M. Pellerin (Laurent): Ça permettra au président de l’UPA
d’avoir aussi à l’intérieur de sa tête, de son coeur, des préoccupations pour défendre ses gens, oui, mais des préoccupations de sécurité du revenu, d’ordre économique et quoi de mieux que de participer à la gestion et au développement, parce qu’on voit beaucoup de développement
dans cette société-là, développement de l’économie agricole du Québec et je trouve que c’est tout à fait intéressant que cette activité-là ou cette naissance-là arrive au moment où le gouvernement du Québec a choisi de donner un signal positif à l’endroit des régions, de la ruralité du Québec, et je pense que s’il y a un outil qui pourra performer pour le développement rural du Québec, c’est celui-là parce qu’il pourra investir dans l’agriculture mais aussi dans la forêt, dans l’agroalimentaire, dans le développement de la transformation en région.
-On a un outil pour être extrêmement présent et pas
plus en
conflit d’intérêts qu’on l’est dans l’implication par exemple de la mise en marché de tous nos produits agricoles. On ne présente pas l’UPA souvent comme ça, mais dans nos bureaux à Longueuil, on met en marché pour au-delà 4000000000 $ par année de produits qu’on vend au nom des producteurs agricoles.
On prend des décisions de péréquation de prix, péréquation de
transport, qui sont aussi des mécanismes de support aux régions, et on l’applique dans un processus démocratique tout à fait performant. Alors, je pense que la Financière agricole s’inscrit dans cette tradition-là des producteurs agricoles du Québec, d’être capables de travailler à la croissance de leurs secteurs puis pas en situation conflictuelle, mais en situation constructive.
Mme Poirier (Dominique): Robert Plouffe.]
[ M. Landry:] Un peu comme le président de la FTQ
qui est président de Fonds de solidarité.
[ M. Pellerin (Laurent): Exact.]
[ M. Landry:] C’est plus une opération de responsabilisation. On
envoie la responsabilité à ceux qui ont à vivre avec les conséquences des gestes posés. Et c’est comme ça pour le Fonds de solidarité, puis ça va être comme ça pour la Financière agricole.
[ Mme Poirier (Dominique): Robert Plouffe.
M. Plouffe (Robert): C’est un peu dans la même veine, M.
Pellerin. On vous a vu à plusieurs reprises vous porter à la défense de vos producteurs, et des acériculteurs, etc., quand il y avait des moments de crise, vous frappiez à la porte du gouvernement provincial ce n’était pas toujours facile. Est-ce qu’il faut comprendre que dorénavant ça va être plus facile pour vos producteurs d’être dédommagés en cas de cataclysme?
M. Pellerin (Laurent): Je pense qu’il y a un niveau de difficultés
qu’on devrait surmonter assez rapidement étant partie prenante à cette société-là. S’il n’avait tenu qu’a nous, je pense que des régimes de sécurité du revenu pour les producteurs acéricoles, producteurs de sucre et sirop d’érable, ils seraient déjà en place., Avec l’enveloppe qu’on a réussi à dégager dans les crédits gouvernementaux, sécurisés pour les sept prochaines années, on a des ressources financières suffisantes pour couvrir les besoins de ces producteurs-là. Je pense que le premier combat qu’on a eu à faire, ça a été de s’assurer qu’on avait les sommes d’argent nécessaires pour faire le chemin des sept prochaines années, en incluant même une clause catastrophe. Si vraiment il y avait des circonstances exceptionnelles d’effondrement total de l’agriculture, des marchés, des taux d’intérêt, de taux de change, c’est sûr que M. Arseneau nous verra revenir à la charge, ou M. Landry. Mais dans le courant des choses, je pense qu’on est capables d’administrer une bonne sécurité pour les producteurs agricoles avec les enveloppes qui ont déjà été consenties et bonifiées aujourd’hui, parce que, à partir d’aujourd’hui, je pense qu’on ne parle plus de
300000000 $ par année pour les sept prochaines années, on parle de 305000000 $ par année pour les sept prochaines années avec un montant de départ qui est quand même substantiel, la Financière démarrera avec un surplus d’autour de 100000000 $ de dollars.
M. Plouffe (Robert): Donc, c’est une façon de calmer un peu
les producteurs, non?
M. Pellerin (Laurent): On est déjà impliqué, par
exemple,
dans le Conseil du développement de l’agriculture du Québec, le CDAQ, qui a géré pour un autre niveau de gouvernement au-delà de 60000000 $ de dollars dans les dernières années, puis des conflits d’intérêt ou des conflits de pensées ne sont pas arrivés. Je pense qu’on est capables de faire cette gestion conjointe là. Puis je vous dirai que j’ai eu de longues discussions avec M. Laberge de la FTQ, avec M. Massé, pour voir comment chez eux, ils géraient ça. Effectivement, ils m’ont raconté qu’au départ, il est arrivé quelques incursions un peu de pression politique sur ces présidents-là, mais que la ligne de conduite s’est tracée assez rapidement dans les premières années de sorte que les gens comprennent maintenant qu’on distingue entre le Fonds de solidarité et la FTQ. Alors, je pense qu’avec le temps les gens vont distinguer aussi les fonctions de représentation des producteurs agricoles à l’UPA et les fonctions de développement économique du Québec ou de support financier de ceux qui ont des risques sur leur marché par la Financière agricole.
Mme Poirier (Dominique): Robert Dutrisac.
M. Dutrisac (Robert): J’aimerais savoir s’il y a
des raisons de nature du commerce international qui concourent à la création d’une financière, c’est-à-dire d’instaurer une distance entre une fonction qui était jadis gouvernementale et qu’on privatise en partie, en quelque sorte. Et est-ce que cette formule-là va être résistante, là, à une éventuelle libéralisation, plus grande en tout cas, du domaine agricole?]
[ M. Landry:] Déjà, les programmes que le gouvernement gérait étaient considérés par les règles de l’OMC comme verts, c’est-à-dire approuvés, mais plus il y a de distance entre l’État et les interventions, plus c’est vert. Ça verdit, l’opération. Parce qu’il se peut que les exigences de l’OMC se resserrent, effectivement, et La Financière agricole nous permet d’être un peu, un coup ou deux coups d’avance puisqu’elle ressemble, en fait, à une entreprise privée. Elle est du domaine associatif, mais le domaine associatif non étatique. Et ça peut, encore une fois, colorer de la bonne façon les analyses des instances internationales.
[ M. April (Pierre): Pour la même question, M.
Pellerin,
comment vous, vous voyez, là… est-ce que ça peut protéger…
M. Pellerin (Laurent): Ce que M. Arseneau a présenté tantôt
-comme deux niveaux d’intervention, le premier niveau accessible à toutes les productions, qu’on va appeler CSRA, Compte de stabilisation du revenu agricole, ce programme-là est d’inspiration du modèle fédéral, CSRN, Compte de stabilisation du revenu net, et le CSRN a déjà subi le test du commerce international à deux reprises. Donc, en s’inspirant de ce modèle-là, en gardant les caractéristiques essentielles accessibles à tout le monde d’approche globale, on est presque assurés… ça ne veut pas dire que personne ne tentera de contester, mais on est presque assurés de leur passage sans heurt au niveau du commerce international. C’était une préoccupation de notre part.
Ce niveau d’intervention là sera à 12 %, ce qui
laisse
beaucoup de marge… en tout cas, ce qui soustrait une bonne partie d’intervention de La Financière de tout risque de douane éventuelle. Alors ça, je pense que c’est sécurisant pour nos productions qui sont sur les marchés d’exportation. Je pense à quelques productions de céréales, maïs, soya, le porc, le veau de lait, qui sont des productions qu’on exporte à un haut pourcentage. D’autres productions, qui étaient moins risquées sur le marché international ne se voient pas pénalisées, on parle de vache, veau, de l’agneau et mouton, petites céréales, qui sont moins visées parce que pas présentes sur les marchés d’exportation. Donc, c’est une combinaison, c’est une amélioration par rapport à la
situation actuelle, il n’y a pas de doute.
Mme Poirier (Dominique): Une dernière question en français,
Lionel Levac.
M. Levac (Lionel): M. Pellerin, vous étiez contre le fait que
la contribution des agriculteurs aux assurances passe d’un pourcentage 33 % à 50 %. Est-ce que vous êtes maintenant d’accord ou est-ce qu’on a changé le pourcentage?
M. Pellerin (Laurent): On n’a pas changé le pourcentage , on
n’est pas plus d’accord, mais on a trouvé une façon de le gérer qui fera en sorte qu’on peut assurer tous les producteurs agricoles du Québec que l passage des régimes qu’on connaît ou qu’on connaissait jusqu’à
aujourd’hui aux nouveaux régimes qui sont dans la Financière n’augmenteront pas le risque que les producteurs ont à supporter ou, dit autrement, vont permettre une couverture équivalente à ce que les programmes précédents comme couverture.
M. Levac (Lionel): Est-ce que ça ajute à la distance si on
veut de l’État aussi?
M. Pellerin (Laurent): Bien, ça ajoute à la distance, ce qui
est le plus beau, vu par les producteurs et vu par moi-même qui suis ces programmes-là depuis presque 20 ans, depuis que je suis impliqué à l’UPA, à chaque fois qu’il y avait une modification à faire dans un programme, c’était la tournée du Conseil du trésor,
le ministre des Finances, Conseil des ministres. gazettage, et tout ça est éliminé. Dorénavant, s’il y a une modification à faire dans un programme, une adaptation rapide, un changement de cap, c’est le conseil d’administration qui a le plein pouvoir d’étudier les alternatives, de les décider et de les mettre en application. Je pense qu’on vient de simplifier un peu le processus d’application des différents programmes et on vient, je pense, aussi, de donner une certaine flexibilité et à la question qui était posée tantôt, une rapidité, je pense aussi de réponse aux besoins des producteurs s’il faut s’ajuster en cours de route.]
[ M. Plouffe (Robert): M. Landry, permettez-moi
d’insister.
Aujourd’hui, Mme Beaudoin a laissé comme sous-entendre que ce n’était pas ni au gouvernement ni à l’Assemblée nationale de s’excuser mais à la personne concernée. Est-ce que vous pensez que M. Charbonneau devrait s’excuser de ses propos?]
[ M. Landry:] Le président est une personne responsable et il jugera lui-même de ce qu’il a à faire. Mais ce que Mme Beaudoin a dit est très certainement vrai, je l’avais dit en Chambre hier d’ailleurs, et ça m’a surpris même que le chef de l’opposition fasse une erreur institutionnelle aussi grave en fait. Le président ne peut pas parler au nom du gouvernement. C’est l’évidence même. Pour le reste, bien, encore une fois, la personne concernée, en son âme et conscience, fera ce qu’elle juge à propos de faire.
[ Mme Poirier (Dominique): Est-ce qu’il y a
d’autres questions en français? Marie-Paul Rouleau. Mme Rouleau (Marie-Paul): M. Landry, est-ce que
vous souhaitez que M. Legendre se présente dans L’Assomption?]
[ M. Landry:] Vous savez que dans notre parti il y
a une règle très stricte, ce sont les militants et les militantes qui
choisissent leur candidat et leur candidate. Et, de toute façon, le comté de L’Assomption, pour l’instant, est représenté à l’Assemblée par quelqu’un d’autre.
[ Mme Poirier (Dominique): En anglais. John.
M. Larocque (Paul): Si ce n’est pas L’Assomption, ça serait
où?]
[ M. Landry:] On verra.
[ M. Larocque (Paul): M. Charest vous a dit cette
semaine que,
lui, il considère que M. Legendre devrait se faire élire avant l’été, en toute légitimité. M. Legault était resté, quoi, quelques semaines à peine avant l’élection générale.]
[ M. Landry:] Nous allons suivre les traditions de notre système parlementaire.
[ M. Larocque (Paul): Ce qui veut dire?]
[ M. Landry:] Ce qui veut dire qu’il sera élu en temps opportun.
[ M. Larocque (Paul): Ce qui veut dire?]
[ M. Landry:] Que le temps opportun est toujours le meilleur.
[ Des voix: Ha, ha, ha!
M. Larocque (Paul): Ce qui signifie?]
[ M. Landry:] On pourrait aller loin.
[ (Fin à 16 h 21)]
[QLDRY20010416cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Le mercredi 16 avril 2001 (Dix-neuf heures quatorze minutes)]
[ Le Modérateur: À l’ordre, tout le monde!
Journaliste: M. Landry, vous êtes un partisan du libre-échange et de la mondialisation. Vous avez reçu, aujourd’hui, des gens qui ont de grandes inquiétudes. vous vous situez à quel endroit? Est-ce possible un libre-échange et une mondialisation de la façon dont le voient les gens du Sommet des peuples?]
[ M. Landry:] Moi, j’ai toujours été très équilibré en ces matières. Ça fait très longtemps que je favorise la libre circulation des biens, des services, des capitaux, et même des personnes, mais j’ai toujours dit dans mes écrits et dans mes positions publiques que le libre-échange n’est pas un projet de société en soi. Si on veut la coopération véritable entre les peuples, il faut concevoir un projet plus vaste, plus universel, et je donne souvent l’exemple le plus réussi de l’histoire humaine, la Communauté économique européenne.
Le traité de Rome, en 1957, n’était pas un traité de libre-échange, c’était un marché commun avec un projet politique puis un projet social, un projet qui ne souffrait pas de déficits démocratiques trop évidents. Le processus est lancé, j’espère que, avec justement la présence du Sommet des peuples et des opinions publiques de la société civile de toutes les nations d’Amérique, le libre-échange sera équilibré par une coopération internationale plus vaste et plus ample. J’ai commencé à dire ça bien avant que le sujet soit d’actualité, je pense que ça fait 12, 15 ans que j’ai commis mes premiers écrits sur cette question, mais, pour moi, c’est une conviction profonde partagée par mon gouvernement, partagée par mon parti, d’ailleurs. Le Parti québécois est représenté au Sommet des peuples.
[ Journaliste: M. Landry, Mme Néméh vous demande de
faire
davantage pression auprès d’Ottawa pour…]
[ M. Landry:] On peut toujours faire davantage, mais n’oubliez pas que nos moyens sont provinciaux.
-[ Le Modérateur: François Cardinal.
M. Cardinal (François): M. Landry, que pensez-
vous de l’idée de Mme Néméh de porter à la consultation publique le processus de négociation ou
-le projet de ZLEA?]
[ M. Landry:] Bon, d’abord, je pense qu’il faut que ce soit connu, donc la plus grande transparence — notre ministre des Relations internationales s’est battue pour la transparence autant qu’elle a pu — et ensuite, chaque processus démocratique devra, suivant les us et coutumes de chaque pays et des droits, donner les approbations requises. Mais il y a des variations, là, ce n’est pas 43 nations uniformes qui ont le même processus d’approbation des relations internationales.
[ M. Cardinal (François): Mais sur l’importance…]
[ M. Landry:] Si on se réfère toujours à l’Europe de l’Ouest, c’est vrai qu’il s’agissait d’un marché commun, mais il y a eu des référendums.
[ Journaliste: M. Landry, en quoi le Sommet des
peuples peut
servir comme tremplin à la reconnaissance du Québec comme nation?]
[ M. Landry:] D’aucune manière. Le Québec est une nation, et il ne le sera pas plus après le Sommet des peuples qu’il ne l’était avant. C’est un fait, et c’est un fait consensuel.
[ Journaliste: De reconnaissance internationale ou
l’appui à
cette reconnaissance-là sur le plan international?]
[ M. Landry:] Si nos amis présents à Québec décident de s’informer davantage sur le Québec, tant mieux. C’est sûrement une bonne occasion de piquer la curiosité de nos amis des autres nations d’Amérique, et ces amis tireront leurs propres conclusions.
-[ Le Modérateur: En français.
Journaliste: M. Landry, Mme Néméh a aussi
souligné l’espèce
de dispositif excessif de sécurité et a rappelé le droit de manifester…]
[ M. Landry:] …je ne suis pas un expert de sécurité.
[ Journaliste: …non, mais a rappelé l’importance
du droit de
-manifester.]
[ M. Landry:] Elle a eu raison, le droit de manifester est intrinsèquement démocratique et utile. Quant au reste, bien là, ça devient des questions techniques qui me dépassent.
[ Journaliste: Mais, personnellement, vous n’êtes
pas gêné de
recevoir de la visite entouré de broches comme ça?]
[ M. Landry:] Je serais plus gêné s’il se développait dans notre capitale nationale un état d’anarchie et de violence qui mettrait en péril les biens et les personnes, encore, surtout. Alors, tout État responsable doit faire en sorte… et le Sommet des peuples, manifestation éminemment pacifique, et qui, sur ce point, nous rejoint totalement. Personne ne veut que des choses disgracieuses n’adviennent, et j’espère que rien de ce type n’adviendra, mais toute société responsable, comme c’était le cas à Vienne, à Prague veux-je dire, comme c’était le cas à Nice, Seattle ou ailleurs, doit assurer la sécurité des biens et des personnes.
[ Journaliste: Quelle était l’importance pour vous
de recevoir
ces gens-là ici même, à l’Assemblée nationale?]
[ M. Landry:] Je pense que c’est très important que les progressistes des trois Amériques viennent dans notre Assemblée nationale pour entendre la parole québécoise sur ces questions très importantes. Ils avaient l’air plutôt contents, d’ailleurs, d’être là.
[ Journaliste: M. le premier ministre, on a eu l’impression que
vous avez désiré garder un profil plutôt bas, aujourd’hui, sur la question nationale, pas créer d’accrochages inutiles avec Ottawa. Est-ce que c’est un choix délibéré?]
[ M. Landry:] La question nationale parle d’elle- même, Québec est une nation, et ces gens qui viennent d’autres nations d’Amérique vont, par leur présence ici, se faire une meilleure idée de ce que nous sommes. Et, pour le reste, j’ai parlé plutôt du fond des choses. J’ai parlé du contrepoids nécessaire à la globalisation, j’ai parlé du fait qu’une zone de libre-échange en soi ne peut pas être une doctrine de coopération internationale, il faut y ajouter des dimensions sociales démocratiques, j’ai donné un message plus universel, disons.
[ Journaliste: …à la promotion de votre thèse, à
la promotion
de votre projet?]
[ M. Landry:] Je pense que le fait que le Québec soit une nation est une promotion qui se fait d’elle-même. Tout esprit logique qui voit cette nation avec toutes ses caractéristiques culturelles, économiques et sociales a tendance à s’interroger sur la place que cette nation doit avoir dans le concert des nations. Je ne veux pas abuser des formules latines, des fois, vous me le reprochez, mais je vais en risquer une: [res ipsa loquitur,] les choses parlent par elles-mêmes.
[ Le modérateur: Dernière question en français,
François
Cardinal.]
[ M. Cardinal (François): M. Landry, vous soulignez
les limites de pouvoir en matière internationale du Québec. Mme Néméh vous invite, elle, à développer des alliances stratégiques avec d’autres pays.]
[ M. Landry:] Oui et elle a raison. Et nous tentons de le faire, mais imaginez-vous la difficulté de faire cela sans avoir le statut qui va avec l’obligation de le faire. Alors, c’est aussi une illustration pédagogique du Sommet que le dialogue du Québec avec les autres nations ne peut pas atteindre sa plénitude parce que le statut du Québec est provincial. Et c’est un fait.
[ Le modérateur: Une dernière question, François
Bourque,
ensuite, en anglais.
M. Bourque (François): Oui. M. Landry, Mme Néméh suggérerait qu’un Québec même souverain, même un Québec qui serait directement présent aux tables, est condamné à perdre de la souveraineté dans un contexte de libre-échange. Est-ce que vous…]
[ M. Landry:] C’est absolument vrai, elle a absolument raison. La façon dont les souverainetés modernes s’exercent, et je l’ai bien dit en mentionnant l’Europe à plusieurs reprises, c’est que des nations souveraines renoncent à une partie de leur souveraineté aux mains d’instances supranationales, comme l’Union européenne, vous savez que ce que je propose pour le Québec et le Canada, c’est une union confédérale de type européen. Alors, ça implique, oui, une renonciation partielle à la souveraineté pour l’avantage du plus grand nombre.
[ M. Landry:] Merci. Thank you.
[(Fin à 19 h 29)]
[QLDRY20010418cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec dans le cadre de la Conférence parlementaire des Amériques
Le mercredi 18 avril 2001 (Dix-huit heures cinquante minutes) ]
[ Une journaliste: M. Landry, Ottawa et Québec se livrent à une guerre
de mots, de drapeaux, de banderoles, c’est la nouvelle invention, la chicane des banderoles, qu’est-ce que vous en pensez?]
[ M. Landry:] Je pense qu’il y a un belligérant de trop dans votre
question. Nous, on se livre à rien du tout, et ce qu’il y avait à dire là-dessus a été dit par ma collègue, avec le sourire.
[ Une journaliste: Trouvez-vous ça déconcertant,
choquant,
déplacé?]
[ M. Landry:] Si j’étais de l’autre côté, je ne serais pas fier de moi.
-[ Un journaliste: M. Landry, le président de la COPA
a exprimé des peurs très sérieuses face à la libéralisation, à l’intégration, des peurs… Même, à un certain moment donné, on ne s’attendait pas à cette expression de peur là. On a peur que l’intégration devienne un instrument de domination. Est-ce que vous les comprenez?]
[ M. Landry:] Parfaitement, et c’est la raison pour laquelle ces processus d’intégration sont souvent très longs et se font par étapes. Même dans des pays aussi près que le Canada et les États-Unis, le traité de libre-échange avait un calendrier d’application de 10 ans avec disparition de la douane en tranches égales annuelles. On a fait la même chose avec l’ALENA, et des fois on prend des précautions supplémentaires avec certains secteurs. Alors, surtout dans le cas de pays de niveaux de développement aussi différents, de grandes préoccupations devront être prises, mais ce type de précautions est connu. On peut regarder l’exemple européen: l’Espagne, le Portugal, la Grèce étaient loin d’avoir le niveau de développement de la République fédérale d’Allemagne, et pourtant ils y sont arrivés à leur profit. Alors, crainte justifiée, oui, mais moyens connus de parer à ces craintes.
[ Le Modérateur: Robert Plouffe.
M. Plouffe (Robert): M. Landry, M. Bové est en
terre québécoise. Voulez-vous nous dire si… dans votre discours, vous avez invité… bon, peut-être pas invité, mais vous avez reconnu qu’il y avait place à la manifestation dans les rues. Alors…]
[ M. Landry:] Oui, la manifestation est une activité démocratique. D’ailleurs, je serais vraiment d’un niveau d’hypocrisie total de dire le contraire, j’ai passé une partie de ma jeunesse étudiante à en organiser, dont la première et la plus célèbre, dont les gens de mon âge se souviennent. Mais cela dit, manifester pour des objectifs connus, pour améliorer les choses et le faire de façon pacifique fait partie de l’expression démocratique. La casse, la menace aux personnes et aux biens, là, dépassent les limites de la démocratie.
[ M. Plouffe (Robert): Est-ce que ça vous renverse
de voir que
les policiers ont saisi de la dynamite, ont arrêté six individus déjà?]
[ M. Landry:] C’est le travail policier, je crois qu’ils le font bien, mais je n’ai rien de plus à dire.
[ Un journaliste: La lutte à la pauvreté en Amérique
du Sud aussi, je voulais vous demander ça. Toute la journée, les parlementaires des Amériques ont beaucoup insisté sur faire la lutte à la pauvreté avant de songer à toute forme d’intégration, de prendre les moyens pour combattre la pauvreté. Est-ce que là aussi…]
[ M. Landry:] Oui, mais là, je diverge un peu si on veut séparer lutte à la pauvreté et intégration, parce que l’intégration, c’est un moyen de créer la richesse. Je redonne de nouveau l’exemple de l’Espagne et du Portugal, quand l’Espagne et le Portugal sont entrés dans le Marché commun européen, leur économie a fait un grand bond en avant, et là, la lutte à la pauvreté est devenue beaucoup plus facile. Pour répartir la richesse, il faut d’abord en avoir.
-[ Un journaliste: M. Landry, juste sur la forme,
quand vous
vous êtes adressé aux membres de la COPA, vous avez utilisé l’espagnol, le français, mais pas l’anglais. Pourquoi?]
[ M. Landry:] Bien, j’avais vérifié d’avance, puis on m’avait dit qu’il y avait très, très peu d’anglophones, et, pour ne pas allonger indûment les choses — vous m’avez peut-être entendu le dire, là — [el primero idioma de las Americas es Castellano, hien?] La première langue des Amériques, c’est l’espagnol. Le français parce que c’est notre langue nationale et, comme il y avait la traduction simultanée, je n’ai pas voulu allonger trop. Mon collègue de l’opposition a fait la même chose -d’ailleurs sauf que lui, il n’a pas parlé en espagnol.
[ Un journaliste: Quand, M. Landry, un ministre
fédéral vous a
accusé de pratiquer un nationalisme ethnique en faisant la promotion de la nation québécoise, comment vous réagissez à ces commentaires-là? ]
[ M. Landry:] Ça, c’est un beau cas de jugement par le peuple. Tout le monde a entendu ce que j’ai dit, tout le monde a entendu ce qu’il a dit, que les gens se fassent une idée.
[ Un journaliste: Est-ce que vous pensez que c’est
un effort systématique de la part Ottawa, les incidents que nous avons vus récemment, pour tenter de contrer votre message?]
[ M. Landry:] Je ne prête pas d’intention, j’ai dit ce que j’avais à
dire là-dessus.
[ Un journaliste: M. Normand parle, il dit: On connaît M.
Landry, on ne sait jamais ce qu’il peut dire, il a dit ga hier, est-ce que ça ne serait pas de la provocation pour essayer…]
[ M. Landry:] Ça, c’est plutôt un compliment parce que ceux dont on sait toujours ce qu’ils vont dire peuvent être particulièrement ennuyeux.
[ Un journaliste: Ça ne serait pas une forme de
provocation
pour vous faire sortir de vos gonds, M. Landry?]
[ M. Landry:] Je ne prête pas d’intention.
[ Une journaliste: Est-ce que ça fait partie de sa
stratégie de
minimiser les provocations et de vraiment éviter les chicanes de famille devant la grande visite cette semaine?]
[ M. Landry:] Et non, madame, ça ne fait pas partie de notre stratégie, ça fait partie de notre nature profonde.
[ Un journaliste: (S’exprime en espagnol)]
[ M. Landry: (S’exprime en espagnol)
Des voix: Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] Merci beaucoup à tous et à toutes.
[(Fin à 19 h 2)]
[QLDRY20010615cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre, M. Jean Rochon, ministre d’État au Travail, à l’Emploi et à la Solidarité sociale et Mme Nicole Léger, ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l’exclusion Dévoilement de mesures additionnelles pour lutter contre la pauvreté Le vendredi 15 juin 2001 (Douze heures six minutes)]
[ M. Landry:] Alors, vous savez que, dans le discours inaugural, nous avons fait ressortir comme priorité gouvernementale très importante un nouveau chapitre de la lutte à la pauvreté. Ce n’est pas le début d’une telle action, parce que, même dans les périodes difficiles de rééquilibrage des finances publiques, nous avons tenté de garder un équilibre humain et social acceptable, en particulier par la clause d’appauvrissement zéro pour les prestataires de l’aide sociale qui ont des contraintes sévères à l’emploi. Aucun d’entre eux et d’entre elles n’a souffert des efforts qui nous ont conduits au déficit zéro. Dans le même temps et au même moment où nous faisions ce rééquilibrage, nous avons instauré un système de garderies qui est le plus progressiste de notre continent, les fameuses garderies à 5 $. Nous avons instauré et rodé un régime très avancé de perception des pensions alimentaires. On sait que la non-perception conduit évidemment à la pauvreté, de femmes en particulier, dans l’immense majorité des cas. Nous avons, durant la même période, instauré un régime d’assurance médicaments qui couvre l’ensemble de la population, un régime universel, et qui, en particulier, a permis à 1 million d’enfants d’avoir accès aux médicaments. Nous avons instauré la nouvelle politique familiale. Et nous avons donné un essor sans précédent aux entreprises de l’économie sociale qui ont créé beaucoup d’emplois, qui ont créé beaucoup d’entreprises.
Donc, nous sommes fiers, dans les circonstances, du bilan social du gouvernement, du bilan social-démocrate, à une période où on devait remettre les finances publiques en ordre. C’est une notion erronée de croire que le déficit zéro était une approche de droite. Tous les gouvernements progressistes veulent avoir les moyens de répartir la richesse. Et, pour avoir les moyens de répartir la richesse, il faut pas que l’État lui-même soit au bord de la faillite. Alors, les grands gouvernements sociaux-démocrates du monde ont fait la même chose, soit en Grande-Bretagne, soit en France. C’était même dans les critères de Maastricht, comme vous savez, dans le cas de la France, pour adhérer à l’euro — la Grande-Bretagne ne l’a pas fait. Alors, notre gouvernement est resté, durant ces périodes de rigueur, social-démocrate. Quand le beau temps est revenu sur nos finances publiques, nous avons été en mesure, et nous sommes en mesure, de faire plus et mieux. Alors, déjà, dans le dernier budget, on a annoncé un train de mesures qui mobilisaient 815000000 $. Nous avons haussé les prestations d’aide sociale pour les prestataires qui ne bénéficiaient pas de cette clause d’appauvrissement zéro dont j’ai parlé. Appauvrissement zéro, ils ont été accompagnés pas à pas et scrupuleusement, et là, ce sont les autres que nous avons rejoints dans le dernier budget. Nous avons également ajouté des mesures pour favoriser la réinsertion au travail, l’ingénieux programme Action emploi, là, qui permet de passer de l’aide sociale au statut d’employé, le soutien aux services à domicile et ainsi de suite. Nous sommes par ailleurs toujours convaincus que la base de la lutte à la pauvreté, c’est évidemment la création de la richesse, la création d’emplois et nous en avons développé l’obsession au cours des cinq dernières années. Ce que nous voulons faire maintenant, c’est avoir la même attitude obsessionnelle quant à la lutte à la pauvreté et quant à la réinsertion de ceux et celles d’entre nous qui, malgré une amélioration de l’économie, n’ont pas vu leur sort matériel amélioré comme il aurait pu l’être. C’est l’amorce qui vous sera présentée aujourd’hui par mes collègues de la lutte à la pauvreté, amorce en termes stratégiques, en termes de plan et de consultation et de mobilisation de la population, mais amorce concrète aussi. On veut pas dire: On va faire des études puis on va consulter la population pendant des années puis ensuite on fera des choses. Des choses se font maintenant et, en plus, une stratégie d’accompagnement se bâtit et est discutée avec les divers groupes sociaux qui s’intéressent particulièrement à la question et avec l’ensemble de la population du Québec. Alors, je vais maintenant demander à mes collègues de donner des détails sur cette lutte à la pauvreté. Je signale que c’est un des éléments des 100 jours, qu’il y en a beaucoup d’autres. On a préparé à votre intention un bilan que M. Wilkins vous fera parvenir dans les heures qui viennent. Cent jours, c’est court, mais avec une équipe déterminée et des gens contents de faire ce qu’ils font, et vous voyez que certains de mes collègues performent beaucoup mieux dans leurs nouvelles fonctions que dans leur ancienne. Alors, j’en ai félicité plusieurs ce matin pour leur dire: Vraiment, vous faites bien ça, vous êtes meilleurs qu’avant. Bien, ils ont dit: C’est la même chose pour vous, monsieur.
[ M. Rochon: Alors, merci, M. le premier ministre.
Je suis très
heureux, évidemment, comme ministre responsable, avec ma collègue Nicole Léger, de ce mandat de lutte à la pauvreté, de pouvoir, dans la foulée de ce que vient de nous dire le premier ministre, vous présenter les grandes lignes du mouvement que nous voulons initier aujourd’hui.
D’abord, la pauvreté, qu’est-ce que c’est? C’est premièrement un
déficit, une difficulté d’ordre monétaire et économique, on connaît très bien cet aspect de la pauvreté, mais c’est plus que ça, la pauvreté. La pauvreté a aussi un aspect de difficulté et de déficit au niveau du développement humain et qui se reflète par une privation plus ou moins importante, selon les circonstances, pour des personnes, pour des individus dans une société d’avoir des occasions équitables de réaliser leur potentiel et d’avoir aussi des opportunités de faire des choix pour mener une vie décente. Alors, c’est à ça qu’on continue de s’attaquer dans la foulée de ce qui a été déjà entrepris par le gouvernement.
C’est devenu possible — et c’est très clair sur le plan
international — c’est devenu possible de s’attaquer
à la réalité et de réussir à réaliser les objectifs qu’on va se donner. C’est devenu possible, d’abord,
-en intensifiant l’action qu’on a entreprise par des mesures significatives, comme l’a dit le premier ministre, et en assurant une constance et une cohérence
encore plus grandes dans nos actions. Et c’est devenu possible, en plus d’intensifier, en intégrant une approche collective au sein du gouvernement, avec le gouvernement et l’ensemble des partenaires -socioéconomiques dans la société et ça, à tous les niveaux: au niveau local, au niveau régional et au niveau national. Et c’est pour ça qu’on a bien choisi comme thème qu’il s’agit de ne laisser personne de côté, ni parmi les gens qui ont besoin d’être soutenus, ni parmi l’ensemble de la société qui a besoin de conjuguer ses efforts pour qu’on y arrive.
Alors, je suis très heureux, d’abord on dit des
actions significatives, de pouvoir annoncer, pour l’accélération de notre mouvement ce matin, que le gouvernement utilisera dès maintenant des sommes substantielles qui seront puisées à même la réserve de 100000000 $ qui a été prévue dans le dernier budget pour répondre à des besoins précis et essentiels comme se nourrir et se loger. Ainsi, une partie importante de la réserve sera consacrée au développement de logements sociaux pour les personnes les plus démunies. Le montant précis sera connu au mois d’août prochain lorsque les discussions en cours avec le gouvernement fédéral seront complétées. Et cette somme sera gérée par la Société d’habitation du Québec. Vous comprendrez que nous souhaitons grandement — et c’est pour ça que nous devrons revenir pour vous donner le montant précis — bénéficier d’une juste part qui nous revient des sommes provenant du gouvernement fédéral en matière de développement de logements durables.
Par ailleurs, nous sommes tous sensibilisés à la problématique des enfants qui vont à l’école l’estomac vide de même qu’aux effets qu’entraîne cette situation sur la capacité de concentration et d’apprentissage des jeunes. Donc, en conséquence,
j’annonce que 21000000 $, sur une période de trois ans, provenant aussi de la réserve, seront investis pour consolider et étendre le travail en matière de soutien alimentaire, qui est déjà réalisé par le ministère de l’Éducation, en collaboration avec des organismes du milieu auprès des jeunes du niveau secondaire. Au cours des trois prochaines années, c’est 7 millions de dollars par année qui vont venir s’ajouter aux sommes que
le ministère de l’Éducation consacrera à même ses budgets.
Également, le gouvernement entend s’associer à l’expansion du Club des petits déjeuners du Québec avec l’injection de 3800000 $ sur deux ans, à même la réserve de Solidarité sociale, toujours. Le Club des petits déjeuners pourra ainsi étendre son action à 100 nouvelles écoles et permettra à 10000 autres enfants du primaire d’entreprendre leur journée scolaire avec un déjeuner complet.
Enfin, j’annonce la mise en oeuvre d’un programme de soutien aux initiatives en matière de sécurité alimentaire pour lesquelles 10000000 $, provenant toujours de la réserve de Solidarité sociale, seront consacrés. À l’intérieur de ce programme, plusieurs types d’interventions pourront être soutenues à partir des besoins qui seront identifiés dans les milieux et dans les différentes régions. Ainsi, on pourra par exemple financer la mise en oeuvre de cuisines collectives, la création de coopératives alimentaires, de regroupement d’achats, de développement de jardins collectifs et d’autres projets alternatifs du même type qui visent à donner davantage de contrôle aux personnes en situation de pauvreté sur leur sécurité alimentaire. Il y a un aspect éducatif et d’apprentissage important à ce type d’intervention.
– Et de même, à l’intérieur de ce volet, en
collaboration avec
les écoles, les commissions scolaires et le ministère de l’Éducation, ces fonds pourront soutenir des interventions supplémentaires de prévention en milieu scolaire, comme le développement de cuisines collectives ou de jardins collectifs dans les écoles afin d’intervenir auprès des jeunes dans la perspective de renforcer dès le jeune âge leur habilité et de changer des comportements pour une action à plus long terme.
Alors, en plus de ces mesures significatives, nous amorçons un mouvement sur sept grandes orientations que je vous énumère rapidement: D’abord, créer la richesse, la partager et développer
l’emploi — on sait qu’on constitue par là les premiers outils pour lutter contre la pauvreté; deuxièmement, de miser sur la valorisation du travail ainsi que sur le potentiel des personnes et des collectivités; favoriser une prise en charge locale et mobiliser la société civile autour de la lutte contre la pauvreté; quatrièmement, d’agir sur toutes les dimensions de la pauvreté de manière intersectorielle; une cinquième orientation qui vise à prévenir la pauvreté par une intervention précoce auprès des enfants, comme on commence à le faire de façon accélérée dès aujourd’hui; une sixième orientation, d’améliorer et d’adapter le filet de sécurité sociale; et, finalement, de cibler et d’adapter nos actions aux besoins des personnes, pour des groupes, et en tenant compte des territoires qui sont les plus pauvres dans l’ensemble du Québec.
À partir, donc, d’aujourd’hui, nous amorçons une réflexion,
un échange, un dialogue, et ma collègue Nicole Léger va vous donner les grandes lignes de ce qui se déroulera au cours des prochains mois devant nous mener au début de 2002 avec l’élaboration où tous auront été impliqués dans une véritable stratégie intensive de lutte contre la pauvreté.
Mme Léger: Alors, M. le premier ministre, mon cher collègue,
membres de la presse, alors, nous entreprenons aujourd’hui une démarche collective, celle de faire reculer la pauvreté au Québec. J’interpelle donc aujourd’hui l’ensemble de la collectivité québécoise, les entreprises privées, publiques, d’économie sociale, les syndicats, les organismes communautaires, les instances de coordination régionale, les gouvernements locaux, les citoyennes et les citoyens, les gens eux-mêmes vivant de la pauvreté. Madame, monsieur, je vous invite à vous engager dans les travaux qui permettront au Québec de choisir les meilleurs outils pour lutter contre la pauvreté. La démarche de concertation que
nous proposons débute aujourd’hui.
Le lancement du document Ne laisser personne de côté est le signal de départ qui nous mènera vers l’adoption d’une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté jamais vue au Québec, dès le début de 2002.
J’entreprendrai, dès l’automne, une tournée de validation à travers
le Québec afin de rencontrer les différents partenaires locaux, régionaux et nationaux. Je serai secondée dans cette démarche par trois secrétaires d’État: Mme Jocelyne Caron, responsable de
la Condition féminine, Mme Lucie Papineau, responsable des Régions-ressources, M. André Boulerice, responsable de l’Accueil et de l’intégration des immigrants, ainsi que des députés qui siègent sur le comité que nous avons formé pour nous épauler dans cette tâche: Mmes Diane Barbeau, Manon Blanchet, Solange Charest et MM. Yves Beaumier, Stéphane Bédard, Marc Boulianne et Serge Geoffrion.
Dans ce processus de mobilisation, le gouvernement québécois
entend jouer son rôle et agir sur les leviers les plus significatifs pour contrer la pauvreté. Pour leur part, les différents acteurs seront invités, à l’occasion de cette vaste opération, à inventorier les meilleurs moyens de poursuivre, sur les plans régional et local, les efforts pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion. Ils seront encouragés à partager avec le gouvernement leurs réflexions, leurs solutions, leurs actions pour contrer ce mal, ce fléau sans pitié qu’est la pauvreté.
Ce que nous souhaitons, c’est que, cet automne, les groupes
et les personnes intéressées réagissent et s’inspirent des orientations et des perspectives d’action soumises à l’intérieur du document pour en arriver à dégager des priorités en matière de lutte contre la pauvreté. Les actions déjà posées dans chacune des régions, notamment dans les suites des forums sur le développement
social, constituent déjà de précieuses prémices aux réflexions. Les fruits de cette démarche et de ces travaux seront par la suite intégrés dans la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Elle sera le reflet de consensus, le reflet d’un partenariat collectif. Une fois adoptée par notre gouvernement, nous y consacrerons les meilleurs moyens pour sa mise en oeuvre, et ce, dans une optique de partage et d’équité.
Vous êtes maintenant en mesure de constater le besoin de solidarité
qu’implique l’élaboration de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et, pour y arriver, nous devons nous mobiliser avec cet objectif commun. Il est primordial que la lutte contre la pauvreté et l’exclusion devienne une préoccupation pour tout le monde. Par la mise en branle de cette démarche de concertation, nous avons comme objectif d’améliorer les conditions de vie des plus pauvres et de favoriser leur autonomie. Nous comptons sur la collaboration des entreprises et des syndicats pour faciliter l’accès aux compétences et l’intégration à l’emploi des personnes exclues du marché du travail. Nous comptons aussi sur la collaboration des organismes communautaires qui interviennent tous les jours pour lutter contre la pauvreté, qui côtoient au quotidien les personnes pauvres et qui, souvent, réussissent, avec grande générosité, à briser leur isolement. Nous invitons aussi toutes les municipalités, les MRC, les CRD, les CLD, à inscrire la pauvreté et l’exclusion dans leur priorité de développement.
Personne ne devrait dormir dehors en plein hiver. Plus de jeunes ne
devraient se retrouver à la rue sans parents et sans aide. Plus d’enfants ne devraient arriver à l’école le ventre vide. Pas au Québec. C’est en consolidant nos efforts que nous pourrons obtenir des résultats à la hauteur de nos attentes. Il faut
que toutes et tous contribuent au développement de cette stratégie. Je lance donc un appel aujourd’hui à la mobilisation et à la solidarité sociale. Nous venons de jeter les bases qui tracent la voie au dialogue. Reste à chacune et à chacun de s’y engager pour ne laisser personne de côté. Merci.
M. Greer (Stuart): Bon, les questions en français, Denis
Lessard.
M. Lessard (Denis): Dans le document, ça paraît assez
vague,
là, les intentions. C’est des orientations très générales. Dans une première mouture du texte, y avait l’idée d’avoir un régime d’aide sociale différent pour les jeunes. Vous l’avez mis puis après ça vous l’avez retiré. Est-ce qu’y a une logique derrière ça? Quelles sont les…
M. Rochon: Vous dites: Dans une première mouture du texte. Il
y a eu différents documents de travail au cours des
derniers mois et qui ont servi de base à notre travail. Ce qu’on lance aujourd’hui, on l’a bien dit, là, c’est un mouvement où on convie tout le monde à un dialogue, à une discussion puis à une réflexion pour mettre ensemble les différentes idées qu’on peut avoir et les programmes qu’on veut proposer. Alors, tout ce qui a pu être mentionné au sein de nos ministères, par des gens dans la société, dans les régions, on veut que tout puisse être mis sur la table et qu’on puisse vraiment voir comment on bâtit avec ça une stratégie. Alors, le document est un document qui ouvre le dialogue, on peut pas conclure de ce qu’on retiendra et comment sera l’ensemble de la stratégie avant d’avoir pris le temps de discuter avec tout le monde et de donner à chacun la chance de faire ses propositions et de dire aussi sur quelles bases on fera les choix et comment on fera les priorités dans ce qu’on voudra faire, parce que la lutte pour la pauvreté, c’est pas juste pour une année, ça va durer sûrement longtemps, c’est un défi énorme à relever. Alors, il faut qu’on mise sur la concertation, et c’est ce qu’on commence ce matin.
M. Greer (Stuart): Norman Delisle.
M. Delisle (Norman): Moi, j’aurais aimé savoir
qu’est-ce
qu’il advient de deux de vos engagements électoraux de la dernière fois dont on n’entend plus beaucoup parler: l’abolition totale de la pénalité pour le partage du logement des assistés sociaux ainsi que le fait que le versement de pension alimentaire ne réduise pas du même montant les chèques d’aide sociale pour les familles monoparentales.
M. Rochon: La question du logement ou ce qu’on appelait la «pénalité pour le partage du logement», vous savez qu’on s’est engagé déjà à ce que cette pénalité soit retirée complètement avant la fin de notre présent mandat et qu’il y en a déjà 50 % qui a été retiré, et on a déjà pris l’engagement que, avant la fin du mandat, c’est une pénalité qui sera disparue complètement.
Pour les pensions alimentaires, je voudrais bien saisir votre question, là, j’ai pas…
M. Delisle (Norman): Quand un assisté social reçoit une pension…
une femme reçoit une pension alimentaire, le montant de son aide sociale est déduit automatiquement du même montant. Alors, la pension alimentaire lui donne pas grand-chose.
M. Rochon: Moi, ce que je peux vous dire, là, j’ai pas la précision, où on en est exactement sur cette mesure aujourd’hui, mais les engagements qu’on a pris, comme pour celui de la pénalité pour le partage du logement, on les a toujours réalisés, nos engagements, et on va les réaliser. Il faut les voir comme faisant partie et étant déjà acquis dans la stratégie. On remet pas en question ce qu’on a déjà dit, on veut faire plus et mieux à partir de ça.
M. Greer (Stuart): Gilles.
M. Morin (Gilles): Oui. M. Rochon, dans les mesures — M.
Landry aussi — d’aujourd’hui, le gouvernement annonce pour l’alimentation et le logement, mais, pour l’aide sociale, il y a rien pour aujourd’hui. Alors, est-ce que vous reportez ça dans la grande réflexion, est-ce qu’il faut s’attendre à une autre réforme ou si vous êtes satisfaits des planchers et des barèmes actuels de l’aide sociale?
M. Rochon: Comprenons-nous bien. On a dit que,
aujourd’hui,
on commence; on termine pas une opération, on la commence. C’est pas une opération qu’on lance sur deux, trois ans, on s’est donné un horizon
relativement court — on parle de six à huit mois — pour avoir une stratégie complète. Et, dans les orientations que je vous ai données tout à l’heure, on veut aussi revoir l’ensemble de notre système de filet de sécurité présentement et voir comment on peut l’améliorer dans toute la mesure du possible. Alors, oui, ça fait partie de la stratégie, mais vous comprendrez que, dans l’ensemble de ce qu’on peut faire pour lutter contre la pauvreté, il faut qu’il y ait un consensus social pour bâtir la stratégie, les critères pour choisir les priorités et de voir comment, dans le temps, on va procéder au cours des prochaines années. On bâtit là quelque chose pour plusieurs années, là, qui va mobiliser tout le monde au Québec.
M. Morin (Gilles): Mais pourquoi ne pas l’avoir fait aujourd’hui parce que ce filet… hausser l’aide sociale, c’est réclamé par tous les… la plupart des groupements. Alors, pourquoi ne pas l’avoir répondu aujourd’hui?
M. Rochon: On avait des choix à faire, on a
décidé,
aujourd’hui, parce qu’on va continuer à prendre des actions structurantes à mesure qu’on va développer la stratégie, on a choisi deux priorités qui viennent rejoindre des besoins fondamentaux et qui viennent rejoindre ceux qui en ont le plus besoin, nommément
les enfants. Parmi les besoins fondamentaux, se nourrir et se loger, faut commencer par ça. Alors, on s’attaque à ça et le reste, on veut le faire venir avec, au cours des prochains mois.]
[ M. Landry:] Il y a un budget par année, évidemment, et ce serait très mauvais pour toute lutte future à la pauvreté si le gouvernement lui-même retombait dans des excès de mauvaise gestion. Si on peut faire ce qu’on fait ce matin, c’est justement parce qu’on en a les moyens, pas délirants, mais on a un peu de moyens. Mais on veut pas retomber dans des déficits qui nous enlèveraient nos marges de manoeuvre. Alors, on va laisser se dérouler l’année présente, qui est une année assez incertaine sur le plan des surplus, n’est-ce pas, parce que l’économie ralentit sur notre continent. Alors, faut être… avoir la compassion, la générosité et la prudence budgétaire qui nous caractérisent.
[ M. Morin (Gilles): Donc, faudra attendre le prochain budget
pour voir les mesures… de nouvelles mesures monétaires, enfin, pécuniaires.]
[ M. Landry:] Pas forcément. Des fois, en cours d’année, on a des indications assez fortes qu’on a plus de moyens ou qu’on en a moins. Vous savez que c’est à peu près au mois de septembre que ça arrive, les premières indications. Alors, on verra. Mais il faut bien comprendre que notre effort de compassion et de solidarité s’inscrit dans un effort de solidarité nationale plus considérable. Ce n’est pas qu’une question de gouvernement, comme l’a dit ma collègue. Les entreprises, pour réintégrer des gens, par exemple, au travail, doivent se mobiliser, les syndicats doivent faire la même chose, les milieux municipaux. C’est pas une opération strictement gouvernementale, c’est une stratégie nationale de lutte à la pauvreté, puis le gouvernement, bien, il fait sa part au fur et à mesure de ses moyens et capacités.
[ M. Greer (Stuart): François.
M. Cardinal (François): M. Landry, je saisis la bonne volonté
en lisant votre document, mais je saisis pas trop le côté révolutionnaire des mesures présentées aujourd’hui.]
[ M. Landry:] Hélas, la condition humaine fait qu’il y a aucun pays, même les plus avancés et les plus riches, qui ont réussi à éradiquer totalement la pauvreté. Bien au contraire, un des pays les plus riches de la terre, notre voisin du sud, est un de ceux qui a le niveau de pauvreté, en nombre d’individus visés, parmi les plus élevés. Alors, c’est pas l’approche révolutionnaire qu’il faut chercher, c’est l’approche efficace, pratique — donc l’action commence aujourd’hui, avec l’argent qu’on a — et l’approche concertée. La population et les groupements qui s’intéressent en particulier à ces questions vont être mis à contribution. Ça va se faire dans un dialogue. S’il y a des mesures révolutionnaires et acceptables qui sortent de ce dialogue, elles ne sont pas exclues, mais c’est une lutte solide, cohérente et concrète qu’on cherche, plus que l’action d’éclat.
[ M. Rochon: Je voudrais rajouter, si vous
permettez, M. le
premier ministre, que l’esprit dans lequel ce mouvement est lancé aujourd’hui en est un où une signification du terme révolutionnaire, qui est l’innovation, s’applique parfaitement. Et l’innovation au sens profond de la façon dont une société fonctionne. C’est-à-dire que, si ça marche comme on le souhaite et qu’on pense que ça devrait marcher, par les contacts qu’on a déjà, quand même, avec l’ensemble des gens au Québec, une stratégie de lutte, pour la lutte à la pauvreté va nous amener à révolutionner beaucoup de nos façons de faire et va nous amener à révolutionner plusieurs aspects dans nos rapports sociaux entre les différents groupes d’une société, vraiment, au titre de l’innovation sociale.
Alors, dans ce sens-là, quand le premier ministre
a dit ça,
il pensait… ou il référait sûrement à l’innovation, qui doit être une grande caractéristique de ce qu’on va faire. On va pas juste chercher des modèles… On va s’inspirer de ce qui se fait ailleurs, tous les pays essaient ça maintenant, mais s’inspirer d’ailleurs pour faire quelque chose qui va être collé à ce qu’est l’entité québécoise et de ce qu’on peut puis ce qu’on veut faire au Québec. Alors, c’est ça qui va être révolutionnaire, je pense.
Le Modérateur: Michel David.
M. David (Michel): Oui. M. Rochon, votre prédécesseur avait déjà travaillé pendant presque un an sur un plan. Vous avez, vous, Mme Léger, je pense M. Landry aussi, rencontré à quelques reprises les gens de la coalition de lutte contre la pauvreté…
M. Rochon: Le collectif.
M. David (Michel): …le collectif qui regroupe à peu près
tous les gens qui se préoccupent de ça. Vous savez très bien, finalement, ce qu’ils veulent, et là vous nous annoncez qu’on reprend une vaste consultation. Est-ce que ces gens-là vont pas vous dire: Écoutez, on vous a tout raconté? Et vous nous arrivez avec un document
qui est une série de têtes de chapitre finalement. Ces gens-là vont peut-être avoir l’impression qu’ils parlent dans le beurre, non?
M. Rochon: Bon. Là, je voudrais préciser une chose, là. Ça
fait deux, trois questions qui reviennent là-dessus, là. Ou bien on attendait un peu plus ou on sortait tout de suite une stratégie complète puis on disait: Voilà, la lutte contre la pauvreté, c’est ça. On a parlé à des gens puis on a bien compris que beaucoup de monde avait quelque chose à dire, qu’il y en a beaucoup d’autres qui ont déjà dit des choses, qu’il y a eu beaucoup d’échanges et qu’il fallait conclure ce débat-là qui est engagé depuis longtemps au Québec et qu’on a, nous, expressément demandé que le gouvernement joue d’abord son rôle qui est celui d’animer, de prendre le leadership, d’encadrer un dialogue, une concertation comme ce qu’on veut faire.
-C’est ça que le document veut faire.
Vous le savez, on a travaillé à beaucoup de
choses, mon
collègue, André Boisclair qui m’a précédé dans ce rôle-là, dans beaucoup d’autres ministères aussi parce que l’action est très intersectorielle. Dans beaucoup d’autres ministères, il y a des idées, il y a des propositions qui s’orientent vers des projets et c’est ça qu’on va mettre sur la table et qu’on va discuter avec les gens et qu’on va valider. Alors, on ne ferme pas. Ça, ç’aurait été une façon de faire, mais tout le monde nous avait dit que c’était surtout pas comme ça qu’il
fallait le faire. Alors, on complète l’opération avec tout le monde. C’est pour ça que vous avez la nature du document qui est là. On ne peut pas conclure avant d’avoir commencé cette dernière période. Maintenant, le…]
[ M. Landry:] Oui. Dans nos rencontres, moi j’y ai participé comme…
[ M. Rochon: On va revenir au Collectif.]
[ M. Landry:] Même comme ministre des Finances, je rencontrais le Collectif régulièrement. Des fois, ils nous font de bonne foi des suggestions que nous ne pouvons pas accepter, en notre âme et conscience, -parce qu’elles ont plus d’inconvénients que d’avantages. Le grand exemple, c’est hausser davantage le salaire minimum, qui part d’un bon naturel, là. Tout le monde veut que le salaire minimum soit le plus élevé possible. Sauf que notre salaire minimum, il est déjà le plus élevé d’Amérique du Nord sauf un État américain, qui est le Rhode Island, je crois. Et, si on allait plus loin — là, tous les économistes et les spécialistes nous mettent en garde, de même que les gens très, très pratiques dont le député des Îles-de-la-Madeleine — si on va plus loin, le bateau qui vient faire traiter le poisson aux Îles, il va aller dans d’autres provinces où les coûts d’exploitation sont plus bas. Donc, une très bonne intention: hausser le salaire minimum. Résultat: création de chômage au bout. Le gouvernement doit arbitrer ces choses-là. Alors, quand on nous suggère de hausser le salaire minimum, on prend la suggestion avec respect puis on regarde ce que ça va faire à l’ensemble de l’économie puis on dit: Non, on l’a haussé de 0,10 $ là, et puis faire plus n’aurait pas été responsable. D’ailleurs, l’opposition nous a reproché de l’avoir haussé de 0,10 $, d’ailleurs, vous vous souvenez? Alors, ils nous suggèrent des choses avec une bonne foi totale puis, des fois, ces choses-là, ou on ne peut pas les faire parce qu’elles sont trop coûteuses ou elles sont contreproductives pour l’ensemble de la société.
[ M. David (Michel): Mais vous savez tous très bien
ce qu’ils
veulent et là, vous nous dites: On va retourner les voir.
M. Rochon: Non, non. Attendez une minute, là! Une
chose qu’ils veulent, c’est une loi pour éradiquer la pauvreté. On en a déjà discuté avec eux. On est déjà en mode de discussion et de travail avec eux et ce qu’on a convenu là-dessus très clairement,
c’est une loi peut-être, on n’est pas nécessairement contre ça. La France, il y a quelques années, a adopté une loi de lutte contre la pauvreté, l’Angleterre, par
contre, y est allée par la voie d’une stratégie. Alors, ce qu’on a très bien dit, et je pense que là-dessus on s’est compris, si on ne s’est pas complètement entendus, c’est qu’une loi, ça peut faire partie d’une stratégie, c’est l’approche qu’on a prise, plutôt qu’une stratégie à être dans une loi. Donc, la loi, on va en parler.
Ce qui est surtout important, ce qu’on a convenu
avec
eux — et le premier ministre était à cette rencontre où j’étais allé avec ma collègue — c’est qu’il y a beaucoup d’éléments qui sont dans leur loi qui sont les mêmes éléments dont on parle dans une stratégie. Alors, ce qu’on a convenu, pendant les prochains mois on va parler du contenu, et plus on va préciser le contenu plus ça va peut-être être facile de s’entendre sur comment les contenants s’ajustent, premièrement.
Deuxièmement, le collectif regroupe énormément de
groupes et de gens, et ça, on le reconnaît parfaitement. Mais eux aussi reconnaissent qu’il y en a d’autres aussi qui ont à voir là-dedans. Nicole Léger a parlé des employeurs entre autres, il y a beaucoup d’acteurs socioéconomiques partout dans les régions, qui ne sont pas nécessairement membres du Collectif. Et l’ouverture qu’on fait, c’est à tout le monde. On laisse personne de côté. Alors, le Collectif, oui. Et d’ailleurs, ma collègue les rencontre régulièrement depuis la rencontre qu’on a eue avec le premier ministre, on a eu une rencontre, on les a
vus ensemble, elle continue à travailler avec eux. Donc, on est en mode de collaboration avec eux, mais on veut que tout le monde puisse venir. Et ça, je n’ai pas senti de leur part que ça leur causait problème qu’on ouvre encore plus large la concertation.
M. Greer (Stuart): Deux dernières questions en français, le
premier ministre doit…]
[ M. Landry:] Ce qu’on veut faire, c’est une espèce de compromis entre le respect de nos interlocuteurs et le travail avec eux et l’action immédiate. Il y a des choses qu’on fait maintenant. M. François Saillant, par exemple, FRAPRU, il veut de l’action dans le logement social. On le sait, il nous l’a dit, il nous a tout expliqué ça; on va le faire. D’autres, vraiment, disaient, comme priorité absolue — et ça tombe sous le sens — que les enfants n’aient plus faim avant de commencer la journée scolaire. Action immédiate. Les gens de l’économie sociale, Mme Neamtan en particulier et son groupe, nous ont dit que dans le dernier budget il n’y avait pas les moyens dont ils avaient besoin pour faire reculer à leur manière la pauvreté. On a fait une conférence de presse la semaine dernière et on a rajouté des moyens considérables. Alors, on veut que ça soit action immédiate et priorité et on veut aussi se doter, par la même occasion, d’une des meilleures stratégies au monde, et pour ça il faut qu’on parle avec nos interlocuteurs et nos interlocutrices pendant un certain nombre de mois. Mais s’il y a des actions possibles entre-temps, on va pas attendre. On va y aller.
[ M. Greer (Stuart): Très vite, on a deux dernières
questions
en français, une question chaque s’il vous plaît parce qu’on est pressés un peu. Mme Andrée Brassard.
Mme Brassard (Andrée): Oui. Vous désirez mobiliser toute la
société civile, mais j’aimerais savoir ce que vous attendez en particulier des entreprises et des syndicats.]
[ M. Landry:] Bon. Les entreprises, moi, ce que j’attends, c’est des choses très pratiques et concrètes. Disons, on crée 300 nouveaux emplois dans un investissement donné. Là-dessus, il y en a 50 qui demandent aucune qualification particulière; un effort pourrait intégrer des gens qui sont pas sur le marché du travail, qui sont à l’aide sociale en particulier. Alors, c’est ça qu’on va demander à chaque d’entreprise dans le cas d’investissement majeur. C’est un exemple concret.
[ Mme Brassard (Andrée): Mais, ça, c’est un
message…]
[ M. Landry:] Dans certains cas, ça s’est fait. Pardon?
[ Mme Brassard (Andrée): C’est quand même un message
que vous
exprimez depuis plusieurs mois, ça. Est-ce que les entreprises…]
[ M. Landry:] Et, dans certains cas, ça s’est fait. Mais on veut que ça se fasse d’une façon plus systématique. Parce que, dans d’autres cas, l’entreprise n’y a même pas pensé. Elle a fait son recrutement puis elle a pas pensé qu’il y aurait des gens qui pouvaient remplir les postes qui étaient à l’aide sociale. Il n’y a pas eu un effort particulier de fait. On veut maintenant que ce soit une pratique généralisée dans l’économie québécoise. Pas imposer des gens non qualifiés mais utiliser pour les circonstances où des postes demandent moins de qualification.
[ M. Rochon: Et, dans cette foulée, il y a des
situations pour
les autres où il peut y avoir besoin de formation où, déjà, il y a des propositions pour que entreprises et syndicats acceptent de faire des accommodements possibles pour que des gens puissent être dans les entreprises.]
[ M. Landry:] Oui. Des fois, la convention collective est un peu
raide.
-[ M. Rochon: Oui. Des fois, on peut avoir des contre-
éclats,
alors il faut que les deux parties conviennent que, oui, on va faire de la place à des gens qui ont besoin d’une période d’adaptation un peu plus longue que ce qui est convenu dans les moeurs en cours actuellement. Ça, c’est un autre exemple de demande concrète de participation à l’entreprise. Eux, ils retrouvent leur intérêt de toute façon parce que, dans certains secteurs, il y a des pénuries de main-d’oeuvre. Et, parfois, c’est des pénuries de main-d’oeuvre dans des secteurs hautement technologiques, mais pas toujours; il y en a aussi où des gens peuvent être rapidement,
-facilement, adaptés. Mais ça prend une collaboration parce que l’ajustement doit être fait syndicat-employeur, Emploi-Québec et les différents services qu’on a.
M. Greer (Stuart): Dernière question en français,
Francis.
M. Labbé (Francis): M. le premier ministre, il y a évidemment
des besoins criants un peu partout dans la société. Il y a des gens qui ont de la difficulté à manger le
matin. Mais il y a aussi… Ce matin, dans la rue, il y avait des gens atteints de surdité qui demandaient
plus d’argent. Est-ce que c’est possible d’accommoder tout le monde?]
[ M. Landry:] Il faut faire tout ce qu’on peut pour accommoder tout le monde mais les besoins sont infinis puis les ressources ne le sont pas. Alors, ça va toujours être des arbitrages difficiles dans notre société comme dans toutes les autres. Les besoins en santé là, Jean Rochon est un des grands experts mondiaux de la question, on sait qu’ils sont infinis, hein. Si tu veux tout couvrir, le curatif et le préventif, 100 % du PNB va y passer. Alors, les États ont des arbitrages à faire. Puis, dans le cas de notre État, malheureusement encore provincial, bien, il y a la contrainte supplémentaire de pas voir ses richesses s’accroître assez vite en termes de moyens. Là il y a eu unanimité des provinces encore hier, là, sous l’égide du président de la conférence des ministres des Finances. Là ce n’est plus une revendication québécoise, ils se sont mis d’accord sur des transferts de points d’impôt, à travers le Transfert social canadien, de n’importe quelle manière, des moyens. Et même quand on les aura, ces moyens, disons honnêtement aux populations qu’on pourra pas donner satisfaction à tout le monde.
[ (Fin à 12 h 54)]
[QLDRY20011010cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Le point sur les mesures prises par le gouvernement du Québec
à la suite des attentats du 11 septembre Le mercredi 10 octobre 2001 (Dix-sept heures trente minutes)]
[ M. Landry:] Chers compatriotes, il y a un mois jour pour jour dans quelques heures survenaient les événements du 11 septembre. Le Québec, comme toutes les autres nations du monde, a été révolté par ces actes de barbarie et leurs conséquences tragiques sur la vie de milliers d’hommes et de femmes. J’ai été en mesure d’exprimer à l’ambassadeur des États-Unis d’Amérique au Canada la profonde sympathie de tous les Québécois et de toutes les Québécoises ainsi que notre appui indéfectible au long combat qui s’annonce dans la lutte au terrorisme et ses impacts.
Dans l’heure qui a suivi l’attaque contre le World Trade Center, le gouvernement du Québec est rapidement intervenu en activant son organisation sécurité civile. Nous avons pris sans délai les mesures requises afin d’offrir l’aide nécessaire aux autorités américaines, d’assurer la sécurité du personnel de la délégation du Québec à New York ainsi que des participants à la mission Québec-New York 2001, créateurs et créatrices qui devaient participer à cet événement. Nous avons rassuré et informé les citoyens du Québec, notamment les membres de certaines communautés culturelles plus sensibles en mettant sur pied une ligne téléphonique 1-800 et nous avons renforcé les mesures de sécurité lorsqu’il était pertinent de le faire.
En outre, un comité ministériel spécial, le Comité du 11 septembre, a été créé afin d’assurer une coordination étroite des actions gouvernementales face à un horizon incertain caractérisé par une inquiétude grandissante. Le gouvernement du Québec décidait donc de faire de la sécurité des citoyens et des citoyennes un axe majeur de son action. Ce Comité du 11 septembre, que je préside, travaille à élaborer divers mécanismes pour répondre efficacement et avec célérité aux attentes et aux besoins des Québécois en matière d’économie et d’emploi, mais aussi de sécurité ainsi que de solidarité et de relations intercommunautaires. Déjà, comme la plupart des États modernes, le Québec est doté d’un dispositif de sécurité publique qui assure une veille, réagit rapidement aux événements et coordonne l’action des pouvoirs publics en situation exceptionnelle. Ce dispositif est présentement actif, collabore avec des intervenants fédéraux et est prêt à faire agir les ministères et organismes gouvernementaux de façon concertée et coordonnée. Il a été développé, actualisé et perfectionné, comme on le sait, au cours d’événements tels le déluge du Saguenay ou le grand verglas, en 1998, et, plus récemment, avec le Sommet des Amériques à Québec.
Outre les éléments de coordination, plusieurs autres aspects du dispositif de sécurité ont été enclenchés ou renforcés. Des mesures de surveillance accrues ont été mises en place, particulièrement au regard des sites sensibles comme les aéroports et certaines infrastructures essentielles telles le réseau d’Hydro-Québec et la centrale de Gentilly. En matière de santé publique, le réseau québécois dispose d’un plan des urgences infectieuses visant les maladies à surveillance extrême, dont l’anthrax. En outre, les Québécois peuvent compter sur un réseau de médecins sentinelles pour favoriser une détection rapide des problèmes pouvant survenir. Aussi, le réseau dispose d’une capacité d’analyse des agents contaminants. Enfin, le Québec voit actuellement, en lien avec les autorités fédérales, à se doter de réserves d’antibiotiques et de médicaments nécessaires pour assurer les soins appropriés aux citoyens du Québec. Le Québec, on le sait, a été bâti par une mosaïque de gens provenant de différents horizons et de cultures diverses. Une des répercussions insidieuses des événements du 11 septembre est que ceux-ci tendent à fractionner le tissu civil québécois. Ainsi, certains de nos concitoyens qui professent la religion musulmane ont vécu une inquiétude qui ne doit pas durer. Le Québec est uni mais il est multiple dans ses origines. C’est pourquoi le gouvernement est intervenu rapidement pour calmer les esprits.
Des mesures seront mises de l’avant par plusieurs ministères et organismes pour favoriser la solidarité interculturelle. Parmi celles-ci, le ministère de l’Éducation prévoit, entre autres, la préparation d’outils de formation destinés aux personnels scolaires pour les aider à prévenir et à gérer les conflits intercommunautaires éventuels, l’encouragement aux établissements ` se doter de programmes de formation continue en relations interculturelles et surtout une incitation aux établissements à adopter une politique de tolérance zéro pour les paroles et comportements racistes. Dans le réseau des centres locaux d’emploi, des sessions de formation seront organisées, avec la collaboration du ministère des Relations avec les citoyens, à l’intention du personnel afin de proposer une vue d’ensemble des caractéristiques de la clientèle née hors du Canada et de ses perspectives d’avenir; priorité, les centres locaux d’emploi, les CLE, de l’île de Montréal bien entendu.
Les événements du 11 septembre ont aussi jeté un éclairage cru sur une réalité de la société québécoise et canadienne: la mise en application de nos politiques d’immigration laissent parfois à désirer. Ottawa est à réviser ses politiques de contrôle aux frontières ainsi que son suivi des demandes de statut de réfugié. Nous entendons l’appuyer dans ces démarches fort importantes pour la sécurité des Québécois et des Québécoises.
De notre côté, nous allons resserrer la gestion des demandes d’immigration au Québec et instaurer un mécanisme de vérification du statut afin de déceler toutes les situations illégales. On se rappellera, par ailleurs, que mon gouvernement annonçait récemment que les conditions entourant l’émission des documents d’état civil allaient être resserrées de façon à rendre encore plus difficile l’obtention frauduleuse d’un passeport canadien.
L’insécurité, hélas, est aussi économique et sociale. C’est pourquoi j’annonce aujourd’hui des mesures reliées à la sécurité économique et sociale des Québécois et des Québécoises.
Au cours des dernières années, grâce à l’action résolue entreprise par le gouvernement du Québec, le Québec a franchi des étapes majeures. Nous avons réussi à assainir les finances publiques en rétablissant l’équilibre budgétaire et en commençant à réduire le poids de la dette; nous avons en même temps commencé à alléger le fardeau fiscal des contribuables et à diminuer ainsi l’écart qui nous sépare à ce titre du reste du Canada; simultanément, grâce à une politique économique volontariste, nous avons accéléré l’ouverture et la modernisation de l’économie québécoise. Le Québec a ainsi réussi des percées remarquables sur le marché américain tout en se positionnant à l’échelle internationale dans les domaines de l’économie du savoir en particulier. Surtout, grâce à ces succès majeurs, le niveau de vie des Québécois s’est significativement accru, et nous avons atteint au plan du chômage des planchers historiques.
Ces acquis sont importants pour le Québec moderne, et nous devons tout mettre en oeuvre pour les conserver. Nous avons travaillé fort à bâtir le Québec, nous ne voulons qu’aucun type d’événement ne contribue à le débâtir. Mieux, nous devons utiliser ces instruments pour protéger notre collectivité contre les impacts des turbulences en cours.
À cet égard et comme vous le savez, les nouvelles économiques de ces dernières semaines sont inquiétantes. Deux des secteurs les plus performants de notre économie, les secteurs du transport aérien et de l’aérospatiale, sont directement affectés par les conséquences des événements du 11 septembre. Plus globalement, les dirigeants de nos entreprises marquent leur inquiétude face à l’impact de la conjoncture actuelle sur le développement de leurs activités. Les États-Unis, qui constituent depuis quelques années notre principal partenaire économique, absorbent 80 % de nos exportations à l’étranger. Le ralentissement de l’économie américaine se répercute donc presque instantanément sur notre propre activité économique et touche directement la plupart de nos entreprises manufacturières. Les plus récentes statistiques sur l’emploi, publiées vendredi dernier, n’enregistrent pas encore ces mauvaises nouvelles. Il faut cependant s’attendre à ce que cette dégradation soit très bientôt perceptible sur les indicateurs du chômage.
Cette situation très difficile touche d’abord la première économie du monde, et le gouvernement des États-Unis d’Amérique est en train d’y répondre en mobilisant des moyens majeurs. En quelques semaines, la Réserve fédérale a procédé à une réduction de 100 points de base de ses taux directeurs, qui ont maintenant atteint le niveau le plus bas depuis 1962. En vérité, ce taux est de 2,5 %. On peut parler de taux d’intérêt négatif. Dans les jours qui ont suivi les attentats, le Congrès américain a débloqué un fonds spécial de 40000000000 $ pour l’année fiscale en cours. Le gouvernement américain s’apprête à verser aux compagnies aériennes une aide publique de 15000000000 $. Mercredi dernier, le président Bush déposait au Congrès un plan de relance économique comprenant l’injection dans l’économie de 75000000000 $ additionnels. Les États-Unis réagissent donc rapidement et massivement, comme on pouvait s’y attendre et comme il était de leur responsabilité de le faire.
Le gouvernement du Québec, à son échelle, a également des responsabilités à assumer et il va les exercer. Pour assurer une plus grande sécurité économique et sociale à nos compatriotes, nous prenons immédiatement une décision majeure: lors de la séance du Conseil des ministres du 3 octobre, la semaine dernière, j’ai demandé à la vice-première ministre et ministre d’État à l’Économie et aux Finances de présenter dans les prochaines semaines un discours sur le budget. La vice-première ministre procédera donc, d’ailleurs, dans les plus brefs délais, à des consultations pré-budgétaires de tous les agents socioéconomiques du Québec: syndicat, patronat, économie sociale, groupes communautaires et autres. Cet exercice sera conduit de façon à rencontrer les objectifs de transparence que le gouvernement s’est fixés. Il sera ainsi possible de réviser très rapidement le budget de l’année en cours et de mettre en place un ensemble d’initiatives visant à assurer le maintien de l’activité économique. L’Assemblée nationale, qui reprendra ses travaux le 16 octobre prochain, consacrera donc bientôt et prioritairement ses travaux à l’étude du budget déposé selon les règles habituelles de notre démocratie parlementaire. Un autre budget au printemps n’est pas exclu, si nécessaire, pour faire face au meilleur comme au pire, à l’amélioration comme à une éventuelle dégradation. Le gouvernement du Québec mobilise ainsi les principaux leviers à sa disposition pour répondre à une conjoncture économique à bien des égards exceptionnelle. Notre discipline budgétaire nous permet de disposer d’une marge de manoeuvre dont l’État québécois ne bénéficiait plus depuis déjà plusieurs décennies, hélas. Surtout dans un contexte où une certaine prudence était nécessaire, nous avions constitué des réserves dans le cadre du dernier budget, pratiquement à hauteur de 1000000000 $. Nous touchons maintenant les dividendes de cette discipline, une discipline qu’il nous faut absolument maintenir. Nos relations économiques renforcies avec les États-Unis font que notre économie va profiter rapidement et directement des injections massives des fonds, décidées par le gouvernement américain. À l’image de ce que font actuellement les États-Unis, nous devons cependant être proactifs et soutenir l’activité économique devant la conjoncture difficile que nous allons traverser. Au-delà des grands leviers budgétaires, le gouvernement posera rapidement une série de gestes concrets visant à soutenir l’activité économique. Le gouvernement mettra plus vigoureusement que jamais l’épaule à la roue. Il verra à ce que les investissements publics, principalement dans les secteurs de la santé et des services sociaux et de l’éducation, soient accélérés et ciblés en fonction des besoins les plus urgents partout au Québec dans chacune des régions. Tout sera mis en oeuvre, notamment les pressions nécessaires auprès du gouvernement fédéral, afin que les projets soumis par les municipalités dans le cadre du programme d’infrastructures soient entrepris et réalisés dans les plus courts délais possible. Le gouvernement utilisera plus intensément que jamais l’outil-clé que constitue l’appui qu’il peut apporter à la réalisation d’investissements privés ayant des retombées rapides et significatives. Nos grands instruments de développement que sont la Société générale de financement et Investissement-Québec seront tout particulièrement au coeur de l’offensive à mener. Les besoins énergétiques du Québec augmentent également de façon rapide en raison de la forte croissance économique des dernières années. Il est à prévoir qu’à partir de 2005 la capacité de production actuelle d’Hydro-Québec sera insuffisante pour répondre aux ventes d’électricité prévues. Dans ce contexte, le gouvernement accélérera, comme il a commencé à le faire d’ailleurs par les projets de Péribonka et de Beauharnois, la réalisation de projets de production d’énergie électrique.
Afin d’assurer un approvisionnement stable d’électricité à faible coût pour les Québécois et les Québécoises d’abord, de soutenir le développement économique du Québec en favorisant la réalisation de projets d’investissement majeurs, d’éviter que le Québec soit confronté à une crise énergétique comparable à celle des États-Unis où, dans certains États, des entreprises ont dû cesser leur production en période de pointe, l’État québécois jouera le rôle qui lui revient et mobilisera toutes nos ressources collectives. Je suis pour ma part très confiant dans la capacité du Québec de contrer rapidement les incertitudes actuelles et de se comporter aussi bien avec autant de dynamisme et de discipline dans les périodes difficiles que dans les périodes de beau temps que nous avons connues et qui finiront bien par revenir. Je suis prêt maintenant à répondre à vos questions.
[ Un journaliste: M. Landry, vous annoncez… enfin
des investissements publics, l’accélération aussi d’autres travaux,
programmes d’infrastructures. Est-ce que vous avez le budget nécessaire pour le faire actuellement?]
[ M. Landry:] Oui. D’abord, j’ai dit que les équilibres budgétaires annoncés au dernier budget seront maintenus. Nous n’allons pas tourner le dos à l’industrie. Alors, d’où viendra l’argent? D’abord, dans l’accélération de projets déjà budgétés qui se seraient réalisés plus lentement et qui émargent aux finances publiques. Deuxièmement, dans l’intervention, non pas avec de l’argent budgétaire mais de l’argent d’investissement de la Société générale de financement, d’Investissement-Québec, d’Hydro-Québec ou d’autres budgets d’investissement et non pas de dépenses du gouvernement du Québec lui-même. Alors, certains grands travaux, qui auraient pu survenir d’emblée dans trois ou quatre ans, surviendront plus vite et nous assumerons le service de la dette quand les emprunts nécessaires auront été contractés. Donc, il n’est pas question de tourner le dos à la discipline budgétaire et ce qui était annoncé pour le présent exercice sera maintenu. Quant au budget à venir, bien, vous verrez son contenu en détail.
-[ Un journaliste: …vous serez obligé d’emprunter
pour payer
ces travaux-là, que ce soit dans deux ans…]
[ M. Landry:] Oui, mais dans nos programmes réguliers de dépenses. Un emprunt s’amortit sur plusieurs années, la conjoncture ayant eu le temps de se rétablir bien des fois depuis. Comme on a un programme d’emprunt très important chaque année, ce qui est important, c’est que le déficit soit maintenu à zéro et que nos continuions à nous désendetter globalement.
[ Une journaliste: …]
[ M. Landry:] Non, ce budget sera déposé dans quelques semaines.
Alors, quand on parle en semaines, ça veut dire qu’on pense à moins d’un mois.
-[ Un journaliste: …est-ce que vous allez faire des
gestes qui
vont toucher…]
[ M. Landry:] Ma collègue des Finances livrera le discours du budget en temps et lieu et vous connaîtrez toutes ces questions, qui ne sont pas des détails, des questions majeures…
[ Un journaliste: …d’augmentation des dépenses…]
[ M. Landry:] Je veux dire que… d’abord, les dépenses déjà budgétées seront accélérées, surtout les dépenses d’investissement, et pour le reste, les grands équilibres du budget seront annoncés par la ministre des Finances, car il s’agit vraiment d’un budget, d’un nouveau budget.
[ Un journaliste: Mais, M. Landry, puisque vous
aviez prévu une
marge de manoeuvre de 1000000000 $ ou presque, pourquoi sentez-vous le besoin d’un budget extraordinaire à ce moment-ci, puisque vous avez la marge de manoeuvre pour le faire?]
[ M. Landry:] D’abord, je dis: Heureusement qu’on avait prévu cette marge de manoeuvre parce que déjà les rentrées fiscales ont commencé à décélérer et on peut prévoir, à cause des pertes des entreprises, des remboursements fiscaux. On a envoyé des chèques comme on en envoie aux particuliers quand on a trop perçu par rapport à leurs revenus. Deuxièmement, les événements que nous vivons sont d’un caractère exceptionnel. Jamais dans l’histoire humaine des événements aussi complexes et aussi imprévus, aux conséquences multiples, ne sont survenus. Et gouverner, c’est prévoir. Alors, nous ne voulons prendre aucun risque avec la sécurité économique et sociale de notre population. [ Le Modérateur: Gilbert Lavoie…
M. Lavoie (Gilbert): M. Landry, d’une part, est-ce que vous
écartez d’emblée la possibilité de revenir sur l’engagement d’indexer
les tables d’impôts le 1er janvier? Et, deuxièmement, vous voyez la controverse aux États-Unis sur… Il y a deux écoles de pensée quand on veut stimuler l’économie: on réduit les taxes ou le gouvernement injecte de l’argent. Sans préjuger de votre décision ici, est-ce que vous pensez que le gouvernement américain aurait plus d’impact sur l’économie?]
[ M. Landry:] C’est la ministre des Finances, évidemment, qui répondra à votre première question dans son discours du budget. Et les deux théories se défendent. J’ai l’impression que les ouvrages de lord Keynes, qui accumulaient de la poussière sur les tablettes de la Maison blanche, ont été ressortis et mis à profit. Et la théorie keynésienne est plutôt d’accélérer la dépense publique, mais la non-ponction peut être équivalente sur le plan économique à l’injection.
[ Un journaliste: …alors pourquoi un nouveau
budget puisqu’il
y a une semaine encore, on soutenait que, de toute façon, on avait une réserve? Quels sont les faits nouveaux et d’autant plus qu’on attendait également des données sur l’état de l’économie.]
[ M. Landry:] La réserve, elle touchait l’exercice présent. Mais, un budget, c’est pour les exercices à venir. Alors, là, on va déborder sur non seulement 2000-2001, mais on va s’en aller sur 2002-2003. C’est un budget.
[ Un journaliste: C’est pour faire l’économie d’un
budget au
printemps prochain.]
[ M. Landry:] Pas forcément. Je crois avoir dit qu’il y en aura peut-être un au printemps prochain pour faire face au meilleur ou au pire. Si les mesures du gouvernement américain — taux d’intérêt – historiquement bas, par exemple, les injections massives, le keynésianisme lié à la fiscalité — allaient relancer l’économie, on en prendra acte dans un budget au printemps. Mais regardons les choses en face, là. Avant même que les deux tours s’écroulent, l’économie américaine avait commencé à s’effondrer. Est arrivé cet événement sans précédent dans l’histoire. Alors, nous ne voulons pas prendre de chance. Je le redis, nous avons bâti cette économie avec soin et patience en se déplaçant pour aller annoncer 10 emplois. On veut pas la voir démolir par la conjoncture et on veut prendre toutes les mesures pour que nos compatriotes restent en sécurité économique et sociale.
[ Un journaliste: …l’économie du Québec est
fortement
tributaire des exportations.]
[ M. Landry:] Oui.
[ Un journaliste: Vous craignez pas que les…]
[ M. Landry:] Non, pas du tout. Les frontières peuvent se resserrer pour des questions de sécurité, donc libre circulation des personnes, qui peut être ralentie à cause des vérifications exigées par la conjoncture. Mais pour le reste, pour l’exportation des biens, il y a pas véritablement d’impact.
-[ Un journaliste: Pour ce qui est de l’électricité,
vous
dites…]
[ M. Landry:] Il y a pas un impact, sauf le fait que l’économie américaine, qui absorbe 80 % de nos exportations internationales, ralentissant, ralentit nos volumes exportés.
[ Un journaliste: Pour ce qui est de l’électricité,
vous lancez
une série… vous voulez lancer une série de projets. Or, ça sera jamais prêt pour 2005, ces projets-là, vous dites qu’on va être en…]
[ M. Landry:] Bon. D’abord, on veut faire face à la demande québécoise. Mais, aussi, un projet annoncé aujourd’hui, la dépense commence aujourd’hui. Quand on a acheté Beauharnois, là, il y a des gens, depuis ce jour, qui reçoivent des chèques, qui en recevaient pas avant parce qu’ils travaillent sur les études préliminaires, travaillent dans les bureaux d’études-conseils et les travaux sur le terrain vont commencer très rapidement. Donc, si jamais on était dans une baisse, quand les travaux sur le terrain commenceront, bien, on compensera la baisse avec ça. Même chose pour Péribonka et d’autres projets que nous allons annoncer avec la plus grande intensité possible et en cascade — c’est le cas de le dire.
[ Le modérateur: Deux dernières questions en français…
Un journaliste: Vous dites être en discussions
avec le fédéral pour obtenir des antibiotiques. En fait, que craint-on exactement? Est-ce que le Québec est prêt à faire face à des attentats
de nature chimique ou bactériologique? Et, sinon, dans quel délai pensez-vous qu’il le sera?]
[ M. Landry:] Écoutez, aucune puissance au monde n’est totalement prête à faire face à ce genre d’attaque inusitée dans l’histoire humaine, encore une fois, si on fait exception des gaz sarin dans le métro de Tokyo. Et le Japon, deuxième puissance du monde, a été pris au dépourvu. Alors, nous faisons tout pour être pris au dépourvu le moins possible. C’est la raison pour laquelle nous aurons les antibiotiques, nous avons les médecins sentinelles, nous avons les moyens d’analyse rapide pour détecter de quel genre de virus ou de bactérie il peut s’agir. Donc, encore une fois, gouverner, c’est prévoir, mais on ne peut pas tout prévoir. On essaie de couvrir le plus grand nombre d’angles possible, comme un gouvernement responsable doit le faire.
[ Le modérateur: Dernière question…
Un journaliste: M. Landry, vous avez dit dernièrement que la réserve budgétaire du Québec doit être crucialement utile. Est-ce à dire que vous allez donc la… vous êtes prêt à la dépenser dans le prochain budget?]
[ M. Landry:] Dans le budget actuel, pour l’exercice en cours, nous allons pouvoir respecter notre équilibre budgétaire, parce que nous avions la réserve. Si nous n’avions pas la réserve, on pourrait déjà parler d’un déficit revenu à hauteur de 1000000000 $. Alors, je n’ose imaginer quelle serait notre situation si on était encore à 6000000000 $ de déficits par année. C’est là qu’on voit que la prévision à long terme, la discipline budgétaire, qui implique, évidemment, certains sacrifices, peut nous éviter des sacrifices plus grands encore. Parce que là, il faut faire face aux demandes accrues d’aide sociale; pour ça, il faut avoir de l’argent. C’est là qu’on voit que la discipline budgétaire rejoint la préoccupation sociale et qu’un parti progressiste est aussi un parti discipliné sous l’angle des finances publiques.
[ Un journaliste: Mais cette réserve des 670
millions, est-ce
qu’elle existe toujours aujourd’hui, là?]
[ M. Landry:] Elle existe sous réserve de la portion qui a déjà été injectée dans les programmes. Parce qu’on a toujours dit que ça serait fractionné au besoin, alors une partie pour la conjoncture, une partie pour mettre de l’argent dans les programmes. Je dirais que c’est autour de 30 % dans les programmes.
[ (Fin à 18 h 2) ]
[QLRDY20011023cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec, et de M. Ted Moses, grand chef du Grand Conseil des cris Le mardi 23 octobre 2001 Entente de principe entre le gouvernement du Québec et le Grand Conseil des cris
(Neuf heures quatorze minutes) ]
[ M. Gagné (Michel): Distingués invités, bonjour.
J’aimerais
tout d’abord vous souhaiter la bienvenue. Il nous fait grand plaisir d’accueillir ce matin à l’Assemblée nationale les dirigeants de la nation crie pour la signature d’une entente historique entre le Québec et
les Cris.
J’aimerais d’abord vous faire remarquer que cette cérémonie est en traduction simultanée. Donc, vous avez sur vos sièges des petits écouteurs où vous trouverez au canal 1 la version anglaise des propos de ce matin et au canal 2 la version française. J’invite tous les participants à bien vouloir fermer les téléphones cellulaires.
Le geste que poseront aujourd’hui les représentants du gouvernement
du Québec et du Grand Conseil des Cris marque une nouvelle relation dans les relations entre les deux nations et est résolument tourné vers l’avenir. Les représentants aujourd’hui à la table principale sont le premier ministre du Québec, M. Bernard Landry, le grand chef du Conseil des Cris du Québec, M. Ted Moses, le ministre des Transports, ministre délégué aux Affaires autochtones, ministre responsable de la Faune et des Parcs et ministre responsable du Nord-du-Québec, M. Guy Chevrette; le ministre des Ressources naturelles, M. Jacques Brassard; M. Edward Gilpin, chef du conseil de bande d’Eastmain et M. Paul Gull, chef du conseil de bande de Waswanipi.
Avant de débuter les allocutions, je vous invite à vous recueillir brièvement pour une prière qui nous est offerte par M. Sam Bosum, chef de la communauté crie de Oujé-Bougoumou. M. Bosum.
M. Bosum (Sam): Thank you. It is a great honor to be here
this morning and to be asked to do the opening prayer. We notoriously do it at our meetings anywhere else.
(S’exprime dans sa langue)
M. Gagné (Michel): Merci, M. Bosum. J’invite maintenant le grand
chef des Cris, M. Ted Moses, à vous adresser la parole. M. Moses.
M. Moses (Ted): Merci. Bonjour, mesdames et
messieurs. Good morning, ladies and gentlemen. (S’exprime dans sa langue). Merci, M. le premier ministre and distinguished ministers, chiefs and guests. (S’exprime dans sa langue).
This is an historic day for the Cree nation and the Québec
nation. Today, Premier Landry and I will sign an Agreement in principle with respect to a new relationship between the Crees and Québec. This Agreement will lead to a final agreement by the
end of
this year. This historic agreement will recognize the interest that both the Cree people and Québec have in the future administration and development of Québec. By this Agreement we stand with Québec because we share the intention to develop this land in the way which is respectful of its vital importance to our survival and mindful that both Crees and Quebeckers must have the means to create a common future of prosperity.
This Agreement marks a turning point where the Crees and Québec have
decided to put the weight of behind them and accept the challenge of resolving our differences in a peaceful manner so that we may work together for a stronger future for both of us.
It is not coincidental that this decision is arrived
at after the horrific and tragic events of September 11th. That day,
people throughout North America realized how small the word is and how
important it is to resolve issues rather than to let them divide us. I hope that everyone will see the major unifying aspects of this
announcement. To do otherwise would be to repeat the mistakes of the
past and keep both Québec and the Cree backed up into the corners that our fighting has placed us in.
With this agreement in principle, we are opening the door and
I see cooperation and mutual respect between us. I see a Québec which
looks on the Cree people as an important part of the political,
economic, cultural and linguistic character of this land and as partners in development. I see the Cree people working with the Québécois on joint projects and on a shared vision of our common interest in the land.
I met with Premier Landry a few months ago. We had a very
open and frank discussion about our vision for a Nations. We sign this agreement in principle today because of the vision we now share. This is the vision of a new nation to nation relationship based on the common desire of insuring a flourishing Québec and a flourishing Cree Nation. I believe Mr. Landry’s leadership must be recognized and commended. Again, Québec and the Cree will be showing the rest of the world a new way to approach relations between aboriginal and non-aboriginal peoples.
The James Bay and Northern Québec Agreement that was signed
in 1975 was a monumental agreement. That was the result of long and difficult negotiations. It set a foundation for future relations. The James Bay and Northern Québec Agreement contains principles for protecting and enhancing the Cree way of life and leaves room for Cree aspirations. However, the same agreement is difficult to implement and leads the confrontation and frustration for all parties. This confrontation and frustration was particularly acute in the areas of community and economic development. We found ourselves arguing over wordings, jurisdictions, details and processes for years without achieving the concrete results that the James Bay and Northern Québec Agreement envisioned. The Crees were essentially left out of community and economic development. As an example, we face a very major housing crisis where, in some communities, we have three families sharing a three bedroom shack, Cree unemployment is rampant, health conditions are terrible.
In this new agreement, a new relationship will be established
between Quebec and the Crees, this relationship will be built on mutual trust and respect. Some may not believe this new relationship will be possible; we will prove them wrong. As the Grand Chief of the Crees, I am fully committed to this new relationship, and I know that the Cree leadership stands united behind me on this fundamental issue. Premier Landry is also fully committed to this new relationship and will do what is necessary to insure its success. We are confident that the final agreement will fully reflect our understandings and mutual commitments.
This new agreement will provide the Cree with
tools for facilitating the economic and community development that will allow us to decide our community priorities and facilitate our participation in the economy. Under this new agreement, we will assume responsibility for our economic and community development, we will be accountable to our own people and to future generations, instead of Quebec being accountable to us for how it manages our affairs. This new agreement will build on the James Bay Northern Quebec Agreement.
Under the new agreement, we will assume for the next 50 years the
undertakings of Quebec relating to the community and economic development of the Cree as set out under certain provisions of the James Bay Northern Quebec Agreement. We see this as a part of true self-government. We will receive from Quebec payments in order for us to properly carry out these responsibilities in accordance with priorities and means which we, the Cree, deem appropriate for our own development. These payments will revolve in accordance with the evolution of the hydro-electric, forestry and mining sectors in our traditional territory. Our destinies and those of Quebec will be tight together. This is an historic turning point and a truly profound revolutionary vision for the Cree and aboriginal people generally as well as for Quebec and the rest of the world. This is a vision both Mr. Landry and myself share. We both believe this to be the true path for the future of both Quebec and the Cree. We will both walk down this path towards the final agreement, next december.
We have also agreed to settle a dispute over forestry. The
Quebec forestry regime will apply in Northern Quebec, but major adaptations will be made to this regime to insure the protection of the Cree traditional way of life. An important feature of this settlement is the joint Cree-Quebec Forestry Board that will review forestry
regulations and forestry plans for our territory and which will provide appropriate recommendations in order to properly conciliate forestry activities with the Cree traditional uses of the territory and the protection of the natural environment. We will also be closely involved in all aspects of forestry planning and management through meaningful and results-oriented consultation processes at the community level.
We have demonstrated our understanding of the needs of Québec
by allowing forestry operations in our traditional territories, and the Québec government has formally undertaken to respect and protect our Cree way of life from incompatible forestry operations. As an example, the Cree trapline system will be used as the basic unit for forestry management and protected areas will be increased. The total allowable cut will be determined by grouping Cree traplines. Cree tallymen will also finally have input on how and where forestry operations are conducted in their traplines. Forestry operations will continue in the territory but in a manner which will promote the viability and sustainability of the Cree way of life. We have understood that the Québec government and MNR are committed to this.
In regard to forestry, I wish to underline here
the
courageous decision of Justice Jean-Jacques Croteau of the Québec Superior Court who showed both to ourselves and to Québec that a new relationship had to be devised in the area of forestry. His courage has made this agreement possible. We will always remember him as a just and brave man who, like Justice Malouf, paved the way to a better world for all of us.
In other development activities, such as mining and hydro electricity, new projects will continue to be subject to the environmental and social impact regime set out in the JBNQA. The Crees intend to continue to protect their environment through these processes and standards. Development projects which meet the standards set out in the JBNQA will normally be subject to agreements with the Cree relating to remedial works, employment
and contracts.
The Cree nation and Québec, through the final agreement, will
also agree to withdraw or settle the litigation which divide us. We are both committed to resolving our differences through results oriented non-confrontational processes and discussions. Both parties will put the
past behind them. Both parties will be looking to the future. Nous faisons la paix des braves.
Some issues require further discussion between the parties, particularly in the areas of health and social services, policing and justice. I have agreed with the Premier to suspend the litigation in these areas in order to resolve these issues through new permanent discussions and alternative dispute resolution mechanisms we will be setting up jointly with Québec. We both intend to work together in the future.
We are together settling arguments of the past,
and we are looking to the future in the same manner. This is demonstrated by the Cree leadership’s consent to the concept of an Eastmain-Rupert Project. This proposed project will of course be subject to full environmental and social impact review and will include Cree participation from conception. The environmental committees set out in the JBNQA will be called upon to review and evaluate fully this project. The project remains subject to all required governmental approvals. Our population will also be fully consulted on the design and impacts of the project, and Hydro-Québec will be required to carry out the appropriate remedial works to minimize the impacts of the project.
We will also sign an agreement with Hydro-Québec to employ
Crees and to encourage permanent employment opportunities within Hydro-Québec. We will also renew an Agreement with Hydro-Québec concerning the mercury contamination resulting from the past projects. Finally, we will sit down with Hydro-Québec to resolve all outstanding issues flowing from past agreements signed with this Crown corporation.
The Grand Council of the Crees has met and approved the agreement in principle. We view this agreement and the final agreement to be signed
by the end of December as important steps forward that will allow us to begin to develop our communities and to become players in the development of Québec.
Most important for us will be the positive impact
that this agreement will have in improving the prospects for our youth and children in the future. To be strong, the Crees must continue to occupy and be involved in the whole of the James Bay territory through the pursuit of both traditional and non-traditional activities. We must continue to work together as the Cree nation and to build the institutions, we need to further our political, economic and social interests. We must and will build this future with the people of Québec.
This was what was intended in 1975 in the James
Baie and Northern Quebec Agreement. With this new Agreement, we have found a way to implement the obligations of Québec in respect to Cree Community development and participation in regional development over the next 50 years. It will give form and life to the Cree rights in the Treaty. This new Agreement is with Québec. Our new relationship is with the Québec Government and Québec. (S’exprime dans sa langue). Thank you. Merci.
M. Gagné (Michel): Merci, Grand Chef Moses. J’invite maintenant le
ministre des Transports, M. Guy Chevrette, à vous adresser quelques mots. M. Chevrette.
M. Chevrette: M. le premier ministre, M. le Grand Chef, Mme
et MM. les chefs des communautés cries de la Baie-James, M. le ministre Jacques Brassard, M. le député d’Ungava, collègues de l’Assemblée nationale, Jamésiens, mesdames et messieurs, je tiens d’abord à souhaiter la bienvenue en ces lieux à tous les leaders cris ici présents, aux représentants de la Jamésie ainsi qu’à
l’ensemble des invités. Comme le soulignait le Grand Chef Moses, cette importante entente concerne tout d’abord la mise en valeur des ressources minières, forestières et hydroélectriques sur le territoire conventionné de la Baie-James. Elle concerne aussi le développement économique et communautaire des Cris ainsi que le règlement des litiges entre le Québec et les Cris.
La signature de cette entente de principe constitue donc l’aboutissement de plusieurs années de discussions où nous avons tenté de passer, malgré des hauts et des bas, d’une approche judiciaire et de confrontation à une approche de négociation, je dirais même de concertation. Aujourd’hui, je crois pouvoir dire que nous y sommes arrivés, nous y sommes parvenus. Nous sortons enfin de cette période un peu triste où nos relations étaient constamment assombries par les poursuites. Résultat, il s’est déployé au cours des dernières années une énergie humaine considérable et il s’est dépensé des millions de dollars pour se battre en cour dans des causes qui, finalement, font rarement de gagnants même si, théoriquement, des milliards de dollars sont en jeu. Cette situation n’était pas sans créer un climat d’incertitude chez les Jamésiens, plus particulièrement dans l’industrie forestière. Pendant ce temps, des besoins importants des populations cries demeuraient sans réponse, la crise du logement dans les communautés en est un bon exemple.
L’entente que nous signons aujourd’hui, en plus de créer un
contexte nettement plus favorable à la mise en valeur des ressources naturelles dans la région du Nord-du-Québec — ce dont mon collègue Jacques Brassard vous entretiendra plus en
détail — établit une nouvelle approche pour la mise en application de la Convention de la Baie James et du Nord québécois pour les 50 prochaines années.
Par cette entente de principe et par l’entente
finale qui en découlera dans quelques mois, les obligations du Québec contenues à la Convention de la Baie James et du Nord québécois et à d’autres ententes et relatives au développement économique et communautaire des cris seront prises en charge et financées par les Cris par le biais du cadre financier global prévu dans l’entente.
Ainsi, à compter du 1er avril 2002, les engagements du Québec à
l’égard du développement économique et communautaire des Cris prévus à
la Convention seront entièrement assumés par les Cris. De plus, les Cris laisseront tomber l’ensemble des éléments de poursuite relatifs à l’application par le Québec de la Convention, notamment les causes Coon Come I et II, Mario Lord et Abel Bosum, à l’exception des allégués concernant l’aménagement du territoire, la santé, la justice et les services policiers dont certains concernent également le gouvernement fédéral et qui seront suspendus pendant trois ans afin de permettre la négociation d’un règlement entre les parties. Les Cris s’engagent également à ne pas intenter contre le Québec d’autres recours relatifs à l’application passée de la Convention.
En contrepartie, le Québec versera aux Cris une contribution
de 23000000 $ en 2002-2003 et de 46000000 $ en 2003-2004. À compter de 2004-2005, cette contribution atteindra 70000000 $ et sera par la suite indexée jusqu’en 2052 selon une formule qui reflète l’activité sur le territoire visée à l’entente dans les secteurs de l’hydroélectricité, de la foresterie et des mines. Une Société crie de développement sera également créée et
agira à titre de véhicule pour l’investissement d’une partie de ces fonds dans des activités de développement économique. Le Québec maintiendra également l’accès pour les Cris aux programmes réguliers selon les dispositions de la Convention de la Baie James, notamment en matière de santé, d’éducation, et à l’égard des autres services de base offerts à l’ensemble de la population québécoise.
Dans l’exercice de mes fonctions de ministre délégué aux
Affaires autochtones, j’ai acquis la conviction que la recherche de l’équilibre et de l’équité entre les autochtones et les non-autochtones est centrale dans l’établissement des relations harmonieuses et durables avec nos communautés. Dans un esprit d’équité entre les populations d’un même territoire, j’entends favoriser, à travers un mécanisme que présentera tantôt le premier ministre, l’établissement de partenariat mutuellement bénéfique et significatifs entre les populations du Nord-du-Québec.
La nouvelle approche découlant de cette entente, donc, est
axée sur le développement et sur l’atteinte d’une plus
grande autonomie de la nation crie dans le respect de sa culture et de son mode de vie. Les Cris auront dorénavant les moyens de créer les emplois dont ils ont dramatiquement besoin pour assurer un avenir meilleur à leurs jeunes et de participer au développement de la région
du Nord-du-Québec notamment par l’établissement de partenariats avec les Jamésiens. Entre parenthèses, 60 % de la population crie a 25 ans et moins.
The new approach arising from this agreement is based on the development and achievement of a greater autonomy for the Cree Nation in respect for their culture and lifestyle. The Cree will henceforth have the means of creatings the jobs they so much need in order to ensure a better future for their young people and to participate in the development of the region of Nord-du-Québec, especially through the creation of partnerships with people in the James Bay region.
J’ai toujours favorisé la négociation à la
confrontation et
cru que nous partagions suffisamment d’objectifs communs pour trouver un modus vivendi qui nous permette de collaborer à l’amélioration de la qualité de vie dans les communautés et à la construction d’un avenir meilleur pour nos jeunes, notamment les milliers de jeunes Cris qui entreront sur le marché du travail au cours des prochaines années. Comme homme politique, c’est cette conviction qui m’a incité à poursuivre dans les moments où une entente paraissait peu probable et qui aujourd’hui me donne le sentiment du travail accompli.
En terminant, je voudrais réitérer à quel point je
suis
heureux qu’enfin nous ayons réussi à nous donner une nouvelle approche basée sur la concertation pour assurer la mise en oeuvre de la Convention de la Baie James. Je suis d’autant plus heureux que cette approche favorisera l’émergence d’une expertise crie en matière de développement économique, la création d’emplois de même que des retombées économiques pour les Cris, leurs voisins jamésiens et pour la
population du Québec en général. Je vous remercie.
M. Gagné (Michel): Très bien.
Merci, M. le ministre. J’invite maintenant le
ministre des Ressources naturelles, M. Jacques Brassard, à vous adresser la parole.
M. Brassard: M. le premier ministre, M. le grand
chef Moses, mon cher collègue, Mme et MM. les chefs des communautés cries, mes collègues de l’Assemblée nationale, Mmes et MM. les représentants des communautés québécoises du Nord, la signature de cette entente de principe entre le Québec et la nation crie marque très certainement une étape significative et déterminante dans les relations entre la nation crie et le Québec. Je suis d’autant plus fier d’apposer ma signature à cette entente qu’elle confirme que la mise en valeur des ressources naturelles, dont la forêt et l’hydroélectricité, s’appuiera d’abord sur un partenariat solide entre nos deux communautés. Les grands principes de cette entente viennent
appuyer, d’une part, la volonté de la nation crie de participer activement à son développement économique et, d’autre part, elle exprime clairement la volonté du gouvernement du Québec de mettre en valeur les ressources naturelles du milieu de manière harmonieuse et durable.
Nous le ferons dans la confiance et le respect mutuel, ce qui aura pour effet net de favoriser l’investissement et la création d’emplois liés au développement du territoire visé.
Dans le respect du régime forestier québécois et
dans le but avoué de permettre une participation accrue des communautés cries dans la mise en valeur des ressources du milieu forestier, cette entente prévoit notamment la création d’un Conseil cri—Québec sur la foresterie. Tout en permettant une consultation plus étroite que décrite dans le processus de planification et de gestion des activités d’aménagement forestier, ce Conseil aura le mandat d’assurer le suivi du volet forestier de l’entente. Le président de ce Conseil sera nommé par le gouvernement après consultation avec les autorités cries. Il sera composé d’un nombre égal de représentants de la nation crie et du Québec. De plus, dans chaque communauté crie touchée par l’entente, des groupes de travail conjoints regroupant des représentants des communautés cries et des représentants du ministère des Ressources naturelles seront constitués afin de voir à la mise en place des mesures spécifiques de cette entente liées à la foresterie.
L’entente confirme de plus que les territoires d’intérêt particulier pour les Cris feront l’objet d’une protection supplémentaire. Par exemple, les camps, les sépultures, les sites d’intérêt archéologique et les sites de portage seront cartographiés et soumis à des mesures de protection spécifique. L’ensemble de ces sites pourrait totaliser jusqu’à 1 % de la superficie totale de chaque aire de trappe. Les territoires particulièrement productifs au plan faunique seront identifiés par les maîtres de trappe cris. Ils pourront couvrir jusqu’à 25 % de la superficie de chaque aire de trappe.
Sur ces territoires, seules les coupes en mosaïque seront
autorisées. Ce type d’intervention permet une plus grande dispersion, des coupes forestières. Il s’agit ici d’une mesure de protection nouvelle. En plus des bandes de protection de 20 mètres conservées le long de tous les cours d’eau permanents, une protection accrue de ces cours d’eau sera effectivement assurée par le biais de l’application des coupes en mosaïque. C’est ainsi que le long des rivières de plus de cinq mètres de largeur, la protection pourra être augmentée jusqu’à 200 mètres sur une portion importante des rives.
Le plan de développement du réseau routier est aussi couvert
par l’entente de principe. Il devra faire l’objet d’une concertation entre les industriels forestiers et les maîtres de trappe dans le but de mieux planifier l’accès au territoire. Au plus tard cinq ans après la signature de l’entente finale, le ministère des Ressources naturelles s’engage à rendre disponible aux Cris 350000 m³de bois sous forme de contrats d’aménagement forestier. L’accès à la ressource forestière constituera un moyen additionnel et significatif pour permettre aux
communautés cries d’assurer leur propre développement économique. Le volet forestier de cette entente s’inscrit donc dans
la volonté mutuelle des Cris et du Québec de renforcer leurs relations économiques, politiques et sociales. Elle apporte des mesures d’adaptation au contexte particulier du territoire visé et s’inscrit en conformité avec le régime forestier québécois. L’entente de principe remet à l’ordre du jour la réalisation du projet hydroélectrique Estmain-Rupert qui s’inscrit d’ailleurs parfaitement dans le cadre de la politique énergétique du gouvernement du Québec tout comme dans ses objectifs de développement économique. Ce projet de 1 280 MW pouvant générer jusqu’à 12 TWh confirme la volonté inébranlable du Québec de favoriser la filière de l’hydroélectricité afin de satisfaire à la croissance de la demande des marchés québécois.
Nous souhaitons que les études d’avant-projets technique et environnemental débutent le plus rapidement possible après la signature de l’entente définitive. Le projet, bien sûr, sera assujetti à la procédure d’évaluation et d’examen prévue à la section XXII de la Convention de la Baie James et du Nord
québécois. Le secteur minier est aussi couvert par l’entente de principe comme le signalait mon collègue Guy Chevrette.
Je crois effectivement que nous assistons ce matin à un
événement qui fait honneur aux deux communautés. La signature de cette entente entre les Cris et le Québec ouvre de nouveaux horizons, et je suis très fier de contribuer à sa mise en oeuvre. Merci.
M. Gagné (Michel): Merci, M. le ministre. Je cède
maintenant
la parole au premier ministre, M. Bernard Landry.]
[ M. Landry:] M. le grand chef Ted Moses, M. le chef de Eastmain, Edward Gilpin, M. le chef de Waswanipi, Paul Gull, chers collègues du Conseil des ministres, Madame et Messieurs les chefs des communautés cries de la Baie-James, M. le député d’Ungava, chers collègues de l’Assemblée nationale, mesdames et messieurs, c’est pour moi un grand plaisir de participer aujourd’hui à cette cérémonie de signature d’une entente de principe historique entre le gouvernement du Québec et le Grand Conseil des Cris du Québec. Au moment du discours inaugural, on s’en souviendra, à l’ouverture de la Trente-sixième Législature de notre Assemblée nationale, le 22 mars dernier, j’avais indiqué que j’entendais continuer à travailler à l’établissement d’un dialogue constructif avec les nations autochtones du Québec.
La négociation de solutions mutuellement acceptables relativement à l’exercice d’une plus grande autonomie par ces nations s’inscrit fort bien dans la foulée de la commémoration du tricentenaire de la Grande Paix de Montréal de 1701 que nous avons célébrée cet été.
Je suis donc très heureux de concrétiser ces objectifs dans la conclusion de cette entente qui constituera, j’en suis sûr, les bases d’une grande paix entre le Québec et les Cris.
Les dirigeants des nations ont, dans le cadre de l’exercice de leur mandat, quelques occasions de construire des jalons dont la portée est historique. La cérémonie de signature d’aujourd’hui est certainement l’un de ces moments privilégiés, un des moments de l’histoire où deux nations décident sur la base d’une volonté commune de tourner la page afin de bâtir un avenir prometteur et ouvert sur des horizons nouveaux. Le Québec forme, nous le savons tous, une nation. Les Cris aussi forment une nation, un fait qui a été reconnu il y a plusieurs années, en vérité en 1985, sous le gouvernement de René Lévesque, dont la clairvoyance en cette occasion s’est affirmée, comme à l’habitude. L’une comme l’autre, nos nations apportent une façon originale de vivre l’aventure humaine et méritent à ce titre de bénéficier de conditions favorisant leur épanouissement et leur développement respectif.
L’entente d’aujourd’hui fournira aux Cris des moyens concrets d’assurer le développement de leur communauté. Soyons clairs: chacune des communautés ont fait le choix de parier sur la confiance et le respect plutôt que sur l’affrontement et la méfiance. Certains continueront de porter leur attention sur ce qui nous divise plutôt que sur ce qui nous unit. Nous qui sommes partie prenante à la signature de cette entente historique aurons la responsabilité dans les mois et les années à venir de garder les yeux fixés sur l’avenir et la nécessité de réconciliation durable entre nos deux nations.
L’entente d’aujourd’hui définit des bases assurant que les gains de l’un ne se feront pas au détriment de l’autre; elle favorisera plutôt l’émergence d’un contexte où l’une et l’autre des nations bénéficieront du changement. Ce choix, le grand chef Ted Moses et moi avons décidé de le faire lorsque nous nous sommes rencontrés en juin dernier. Nous avons échangé, à ce moment-là, de manière très franche et très directe. Le chef Moses a utilisé les mêmes mots que moi, et c’était parce qu’il était vraiment franc et direct. Nous avons alors fait le constat que nous avions des différends importants à résoudre et qu’il n’existait qu’une seule voix viable pour y parvenir: le dialogue. Nous avons alors convenu qu’il fallait nous affranchir de l’approche juridique qui entachait nos relations depuis quelques années. Il est devenu clair que nous devions définir ensemble une nouvelle base à partir de laquelle nous pourrions construire une relation de nation à nation, une relation tournée vers l’avenir. Nous avons surtout constaté qu’il y avait encore trop à faire pour le développement des communautés cries, pour le développement du Nord-du-Québec et pour le développement du Québec en général. Nous devions trouver le moyen de nous entendre.
Nous avons alors demandé à nos proches collaborateurs d’explorer s’il nous était possible de tourner la page et de convenir ensemble d’une nouvelle approche qui permettrait à nos communautés respectives d’évoluer dans un environnement plus serein, ouvert sur l’avenir.
Je tiens à souligner ici le remarquable travail de l’équipe de négociation dans la réalisation de ce mandat. Je pense plus particulièrement au travail de M. Abel Bosum, chef négociateur cri, et de toute l’équipe de négociation du gouvernement du Québec; nous pouvons être fiers du travail accompli par ces hommes et par ces femmes. L’entente que M. Bosum a contribué à élaborer amorce une nouvelle relation de nation à nation, un nouveau départ qui permettra d’établir de nouvelles relations politiques, économiques, sociales entre le Québec et les Cris, tout en demeurant fondées sur les engagements contractés durant bientôt 26 ans, lors de la signature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, notre relation se caractérisera davantage par la confiance, la coopération, le partenariat et le respect mutuel. Je demande donc à ces mêmes proches collaborateurs de poursuivre le processus déjà bien entamé pour préciser les principes établis, convenir des modalités plus fines d’application et de rédiger un projet d’entente final d’ici la fin de la présente année, d’ici la fin de 2001. Vous aurez compris que les procédures judiciaires sont de facto dès maintenant suspendues pour nous permettre de nous concentrer sur la préparation de cette entente finale dans le nouvel esprit de collaboration et de confiance mutuelle qui dorénavant nous animera. C’est d’ailleurs dans ce contexte que les Cris consentent à la réalisation du projet hydroélectrique Eastmain et au projet de dérivation de la rivière Rupert. Ces projets, qui sont stratégiques pour assurer l’approvisionnement énergétique du Québec, représentent des investissements de près de 4000000000 $. Ils donneront lieu à l’augmentation de 15 % de la production d’électricité sur le territoire de la Baie-James et permettront la création d’emplois représentant quelque 8000 personnes-année durant les six années et demie que durera la phase de construction. Une fois l’entente finale signée, nous débuterons dans les plus brefs délais les études, notamment environnementales, préalables aux travaux de construction proprement dits.
Je profite de l’occasion pour annoncer la création d’un comité ministériel propre au Nord-du-Québec. Celui-ci sera présidé par le ministre Guy Chevrette, qui sera secondé dans l’exercice de ses fonctions par le député d’Ungava, Michel Létourneau. Le comité sera notamment chargé de favoriser les retombées et l’établissement d’un partenariat durable entre les Cris et les populations non autochtones régionales, en continuité avec la politique de développement du Nord-du-Québec adoptée par le gouvernement au printemps dernier. Avec la signature de cette entente de principe aujourd’hui, les conditions sont réunies comme jamais pour aller encore plus vite et plus loin dans le développement de cette région au fort potentiel, et au bénéfice de toutes les populations qui habitent cette région.
[ In conclusion, I wish to reiterate that the signature of this
historic agreement marks the establishment of a new and open relationship, based on the common values and interests of the Cree and Québec nations. It reinforces the capacity of the Cree to ensure their own development and focusses on a shared willingness to pursue the harmonious development of Northern Québec, in respect for our respective cultural heritages in a context of increasing modernization.]
Nous savons malheureusement que ce matin, sur notre terre, ne souffle pas que le vent de la paix et de l’harmonie. Des événements malheureux dans plusieurs parties du globe assombrissent l’équilibre universel. À leur échelle, les Québécois et les Québécoises et les hommes et les femmes formant la nation crie posent un geste qui va, lui, dans le sens de l’harmonie, de la paix, de la fraternité et du regard vers un futur radieux plutôt que celui tourné vers un passé parfois troublé, hélas. J’espère que l’esprit de cette entente rejaillira sur les Cris, sur le Québec et sur les hommes et les femmes de bonne volonté qui, dans le monde, cherchent l’harmonie plutôt que la confrontation, cherchent le mieux-être de leur population et cherchent à augmenter les possibilités de bonheur humain. Merci.
[ M. Gagné (Michel): Merci, M. le premier ministre.
Nous en
sommes maintenant arrivés à la signature de l’entente. J’inviterais donc les représentants des deux parties à bien vouloir procéder à cette signature, à commencer par le grand chef et le premier ministre.
(Signature de l’entente)
M. Gagné (Michel): Et voilà, c’est fait. J’invite
maintenant
l’attaché de presse du premier ministre, Hubert Bolduc, à diriger une période de questions qui conclura cette cérémonie.
M. Bolduc (Hubert): Bonjour. Je vous demanderais
de vous identifier, identifier le média que vous représentez et également la personne à qui vous adressez la question, s’il vous plaît.
Sophie Langlois.
Mme Langlois (Sophie): Sophie Langlois, de Radio-Canada. J’aurais une question, la même pour M. Landry et M. Moses et une question à M. Brassard sur les forêts.
M. Moses, you said that September 11th events acted as and accelerator to this agreement today. Did the elections of October 1st and the losses of the PQ in two ridings also accelerate the negotiations?]
[ M. Landry:] …vous prenez ça de haut, vraiment, hein.
[ M. Chevrette: Oui, c’est très haut. Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] Le sens de l’histoire, alors, fabuleux!
[ M. Chevrette: Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] Non, vraiment, je pense que la question trouve sa réponse dans la façon dont elle est posée. Nous mettons un point final à 25 ans de discorde, nous créons des conditions nouvelles pour l’avenir.
Il s’agit du destin de jeunes hommes et jeunes femmes en territoire cri qui sont dans des conditions, comme l’a dit le chef, absolument inacceptables. C’est deux peuples qui font leurs devoirs. Alors, ce n’est pas événementiel. D’ailleurs, déjà dans le discours inaugural, il était prévu que nous recherchions ce dialogue. Donc, rien ne s’était passé en septembre ni rien de conjoncturel n’était survenu, c’était une conviction profonde. Et, en plus, le chef Ted Moses et moi-même, avant toujours le 11 septembre et quelque événement conjoncturel, nous nous sommes rencontrés, avons eu un dialogue franc et sincère, et nos collaborateurs et collaboratrices, dont les deux ministres à cette table et les collaborateurs du chef Moses, se sont mis à l’oeuvre, encore une fois, dans une perspective historique et non pas dans une perspective au ras des pâquerettes qui tend à tout ramener, même les choses les plus extraordinaires, à un niveau qui n’est le plus noble.
[ Mme Langlois (Sophie): Question, monsieur… Oui,
M. Moses;
oui, s’il vous plaît.
M. Moses (Ted): Yes, thank you. In response to the question,
I just want to say that we have gone through a period of a quarter of a century in trying to implement the James Bay and Northern Québec Agreement. As I’ve said in my statement, it’s been a very frustrating exercise which has ended in very little results for both sides, and, prior to the events of September 11th, when I came back from the goose hunt this spring, the Prime Minister and I met and we had a frank and open discussion about certain principles and a vision for our people. We agreed that we need to do something, we need to turn a new page to a new approach in how we deal with, how we relate with each other, and those are the principles that have guided us, that have led us to this fine ceremony, yes, this morning. We seek greater autonomy in the things that we do in the territory, in the development of our people, and that’s what drives us to be able to conclude these agreements, the political will to turn a new page and to seek and strive for the future for a better development of our people. Those are, so far as the Crees are concerned, the many principles which have now resulted in the finding of an agreement in principle.
Mme Langlois (Sophie): Oui. Une question pour M. Brassard. Vous savez, un des derniers blocages sur la forêt, c’était que les Cris tenaient à cogérer les forêts publiques avec vous et tenaient à être majoritaires dans ce conseil cri qui est créé avec cette entente aujourd’hui. Dans votre discours, vous dites que ce conseil sera composé d’un nombre égal de représentants de la nation crie et du Québec, alors que, dans les documents techniques et les communiqués émis par le bureau du premier ministre, il est dit que ce conseil sera composé majoritairement de représentants cris. Alors, est-ce qu’ils seront majoritaires ou pas sur ce conseil ici?
M. Brassard: C’est un comité paritaire. C’est un
comité paritaire, et le président est nommé par le gouvernement après consultation avec la communauté crie, avec le Grand Conseil des Cris, les autorités cries.
Mme Langlois (Sophie): Merci.
M. Brassard: C’est un comité qui a pour mandat, comme je l’ai
dit, de voir à la mise en oeuvre de la partie de l’entente qui porte sur la foresterie. Cette partie de l’entente sur la foresterie, c’est important, il s’agit d’un ensemble de mesures dont l’objectif est de mieux protéger les activités traditionnelles, essentiellement des activités de trappe. Et je pense qu’il est tout à fait possible de concilier à la fois les activités forestières et les activités traditionnelles, et cet ensemble de mesures qu’on va mettre ensemble en oeuvre vont permettre cette conciliation entre activités traditionnelles et activités forestières.
(Consultation)
M. Brassard: Ah, je pense qu’il y a peut-être une
petite erreur, là, qu’on me signale. Là où les Cris sont majoritaires, c’est dans la Société dédiée au développement économique et communautaire des Cris, là, ils sont majoritaires, mais dans le conseil sur la foresterie, c’est paritaire. C’est ça.
M. Lavoie (Gilbert): Gilbert Lavoie. Peut-être que ma question a déjà été posée, mais il me semble important d’y revenir. My question would be for you, M. Moses: It’s always
difficult to understand what’s the turning point in history. Is it your meeting with Premier Landry or is it… and if it is why was it not possible before? Is it a matter of being able to build a trust that was impossible before with other leaders? What happened?
M. Moses (Ted): I think we were looking at…
before we were looking at more of the present confrontation, the present fight we were in, we were trying to solve something out of court when we were in court on a particular issue. When we met, when Premier Landry and I met, we looked at the bigger picture, we looked at division of our people, division for the future, and the future of our people as opposed to looking at a particular issue, like forestry for example, and we said: O.K., if we’re gonna have a new relationship we gonna have to learn and accept to put the past behind because the past has led us to believe there’s mistakes and and now we want to make certain things work in the territory and we have to take a different approach.
So with that the discussions began and after some time, not
too long ago, a matter of a few weeks, it’s incredible how our negotiations developed. When there is political will on both sides we exchanged messages that we should try and strive for a new deal which gives a better future for the Crees, which includes the Crees and the sharing the revenues generated by development in the territory which allows the Crees to participate in the development of the territory, which allows the Crees to become partners with people from Québec. We are no longer bystanders, we’re watching the benefits of development go south and then we don’t benefit from it. So, we see benefits. We see ourselves as major players in the development of the territory but without having to give up the lights which we have
fought for for so many years.
M. Lavoie (Gilbert): Si vous permettez, au premier ministre
cette fois-ci. Qu’est-ce qui fait que c’était impossible auparavant de faire ce constat? Est-ce que…]
[ M. Landry:] On est dans le non-scientifique là, sûrement. Des fois, c’est une circonstance qui vient consacrer une évolution qui était déjà commencée. La circonstance, ça a été la rencontre que nous avons eue, le chef Moses et moi. Je ne connaissais guère ce dossier. La dernière fois que j’y avais travaillé, c’est quand j’étais l’adjoint de René Lévesque, au ministère des Ressources naturelles. Alors, j’ai dû me refaire une tête et mes collaborateurs m’ont expliqué de quoi il s’agissait, puis j’ai regardé avec un oeil neuf, ils m’ont dit: Le chef Moses est un homme franc, sincère et direct. Alors, on s’est rencontré, et puis le climat de la rencontre, on s’en est aperçu dès les premières minutes, a été inusité par rapport à ce qui se faisait avant: une grande franchise sans susceptibilité et des propos directs. Il m’a dit ce qu’il pensait de nous, je lui ai dit ce que nous pensions de lui, et deux, et à partir de ce constat réaliste, on a dit: Maintenant, nous allons chercher notre intérêt mutuel, l’intérêt de nos nations. Et c’est ce qu’on a fait. Je suis sûr que la reconnaissance, par René Lévesque et notre Assemblée nationale, du statut de ce groupe humain qui s’appelle les Cris comme nation, en 1985, est un élément déterminant de ce que nous pouvons faire aujourd’hui. Ça s’est fait dans l’égalité et dans le respect mutuel et dans la franchise. Pour le reste, bien, les historiens analyseront. Ça, ça a dû cheminer… Ça cheminait chez les Cris, ça cheminait chez nous. [ M. Lavoie (Gilbert): Martin Ouellet, MTR.
M. Ouellet (Martin): M. Landry, j’aimerais savoir
combien atteindront les redevances à la fin de l’entente, et est-ce que ce n’est pas cher payer?]
[ M. Landry:] Quand on fait des ententes de cette nature, chacun y met du sien. Oubliez pas qu’il y avait l’entente de la Baie-James là, qu’il y avait des poursuites pour des milliards et des milliards de dollars dont on ne connaissait pas l’issue. Alors, nul ne peut dire comment ça aurait fini. Mais ce qu’on peut dire maintenant, c’est que nous nous acquittons de nos obligations de la Convention et on le fait mieux que dans la Convention.
Dans la Convention, il était dit que Québec, au fond, développait les Cris. Là, c’est pas ça. Ce sont les Cris qui assurent leur propre développement à travers une société et Québec contribue en regard des avantages qu’il en retire. Mais enfin, je ne suis pas le meilleur technicien, Guy connaît ça beaucoup mieux que moi.
[ M. Chevrette: Mais même la formule trouvée est
basée sur les
activités sur le territoire. Et les obligations qu’on avait en vertu du chapitre XXVIII de la Convention, il fallait s’en acquitter. C’était toujours dans des
procédures ponctuelles d’un an, on appelait ça nos MOU. Ça donnait lieu à une négociation constante, quasi permanente, alors que là, on a une procédure qui est vraiment valable pour 50 ans, qui assure une plus grande autonomie et puis qui, d’autre part, contribue, en ce qui nous regarde, à assumer nos responsabilités qui sont dévolues en vertu de la Convention de la Baie James, chapitre XXVIII. Donc…
M. Ouellet (Martin): Au niveau du processus, ça va coûter
combien?
M. Chevrette: Bien, au niveau du processus, si
vous
multipliez le nombre d’années, en partant à la première 23, 46 la deuxième, 70 les autres, indexés en plus ou en moins selon l’activité, vous avez le compte. Vous avez le compte, mais je dois vous dire que c’est, selon nous, raisonnable et qu’il n’y a pas une partie qui est supérieure à l’autre dans cela. On y trouve notre compte puis la nation crie retrouve le
sien. Et on pense que c’est correct. On pense que c’est très correct.]
[ M. Landry:] Pour des raisons actuarielles, parler de ce que ça vaudra dans 50 ans…
[ M. Chevrette: Non, on peut pas…]
[ M. Landry:] …et c’est indexé par ailleurs, mais pas indexé bêtement sur des chiffres…
[ M. Chevrette: Non.]
[ M. Landry:] …sur le développement réel du territoire. Si les Cris se développent parfaitement, le Québec se développe parfaitement, tout le monde en profitera plus.
[ M. Chevrette: Exact.]
[ M. Landry:] Si ça stagne, ce sera notre responsabilité et les montants seront figés.
[ M. Landry:] Il y a pas de provisions mais j’ai déjà exprimé ma conviction là-dessus, il n’y aura pas de solution à la question constitutionnelle, et canadienne et québécoise et bilatérale et multilatérale, sans que les nations autochtones ne soient partie à la discussion et à l’entente. Ce n’est pas réaliste de penser que le Canada et le Québec vont régler leur problème sans tenir compte du fait qu’il y a des nations autres que la canadienne et la québécoise. Notre Assemblée nationale, de façon exemplaire, en 1985, a déjà reconnu ce fait. On espérerait que d’autres Parlements aient le même degré de réalisme, d’ouverture et de fraternité.
[M. Bolduc (Hubert): Robert Plouffe et ensuite Marie-Paul
Rouleau, ce sera terminé.
M. Plouffe (Robert): M. le premier ministre, les Cris avaient
des poursuites pour environ 3500000000 $, vous réglez aujourd’hui pour environ aussi 3500000000 $ sur
50 ans. Quel message on envoie aux autres communautés qui vivent en territoire québécois aujourd’hui par cette entente-là?]
[ M. Landry:] D’abord, je pense que si on compte tout, c’était beaucoup plus que ça, hein?
[ M. Chevrette: Bien, ce n’est seulement que les
poursuites, il
y avait des obligations de faire en matière de communauté. On avait des MOU qui signaient, bon an, mal an, à 80… 25, on avait un MOU de 80000000 $ déjà de négocié. Vous comptez exclusivement les poursuites… Je viens de comprendre ce que vous avez fait. À l’échéance de 50 ans, vous aurez versé 3500000000 $, alors que les poursuites sont de 3500000000 $, donc vous achetez toutes les poursuites.
Non, on paie notre quote-part des obligations
prévues au chapitre 28 de la Convention de la Baie James, et si vous voulez connaître le chapitre 28 et l’ensemble, la kyrielle des obligations qu’on avait en matière communautaire, en matière de développement économique, en matière d’obligation de faire dans le logement social, etc., et regarder tout, vous ferez le compte et votre question ne tiendra plus.]
[ M. Landry:] Quant à l’exemple pour les autres communautés, bien, j’espère qu’il sera compris et entendu, il vaut mieux s’entendre dans l’intérêt des populations que de traîner devant les tribunaux pendant des années pour des résultats incertains. Il y a des jeunes hommes et des jeunes femmes à la Baie-James qui ont pas à attendre que des tribunaux éventuellement se prononcent sur des droits à éclaircir qui attendent du logement, qui attendent des conditions d’épanouissement et des emplois, et j’espère que tout le monde va comprendre ça. Il y a des avocats qui disent que le moins bon arrangement vaut le meilleur des procès… Ha, ha, ha! mettons qu’on atténue un peu. Vaut mieux s’entendre.
[ M. Chevrette: Mais quand 60 % de la population
crie a 25 ans et moins, et que 35 % ont 15 ans et moins puis qu’on connaît les obligations qu’on a en vertu du chapitre 28, on se doit d’agir, et il y a aucune relation, je le répète, entre le montant global qui peut être versé dans une entente de 50 ans et les poursuites. Les poursuites ne sont qu’une partie de l’entente, l’irradiation des poursuites, puis il y a un forfaitaire annuel indexé pour remplir nos obligations que nous avons contracté il y a 26 ans, et les obligations du chapitre 28 de la Convention de la Baie James. C’est de même qu’il faut interpréter l’entente, pas d’une autre manière.]
[ (Fin à 10 h 28)]
[QLDRY20011206cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Dévoilement de la Politique nationale de la ruralité
Le jeudi 6 décembre 2001 (Quatorze heures cinq minutes)]
[ M. Gagné (Michel): Votre attention, s’il vous
plaît! Puis-je
avoir votre attention, s’il vous plaît? Alors, je vous inviterais à vous lever debout pour l’arrivée des dignitaires.
Veuillez vous asseoir.
M. le premier ministre, M. le ministre d’état aux Régions,
ministre de l’Industrie et du Commerce, M. Jacques Proulx, président de
Solidarité rurale, M. Michel Belzil, président de la Fédération québécoise des municipalités, M. Émilien Nadeau, président de l’Association des régions du Québec, M. Yvon Leclerc, président de l’Association des centres locaux de développement, Mmes et MM. les ministres et députés, distingués invités, membres de la presse, mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue à l’hôtel du Parlement pour cette cérémonie marquant le dévoilement de la politique nationale de la ruralité. La préparation de cette politique qui était sous la responsabilité du ministère des Régions est le fruit du travail de plusieurs partenaires et d’un groupe de députés de l’Assemblée nationale.
Sans plus tarder, j’invite le ministre responsable de son élaboration, M. Gilles Baril, à vous présenter les grandes lignes de cette politique depuis ce lutrin. M. le ministre.
M. Baril (Berthier): Merci. Alors, M. le premier
ministre, collègues de l’Assemblée nationale, du Conseil des ministres, M. le président de la Fédération des municipalités, M. Michel Belzil, M. le président de Solidarité rurale, M. Jacques Proulx, mesdames et messieurs, aujourd’hui, le gouvernement du Québec et ses
partenaires du monde rural s’engagent formellement pour l’avenir. Il y a longtemps que l’on travaille ensemble, mais c’est la
première fois dans l’histoire du Québec que l’on se donne une politique nationale de la ruralité qui reconnaît l’importance du dynamisme rural pour l’avenir de tout le Québec. Pour moi qui suis un fils de Saint-Eugène-de-Guigues au Témiscamingue, vous comprendrez que c’est une grande fierté de participer à ce moment historique.
Il y a, dans les communautés rurales du Québec, des défis
importants, et on se donne aujourd’hui les outils pour y faire face, et ce, dans le respect des différences.
Il y a des défis mais il y a aussi des réussites extraordinaires un peu partout sur le territoire du Québec. La politique que nous dévoilons aujourd’hui mise sur le capital humain des villages ruraux du Québec. De nombreuses communautés rurales ont fait la preuve qu’il y a de l’espoir que l’on peut faire les choses différemment, que l’on peut réussir en empruntant de nouvelles voies. Bref, que l’on peut vivre heureux en région, et qu’il y a bien des façons d’être branchés sur la modernité.
Cette politique comprend un engagement formel de l’État et de
ses partenaires en faveur du monde rural, une adaptation des politiques gouvernementale aux milieux ruraux comme jamais, et la signature d’un pacte entre le gouvernement et chacune des MRC visées. Ce pacte fera toute la place à l’imagination, à l’innovation et
au respect des aspirations de chaque communauté.
Avec la politique nationale de la ruralité, les
communautés
auront les outils pour agir. Tous n’agiront pas au même rythme, n’auront pas les mêmes objectifs ni les mêmes résultats, mais tous auront la même chance de se prendre en main localement et pourront compter sur le gouvernement et ses partenaires pour les soutenir.
Alors, cette politique sera tout le contraire du mur-à-mur et elle misera justement sur les particularités locales et les différences.
Le Québec rural est bien vivant. À preuve, pendant que nous annonçons cette politique dans les milieux ruraux, il
-y a 77000 personnes qui travaillent sur des fermes,
400000 autres qui oeuvrent en amont, dans l’industrie bio-alimentaire, 300000 personnes qui transforment avec succès nos richesses naturelles, des milliers d’autres qui travaillent dans les domaines de la transformation, de la nouvelle économie et des services. Enfin, c’est par dizaines de milliers que nos concitoyens du monde rural s’activent au développement du potentiel touristique de leur milieu.
À elle seule, la valeur attribuable à la forêt, aux mines et
à l’énergie atteint près de 23000000000 $, soit 12 % de l’activité économique du Québec et 31 % de nos exportations. De manière plus générale, le monde rural, c’est 22 % de la population québécoise vivant sur 80 % de notre territoire, plus de 1000 villages.
Alors, depuis 1997, avec l’adoption de la politique de
soutien au développement local et régional, le gouvernement du Québec a multiplié les aides techniques et financières pour les régions. Il y avait
de grands défis: l’exode des jeunes; le manque de main-d’oeuvre spécialisée dans des régions qui affichaient pourtant un haut taux de chômage; des services sans cesse effrités par ces départs; le vieillissement de
-la population et l’absence de diversification économique. Il fallait donc offrir un cadre de travail souple, harmonieux, évitant à tout prix le mur-à-mur et les solutions temporaires. C’est d’ailleurs à ce moment que nous avons mis en place les CLD, les CLE et même le ministère des Régions.
Depuis 1997, nous sommes allés au plus urgent. Plus de 100 agents ruraux sont maintenant actifs dans les différents CLD, avec une vision moderne de la ruralité. Les CLD disposent d’une enveloppe dédiée de 11200000 $ pour appuyer les initiatives de développement économique des milieux ruraux et
600000 sont consacrés annuellement à la mise en valeur des produits du terroir. Par ailleurs, cette année, notre gouvernement a alloué 800000000 $ dans la mise en oeuvre d’une stratégie de développement économique des régions-ressources, dont 200000000 $ concernent plus directement les milieux ruraux de ces régions. Nous devions maintenant faire un pas de plus. Il devenait incontournable non seulement de se munir de nouveaux outils, mais également de concilier l’ensemble de nos efforts à travers une vision globale du développement rural partagé par tous. Voilà le coeur de la Politique nationale de la ruralité, une politique basée sur quatre grands principes: une approche souple, une
approche qui favorise les initiatives locales, une approche qui stimule et soutient l’innovation et une nouvelle façon de faire qui mise sur le partenariat avec le milieu.
Dans quelques minutes, nous allons procéder à la
signature — le premier ministre, moi-même ainsi que nos principaux partenaires — de la Déclaration en faveur du monde rural. Il s’agit d’un moment fort confirmant notre engagement à travailler solidairement au renouveau, à la prospérité et à la pérennité des communautés rurales. Ce ne sera pas seulement un geste symbolique. Ce que nous annonçons aujourd’hui, c’est notamment l’établissement d’un pacte rural qui sera signé entre le gouvernement du Québec et chacune des MRC visées. 91 MRC seront touchées par le pacte, ce qui nous permettra d’atteindre toutes les communautés rurales au Québec.
Avec ce pacte, nous disons aux communautés rurales: Fixez vos objectifs, définissez vos priorités, le gouvernement et ses partenaires seront là pour vous épauler. C’est du jamais vu. Avec ce pacte et d’autres mesures dont vous parlera le premier ministre, on atteint un degré d’adaptation aux réalités locales comme jamais auparavant. Le pacte est un dispositif qui permet à l’État et à chacune des collectivités de joindre leurs efforts de manière globale, cohérente et à long terme en fonction des particularités propres à chaque territoire rural. Les députés des comtés ruraux seront également partie prenante de la démarche, puisqu’ils seront eux aussi signataires du pacte.
Nous avons voulu un cadre de travail souple. À cette fin, le
pacte que nous signerons avec chaque MRC s’appuie sur trois orientations de la Politique nationale de la ruralité: stimuler et soutenir le développement durable ainsi que la prospérité des collectivités rurales, assurer la qualité de vie de ces communautés et renforcer leur pouvoir d’attraction, appuyer l’engagement des citoyens au développement de leur collectivité. En bref, par ces pactes, le gouvernement du Québec confie aux MRC le mandat de promouvoir le développement de leur territoire rural. J’annonce d’ailleurs aujourd’hui une enveloppe budgétaire de 90000000 $ sur cinq ans pour soutenir les MRC dans leur action en faveur de leur innovation.
Ce montant s’ajoute aux 200000000 $ dédiés
exclusivement au
monde rural dans la stratégie de développement économique des régions-
ressources. Vous le comprenez, c’est une véritable corvée à laquelle on convie le monde rural; la corvée, ce symbole québécois de l’entraide, de la fraternité qui permet à une communauté de travailler solidairement à la préparation de l’avenir.
Je vous ferai grâce des modalités de gestion du pacte, sinon
pour vous dire que les MRC ont toute la latitude pour faire émerger des projets qui seront à leur image et qui correspondront à leurs besoins. Il n’y aura pas de censure à l’imagination, à l’audace des communautés.
Les domaines d’intervention couverts par les pactes ruraux
pourront être très variés, de manière à les adapter aux spécificités des territoires ruraux visés. Certains champs d’intervention sont cependant particulièrement importants pour la pérennité des collectivités rurales, notamment le maintien et le retour des jeunes et des familles, l’amélioration de l’offre et de la disponibilité des services, la mise en réseau des promoteurs locaux qui contribuent à la démarche de revitalisation, le développement de nouveaux produits et de nouvelles entreprises, la mise en valeur du capital humain et le soutien à l’entrepreneuriat individuel et collectif.
Non seulement signons-nous une première déclaration en faveur
du monde rural, non seulement mettons-nous en place les pactes ruraux, mais nous allons aussi offrir un accompagnement basé sur l’entraide, la collaboration et l’implication de tous. Ainsi, afin de coordonner et de stimuler le développement socioéconomique des communautés, nous allons créer un Secrétariat à l’innovation rurale au sein même du ministère des Régions. Cette équipe travaillera en étroite collaboration avec un nouveau comité dont j’assumerai la présidence. Ce Comité des partenaires de la ruralité sera composé des principaux organismes nationaux qui participent à la mise en oeuvre de cette politique: Solidarité rurale du Québec qui, soit dit en passant, voit la confirmation dans cette politique d’un financement garanti jusqu’en 2005; la Fédération québécoise des municipalités; l’Association des centres locaux de développement du Québec; l’Association des régions du Québec ainsi que quelques chercheurs reconnus pour leur expertise en matière de ruralité.
Je veux aussi dire à l’ensemble des citoyennes et
des
citoyens vivant en milieu rural que cette première Politique nationale de la ruralité, c’est aussi la reconnaissance de la nation québécoise pour leur apport et un hommage à leur travail de bâtisseurs. De plus, dans le cadre de cette politique, deux dispositions qui touchent l’ensemble des ministères et organismes sont mises en place.
Première mesure: la clause modulatoire. Par cette mesure, le
gouvernement compte inciter les ministères et organismes à moduler leurs programmes et services afin d’en assouplir les normes d’application en regard des particularités des milieux ruraux. Ainsi, les ministères seront invités à modifier leurs normes de leurs programmes et services pour tenir compte de la faible densité de la population, du volume réduit de la clientèle et aussi de l’éloignement. Deuxième mesure, l’instauration d’une clause territoriale. Nous allons instaurer une clause territoriale au sein de tout le gouvernement. Par cette clause l’État québécois s’assurera de prendre en compte les spécificités de chacune des régions du Québec ainsi que des caractéristiques des milieux ruraux afin d’évaluer les conséquences de son intervention sur le territoire lors de l’adoption de politiques, de lois et de règlements. Bref, aucune décision ayant une incidence sur les territoires ne sera désormais autorisée sans en avoir évalué l’impact sur le développement régional et sur la vitalité des milieux ruraux. Enfin, nous consacrerons 10000000 $ pour le transport communautaire.
En terminant, je veux souligner le travail de ma
collègue, la secrétaire d’État aux Régions-ressources, Mme Lucie Papineau, qui fait un travail remarquable,
et je tiens à le spécifier aujourd’hui. Je veux remercier, dis-je, spécialement aussi les députés qui m’ont accompagné dans l’élaboration de cette politique. M. Guy Lelièvre, Hélène Robert, Léandre Dion, Jean-François Simard et Jacques Côté, merci pour vos conseils et votre soutien. Je souligne également l’apport de la députée Danielle Doyer,
qui présidait ce comité, de même que l’appui constant de mon adjointe parlementaire, Mme Solange Charest.
Sincèrement, je le dis humblement car il s’agit du
travail de plusieurs personnes et organisations, je suis fier aujourd’hui de donner au milieu rural une politique qui lui permettra d’affirmer son talent, son sens de l’innovation et sa ténacité. Le défi que nous devons relever interpelle d’ailleurs l’ensemble des Québécoises et des Québécois car avec un milieu rural fort le Québec du XXIe siècle sera encore plus prospère et parmi les plus
innovateurs au monde. Plus que jamais j’ai la conviction qu’il faut miser sur la qualité de vie des populations. N’oublions jamais que 1,6 million de Québécois et de Québécoises ont choisi de vivre en milieu rural et ils doivent pouvoir compter sur un cadre de vie dynamique économiquement, culturellement et socialement. Cette politique envoie un signal clair de la volonté du gouvernement et de ses partenaires de nous assurer à tous et à toutes un avenir meilleur. Merci.
M. Gagné (Michel): Merci, M. le ministre. Cette politique,
comme on l’a dit plutôt, est le résultat d’une volonté de collaboration étroite du gouvernement et de plusieurs partenaires. Parmi ces partenaires, la Fédération québécoise des municipalités jouera un rôle très actif. Je cède donc la parole à M. Michel Belzil, président de la Fédération québécoise des municipalités. M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Alors, M. le premier ministre, M. le ministre
d’État aux Régions, M. le président de Solidarité rurale, M. le président de l’Association des régions du Québec, M. le président de l’Association des centres locaux de développement du Québec, Mmes et MM. les députés et ministres de l’Assemblée nationale, Mmes et MM. les préfets — il faut souligner qu’il y a, en cette salle, environ 75 préfets du territoire québécois, alors, c’est intéressant — distingués invités, mesdames et messieurs de la Tribune de la presse, tout d’abord, mes premiers mots s’adressent à M. le premier ministre qui s’était engagé, lors de notre congrès, en septembre passé, à faire en sorte que la politique de la ruralité voit le jour avant les fêtes de cette année et je veux le remercier officiellement pour la détermination et le leadership qu’il a assumés pour faire en sorte qu’on voit le jour aujourd’hui de cette politique attendue. Merci, M. le premier ministre.
Je veux aussi souligner l’implication intensive de notre ministre
des Régions, M. Baril. On ne fera pas la nomenclature de toutes les prouesses qu’il a dû accomplir avec son équipe, mais on sait qu’il a aussi démontré beaucoup, beaucoup de détermination, et — j’aime le souligner — merci de nous avoir rendu cette Politique et également merci d’avoir acquiescé à notre demande de participer activement à cette élaboration.
Et je pense qu’on a été d’un soutien constant, de tout temps. Alors, merci, M. Baril.
Mission accomplie, diront certains, mais je crois
qu’il faut
plutôt parler d’un début que d’un résultat. La Politique et la Déclaration en faveur du monde rural témoignent de l’engagement solennel du gouvernement du Québec et de l’ensemble des forces vives du Québec de tout mettre en oeuvre pour l’essor du monde rural. L’engagement du gouvernement du Québec est majeur et une Politique de cette envergure nous indique la vision et l’attachement du gouvernement du Québec envers les ruraux. Cet engagement à travers la Déclaration en faveur du monde rural témoigne bien sûr de la volonté du gouvernement d’atteindre les objectifs qu’il s’est fixés avec la Politique d’aujourd’hui. Cet engagement, c’est d’abord l’engagement personnel de vous, M. le premier ministre — je l’ai souligné tantôt — bien sûr de notre ministre d’État aux Régions, M. Baril, mais également et particulièrement l’engagement de tous les ministères. Et, à ce niveau, je dirais que les attentes sont très grandes. Alors, ce qui a été mentionné tantôt, clauses régions, évaluation des impacts sur les régions en matière… pour des critères d’éloignement, je pense qu’on attend ça de tous les ministères. Et l’engagement, nous le prenons de cette manière et ça va aussi loin que
j’ose le dire aujourd’hui.
La FQM a été, tout au long de l’élaboration de la
Politique
nationale de la ruralité, un partenaire de tous les instants. Ma signature implique l’engagement du monde municipal à tout mettre en oeuvre pour stimuler la mobilisation de nos concitoyens afin de multiplier les initiatives de développement économique et social sur tout le territoire occupé par les ruraux et surtout de faire en sorte que ces idées, ces initiatives, ces «success story» émergent bien sûr de la base, de nos concitoyens qui sont interpellés aujourd’hui. Cette Politique invite aussi l’engagement de plus de 1,6 million de personnes sur nos territoires, bien sûr nos citoyens. La responsabilité est énorme mais combien porteuse d’avenir. Je suis persuadé que les élus locaux et régionaux ainsi que leurs concitoyens sont en mesure de relever le défi de la ruralité.
M. le premier ministre, M. le ministre des Régions, vous avez
bien saisi l’importance de nous associer plus étroitement et de mettre en place un partenariat solide avec vous afin de travailler à l’avenir du monde rural. Pour une des rares fois dans l’histoire du Québec, le gouvernement a signifié sa confiance aux capacités des milliers d’élus municipaux d’être de vrais leaders de leur communauté et d’assurer ainsi une synergie indispensable avec tous les partenaires du milieu.
M. le premier ministre, plus de 7000 élus municipaux sont
prêts à vous démontrer que vous avez eu raison de leur faire confiance. Je vous assure personnellement que nous ferons de la Politique nationale de la ruralité un très grand succès. Merci beaucoup.
M. Gagné (Michel): Merci, M. Belzil. Depuis sa création, Solidarité
rurale agit de son côté comme
conscience de la société québécoise à l’égard du devenir des communautés rurales du Québec. Cet organisme a joué un rôle très actif lors des consultations entourant la préparation de la Politique nationale de la ruralité. Je cède donc la parole à M. Jacques Proulx, président de cet organisme. M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Alors, M. le premier ministre, M. le ministre,
mesdames, messieurs. Je ne nommerai pas vos titres, vous êtes ici présents, c’est déjà un engagement extraordinaire. Je pense que je n’ai pas besoin de vous dire combien je suis ému aujourd’hui — ça paraît d’ailleurs — parce que c’est l’aboutissement d’un travail de beaucoup de gens au cours des dernières années. Un jour, Gilles Vigneault, le poète chansonnier, a dit que c’était grave d’écrire car on était immédiatement responsable de ce que l’autre lira. Je me dis que cela doit être aussi grave de parler car on est immédiatement responsable de ce que l’autre entendra.
Alors, entendez-moi bien, cette première Politique de la ruralité est un coffre d’outils avec lesquels les hommes et les femmes de bonne volonté que nous sommes pourront se bâtir des villages à la mesure de leurs ambitions. Or, le rêve est l’élément essentiel déclencheur du développement. Renouveler le regard, voilà comment voir les choses autrement. Les imaginer différentes, voilà le passage obligé pour toute personne intéressée par le développement de son village, de sa communauté. Ainsi, initier une politique qui laisse place à l’animation, à la mise en commun des rêves et des aspirations promet énormément.
Aujourd’hui, le monde rural est plus libre car il
a les moyens; oh, pas tous, mais les moyens tout de même de prendre son
destin en main. Il a notamment l’engagement de l’État à l’appuyer. Voilà pourquoi j’ai dit et répété aux députés, au ministre des Régions, au premier ministre que, s’il ne devait y avoir qu’une seule chose dans la politique, il devait y avoir une déclaration ferme du gouvernement à reconnaître la légitimité culturelle et politique de la vie rurale. Or, la Déclaration en faveur du monde rural confirme cet engagement. Au nom des membres de Solidarité rurale du Québec, j’accepte avec enthousiasme de mettre l’épaule à la roue. Mais ni le gouvernement ni ses partenaires ne pourront faire plus, car le village, le monde rural appartiennent à ceux et celles qui l’occupent, l’habitent, l’exploitent, le développent, l’entretiennent, et ils en sont responsables.
Depuis des années, je dis que l’enjeu le plus important, surtout
pour les pays riches, est celui de la propriété collective des territoires afin qu’ils soient au service du bien commun. Cette politique reconnaît et encourage que le mode de vie rural, si intimement lié au territoire, est un bien commun inaliénable pour tout le Québec. Par sa Déclaration, mais également sa politique et les mesures qu’elles contiennent, le gouvernement accepte que chaque pays et arrière-pays du Québec soit un terroir qui déterminera son avenir. Nous venons de reconnaître à la Baie-des-Chaleurs, aux Bois-Francs, au Témiscouata, aux Etchemins, au Suroît, à la Haute-Mauricie, à Lotbinière, à la Matapédia leur droit à la différence et leur responsabilité face à leur avenir.
Quant à Solidarité rurale du Québec, sa
responsabilité sera
de travailler au suivi de la politique, d’être le chien de garde des idéaux et des espoirs qu’elle contient afin de s’assurer que toujours les ruraux, hommes et femmes de vieille cuvée ou de nouveaux arrivages, soient maîtres de leurs rêves et, je le répète pour les durs de la feuille, le développement ce n’est pas qu’une question d’argent. À preuve, à Saint-Camille, Saint-Fabien-de Panet. L’Islet, Lac-Mégantic, Deschambault, Saint-Narcisse, Saint-Cyprien, Saint-Eugène-de-Guigues ou Calixa-Lavallée avaient renoué avec la prospérité bien avant les mesures de cette politique. En fait, ils ont essaimé et l’État relaie leur réussite en offrant à l’ensemble des communautés du terroir un coffre d’outils.
Mes derniers mots seront pour ceux et celles qui,
du gouvernement, des membres de Solidarité rurale du Québec ou de ses employés ont été les artisans acharnés de cette politique. Car nous en avions beaucoup rêvé et certains, certaines y ont travaillé plus que d’autres. Ils ont toute ma reconnaissance et un peu beaucoup du coeur des ruraux. Merci.
M. Gagné (Michel): Merci M. Proulx. J’invite maintenant le premier
ministre, M. Bernard Landry, à vous adresser la parole.]
[ M. Landry:] M. le ministre d’État, M. le président de la Fédération des municipalités, M. le président de Solidarité rurale, l’Association des CLD, mes chers collègues du Conseil des ministres, de l’Assemblée, de la Chambre des communes — j’en ai vu — mesdames, messieurs, chers amis et mesdames, messieurs les préfets en particulier, votre présence nombreuse ici fait que notre réunion de cet après-midi est sans doute une des plus territoriale que le Québec n’ait jamais connue dans son histoire. [ Des voix: Ha, ha, ha! ]
[ M. Landry:] Jacques Proulx, c’est l’émotion qui t’a fait oublier deux villages dans ton énumération, Saint-Jacques-de-Montcalm, où je suis né, et Verchères, où je vis.
[ Des voix: Ha, ha, ha! ]
[ M. Landry:] Et ce périple n’est pas étranger à la complicité qui nous a unie dans l’amour des villages. Souvent, on transpose toujours plus ou moins dans sa vie publique certaines constantes de la vie privée. Ceux et celles qui sont nés dans des villages — et ça doit être encore une portion significative de la population du Québec, même s’il n’y a plus que 22 % qui vivent en ruralité, il y a beaucoup de ruraux urbanisés, bien entendu; c’est un des aspects du problème qui nous réunit aujourd’hui dans cette politique de la ruralité — ceux et celles qui sont nés dans un village en gardent toujours une nostalgie considérable, et pour des raisons profondes. Le village, c’est la convivialité. C’est le contact humain. C’est le contraire de l’anonymat. C’est souvent le contraire du bruit. C’est le contraire du vacarme. Toutes des choses que l’être humain apprécie profondément et qu’il cherche à reconstituer ou à garder. Ou à garder.
Or, par un étrange paradoxe, non seulement des pays développés, parce que les pays sous-développés ont connu le même problème, les villes attirent alors que, en toute logique, dans bien des cas, ça devrait être le contraire, en termes de qualité de vie. Jean Ferrat, dans une de ses chansons, résumait le paradoxe en un vers, en disant: «Comment peut-on imaginer, en voyant un vol d’hirondelles, que l’automne vient d’arriver?» Pourquoi est-ce qu’on converge vers les grands centres? Les vieux sociologues et anthropologues disaient: Les villes sont mangeuses d’hommes, c’est-à-dire que les gens s’en vont vivre en ville et la natalité a tendance à s’effondrer. Donc, les villes ont tendance à faire diminuer la population, avaient tendance. Parce que, à l’époque où on disait: Les villes sont mangeuses d’hommes, les régions compensaient très largement. Les très hauts taux de natalité et de fécondité des régions nous faisaient oublier, en région, ce qui se passait sur ce plan en ville.
On sait bien qu’aujourd’hui une certaine forme de vie contemporaine a fait que des valeurs analogues quant à la famille ou à l’ampleur des familles qui se sont développées dans les régions comme en ville, alors là, les régions peuvent et sont jusqu’à un certain point perdantes de ce mouvement en apparence incompressible. Je dis que c’est vrai pour le monde développé. J’ai étudié, comme vous le savez, le cas mexicain. Il y a 30000000 de personnes qui vivent dans une cuvette de la ville de Mexico, affligée par la pollution, inconfortable à cause de la surpopulation, et ces gens, souvent, ont quitté des endroits fabuleux, des rivages du Pacifique ou du Golfe, pour aller vivre en cet endroit. Donc, l’opération que nous lançons aujourd’hui, elle est pour contrer une force et une tendance très lourde. C’est la raison pour laquelle nous aurons besoin de beaucoup d’énergie, de beaucoup de solidarité. Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est le contraire d’une opération libérale — je ne le dis pas au sens partisan du terme, évidemment, je le dis au sens de la philosophie économique. C’est une opération qui s’oppose aux libres tendances du marché parce que c’est mieux comme ça, parce que c’est mieux pour les hommes et les femmes de ne pas laisser ces forces aveugles continuer à vider les régions ou à diminuer leur importance. C’est, en d’autres termes, de l’interventionnisme. Nous vivons dans une économie de marché. Cette économie de marché nous rend de grands services mais cette économie de marché, avec toutes ses vertus, n’a jamais été capable de répartir convenablement la richesse entre les personnes ni entre les régions. Alors, nous déclenchons une opération basée sur une dose considérable de courage. Sauf que cette technologie et cette modernité qui, dans un premier temps, a pu sembler nuire aux régions et être défavorable aux régions, elle peut devenir aujourd’hui un soutien puissant de la renaissance régionale. Vous le savez, vous en vivez vous-même les expériences. Dans des rangs merveilleux et éloignés, même du village, dans de beaux écrins de collines se trouve un ménage qui gagne sa vie à l’échelle planétaire en exploitant un commerce par Internet qui fait qu’ils ont des clients à Paris ou à Moscou ou ailleurs. Dans le même rang, d’autres jeunes couples font leur travail pour une multinationale installée à Montréal sans jamais aller à Montréal. Voilà le créneau technique et technologique qui va aider puissamment à faire vivre les régions et à les faire revivre. Si on veut aller à l’opposé, dans le plus traditionnel, une force puissante qui va aider les régions, c’est cet engouement des urbains et de tout le monde pour les produits du terroir, les produits raffinés, les produits sophistiqués. Je ne suis pas un fanatique de José Bové, je pense que Jacques est un de ses amis…
[ Des voix: Ha, ha, ha! ]
[ M. Landry:] Je ne veux pas faire une charge contre les McDonald’s mais je sais très bien qu’un fromage Pied-De-Vent des Îles-de-la-Madeleine, ça a quand même un attrait formidable qui devrait gagner sur bien d’autres choses, un jour ou l’autre. Donc, il y a des forces à l’oeuvre dans un sens, mais il y a de puissantes forces à l’oeuvre dans l’autre, il faut appuyer les forces dans le sens qui sont le plus favorables à la vie intégrale sur le territoire du Québec. Tout cela — Jacques l’avait en tête quand il nous a fait son exposé si émouvant — a commencé largement quand, dans quelques conversations que nous avons eues, lui et moi il y a un certain nombre d’années, nous nous sommes rendu compte que plusieurs villages avaient des taux de chômage zéro, quelle que soit la région, dans des régions assez éloignées, ou à Verchères ou à Calixa-Lavallée, des villages étaient prospères. Et nous avons lancé l’opération Villages prospères, c’était dans le budget de 1996-1997, c’est Jacques Proulx qui l’a lui-même assumé. Et je pense que le corpus intellectuel de la politique de la ruralité est né de ce premier travail, mais il fut continué vigoureusement par le ministre d’État aux Régions — qui est lui-même un homme de région et qui dispose, c’est bien connu, d’une réserve d’énergie considérable. Lui vient-elle de son passé régional? Je n’en sais rien, mais ça a dû commencer fort pour être encore comme ça aujourd’hui — et ses collaborateurs et les députés qui ont travaillé avec lui et les partenaires.
Ce que nous présentons aujourd’hui, c’est un pacte, c’est un pacte entre un gouvernement national et sa population rurale, c’est un pacte entre un gouvernement national et Solidarité rurale du Québec, Fédération des municipalités du Québec, Association des CLD, CRD. Ce n’est donc pas une opération gouvernementale, Dieu merci, c’est une opération collective, et c’est comme ça que nous entendons la mener.
Elle ne sera pas facile, il y aura des vents contraires, parfois la conjoncture économique n’est pas toujours aussi bonne, c’est ce que nous redoutons pour quelques mois à venir, mais nous avons aussi de bonnes raisons de croire que quand cette politique sera en place, le vent soufflera de nouveau du bon côté. Et il fait toujours beau quelque part, et il finit toujours par faire beau. Alors, ce qu’il faut faire, c’est qu’il fasse beau le plus tôt possible sur les régions du Québec.
Et je ne crois pas que ce soit par hasard que le gouvernement que je dirige avec les convictions qui sont les siennes soit le premier à promulguer une telle politique et à provoquer un tel rassemblement et de tels espoirs. C’est parce que quand on considère que nous avons la responsabilité d’un territoire national, on ne veut pas qu’il ait de quelque manière que ce soit des caractéristiques purement provinciales — pour employer une expression qui peut être juridiquement vraie mais qui est réductrice par rapport à la réalité québécoise. Nous avons la responsabilité de faire que ce vaste territoire qui est un des plus vastes du monde parmi les pays même à vastes territoires se développe intégralement avec toutes ses potentialités et ses virtualités. Aussi bien les urbains que les ruraux ont le devoir que ce magnifique Québec, avec son million de lacs et ses grands cours d’eau, et ses affluents, et ses côtes maritimes se développe à la hauteur de son potentiel, même à la hauteur de sa beauté. Et nous en avons affronté, des défis, à partir de cette Assemblée nationale et de ce siège de l’exécutif depuis notre Révolution tranquille. Ça ne veut pas dire que rien ne s’était passé avant, parce que justement une solide ruralité a fait qu’on a pu affronter la Révolution tranquille et qu’on a pu être prêt pour le faire, mais vous savez que cette Révolution tranquille nous imposait le fardeau de partir des niveaux d’éducation les plus bas d’Occident pour faire une véritable révolution des esprits. Nous l’avons fait. Le Québec aujourd’hui a un, sinon le niveau d’éducation le plus élevé du monde et, on l’a vu ces jours derniers, non seulement en quantité mais en qualité. Nos écoliers, nos écolières sont dans les meilleurs au monde dans des sciences aussi décisives que les mathématiques, les sciences en général ou la lecture, ce qui est un élément fondamental de la culture, de la beauté et de la poésie. Si nous avons pu relever avec succès tous ces défis, qu’est-ce qui va nous empêcher de faire de cette Politique de la ruralité un succès resplendissant? Ça va prendre du temps, ça va prendre du courage, ça va prendre du sens critique et même il va falloir bougonner quelquefois, mais je compte sur certains de nos amis pour le faire avec des talents confirmés.
[ Des voix: Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] Mais tout ça, tout ça va nous porter à l’action, et l’action va nous porter au succès. Et j’espère que sous peu le Québec entier pourra dire que ce défi-là, nous l’avons affronté et nous pouvons être un modèle, puisque le problème est commun à plusieurs pays du monde. J’espère que nous pourrons dire aux pays qui sont angoissés par l’exode rural et par les problèmes de ruralité: Venez voir dans notre Québec comment nous les avons résolus d’une façon exemplaire.
[ M. Gagné (Michel): Merci, M. le premier ministre. Le moment
est maintenant venu de sceller de façon solennelle le pacte unissant le
gouvernement du Québec et les partenaires du monde rural. Nous allons donc procéder à la cérémonie de signatures de la Déclaration en faveur du monde rural.
Par cette déclaration, et je cite, «le gouvernement du Québec
et ses partenaires reconnaissent officiellement l’importance de la ruralité et s’engagent de façon solidaire à travailler au renouveau, à la prospérité et à la pérennité des communautés rurales», fin de la citation.
Cette déclaration sera signée par le premier ministre et le
ministre d’État aux Régions, au nom du gouvernement, par M. Jacques Proulx, au nom de Solidarité rurale, M. Michel Belzil, au nom de la Fédération québécoise des municipalités, M. Émilien Nadeau, au nom de l’Association des régions du Québec et M. Yvon Leclerc, au nom de l’Association des centres locaux de développement.
(Signature de la Déclaration)
Alors, tous les documents étant maintenant dûment signés, une période de questions à l’intention des journalistes sera maintenant dirigée par l’attaché de presse du premier ministre, M. Hubert Bolduc.
M. Bolduc (Hubert): Je demanderais aux journalistes qui veulent poser des questions de se rendre au centre du salon rouge où un micro est là pour la période de questions.
M. Labbé (Francis): Alors, M. le premier ministre, si on comprend bien, en résumé là, ce que le gouvernement s’engage à faire, c’est à prendre en considération la ruralité à tous les niveaux lorsqu’il prendra une décision ou adoptera un projet de loi. C’est ça? ]
[ M. Landry:] Oui. Ça, c’est un des aspects de la politique, c’est ce qu’on appelle la clause territoriale. Nous avions déjà, comme vous le savez, une clause capitale nationale, une clause métropole, qui avait été conçue à l’époque où la métropole était en détresse, d’ailleurs. Alors là, on a une clause régions, une clause ruralité, une clause territoriale. En pratique, ça veut dire que tout document cheminant vers le Conseil des ministres sera examiné sous l’angle de la ruralité par les divers comités et, quand il arrivera au Conseil, on aura sur la table tous les éléments d’impacts ruraux possibles. S’ils sont négatifs, on essaiera de les gommer; s’ils sont positifs, on essaiera de les renforcer.
[ M. Bolduc (Hubert): Marie-Paul Rouleau, Radio-
Canada.
Mme Rouleau (Marie-Paul): C’est une question pour M. Landry.
M. Landry, M. Proulx a dit que l’argent n’était pas tout, mais moi, j’ai fait quelques calculs quand vous avez annoncé l’entente des Cris, et j’avais calculé que c’était environ 6000 $ par personne par année pendant 50 ans pour le développement de la région. Alors là, j’ai fait le même genre de calcul, et je m’aperçois que c’est à peu près 50 $ par personne pour cinq ans. Alors, comment expliquer… est-ce que c’est assez d’argent, finalement?]
[ M. Landry:] Votre question est ingénieuse, mais n’est pas un modèle de science économique.
[ Des voix: Ha, ha, ha!]
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): Alors, la réponse,
c’est?]
[ M. Landry:] Je m’excuse. D’abord, parce que: Nommez-moi 10 villages cris qu’on pourrait qualifier de villages prospères? En partant.
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): Peut-être au…]
[ M. Landry:] Nommez-moi chez les Cris une activité aussi prodigieusement lucrative que l’agriculture de la vallée du Saint-Laurent, dans mon village de Verchères, par exemple? Et cetera. C’est que les régions du Québec et la ruralité, déjà, sécrètent un flot d’activités économiques considérable, et par la cohésion, un peu d’argent mais surtout du courage, de la détermination et du sens de l’autonomie, les régions vont pouvoir s’en tirer, ce qui n’était pas la même chose que la détresse des villages amérindiens du Nord. C’est pour ça que les deux situations ne sont pas comparables. Et on ne demande en retour rien aux régions, tandis que, de nos partenaires cris, on demande l’aménagement des rivières, des milliards d’investissements, donc des milliards de retombées économiques en retour, que les régions du Québec nous donnent déjà.
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): Maintenant, ce sera une
question
pour M. Proulx. M. Proulx, on parle, dans la Politique, de maintien ou de retour de jeunes familles. Juste pour nos auditeurs, j’aimerais que
vous nous donniez un exemple concret de ce que ça peut être? Comment est-ce qu’on… ça serait quoi un truc pour faire ça?]
[ M. Proulx (Jacques): Bien, écoutez, je pense que
ce serait de
mettre en place différentes possibilités. Ça pourrait être, par exemple, payer une partie des études d’un jeune médecin qui prendrait
l’engagement de venir s’établir. Je dis n’importe quoi, mais en même temps, j’essaie de vous donner des exemples. Ça pourrait…
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Proulx (Jacques): Bien, n’importe quoi, je veux dire n’importe
quoi, n’importe quel exemple. Ça peut être ça, ça peut être…
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Proulx (Jacques): ..ça peut être au niveau de l’enseignement, ça peut être au niveau de tous les besoins qui vont se préciser, les besoins qui vont se préciser à l’intérieur de communautés. Alors, moi, j’ai compris que la communauté pourrait fixer ses attentes et pourrait prendre des engagements, des ententes avec ces gens-là. Pour moi, c’est ça. Alors, ça peut se présenter de toutes sortes de façons: études, établissement, services. Vous pouvez imaginer à peu près n’importe quoi parce que je pense que ce qu’il faut reconnaître dans cette politique-là, et j’espère que ça va être ça, j’y crois, il y aura beaucoup d’espace pour l’imagination. Alors, imaginons-nous qu’on peut toucher à beaucoup de choses.
Mme Rouleau (Marie-Paul): Si je peux, peut-être, me permettre
une dernière question. Dans la politique, on dit aussi qu’on va favoriser le rôle des femmes dans les milieux ruraux. Je remarque qu’il n’y a aucune femme devant
-moi à la table, d’un part, et d’autre part, j’aimerais
aussi avoir un exemple concret de ce que ça peut vouloir dire. ]
[ M. Landry:] Il y a au moins une femme au micro.
[ Des voix: Ha, ha, ha!
M. Baril (Berthier): Bien, les femmes… D’abord, les femmes
ont joué un rôle important dans la mise en place de cette politique. La Secrétaire d’État au régions-ressources, Mme Doyer, qui est présidente du comité. Mon adjoint parlementaire, Mme Charest. Donc, dans le fond, ce qu’on veut faire, c’est qu’on veut dynamiser les milieux ruraux. Alors, on met à leur disposition des outils, des instruments financier importants, nouveaux, des instruments neufs pour que les gens puissent se mobiliser en fonction de leurs particularités. Et, dans ce sens-là, je suis convaincu que toutes les femmes du Québec vont jouer un rôle de premier plan dans ce nouveau défi qui s’adresse aux différentes communautés rurales du Québec.
M. Proulx (Jacques): La question n’était peut-être pas à moi,
mais moi, je peux vous dire que j’ai les quelques milliers de fermières qui sont membres de Solidarité rurale. Alors, ce sont des femmes.
Une voix: …
Mme Rouleau (Marie-Paul): Mais je n’ai pas compris, mais
enfin…]
[ M. Landry:] Il a dit qu’il y avait quelques milliers de fermières qui étaient membres de Solidarité rurale. Et s’il ne l’avait pas dit, nos députés ne pouvaient plus se retenir de ne pas le dire.
[ Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Rouleau (Marie-Paul): Merci.
M. Bolduc (Hubert): Robert Plouffe.
M. Plouffe (Robert): M. le premier ministre, vous
avez donné l’exemple du télétravail pour freiner
l’exode dans les rangs, dans les régions. Mais, semble-t-il, la Loi du zonage agricole empêcherait justement ce genre d’activité là. Est-ce que vous pouvez, vous, nous donner des précisions?]
[ M. Landry:] Moi, j’ai mon ami Jacques Dufresne, – qui est l’exemple même du télétravail. Il est en pleine zone rurale, il publie L’Agora à partir de là puis il communique avec la terre entière. Il est en train de travailler une encyclopédie électronique. Je n’ai jamais vu qu’il y avait d’impératif juridique. Jacques, toi, qui est un partisan de cette loi, à mort, est-ce que tu penses que ça va empêcher le télétravail?
[ M. Proulx (Jacques): Il ne faudrait pas… il
faudrait vous
corriger, M. le premier ministre, je ne suis pas un
-partisan à mort, je suis convaincu que c’est nécessaire mais avec les adaptations qui s’imposent. Et à la question, je ne comprends pas, parce que je ne peux pas voir en quoi que le télétravail viendrait nuire au zonage agricole.
M. Plouffe (Robert): Bien. Probablement que ça fait d’autre
chose que…]
[ M. Landry:] …et si c’était le cas. Mais si Jaques Proulx dit que ce n’est pas le cas, il y a des chances que ce ne soit pas le cas parce qu’il est plutôt critique, mais si c’était le cas, si c’était le cas on regardera ça de près.
[ M. Bolduc (Hubert): Est-ce qu’il y a d’autres
questions?
M. Ouellet (Martin): Martin Ouellet, NTR. M. Landry, je voudrais
revenir sur l’argent. Il me semble que 90000000 $ sur cinq ans, ce n’est pas des masses quand même, ce n’est pas
20000000 $ par année. Alors, est-ce que ça valait tout ce spectacle?
M. Baril (Berthier): Bien. Écoutez. D’abord on va permettre
aux gens des communautés rurales d’évaluer puis de juger ça, première des choses, par respect pour eux et pour elles qui se sont engagés dans un long processus de mobilisation depuis les trois dernières années. Je pense que ce sera à eux autres de porter le jugement parce que le vrai tribunal, c’est la population du Québec. Il y a eu beaucoup d’efforts, il y a eu beaucoup d’énergie, il y a eu beaucoup de mobilisations partout à travers le Québec, tout particulièrement à travers les partenaires.
Je veux rappeler une chose. Depuis les derniers mois,
nous
avons mis en place des mesures importantes pour accélérer le développement économique des régions. Le premier ministre l’a dit lui-même, il en a fait une priorité lors de son assermentation ici même, au salon rouge. Alors, quelques semaines plus tard, lors du dépôt du budget de notre collègue, Pauline Marois, nous avons annoncé 800000000 $ en faveur des régions-ressources du Québec, particulièrement destinés à sept régions, 200000000 $ de ce 800000000 $ étaient destinés justement à consolider le tissu économique et social des communautés rurales.
Alors, là, on vient de poser un autre geste important en faveur de
ces communautés-là, qui est le dépôt de cette politique nationale de la ruralité et, au coeur de cette politique, c’est ce fameux Fonds d’innovation qui va être animé par l’ensemble des MRC au Québec. Je
voudrais vous rappeler qu’il y a quelques semaines, Mme Marois, lors du dépôt du budget, a annoncé quand même des mesures extrêmement importantes, qui étaient demandées d’ailleurs, qui étaient attendues par le monde rural au Québec, qu’on parle de Villages branchés, une aide financière de 75000000 $, qu’on parle de l’embellissement des villages, qu’on parle de RénoVillage, qu’on parle d’un programme particulier, justement, pour les petites municipalités qui ont un problème avec l’eau potable, donc, etc., etc. Plus 20 % de l’ensemble des
-programmes et des infrastructures qui sont mis sur la table actuellement seront destinés aux communautés rurales au Québec.
Alors, je pense qu’en quelques mois ce sont des efforts
importants qui ont été faits en faveur des régions
-du Québec et tout spécialement en faveur des communautés rurales.
M. Bolduc (Hubert): Karen Pouliot… ]
[ M. Landry:] Oui. Aussi on espère…
[ Mme Pouliot (Karen): …]
[ M. Landry:] …pardon, madame, que l’argent de la politique de la ruralité va permettre de dépenser plus en zones rurales à travers tous les autres programmes. Tout ce nouveau dynamisme rural va faire que le 800000000 $ du budget, par exemple, va se dépenser plus équitablement dans la partie rurale des régions-ressources. On a 800000000 $ pour les régions-ressources, mais partie des régions-ressources est urbaine, mais l’immense partie est rurale. -Alors, ça va être un levier qui va permettre de dépenser plus et mieux et de faire susciter les initiatives régionales aussi qui n’auront rien à voir avec la dépense publique. Souvent, les villages prospères dont on a parlé, là, c’est leur initiative qui les a rendus prospères, ce n’est même pas la dépense publique; un programme gouvernemental ici et là, mais l’initiative d’abord, l’entrepreneurship et le courage.
[ M. Bolduc (Hubert): Une dernière question, s’il
vous plaît,
Mme…
Mme Pouliot (Karen): Oui, bonjour. Karen Pouliot, de Radio-Bellechasse. J’aimerais savoir comment seront réparties les sommes dans chacune des MRC.
M. Baril (Berthier): Ce sera connu dans les prochaines semaines. On
fera ça, naturellement, en partenariat avec les différentes… naturellement, avec la Fédération québécoise des municipalités, mais les budgets seront connus au plus tard après les Fêtes.
M. Bolduc (Hubert): Merci beaucoup. Bonne fin d’après-midi.
(Fin à 15 h 4)]
[QLDRY20011219cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec, et de M. Jacques Brassard, leader du gouvernement Bilan
de la session parlementaire Le mercredi 19 décembre 2001 (Quatorze heures trente minutes)]
[ M. Landry:] Bon après-midi, mesdames et messieurs. Notre vie démocratique, dont notre vie parlementaire, au cours des derniers mois, a été profondément marquée par ce qui s’est passé à New York le 11 septembre. C’est notre cas au Québec comme c’est le cas dans pratiquement tous les pays du monde, à divers degrés. Dans le cas d’une économie développée comme la nôtre, une économie nord-américaine comme la nôtre, qui était déjà en train de donner des signes de faiblesse depuis 15 mois, le 11 septembre, évidemment, a rendu plus critique une situation qui n’était déjà pas très rose. C’est la raison pour laquelle le gouvernement, dès le début, a mis beaucoup d’énergie à s’occuper de sécurité intellectuelle, physique, économique et sociale de nos compatriotes. Vous savez que c’est dans cette atmosphère que la session s’est ouverte et que, déjà à ce moment-là, on avait mis en place les comités voulus, nous avions tous les contacts qu’il fallait avec le gouvernement des États-Unis d’Amérique, celui des autres provinces du Canada pour faire triompher en particulier l’idée d’un périmètre de sécurité. Le gouvernement central était réticent au début, mais, après que le Québec, l’Ontario et la Colombie-Britannique se soient prononcés, on a vu un déplacement vers ce qui devait se faire. Nous, on l’a fait surtout pour des raisons économiques, puisqu’on voyait s’encombrer nos frontières, s’encombrer nos transports routiers et aériens à cause de la préoccupation de sécurité des personnes.
Donc, cela a influencé énormément un des premiers gestes majeurs de la session dans les tout premiers jours, le budget. À cette occasion, la vice-première ministre et ministre des Finances, qui a présenté un budget très bien reçu, d’ailleurs, a mis surtout de l’avant le plan d’action AGIR autour de trois grands axes d’intervention: soutien à la consommation, 400000000 $ — c’est une façon de faire tourner l’économie; appui aux entreprises, 525000000 $ — qui est aussi une de nos marques de commerce, comme vous le savez, notre gouvernement intervient, ce n’est pas un gouvernement libéral; et, enfin accélération des investissements publics dans divers ministères, il y en a pour 3000000000 $.
En moins de deux mois, parce qu’une des consignes du budget et de l’avis gouvernemental, c’était de faire que les choses arrivent et arrivent vite. En moins de deux mois, des projets d’investissement publics de 935000000 $ ont déjà été approuvés dans le domaine de la santé. Le Conseil du Trésor, en particulier, a autorisé 692000000 $ de projet, en éducation, 243. Le ministère des Transports dispose maintenant d’une enveloppe de 400000000 $, alors on voit, ça bouge sur le terrain, ça bouge dans les villes et les villages. Nous avons aussi, vous l’avez vu, appuyé sur le déclenchement d’investissements majeurs. J’avais pris l’expression: Chauffer le four, bien, chauffer le four, c’est ça que ça décrivait au complet dont les investissements majeurs. Nous avons procédé aux annonces dans les régions concernées, en concertation avec les autorités locales, alors Péribonka, 1000000000 $; la centrale du Suroît, centrale électrique du Suroît, 1 demi-milliard; Gaspésia, cette semaine, 465000000 $; Caprion, 100000000 $; la mise en valeur de Chic-Chocs, 62000000 $; Bridgestone-Firestone a annoncé aussi cette semaine, 36000000 $; Société de développement du magnésium, 34000000 $; Boralex, 36000000 $, Mont-Laurier, Teknion, 30000000 $, mais 600 emplois sur la Rive-Sud de Québec; Alumiform, projet de 19000000 $.
Donc, dans cette logique de chauffer le four, accélération des projets, annonces des projets. Nous avons également, pour rendre plus fluides les échanges avec notre principal client, l’État de New York, signé une entente, une entente de réciprocité quant aux marchés publics. Alors, le Québec ouvre ses marchés publics à l’État de New York, l’État de New York en fait autant, sauf que la population de l’État de New York est de quelques fois celle du Québec. Alors, ça fait un marché, le nôtre et le leur additionnés, très intéressant pour nos entreprises. Nous avons également, dans la même optique diplomatique mais plus large cette fois-ci, effectué un certain nombre de missions à l’étranger, je peux dire toutes fructueuses, puisqu’il s’agit de l’Europe, Allemagne, Belgique, France, c’est des missions polyvalentes, c’est-à-dire politiques, culturelles, économiques. On a annoncé pour l’Europe seulement des projets totalisant 287000000 $. Toujours au chapitre de la diplomatie, nous allons tenir au début de 2002, transfrontalier, un forum économique Québec, New York. Alors, à Saint-Jean et à Plattsburgh, des centaines d’entreprises représentées avec le gouverneur de New York, avec moi-même et mes collaborateurs.
Toujours dans les gestes déterminants pour l’avenir, une entente historique entre la nation crie et la nation québécoise par leur gouvernement et leur chef pour d’abord régler un problème de franchise des relations et d’établissement d’un climat fraternel entre les cris et le Québec. Et on l’a bien vu, il faut entendre le chef Ted Moses en parler et les autres chefs amérindiens de tout le Canada, il n’y a pas 50 façons d’établir des rapports harmonieux, il faut d’abord reconnaître ces nations — René Lévesque l’a fait en le proposant à notre Assemblée nationale en 1985 — et il faut par la suite dialoguer, de nation à nation. Alors, avec les Cris, vous le savez, au niveau du traité, au niveau des contrats, ça s’est très bien déroulé. Les échos que nous avons du terrain, encore hier, le chef Ted Moses a fait un inventaire de la situation: au niveau du terrain, ça va très bien aussi. Ça veut dire que non seulement on va pouvoir permettre aux Cris d’être en charge de leur développement, aux Québécois, d’utiliser avec eux et en commun des richesses naturelles importantes, nous allons aussi servir d’exemple pour les rapports avec les autres groupes amérindiens, les autres premières nations du Québec, et si ça peut servir au reste du Canada, tant mieux. Et c’est ce que le chef Ted Moses dit en substance, que le Québec a trouvé la façon de traiter avec les nations aborigènes.
Nous avons aussi, après des années de travail difficile et assidu, mis de l’avant une politique de la ruralité. C’est pour ça qu’il y a eu tellement d’émotions quand cette politique a été rendue publique, de la part de Jacques Groulx, en particulier, ça fait des années qu’on essaie d’arrimer une politique de la ruralité. Ça a commencé, il y a trois ou quatre budgets, j’avais lancé l’opération Villages prospères — je ne sais pas si vous vous en souvenez, il s’agissait d’étudier pourquoi certains villages ont un taux de chômage zéro, puis transposer le modèle à d’autres — Jacques Proulx a beaucoup contribué à ça, et ses collaborateurs et les autorités locales, c’est la raison pour laquelle il y a eu un enthousiasme extraordinaire au salon rouge. C’était attendu, c’était voulu, c’était voulu comme ça, ce n’est pas exorbitant, ce n’est pas excessif, mais c’est ciblé. Donc, une espèce de reprise de contact profond avec le milieu rural, avec les aborigènes et aussi avec les orphelins de Duplessis. Un problème lancinant qui, sur le plan humain, était difficile à supporter pour plusieurs personnes qui ont été heurtées par ces événements d’une autre époque, mais il faut vivre avec les conséquences de ses gestes, alors un bon contact, une bonne discussion, un bon épilogue avec les orphelins de Duplessis. Je mentionne aussi qu’à cause d’une crise du logement qui s’est développée… Nous avions déjà une politique de logement social, on avait déjà eu les félicitations du FRAPRU, vous le savez, il y a quelques années à l’occasion d’un budget mais, pour diverses raisons la demande de logements a eu tendance à rendre critique l’écart entre l’offre et la demande, et c’est pour ça que le gouvernement a accéléré la construction et la rénovation de plus de 40000 logements, en accordant, à travers le budget, une aide financière de 500000000 $. Et, finalement on a prévu 50000000 $ de dollars afin de créer 5000 places additionnelles dans les centres de la petite enfance. Cette politique est un succès, cette politique est exemplaire. La seule ombre au tableau, c’est qu’elle est dépassée par son succès, alors on a décidé d’accélérer la création des places.
Vous avez entre les mains divers documents qui vous parlent de façon plus exhaustive de ce qu’on a fait au cours des derniers mois mais je mentionne qu’on a continué à mettre de l’avant la stratégie de lutte contre la pauvreté, en discussion avec tous les intervenants, nous avons réalisé les fusions municipales consacrées dans leur droit par les cours de justice, nous avons mis de l’avant la politique maritime qui a été très bien accueillie par les intervenants du secteur maritime, de même que la politique de la jeunesse, nous sommes en train de mettre à jour les études Bélanger-Campeau, la commission Séquin est à la phase finale de ses travaux — ça serait déjà fini si M. Séguin n’avait pas été gravement malade — nous avons fait le forum sur le jeu pathologique qui est un succès scientifique et un succès social clair, nous avons continué le rajeunissement de la fonction publique en y faisant participer davantage en particulier les membres des communautés culturelles, la réforme de la carte électorale se fait, les groupes de médecine familiale sont en voie d’être créés, nous avons tenu à Saint-Hyacinthe un forum extrêmement réussi sur l’agroalimentaire et la politique agricole avec les décideurs de ce milieu, nous avons obtenu, ce qui n’est pas négligeable, c’est une bataille gouvernementale, l’obtention des Jeux gais pour Montréal, qui est une immense manifestation internationale.
Donc, comme il m’arrive souvent de le dire, nous sommes contents, nous ne sommes pas satisfaits; on peut toujours faire mieux et beaucoup mieux, et on entend travailler plus fort encore dans les mois et les années à venir pour servir au mieux notre population qui, soit dit en passant, n’a pas l’air mécontente de ce que nous faisons. Diverses enquêtes scientifiques de diverses maisons démontrent avec certitude que les gens apprécient nos travaux. Nos amis d’en face, comme on le dit — puis on insiste plutôt plus sur l’amitié des jours comme aujourd’hui que d’autres jours — n’ont pas eu des performances éblouissantes en Chambre. Vous êtes des experts, certains d’entre vous plus que moi. Donc, ce que je vous dis là, vous le savez d’avance.
Il y a eu aussi une stratégie qui a été développée d’attaques personnelles en Chambre ou à l’extérieur de la Chambre. Là, à un moment donné, ils se sont mis à marteler: Les femmes n’aiment pas Landry. Vous vous rappelez de ça? Tous les sondages démontrent que c’est faux. Ça m’a valu d’ailleurs l’été à rencontrer des milliers de femmes qui disaient: Moi, monsieur, je vous aime. Alors…
[ Des voix: Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] …des malheurs comme ça, amenez-en!
[ Des voix: Ha, ha, ha!]
[ M. Landry:] Et puis toutes ces femmes-là réunies, quand on regarde les sondages, devaient avoir raison parce que le taux de soutien que j’ai de la population est majoritaire chez les hommes comme chez les femmes. Ils ont fait une chose lamentable en termes «national et d’intérêt public», c’est cette mésaventure de défusion. Ça n’a aucun sens. Quand le chef de l’opposition de Montréal et le maire se lancent avec enthousiasme dans la construction d’une formidable ville et que l’opposition officielle à Québec dit: Si jamais on prend le pouvoir, cette ville sera mise en pièces par les municipalités qui veulent en sortir, c’est une disgrâce. Nous l’avons souligné à quelques reprises, mais les analystes neutres l’ont souligné encore plus que nous.
Leur politique constitutionnelle — je vous l’ai dit à plusieurs reprises, je leur ai dit aussi, là, sans prendre de détour — quand on fait la somme des évolutions constitutionnelles souhaitées par le Québec depuis 1960, ce qu’ils ont mis sur la table cette année est en bas de tout. Je ne dis pas en dessous de tout pour ne pas être impoli. C’est en bas de toutes les revendications traditionnelles du Québec. C’est une acceptation béate du statu quo et même un recul. Parce que, quand ils disent: nous allons cogérer avec les autres provinces et le fédéral un certain nombre de domaines, c’est un recul parce que Bourassa n’a jamais demandé la cogestion, il avait la gestion et c’était dans la Constitution. Alors, offrir la cogestion, c’est ouvrir la porte à toutes les interventions fédérales dans les domaines de juridiction qui sont les plus sacrés. Nos amis libéraux ne sont pratiquement pas venus non plus au forum sur l’agriculture. Ils ont manqué à un devoir grave de ne pas critiquer le budget Martin, alors que tous les ministres des Finances de toutes les provinces ou presque et tous les premiers ministres de toutes les provinces ou presque, y compris et surtout celui de la plus grosse, l’Ontario qui a la population de la Suède… Les mots employés par le premier ministre de l’Ontario ont dépassé en dureté ceux que Gérard D. Lévesque, et moi-même, et les ministres des Finances du Québec ont employé pour décrire les budgets fédéraux. Il a dit — les anglophones vont apprécier — il a dit: «Crass». Ce budget «is a crass budget». D’après le dictionnaire Oxford, ça veut dire «gross stupidity». Alors, nous, avec nos mots de «fédéralisme dominateur», «impérial», «centralisateur», on a encore un vocabulaire plus doux que celui du premier ministre de l’Ontario. Or, nos amis libéraux n’ont rien dit. Leur critique financière est montée au créneau pour parler du budget fédéral, pas un mot sur cette stratégie d’étranglement qui est pourtant limpide: il s’agit de laisser les provinces s’embourber avec la santé et l’éducation en ne leur donnant pas les moyens pour faire face à la croissance, puis après ça envahir leurs champs de juridiction. C’est élémentaire comme stratégie. Je ne sais pas si c’est «crass», mais c’est «gross». Parce que c’est quoi, ça, dans un système soi-disant fédéral, le gouvernement central qui affame les unités décentralisées pour ensuite envahir leurs juridictions d’une façon plus ou moins subtile comme avec les infrastructures municipales?
Enfin, on s’énerve beaucoup sur les sociétés d’État aujourd’hui, depuis quelques jours — vous avez vu — mais, quand les sociétés d’État sont venues à la défense des crédits, on ne leur a pas posé une seule question, on les a regardées de haut. On a voulu plutôt essayer de mettre les ministres à mal sans vouloir vraiment la vérité. Parce que la vérité la plus simple et la plus technique, bien ce sont les gens des sociétés d’État qui peuvent les donner. Alors, voilà ce que j’ai à dire, et mon collègue qui, lui, a suivi de minute en minute les travaux législatifs peut en parler beaucoup mieux que moi. Les choses parlent par elles-mêmes.
[ M. Plouffe (Robert): …Sophie Langlois.
Mme Langlois (Sophie): M. Landry, quand vous avez signé l’entente historique avec les Cris — le 23 octobre, je crois — vous et M. Moses, vous avez dit dans vos discours formellement: Cette entente finale, l’entente finale sera signée avant la fin de l’année 2001. Les chefs ne se sont pas encore entendu sur le mode de consultation de leur population, donc M. Moses demeure confiant, mais il y a clairement un grain de sable dans l’engrenage, là. Est-ce que vous êtes déçu que cette entente-là ne sera de toute évidence pas signée avant la…]
[ M. Landry:] Non. Je suis réjouis que la nation crie pratique sa démocratie, et c’est une décision démocratique à l’intérieur. Ils n’ont ni nos traditions, ni nos institutions, ni notre nombre. Alors, à leur manière, ils vont appuyer leurs chefs ou ne les appuieront pas. Mais toutes les nouvelles sont à l’effet qu’ils vont appuyer leurs chefs.
[ Mme Langlois (Sophie): Pas d’inquiétude du tout de votre
part, non?]
[ M. Landry:] Bien, j’ai énormément confiance au chef Ted Moses et à d’autres grands chefs que j’ai connus dans le passé et qui sont des gens très influents dans leurs communautés et qui sont également d’accord.
[ Mme Langlois (Sophie): Sur un autre sujet. Il y a un groupe
important qui demande au gouvernement de revoir le système électoral pour inclure une notion de proportionnalité. Vous avez clairement dit que votre gouvernement allait étudier sérieusement la chose, mais sans jamais vous engager à changer le système. Les gens qui vous demandent de l’étudier, vous demandent de l’étudier pour changer le système. C’est quoi, votre volonté pour la prochaine session d’apporter des changements au système?]
[ M. Landry:] On trouve que ce serait imprudent de changer le système sans faire les études d’abord. Mais, moi, j’ai toujours été un partisan du changement de système et du changement radical de système. Une république, un régime présidentiel d’inspiration américaine et française ou autre, parce qu’il y a des grandes démocraties présidentielles foisonnent, un système proportionnel, plus ou moins proportionnel, à un tour ou à deux tours. Ça, c’est des choses qu’il faut étudier éventuellement: une chambre des régions, une représentation régionale. Alors, nous sommes résolus d’aller au fond de cette question de la manière à déterminer, mais, dès le début de 2002, il est sûr que nous serons à pied d’oeuvre.
[ Mme Langlois (Sophie): Dans un agenda idéal… Oui,
juste
pour finir là-dessus…]
¸[ M. Landry:] C’est pas clair? Je vous dis encore une petite chose….
[ Mme Langlois (Sophie): …c’est que je voudrais
juste savoir
si vous voudriez que, dans une prochaine campagne électorale, ça fasse partie de votre programme de soumettre un changement du système.]
[ M. Landry:] Si c’est à ça que le mécanisme qu’on va mettre en marche conclut, très certainement. On écoute pour prendre en compte ce qui s’est dit. C’est pas du tout simple cette affaire-là puis les libéraux le sentent bien aussi. Il y a des gens qui disent: Vous avez eu 43, virgule, quelque pourcent des voix et les libéraux 44, donc vous ne seriez pas au pouvoir. Un instant. Où se seraient reportés les voix de l’ADQ, qui était avec nous du côté du Oui durant le référendum? Alors, personne ne peut dire: C’est clair pour l’un. C’est clair pour l’autre. La cause est entendue. C’est un redéploiement démocratique.
[ M. Plouffe (Robert): Paul.
M. Roy (Paul): Oui. M. Landry, tantôt M. Charest nous disait que 2002 doit être une année électorale. Si jamais vous étiez du même avis que lui, est-ce que vous fermeriez la porte à des candidatures d’actuels députés du Bloc québécois?]
[ M. Landry:] Quelle que soit l’année, les bloquistes ont été élus à Ottawa et ils doivent rester à Ottawa. J’en ai discuté longuement avec mon homologue et ami, M. Duceppe, et c’est ce que nous pensons par égard pour la population. Le signal qu’on leur a donné, c’est que les députés du Bloc rentreront au Québec le jour où le Québec entrera à l’Assemblée générale des Nations unies.
[ M. Roy (Patrice): Donc, vous fermez la porte à des
candidatures de députés.]
[ M. Landry:] Oui, et pas pour des raisons d’individus, d’hommes et de femmes, il y en a de fantastiques — ce serait même la solution de facilité pour nous — une pépinière extraordinaire, mais c’est par égard à la population qui les a élus. Et ils ont un mandat difficile, difficile, et ils et elles s’en acquittent et doivent continuer à le faire.
-[ M. Plouffe (Robert): Jean Thivierge.
M. Thivierge (Jean): M. Landry, j’ai personnellement vu beaucoup de sessions parlementaires et quelques premiers ministres, et je peux par comparaison dire que ça n’a pas été la plus flamboyante session qu’on a vécue. Avant la session, vos gens dans les cabinets disaient: Le mot d’ordre, c’est: On ne fait pas de vagues. Effectivement, il n’y a pas eu trop de vagues mis à part le budget. On peut difficilement imaginer qu’on peut faire aussi peu, sur le plan habituel législatif, encore pendant beaucoup de sessions. Et, actuellement, le chef de l’opposition attaque sans cesse, et je pense qu’il nous a annoncé qu’il va attaquer encore plus durement votre légitimité dans les prochaines semaines, les prochains mois. Vous allez tenir le coup?]
[ M. Landry:] Bien, d’abord, légitimité, il n’a pas de cause. Il a le droit de faire des coups d’éclat, mais pas de coup d’État. La tradition…
[ M. Thivierge (Jean): Oui, mais c’est peut-être plus
sur le
fait que vous soyez désigné, premier ministre désigné.]
[ M. Landry:] Comme l’était Daniel Johnson, prédécesseur de M. Charest. Et M. Daniel Johnson, d’ailleurs, il a eu le gouvernement le plus long de l’histoire du Québec, je pense, quatre ans et 11 mois. Ça ne veut pas dire que c’est un modèle, mais ça veut dire que l’histoire n’a pas commencé avec M. Jean Charest. Bon. Et puis, moi aussi, j’en ai vu des premiers ministres, j’en ai vu des sessions, puis il y en a qui sont plus intenses que d’autres parce qu’un gouvernement doit quand même respecter la tranquillité démocratique des gens après avoir imposé des réformes importantes et graves. Et là, on est dans cette phase-là. Dans l’histoire de tous les pays, ils appellent ça des périodes bleues, des périodes rouges. Une période rouge, c’est quand on fait des fusions à Québec, à Gatineau, à Chicoutimi, Jonquière, La Baie et à Montréal. Il faut que les gens prennent leur souffle après, apprécient la pertinence des réformes. Une période rouge, c’est quand, après les déficits pendant 50 ans, on arrive au déficit zéro. Alors, il faut qu’il y ait un rythme, une eurythmie démocratique. Et on avait promis aux gens de faire plutôt la chasse aux irritants, de gérer, d’améliorer des systèmes, d’améliorer les choses, et c’est ce qu’on fait. Et je pense que c’est ce qu’ils veulent parce que, toujours d’après ces études scientifiques, mais qui peuvent ne pas l’être pour une mais qui le sont en groupe, les gens ne souhaitent pas d’élection, les gens ne souhaitent pas d’élection, et puis ils sont satisfaits. Alors, qu’est-ce qu’on peut demander de mieux? Et quand on pense que ce sera dans l’intérêt du Québec de faire des élections, pas dans l’intérêt des libéraux ou dans notre intérêt, on en fera.
[ M. Plouffe (Robert): Michel David.
M. David (Michel): Oui, deux questions, M. Landry.
-D’abord pour revenir sur le mode de scrutin, je crois me souvenir d’une de vos réponses à l’Assemblée nationale il y a une couple de semaines, que tout partisan que vous soyez d’une proportionnelle, là, plus ou moins, vous ne l’envisagez pas en dehors d’un Québec souverain, hein, est-ce que j’ai bien compris?]
[ M. Landry:] Je pense que c’est chez vous que j’ai lu ça mais ce n’est pas tout à fait ça.
[ Des voix: Ha, ha, ha!
M. David (Michel): Ce n’est pas ça? ]
[ M. Landry:] Vous avez raison 95 % du temps mais des fois, des fois non, c’est comme moi d’ailleurs, et… Non. Si on peut trouver une façon d’accommoder un système parlementaire britannique avec une forme de proportionnelle, c’est possible avant la souveraineté. Ce que j’ai dit, par ailleurs, c’est que c’est beaucoup plus facile en régime présidentiel et là, bien, ça ne peut pas être fait avant la souveraineté. La souveraineté facilite les choses mais n’empêche pas une certaine forme de proportionnelle.
[ M. David (Michel): Bon…]
[ M. Landry:] D’ailleurs, René Lévesque l’avait envisagée, vous vous en souvenez, et on n’avait pas la souveraineté, et c’est les députés qui n’en n’ont pas voulu pour diverses raisons.
[ M. David (Michel): Et la deuxième question. Est-ce
qu’on doit
attendre le remaniement ministériel d’importance en début d’année? ]
[ M. Landry:] Bien, je pense que les gens, ils font bien leur travail, ils travaillent bien. Il se peut que certains veuillent d’autres défis. On va réfléchir à ça durant les fêtes, là. Je ne me mets pas de limitations ni d’objectifs sauf de réfléchir.
[ M. Plouffe (Robert): On va passer en anglais, John
et Kevin
après. ]
[ M. Landry:] Ah! bon. Mais, moi: Est-ce que vous acceptez que je vous dise du fond du coeur: Joyeux Noël et Bonne année [from the bottom of my heart. Merry Christmas, Happy New Year, Feliz Navidad, Próspero Año y Felicidad.]
[(Fin à 15 h 7)]
[QLDRY20020212cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Commentaires à la suite de la démission de M. Gilles
Baril (Dix-sept heures vingt-six minutes)]
[ M. Landry:] J’ai appris avec beaucoup de tristesse, vous pensez bien, la démission de mon collaborateur et ami Gilles Baril qui a été un des plus jeunes députés jamais élus dans notre Assemblée nationale et qui s’est illustré comme parlementaire. Il va continuer à le faire, d’ailleurs, il va exercer la noble tâche de député de Berthier, représenter ses électeurs et ses électrices jusqu’à la prochaine élection. Mais il a décidé, pour des raisons qu’il vous a expliquées lui-même et que je respecte profondément, qu’il quitte le Conseil des ministres, des raisons personnelles, des raisons familiales que tous les gens qui sont en politique et qui ont une famille peuvent comprendre facilement. Hélas, je redoutais cette éventualité parce qu’il m’a appelé du Mexique, où il avait pris quelques jours de vacances, seul avec sa famille d’ailleurs — je tiens à le souligner — et non pas avec un lobbyiste. Il est descendu au Mexique dans le même véhicule que son ami André Desroches pour aller faire ses vacances seul, et ils ont payé chacun leurs dépenses. Je ne voudrais qu’aucune insinuation ne subsiste à cet égard. Donc, il m’a parlé du Mexique et j’ai senti qu’il était moralement très affecté et son épouse de même par ce que l’on tentait de faire circuler à son égard Et les conséquences et les retombées caricaturales ou autres, de le présenter, parce qu’il avait conduit un véhicule avec un de ses amis de 20 ans, comme le Gagliano du Québec ou des choses de ce genre-là, ça l’a vraiment très affecté. Et comme une manchette du même genre, la veille du Conseil national, de nous dire qu’il était dans le pétrin pour une affaire avec laquelle il n’avait vraiment aucun rapport et une affaire d’une importance de façon secondaire qui a eu un épilogue qui ne coûte rien aux contribuables, bien, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase et il a décidé de se consacrer davantage à sa vie familiale avec plus de sérénité, plus de disponibilité. Je vous redis, c’est quelqu’un que j’aime beaucoup, qui a mon admiration, qui est d’un dynamisme incroyable, qui est efficace dans ses tâches. Il avait un respect incroyable de l’action régionale du gouvernement et du développement des régions. Il avait d’abord été élu, on le sait, en Abitibi et ensuite dans Laurentides-Lanaudière. Alors, je déplore qu’il quitte le Conseil des ministres et j’annoncerait demain les aménagements faits pour que ses lourdes tâches soient partagées d’une autre manière. Demain également, à l’issue du Conseil des ministres, je vous ferai part des lignes directrices qui seront à la base des lois pour réglementer le lobbying au Québec. Vous savez qu’il y a deux ans, notre formation politique a mis de l’avant de telles directives à la suite d’une commission parlementaire. Le Parti libéral s’y est formellement opposé. Mais ce dont nous allons convenir demain, que le Parti libéral s’oppose ou non, deviendra l’encadrement de l’activité de lobbying au Québec. Si ça avait été fait il y a deux ans, on n’aurait peut-être pas eu les événements extrêmement malheureux qu’on a vécus au cours des derniers jours. Alors, on va faire en sorte que cette loi respectueuse des libertés fondamentales soit quand même tout à fait exemplaire par rapport à ce qui se fait ailleurs, c’est-à-dire transparence, distance, traitement voulu pour les organisations publiques par rapport aux organisations privées, et autres modalités qui seront communiquées demain.
Je dois vous dire aussi que j’ai retardé mon départ pour la Russie de 15 heures sans que ça n’affecte aucunement la mission, parce que la seule activité à laquelle je devais participer en arrivant, c’est une activité mondaine qui a été reportée à samedi prochain. Alors, donc, ma mission sera entière et intégrale avec les gens d’affaires du Québec.
[ Le Modérateur: Gilles Morin.
M. Morin (Gilles): Oui. M. Landry, la première
fois que
M. Baril vous en a parlé lors d’une… c’est juste au cours d’une conversation qui s’est tenue en revenant du Mexique. Qu’est-ce qu’il vous a dit exactement? Mais, à ce moment-là, il vous parlait de démissionner et quand c’est arrivé dans les dernières heures…]
[ M. Landry:] Il remettait en question sa vie publique tellement il était éprouvé, il tenait à son intégrité comme tout le monde, souvent… dans notre cas, c’est la seule richesse que nous possédons, alors si quelqu’un touche à cette intégrité, même indirectement, c’est sûr que ça peut être très blessant, il aurait un peu récupéré au retour, je lui avais remonté le moral du mieux que j’ai pu ainsi que ses nombreux amis, mais là, quand on a redit qu’il était dans le pétrin à la une du plus grand quotidien français d’Amérique, bien là, il a pensé que c’était le temps qu’il se consacre davantage à sa famille.
[ Journaliste: Est-ce qu’il vous en a parlé au cours
de la fin
de semaine de sa décision…]
[ M. Landry:] Il m’a parlé de sa tristesse en fin de semaine, il m’a demandé rendez-vous. Alors là, j’ai compris que quelque chose allait se passer. Hélas!
[ M. Larocque (Paul): M. Raymond Bréard hier,
Gilles Baril
aujourd’hui…]
[ M. Landry:] Bien la vie politique est un engagement difficile. Je le sais depuis très longtemps, ça fait des années que je fais ce métier. J’ai vu René Lévesque agir, Jacques Parizeau, Lucien Bouchard, Pierre-Marc Johnson, et je connais les difficultés du métier. Si la démocratie peut fonctionner, c’est -parce qu’il y a des gens qui acceptent les difficultés de ce métier, avec le plus de courage possible, le plus de dévouement possible et le plus de calme possible.
[ Journaliste: M. Landry, il y a des gens qui
parlent
d’atmosphère de… (inaudible)]
[ M. Landry:] Oui, j’en suis absolument certain, j’en étais certain avant, mais j’ai parlé longtemps avec elle, hier et aujourd’hui. Et j’ai une confiance totale en elle et elle m’a réitéré à plusieurs reprises qu’elle était aussi outrée par ces rumeurs, ces spéculations concernant son manque de loyauté. J’ai toujours considéré que c’était une femme extrêmement loyale. Après mûre réflexion, elle a décidé de devenir la vice-première ministre, j’ai pleine confiance en elle et d’ailleurs j’ai cultivé depuis 10 mois que je suis là, le tandem Landry-Marois. J’ai l’intention de continuer à le faire et Mme Pauline Marois veut faire de même.
[ Journaliste: …d’accepter il y a une semaine ou
deux, des
responsabilités…]
[ M. Landry:] Parce que je l’ai supplié an nom du devoir et au nom de l’intérêt national de passer par-dessus sa tristesse et son chagrin et de continuer. Et il a accepté généreusement de le faire.
[ Le Modérateur: Gilbert Lavoie.
–
M. Lavoie (Gilbert): M. le premier ministre, vous avez également été dans l’opposition et vous avez pu entendre des gens se plaindre… ]
[ M. Landry:] D’ailleurs, je fais une petite correction, mon parti a été dans l’opposition, mais moi, comme parlementaire je ne l’ai pas été. La politique avait pris congé de moi. Donc, j’ai moins vu ces échanges parlementaires de près sous l’angle de l’opposition. Ça fait assez longtemps que je fais ce métier et que je suis en contact avec vous, que j’ai des conversations privées et publiques avec vous, que vous devez connaître mon immense respect pour votre métier qui est un des fondements de la démocratie, sauf que je le trouve difficile et avec la concurrence vive et la chasse aux manchettes et le fait de vouloir battre l’autre en rapidité et en quantité, je ne suis pas sûr qu’il n’y a pas une certaine dérive de procès sommaire qui est en train de s’établir et qu’il n’y a parfois l’abus de la une et des grosses manchettes non pas tellement dans le but d’informer que d’être plus sensationnel que le concurrent. On est dans une économie de marché, les médias sont en concurrence. Il y a même une concentration inquiétante de ces médias. Alors, pour ça, je vous dis que j’ai de l’admiration pour ce que vous faites, votre métier est presque aussi difficile que le mien et, parfois, dans mon métier, nous faisons des erreurs et parfois vous en faites dans le vôtre.
[ Journaliste: M. Landry, quelle évaluation faites-
vous de ces événements des derniers jours sur votre leadership?]
[ M. Landry:] C’est difficile à dire, mais j’ai parlé aujourd’hui aux membres de mon comité des priorités, à la présidente du parti, à plusieurs de nos militants et nos militantes, et je n’ai reçu que sympathie et témoignages de solidarité renouvelée. Alors, parfois on peut dire: À quelque chose malheur est bon. Je pense que les lignes d’autorité mais les lignes aussi de conversation démocratique seront renforcies en ce qui me concerne dans mon dialogue avec mes collègues et avec mon parti.
D’ailleurs, vous avez vu la réaction des militants et des militantes à ce que vous appelez mon leadership en fin de semaine? On n’a pas eu de vote secret, mais je pense que c’était plutôt réconfortant.
[ Journaliste: Est-ce que ceci met fin à la crise?]
[ M. Landry:] Je l’espère. Mais la politique, c’est parfois comme une mer agitée. Il y a des vagues, et ensuite ça se calme, et il faut garder son sang-froid. Nous sommes là pour servir. Il y en a qui ont de la difficulté à croire ça, il y en a qui sont cyniques par rapport à la vie publique. Ils ont peut-être raison dans certains cas, mais ce n’est pas mon cas à moi, je ne suis pas cynique par rapport à cette existence. Que des hommes et des femmes décident de faire le métier que l’on fait, c’est le fondement de la démocratie. Si personne ne l’acceptait ou si -personne de qualité ne l’acceptait, dans un parti comme dans l’autre, ce serait une tragédie.
Alors, c’est comme ça que je vois les choses. Je fais face aux événements avec le plus de sincérité, le plus de lucidité, le plus de courage possible et, encore une fois, même quand c’est très difficile sentimentalement… essayer de le faire sans états d’âme.
[ Journaliste: M. Landry, est-ce que vous avez une part de
responsabilité quand vous parlez d’événements? En fait, c’est que c’est quand même vous qui avez nommé ces gens-là. M. Baril…]
[ M. Landry:] Ah, non, ce n’est jamais l’impression que j’ai eue!
C’est un jeune homme de 42 ans très talentueux, très prometteur qui a été élu à l’Assemblée nationale pour la première fois en battant Camil Samson, je pense qu’il avait l’âge de 22 ans. Et non, au contraire. Comme je vous l’ai dit, quand j’ai senti qu’il allait peut-être partir, je l’ai supplié de rester pour assumer des responsabilités plus grandes encore.
[ Journaliste: Dernière question en français, Robert Plouffe.]
[ M. Plouffe (Robert): M. Landry, au cours de la fin de
semaine, Pauline Marois a contesté ouvertement la décision de l’exécutif par rapport à M. Bréard, et M. Baril, lui, appuyait M. Bréard. Il a beau dire que c’est la pression médiatique qui l’a décidé, et je n’en doute pas, parce que ça doit être des fois invivable, comme il l’a dit. Mais jusqu’à quel point, quand même, on ne peut pas penser qu’il y a un lien entre ce qui s’est passé au cours de la fin de semaine et les événements d’aujourd’hui?]
[ M. Landry:] Bien, M. Baril vous a parlé lui-même, là, tout était joué en ce qui le concerne avant la fin de semaine. Il s’était déjà ouvert à des intimes avant la fin de semaine de la décision qu’il allait me communiquer un certain nombre d’heures plus tard. Alors, premièrement, il n’y a pas de lien. Deuxièmement, vous allez peut-être un peu vite en disant que Mme Marois s’est dissociée de la position de l’exécutif. Mme Marois souhaitait que M. Bréard quitte temporairement ses fonctions. Quarante-huit heures plus tard, il a décidé volontairement de les quitter, mais de les quitter complètement. Alors, ce n’est pas une contradiction si grande que ça. Deuxièmement, la solidarité ministérielle n’est pas en cause, c’est l’exécutif national du parti qui embauche et débauche le directeur général et l’exécutif national est en train de faire des démarches pour remplacer Raymond Bréard.
[ (Fin à 17 h 17) ]
[QLDRY20020313cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, pemier ministre du Québec, et de Mme Pauline Marois, ministre d’État à l’Économie et aux Finances Commentaires sur le rapport Séguin Le mercredi 13 mars 2002
(Seize heures sept minutes)]
[ M. Landry: Oui, ma collègue aussi peut-être va compléter ce que j’ai à dire. Bon. Alors, on veut vous parler essentiellement du rapport de la commission Séguin sur le déséquilibre fiscal pour souligner qu’il s’agit d’un instrument extrêmement précieux non seulement pour le gouvernement, mais pour les partis politiques à l’Assemblée nationale et pour la société tout entière, tous les groupes qui s’intéressent à la question du partage des ressources entre le gouvernement central et le gouvernement du Québec. Je dirais même que certains de nos prédécesseurs, quelle que soit leur allégeance politique, auraient été très heureux d’avoir un tel document entre les mains. Je pense à Gérard D. Lévesque, qui faisait ses imprécations habituelles sur le mauvais partage des ressources. Et ce que ce document établit clairement et avec une preuve d’une force extrême, c’est ce que nous avons dit bien simplement, nous et les libéraux avant nous: Les besoins sont à Québec et l’argent est à Ottawa.
Mais là, la commission, avec un très grand soin, une des précautions prises étant d’ailleurs de mettre le Conference Board à l’oeuvre avec elle pour accéder à une expertise plus vaste et plus neutre d’une certaine façon, le Conference Board ne peut aucunement être sous influence du gouvernement du Québec, comme chacun sait, ni du gouvernement du Canada, du reste. Avec une force donc inégalée que c’est une sorte de tragédie qui se prépare pour le gouvernement du Québec et le gouvernement des provinces. Sous quelle forme cette tragédie se prépare-t-elle, et existe-t-elle déjà? Elle est sous la forme d’un endettement de plus en plus considérable du gouvernement du Québec, donc de la jeunesse québécoise, de nos enfants et de nos petits-enfants parce que les projections sont longues et on voit qu’il va manquer de l’argent au Québec à chaque année. Ce que le Québec devrait faire, c’est plutôt réduire sa dette parce que là, actuellement, on stérilise 6000000000 $ par année pour payer des intérêts sur cette dette. Le fédéral, lui, va faire le contraire. En payant sa dette, il va réactiver des montants qui vont aujourd’hui à la dette et ça va lui créer des surplus énormes, à hauteur de 90000000000 $ dans une seule année à la fin de la période. Et le Conference Board est conservateur, on le voit bien parce que le Conference Board avait pensé qu’à cause des événements du 11 septembre et de la récession, on aurait des années creuses à Ottawa. Pas du tout, les années ne sont pas creuses à Ottawa, on est déjà actuellement dans des surplus de 6 ou 7000000000 $, suivant les estimés conservateurs. Alors, le premier élément de la tragédie, c’est l’endettement des générations futures au Québec. Le deuxième élément, il est plus contemporain puis il va être actuel à chaque année, c’est le manque de ressources pour les tâches fondamentales comme la santé, l’éducation et les transferts sociaux. Alors, ce n’est pas juste un document théorique qui démontre des surplus à Ottawa et la misère à Québec et dans certaines provinces. C’est un document qui doit donner le signal à ceux et celles qui se préoccupent de soins de santé, qui sont inquiets même des soins de santé, qu’il faut des moyens que normalement nous devrions avoir et que le déséquilibre fiscal nous empêche d’avoir et à hauteur de plusieurs milliards de dollars de plus chaque année. C’est vrai que la santé c’est une question de gestion. Oui. Mais, la gestion a ses limites. C’est aussi une question d’argent. Vous connaissez les paramètres qui changent à cause du vieillissement de la population, du progrès technologique et tous les autres. D’ailleurs, un des premiers groupes à réagir, c’est justement un groupe de la santé, là, qui nous a émis un communiqué que vous avez entre les mains.
[ Mme Marois: La Fédération des médecins spécialistes. ]
[ M. Landry:] Une fédération de médecins qui… Là, de nombreux groupes ont déjà réagi, vous le savez, et beaucoup d’autres vont se rendre compte de l’impact dans leur secteur. Alors là, le communiqué, c’est: Fédération des médecins spécialistes, le rapport fiscal et les transferts fédéraux urgents pour la santé des Québécois. Bon, alors, voici les fondements de ce que nous apprend le rapport Séguin. Il s’est passé, dans les heures de sa publication, une chose pas très édifiante. Et vous vous souvenez, quand il a été question de ce 500000000 $ d’erreur de calcul statistique, que nous avons dit: La bonne foi se présume, vous vous souvenez de ça. Mais là, quand quelqu’un comme le ministre des Finances du Canada, en une heure, rejette du revers de la main l’étude Séguin, l’étude du Conference Board, en niant le déséquilibre fiscal et en disant que c’est un mythe, là, sa bonne foi reste à prouver.
Le ministre des Finances du Canada a agi d’une façon cavalière avec une étude sérieuse de la commission Séguin, un homme éminemment respectable et une équipe très savante autour de lui, rejeté du revers de la main ainsi que le travail du Conference Board. Nous pensons que ce n’est pas correct et nous exigeons du gouvernement du Canada et de son ministre des Finances une réponse articulée et non pas un rejet du revers de la main.
D’autant plus que ce que dit la commission Séguin ressemble étrangement à ce que j’entends et que ma collègue entend dans les conférences fédérales-provinciales, dernières conférences des premiers ministres, les deux dernières, vous vous souvenez, Victoria et Vancouver, où tout le monde pouvant diverger sur les moyens de correction s’entend sur le fait que les provinces manquent de ressources pour leurs tâches fondamentales. C’est un déficit non seulement financier, mais c’est aussi un déficit démocratique parce qu’évidemment les gouvernements qui donnent les services sont plus à risque d’être blâmés par leur population. Quand il y a une grève d’infirmières dans quelque province que ce soit, on scande ou on écrit sur les pancartes les noms des premiers ministres des provinces et les ministre de la Santé, les présidents du Conseil du trésor, c’est un déséquilibre démocratique. La cible n’est pas… c’est plus donc qu’un déséquilibre fiscal parce que les citoyens et les citoyennes sont confondus dans la cible à sanctionner politiquement ou à attaquer politiquement, ce qui rend dans certaines provinces — au Québec, on a connu des événements malheureux, on a eu une grève d’infirmières — la démocratie beaucoup moins transparente qu’elle ne devrait être.
Quelques derniers points, que je mentionne en dernier mais qui sont majeurs. Ce document, il peut être utile au Parti libéral du Québec, à l’Action démocratique du Québec, Parti libéral qui a la proposition constitutionnelle que l’on sait, la plus faible de l’histoire contemporaine du Québec, ou l’Action démocratique qui a évoqué déjà l’union confédérale, ou le Parti québécois. Le document est utile aux trois formations politiques.
En quoi est-il utile à la nôtre qui est une formation politique souverainiste? Cela doit être dit haut et clair. Premièrement, si le Québec avait voté oui en 1995, le sujet de notre conférence de presse d’aujourd’hui serait différent parce que le problème serait déjà réglé et derrière nous. On ne parlerait pas de transfert de points d’impôts ou de TPS, on aurait 100 % de la fiscalité, comme le demandait d’ailleurs Daniel Johnson, le père, même dans un contexte de non-souveraineté. Alors, nous ne renonçons aucunement à doter la nation québécoise de l’ensemble de ses moyens fiscaux, et ce, le plus tôt possible, on vous l’a dit souvent. Je ne peux pas faire des référendums à chaque année, et notre idéal n’est pas référendaire, il est souverainiste, mais le plus tôt sera le mieux. C’est ça la façon de régler le problème et de responsabiliser tout le monde à tous les niveaux et d’effacer le déficit démocratique, sauf que le Québec n’est pas souverain, et l’étude dit que cette année, comme les années précédentes… parce que le Conference Board projette le passé sur l’avenir. Donc, depuis plusieurs années, et cette année, et l’année d’après, et l’année d’après, le Québec va être privé de moyens qui légitimement devraient être les siens.
Alors, oui, nous sommes souverainistes, mais nous gouvernons en attendant la souveraineté et nous entendons nous servir de cette étude pour amener le gouvernement du Canada le plus rapidement possible à reconnaître son erreur, premièrement, et, deuxièmement, à la corriger. Et, pour ce faire, dans les jours qui viennent, je vais rencontrer le chef de l’opposition officielle et le député de Rivière-du-Loup pour discuter avec eux de la meilleure façon possible pour que ce rapport serve à l’ensemble de la société québécoise.
Alors, nous ferons avec eux le plan d’action le plus complet possible en les invitant à chercher l’intérêt du Québec au-delà des partis, puisque je le redis, il y a dans ce rapport de quoi faire réfléchir l’ensemble de la population, tous partis politiques confondus. Est-ce que ma collègue a des choses à…
[ Mme Marois: Oui, très brièvement. En fait, on a
entre les
mains le résultat d’un travail de très grande qualité, je pense qu’on était tous convenu ensemble. La commission présidée par M. Séguin nous permet de clarifier et d’expliquer un problème qui est quand même très complexe, je pense qu’on va aussi convenir de cela ensemble. Mais, en même temps qu’elle réussit à expliquer ça, je crois, très bien, elle nous fait un certain nombre de recommandations qui nous apparaissent particulièrement convaincantes à cet égard.
Pour moi, ce qui est à ce moment-ci très important, c’est que le fédéral doit faire face à ces résultats avec le plus de sang-froid possible, d’honnêteté et de franchise aussi, parce qu’il doit avoir, comme nous, en tête l’intérêt des citoyens et des citoyennes du Québec. Et je crois que M. Martin doit prendre tout le temps nécessaire pour se pencher de façon sérieuse sur le rapport parce que, dans le fond, c’est d’abord au gouvernement fédéral que le rapport s’adresse puisque c’est lui qui est très clairement interpellé. En fait, c’est un tableau absolument implacable, il est même limpide sur l’état actuel des relations financières intergouvernementales et surtout, surtout des conséquences qui en résultent pour tous les citoyens et citoyennes du Québec et des réponses qu’on doit y apporter.
En fait, la projection des équilibres financiers sur les prochaines
années, suite à l’étude faite par le Conference Board du Canada, démontre hors de tout doute le caractère complètement inacceptable du partage actuel des moyens financiers au Canada. Et la commission Séguin nous dit: Les provinces devraient bénéficier de moyens supplémentaires pour répondre aux besoins que les citoyens considèrent comme prioritaires. Et c’est à juste titre que les citoyens considèrent ces besoins comme prioritaires quand on pense entre autres à la santé, aux problèmes de pauvreté, aux réalités en matière d’éducation, ça va de soi.
En fait, on parle à court terme de 8000000000 $ qui devraient revenir aux provinces, dont on évalue environ que 2000000000 $ devraient revenir au Québec. Imaginez ce que ça pourrait signifier que 2000000000 $ de plus pour répondre aux besoins de nos concitoyens. Regardez ce qui se passe du côté de la santé, c’est très difficile. Regardez ce qui se passe du côté du support à l’emploi, à l’insertion sociale. Regardez ce qui se passe du côté des politiques familiales. Imaginez comment nous pourrions entre autres accélérer l’implantation de certaines de nos grandes politiques en ces matières, qui sont de l’ordre de la prévention.
En fait, la commission, elle va assez loin dans
ses recommandations. D’abord, elle explique que le déséquilibre fiscal provient du caractère inadéquat du programme et des programmes de transfert actuels, en particulier le transfert social canadien qui constitue, selon elle, l’illustration de ce que l’on appelle le pouvoir fédéral de dépenser. Et on met toujours ça entre guillemets, parce qu’on nous fait,
-dans les analyses qui suivent, la démonstration que ce ne serait pas constitutionnel. Donc, la Commission nous recommande qu’on supprime le transfert social canadien et qu’on le remplace par un espace fiscal qui serait abandonné par Ottawa au profit, bien sûr, des provinces.
La Commission marque une préférence, l’occupation du champ de la
taxe sur les produits et services, mais elle n’exclut pas, et le démontre assez bien aussi, comment nous pourrions réallouer le champ fiscal qui concerne l’impôt des particuliers. Et, à cet égard, je crois que la discussion doit demeurer ouverte, ces deux avenues sont toujours là. Elle propose aussi une refonte majeure du programme de péréquation. Ça a fait l’objet de discussions entre les premiers ministres, entre les ministres des Finances et entre tous les ministres sectoriels, et en particulier les ministres de la Santé, depuis de nombreuses années. -Donc, nous accueillons favorablement le rapport, et il y a un
consensus qui se dégage du côté des différentes organisations et institutions ici, au Québec. Et je dirais que, par simple respect pour les Québécoises et les Québécois, qui se reconnaissent sûrement dans les préoccupations de la commission Séguin, je crois que le fédéral a le devoir, le gouvernement fédéral a le devoir d’entamer, et cela, de façon approfondie, des échanges avec nous à partir des travaux présentés par la commission Séguin.
Dans cette perspective, j’ai déjà demandé que ce rapport soit
à l’ordre du jour de la prochaine conférence des ministres des Finances qui se tiendra en avril prochain. Et j’annonce aujourd’hui que j’entame une tournée auprès de mes collègues des autres provinces pour discuter avec eux des solutions qui sont proposées par la commission Séguin et de la stratégie sur laquelle nous pourrions travailler à cet égard avec mes collègues des autres provinces.
Vous savez que la commission a pris soin d’effectuer une analyse qui s’applique à l’ensemble des provinces. C’est ce que, bien sûr, je soulignerai à mes collègues. J’ai eu d’ailleurs l’occasion de le faire à d’autres reprises, soit comme ministre de la Santé et, pendant un court moment, comme ministre des Finances où, déjà, le Québec avait réclamé des points d’impôts à Ottawa. Il se situait dans la droite lignée de d’autres premiers ministres qui l’avaient demandé avant ou d’autres ministres des Finances dont, entre autres, Gérard D. Lévesque, le premier ministre actuel, M. Bouchard, et je l’avais fait aussi, comme ministre des Finances à la fin de l’année 1995.
Alors, nous sommes prêts, nous, à ouvrir la
discussion, à regarder sérieusement les hypothèses qui sont là, à confronter nos chiffres. Nos chiffres, ils sont simples. Pendant que le Québec aura à subir année après année un déficit de près de 3000000000 $ en moyenne, il s’accumulera à Ottawa, à la fin de la même période, un surplus de 90000000000 $ et on aura réduit à toutes fins pratiques à quelques dizaines de milliards de dollars la dette fédérale alors que la dette québécoise, elle, aura augmenté de 60000000000 $.
Je pense que ça mérite au moins qu’on s’arrête sur ces données.
M. White (Patrick): Première question, Denis Lessard, La
Presse.
M. Lessard (Denis): Deux questions, M. le premier
ministre.
La commission Séguin propose de récupérer la totalité de la TPS, cette assiette-là. Je pense que la veille ou deux jours avant le dépôt du rapport, vous sembliez dire que vous n’étiez pas d’accord avec cette avenue-là, que vous préfériez des points d’impôt.]
[ M. Landry:] On n’a pas choisi encore.
[ M. Lessard (Denis): Pardon?]
[ M. Landry:] On n’a pas choisi encore. La position traditionnelle du Québec, c’est points d’impôt. Là, -on a reçu le rapport, on l’a étudié attentivement et on réserve notre choix pour plusieurs raisons. D’abord, parce qu’on aimerait bien que d’autres provinces épousent une position analogue à la nôtre, en termes de choix, une ou deux ou trois ou toutes.
C’est pour ça qu’il faudrait avoir une discussion avec eux et ma collègue va faire le tour des capitales et des ministres des Finances. Et la deuxième raison, c’est que tout ça se réglera dans une discussion avec le gouvernement fédéral qui peut, lui aussi, avoir des préférences et avoir des arguments en faveur d’une formule plutôt que l’autre qui nous conviendrait.
[ M. Lessard (Denis): Deuxième question: Vous
dites… Ça fait
plusieurs années qu’on dit que le pouvoir fédéral de dépenser est inconstitutionnel. Vous avez fait des références en cour sur les jeunes contrevenants, sur
les congés parentaux. Pourquoi ne pas tester ça devant les tribunaux?]
[ M. Landry:] Ce n’est pas exclu. Ce n’est pas exclu. On a les juristes à l’oeuvre. Vous connaissez les thèses en présence, elles sont vieilles comme le monde. C’était déjà comme ça du temps de Jean Lesage. Actuellement, c’est un [obiter dictum], c’est-à-dire à peu près une phrase accidentelle dans un jugement qui fonde le pouvoir fédéral de dépenser. Si on va en référer, ou c’est confirmé ou ça saute. Alors, il faut voir ce qui, toujours dans une stratégie éventuelle avec d’autres provinces, serait le plus intéressant. C’est pour ça que notre opinion n’est pas totalement arrêtée.
[ M. White (Patrick): Deuxième question, Sophie
Langlois, Radio-
Canada.
Mme Langlois (Sophie): Oui, M. Landry, Robert Bourassa s’est battu. Le superfédéraliste Robert Bourassa s’est battu toute sa vie politique contre le pouvoir fédéral de dépenser et il pouvait être cinglant à l’égard d’Ottawa. Les mots les plus forts que vous avez aujourd’hui contre Ottawa, c’est que:
-«Le ministre des Finances fédéral agit de façon cavalière. Nous pensons que ce n’est pas correct.» Est-ce que ce n’est pas une réaction un peu molle face à une fin de non-recevoir implacable d’Ottawa?]
[ M. Landry:] Mais il y a une règle qu’Ottawa n’a pas suivie, mais qui est une règle stratégique également implacable. On ne tire pas la bombe atomique le premier jour de la guerre. S’il y a une escalade — ce que nous ne souhaitons pas — nous souhaitons qu’ils comprennent, comme ils ont compris dans le cas du 500000000 $ et rapidement, et qu’ils se mettent à table et qu’ils étudient en profondeur ce rapport Séguin et celui du Conference Board et nous donnent une réponse articulée.
Alors, c’est ça qu’on demande, toujours dans cette optique de bonne foi. La dernière fois, on vous a dit: La bonne foi se présume. Cette fois-ci, on vous dit un cran de plus: ils doivent la démontrer et on attend la réponse.
[ Mme Langlois (Sophie): Vous ne croyez pas qu’ils
n’ont pas
déjà démontré leur absence totale de volonté?]
[ M. Landry:] Bien, si c’est ça, c’est lamentable et ils en porteront le poids. Là, ils ont déjà dit non au gouvernement du Québec et non au chef de l’opposition officielle. Vous avez vu ça. Non à Landry, non à Charest. C’est trop vite et ce n’est pas acceptable comme réponse, surtout pour des fédéralistes. Autrement, le mot fédéraliste n’a plus aucun sens. Ça devient du centralisme impérialiste. Alors, on espère qu’ils vont s’amender de façon qu’on n’ait pas à employer ces deux mots. Il y avait fédéralisme dominateur aussi. Vous vous en souvenez.
[ Mme Marois: Prédateur avait été…]
[ M. Landry:] Prédateur. Tous les mots y ont passé. Alors, là, on veut bien, on veut bien une gradation, mais on veut, au nom de la population du Québec, une réponse digne, ce qu’on n’a pas eu jusqu’à maintenant.
[ M. White (Patrick): Paul Larocque, TVA.
M. Larocque (Paul): M. Landry, restons dans le même domaine.
Dans le concept de la riposte graduée avant, ultimement, pour lancer une bombe atomique, encore faut-il en avoir une. Vous allez rencontrer M. Dumont et M. Charest, qu’est-ce que vous allez leur proposer? L’idée du référendum, est-ce que c’est un scénario qui est vivant compte tenu de ce que M. Charest a dit, par exemple?]
[ M. Landry:] Je leur réserve la primeur. Il faut commencer par discuter avec eux des consensus existants et de ce que nous pouvons en faire en croyant qu’ils vont servir les meilleurs intérêts du Québec et on verra au fur et à mesure. On a des hypothèses de travail. Ma collègue et moi avons des hypothèses de travail, mais on ne parlera pas par hypothèses. On parlera quand on sera prêt à parler.
[ M. Larocque (Paul): Et le référendum en même temps
que
l’élection générale qui viendra, est-ce que c’est un scénario possible qui sera mis sur la table, là?]
[ M. Landry:] Pour l’instant, on ne parle pas par hypothèses. Là, ce qu’on a dit aujourd’hui est clair et ferme autant sur la souveraineté. Nous sommes des souverainistes et nous voulons 100 % des impôts et taxes mais, comme la souveraineté n’est pas réalisée et que ça nous coûte 3000000000 $ par année minimum plus des souffrances dans les hôpitaux, les écoles et dans les autres services, nous, souverainistes, demandons au gouvernement du Canada de corriger tout de suite.
[ M. White (Patrick): Marie-Paul Rouleau.]
[ M. Landry:] D’autres partis politiques pensent que ce n’est pas la solution. L’Action démocratique a déjà fait allusion à une union confédérale, dans une union confédérale, des choses comme ça n’arrivent pas.
[ M. White (Patrick): Marie-Paul Rouleau, Radio-
Canada.
Mme Rouleau (Marie-Paul): On voit dans les documents mêmes de
la commission Séguin que les points d’impôt que le gouvernement fédéral vous avait transférés il y a plusieurs années…]
[ M. Landry:] Il les a repris.
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): …on les exclut
aujourd’hui aussi
de la comptabilité qu’on fait. On dit même que si on comptait ces points d’impôt là, le gouvernement du Québec aurait 1100000000 $ de plus qu’à l’heure actuelle. ]
[ M. Landry:] Non. Ce que Séguin a démontré très astucieusement, c’est que les points d’impôt, en pratique, ils ne nous en ont jamais cédé. Ils en ont cédé de façon nominale et trois ans après, ils avaient tout repris et plus. On dit que… Séguin dit qu’il y aurait 6 points de concession qui pourraient équivaloir à zéro, en moins de deux ou trois ans, par le mécanisme de la perception fiscale et de l’assiette fiscale et des jeux qu’on peut y faire.
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): Mais, la question que je
voulais
poser est politique. C’est quoi l’avantage pour le gouvernement fédéral de céder des points d’impôt à des provinces qui, dix ans plus tard, nient l’effet de ces points d’impôt là?]
[ M. Landry:] Bien. C’est parce que ces points d’impôt n’ont plus d’effet. Il a tout repris. Alors, il y a un avantage politique pour eux, ils font semblant d’être généreux et ils ne le sont pas. D’ailleurs, là, on est au-delà de la politique, là. On est dans les hôpitaux. On est dans l’éducation, dans les transferts aux plus démunis. On est au coeur de la question, là. Le mot «chicane» ne peut pas s’appliquer, là. Le seul mot qui convient, c’est un débat nécessaire et en profondeur sur cette question.
[ Mme Rouleau (Marie-Paul): Une dernière question, si
vous me
permettez, Mme Marois. Le seul premier ministre provincial à avoir réagi à part évidemment M. Landry, c’est M. Calvert de la Saskatchewan, et il a rejeté l’idée, lui. Il a dit qu’on ne devait pas dépouiller le fédéral de ses moyens financiers. Alors, est-ce que vous ne pensez pas que vous allez prêcher dans le désert un peu avec l’idée du rapport Séguin? ]
[ Mme Marois: Il a dit cependant une première chose.
Il a dit
qu’il y avait un déséquilibre fiscal. Alors, ça, c’est au moins reconnaître les faits. Et après, il dit: «Le moyen que propose la commission dont, entre autres, le rapatriement de la taxe sur les produits et services n’apparaît pas le moyen adéquat et en prive le fédéral de certaines de ses ressources, etc.» Mais, l’important, c’est qu’il a reconnu ce déséquilibre-là. Après ça, il peut dire le moyen que vous proposez n’est pas le bon mais, dans les moyens qui sont proposés, il y a celui du transfert de points d’impôt ou du transfert des profits et des produits, pardon, de la TPS, ou, aussi, il suggère de modifier les règles qui concernent, par exemple, la péréquation. Dans le rapport que fait Séguin, il y a différentes avenues qu’on nous propose d’envisager, et je peux vous dire que de ces avenues-là, moi, j’ai déjà discuté avec mes homologues des Finances et aussi de la Santé
et des Services sociaux pour convenir qu’on devait agir en ce sens-là. Alors, je pense qu’il faut nuancer et, par ailleurs, moi, je suis
confiante, j’ai déjà commencé à parler à certains de mes collègues des autres provinces. D’abord, je leur ai envoyé déjà depuis, la commission s’est chargée d’envoyer le rapport, j’avais souhaité que la commission le fasse rapidement à tous mes homologues, et je vais les rencontrer systématiquement dans les semaines qui viennent. Déjà, les premiers échanges que j’ai eus s’avèrent quand même intéressants.
M. White (Patrick): Kevin Dougherty, The Gazette.
M. Dougherty (Kevin): M. Landry, je me demande, vous êtes souverainiste, ça, c’est clair.]
[ M. Landry:] Vous n’avez pas appris ça cet après-midi, Kevin.
[ M. Dougherty (Kevin): Non, mais là, il me semble
que c’est clair aussi que Séguin, c’est une approche fédéraliste. Alors, quand vous allez, Mme Marois aussi, vous allez visiter vos homologues dans les autres provinces, est-ce que… comment vous allez, comment vous pouvez
-avancer une proposition fédéraliste
tandis que vous êtes au fond souverainiste? C’est-à-dire c’est une question de crédibilité, et je suis sûr que certains Dion et compagnie vont dire: Mais de toute façon, il ne veut pas réparer le système fédéral, ce qu’il veut, c’est de sortir. Comment vous allez expliquer ça?]
[ M. Landry:] Là, je pense que la population est dans une belle position d’arbitrage. Le gouvernement du Québec est un gouvernement souverainiste, c’est la population du Québec qui le choisit, et ce gouvernement souverainiste, tant que la souveraineté n’est pas faite, est exemplaire dans le respect des lois, des institutions et de la Constitution. Alors, on travaille dans le cadre présent tant qu’on n’aura pas pu légitimement le changer. Et, dans le cas présent, on perd 3000000000 $ par année. Alors, c’est notre responsabilité, puis on a besoin de ça pour la santé, pour l’éducation.
Il tombe en même temps sous le sens que, pour des fédéralistes québécois, le diagnostic vaut également. Alors là, le gouvernement du Canada, qu’il soit en face de fédéralistes ou de souverainistes, il a à regarder le problème en face puis regarder la population en face. Au lieu de faire ça, il dit non au gouvernement actuel du Québec et il dit non à Jean Charest d’avance, au cas où il formerait le gouvernement.
Bien ça, pour la population, c’est une attitude qui n’est pas acceptable, surtout que, ce ne sont que des sondages, mais des sondages écrasants, que la population pense comme M. Séguin.
[ M. Dougherty (Kevin): Donc, il y a matière pour un
référendum
peut-être?]
[ M. Landry:] On verra. Je vous ai dit, on n’est pas ici pour discuter d’hypothèses, là on s’en tient aux faits, on les aligne les uns après les autres de la façon la plus solide possible et on agira en conséquence.
[ M. Séguin (Rhéal): Mme Marois, pourquoi utiliser
le rapport
Séguin pour faire le tour des autres provinces pour tenter de présenter une solution pour améliorer le fédéralisme alors que vous pouvez l’utiliser, ce rapport-là, pour faire de la pédagogie, justement, pour faire la promotion de votre option, la souveraineté?
Mme Marois: Mais je pense qu’il faut faire les
deux.
M. Séguin (Rhéal): …
Mme Marois: Pardon?
M. Séguin (Rhéal): Vous ne nous annoncez pas ça
aujourd’hui,
ce que vous faites, c’est que vous faites le tour du Canada pour améliorer le fédéralisme canadien.
Mme Marois: Alors, ce que l’on vous dit, c’est que, dans le cadre du fédéralisme actuel, il y a non seulement de l’iniquité, de l’injustice, il y a très objectivement un déséquilibre fiscal qui prive les citoyens du Québec de ressources qui leur permettraient d’avoir accès à de meilleurs services en santé, en éducation ou ailleurs. Nous sommes dans une fédération, enfin, de moins en moins, parce qu’on s’en va plutôt vers une centralisation des pouvoirs, mais nous sommes dans un système fédéral et, malheureusement, à mon point de vue, nous n’avons pas encore choisi de devenir souverains. Dans ce système fédéral, nous pensons que le Québec doit avoir sa juste part, et on va s’assurer de l’avoir par tous les moyens honnêtes et à notre disposition pour en convaincre, et mes homologues dans le cas des autres provinces, et nos vis-à-vis dans le cas d’Ottawa. En même temps
que, bien sûr, non seulement nous ne renonçons pas à la souveraineté, nous pensons que la véritable solution, elle passe par la souveraineté du peuple québécois qui posséderait tous ses outils et tous ses moyens et, dans ce sens-là, le rapport Séguin indique que le système actuel défavorise très clairement et très nettement le Québec et que, s’il n’est pas changé profondément, il risque de continuer de le faire.
Nous savons pour l’instant, la réponse d’Ottawa
n’est pas
très encourageante, mais, comme nous sommes déterminés à continuer à défendre les intérêts du Québec, on va y aller en toute bonne foi, de reproposer de débattre avec nous cette question, mais ça ne fera pas pour autant de nous des fédéralistes.]
[ M. Landry:] Oui. Vous avez quand même raison sur l’aspect pédagogique. Ce rapport est un puissant instrument pédagogique pour la souveraineté également. La souveraineté, c’est une chose généralement positive, c’est le fait pour une nation de contrôler son destin, de converser avec les autres nations, de participer au Sommet, de faire contrepoids aux effets néfastes de la globalisation, de préserver sa culture, sa langue, ses institutions, sa solidarité. Ça, c’est les raisons identitaires, les raisons internationales, les raisons nationales classiques, mais il y a une pédagogie par la négative, en plus le système fédéral nous conduit à la ruine et à l’endettement perpétuel. Moi, j’aime bien être positif et j’aime mieux être positif dans la pédagogie souverainiste, mais il faut aussi mettre le doigt sur le très grave déséquilibre démocratique du fédéralisme et son déséquilibre financier. Toutes ces raisons-là font partie d’une argumentation globale. Pour les libéraux, ce sera autre chose; ils vont se servir juste du côté négatif pour dire, bien: Il faut notre argent, puis etc. Très bien, ils peuvent faire ça, c’est ça, la beauté du rapport Séguin.
[ M. Séguin (Rhéal): Mais après avoir essuyé un
refus, en
décembre 1995, sur les points d’impôt, Mme Marois,
immédiatement après le référendum de 1995, après avoir essuyé un refus sur l’union sociale, qu’est-ce qui vous fait croire que maintenant, les provinces, qui vous ont refusé vos demandes dans le passé, vont soudainement dire: Voilà une brillante idée pour améliorer le fédéralisme?]
[ M. Landry:] Ce n’est pas les provinces qui ont refusé, remarquez, là, c’est Ottawa. Moi, je participe, là, aux réunions des premiers ministres des provinces et, sur ces questions — je ne parle pas de la souveraineté, bien entendu — Mike Harris a des mots aussi durs que les miens, sinon plus durs. Vous vous souvenez du fameux discours d’Ottawa, il y a peu de temps, là. Alors, ce n’est pas… Dans cet aspect négatif du mauvais fonctionnement du fédéralisme, ce n’est pas une question québéco-québécoise. Tout le monde souffre. Vous savez ce qu’il a dit, Mike Harris? Il est écrasé: il a 50 % des dépenses de son gouvernement provincial, comme il dit, qui vont en santé, alors il est acculé au pied du mur, comme nous. Mais pour nous, c’est plus grave, parce que c’est l’endettement national du Québec à perpétuité.
[ M. White (Patrick): Robert Dutrisac, Le Devoir.
M. Dutrisac (Robert): On peut … avec le rapport Séguin dans
le sens suivant. C’est qu’il évacue totalement l’aspect politique du débat, c’est-à-dire que ce déséquilibre fiscal présumé est essentiellement une manifestation de la volonté politique canadienne d’exercer certains pouvoirs, pouvoirs qu’il exerce par son pouvoir de dépenser, notamment, et d’être… C’est une volonté politique de la fédération canadienne d’augmenter sa présence auprès de la population dans des services bien précis, etc., et cette volonté politique là, elle est en quelque sorte appuyée par une certaine part de la population.
Autrement dit, ce que je me demande, c’est: Que va faire le Québec,
là, d’autant plus que les deux partis d’opposition, le Parti libéral et le parti de Mario Dumont, l’ADQ, ont rejeté l’idée d’un référendum sur cette question-là? Que, finalement, va faire le Québec, pour contrer cette volonté politique là? Parce qu’il n’y a pas grand…]
[ M. Landry:] Bon. Je l’ai dit, on va aller voir les dirigeants des autres partis puis leur offrir des actions communes. Il y en a qui peuvent aimer, d’autres moins aimer; ce qui est important, c’est qu’on s’entende sur des actions communes. Et si nous ne nous entendons pas sur des actions communes, le gouvernement a le devoir d’agir, et on décidera de l’action au fur et à mesure. Parce que nous nous sentons solidement appuyés par la population du Québec déjà. Et s’il faut que ces appuis prennent d’autres formes, on verra. Nous ne sommes pas dans les hypothèses, là, c’est l’action qui progresse.
[ M. Dutrisac (Robert): C’est l’action et
l’échéancier pour
cette action-là. Autrement dit, combien de temps vous allez laisser aux autres provinces…]
[ M. Landry:] Bien, ça va être conditionné un peu par les réactions, là. Là, M. Martin, il doit répondre en regardant la population du Canada dans les yeux et dire: J’ai eu un rapport sérieux, fait par des gens sérieux venant du Québec, on l’a fait traduire en anglais, d’ailleurs, puis on l’a envoyé partout, plus l’étude du Conference Board. Dire en un quart d’heure ou quatre quarts d’heure — parce que c’est ça que ça lui a pris, à peu près — que c’est un mythe et c’est non au gouvernement actuel du Québec et c’est non à un éventuel autre gouvernement du Québec, si c’est libéral, ce n’est pas convenable.
Alors, M. Paul Martin, ministre des Finances du Canada, septième pays du G 7, doit répondre à la population du Québec et à un instrument intellectuel, le rapport Séguin, qui le met au défi de donner des réponses cohérentes.
[ M. Séguin (Rhéal): Vous savez qu’ils vont dire
non, ils le
disent, le répètent. Pourquoi vous vous entêtez à penser qu’ils vont pouvoir un jour changer d’idée et dire: Oui, c’est beau?]
[ M. Landry:] Il y a un prix politique à nier la réalité et à avouer, au fond, qu’ils ne sont pas fédéralistes mais qu’ils sont centralistes. C’est un peu ça que la question de votre collègue implique.
[ M. Séguin (Rhéal): …M. Landry.]
[ M. Landry:] Oui, mais les idées politiques puis les cultures politiques évoluent lentement. Je ne rappellerai pas, pour la millième fois, qu’il y avait 1 % de souverainistes au Québec en 1960. Les idées évoluent.
[ M. White (Patrick): Louis Tanguay, Le Soleil.
M. Tanguay (Louis): Mme Marois, qu’est-ce que vous allez
faire pour éviter de retomber dans le déficit que le rapport Séguin laisse présager?]
[ Mme Marois: Nous allons faire ce que nous avons
fait depuis
quelques années, nous allons bien gérer les finances publiques du Québec. Et cela nous mène à faire des choix parfois déchirants entre des demandes importantes qui nous viennent de différents secteurs d’activité pour répondre à des besoins tout aussi importants. Et nous allons, comme d’habitude, agir avec rigueur et
aussi courage pour faire les choix les plus judicieux possible parce que nous ne pensons pas que c’est une solution non plus que de retomber dans l’endettement et déléguer ainsi aux générations futures une dette qui deviendrait absolument impossible à supporter. Parce que n’oubliez pas, là, que, si on applique l’hypothèse qu’a retenue le Conference Board — et je vous fais remarquer qu’ils sont tout à fait réalistes, pour ne pas dire conservateurs dans certains cas — non seulement nous n’attaquons pas la réduction de la
dette du Québec, mais elle augmente de 60000000000 $, ce qui est grave et inquiétant. Et à sa face même, évidemment, ça nous oblige à faire des choix rigoureux et exigeants.
Quand vous constatez que, dans les faits, et vous
le
retrouvez à l’annexe du Conference Board, quand on dit que les dépenses publiques en soins de santé vont croître à un rythme annuel moyen de 4,8 % entre 2000-2001 et 2019-2020, et je peux vous dire que, pour regarder le passé quant à la croissance de nos dépenses, ça a été plus élevé que cela, dans les dernières années. Si on compte tout le non-récurrent qu’on a mis année après année quand on a eu des surplus, je peux vous dire que ça a crû à un taux plus élevé que celui-là. Donc, les chiffres du Conference Board sont conservateurs à cet égard.]
[ M. Landry:] On est vraiment pris au piège parce que si on fait des déficits, disons qu’on serait laxiste puis qu’on ferait un déficit, l’année d’après, la dette est plus haute, il nous reste moins d’argent, le taux d’intérêt augmente et on stérilise de plus en plus de fonds qui, au lieu d’aller à la santé, vont aux banquiers de New York.
[ M. White (Patrick): Avant-dernière question en
français,
Claude Brunet, Radio-Canada.
M. Brunet (Claude): Plutôt sur les partielles, M.
Landry, si vous permettez: Six circonscriptions vacantes, un député qui n’est pas ministre, vous êtes à un an de la fin de votre mandat, pourquoi seulement trois partielles? Que craignez-vous en fait? Pourquoi manquez-vous de confiance?]
[ M. Landry:] On est à 20 mois, premièrement, de la fin de notre mandat. Non, on a un chef de l’opposition qui a fait partie du gouvernement le plus long de l’histoire du Canada à Ottawa et son prédécesseur libéral a eu le gouvernement le plus long de l’histoire du Québec. Alors, soyons de bon compte, la Constitution s’applique à tous et pour tout le monde. Et, deuxièmement, vous savez que la population ne réclame pas d’élection. C’est même le contraire. C’est même le contraire. Plusieurs analyses d’opinion, d’une façon mais vraiment écrasante, démontrent que la population ne veut pas d’élection générale. Alors, on suit la loi, puis on fait des partielles et quand une circonscription devient vacante, c’est pour ça d’ailleurs que la loi dit six mois, il faut se réorganiser. Il faut parfois panser des blessures. Il faut donner le temps aux divers candidats et candidates à la succession de se préparer, de vendre des cartes pour les conventions, etc. Tout ça, c’est le processus démocratique.
Dans certains partis, vous le savez, ils disent: Tu seras la candidate ou le candidat, ça finit là. Ce n’est pas exemplaire, puis ce n’est pas comme ça chez nous.
[ M. Lessard (Denis): En décembre, vous avez dit, M.
Landry,
qu’il n’était pas question que des candidats du Bloc viennent sur la scène provinciale. Aujourd’hui, je pense que M. Tremblay va s’annoncer dans Lac-Saint-Jean. Est-ce que vous êtes favorable?]
[ M. Landry:] J’ai vu M. Tremblay, puis j’ai parlé à M. Duceppe. Nous ne souhaitons pas, ni M. Duceppe, ni moi, que des députés du Bloc viennent briguer des candidatures au Québec. Cependant, dans le cas du Parti québécois, ce sont les militants et les militantes de la base qui décident dans des conventions. Et notre tradition est même à l’effet que les dirigeants du Parti ne cherchent pas à influencer ces conventions. René Lévesque, notre fondateur, l’a fait à plusieurs reprises et, à chaque fois, c’est la personne qu’il ne voulait pas qui était élue. Alors, si la personne que vous allez nommer pense qu’elle peut convaincre une majorité de militants et de militantes dans une investiture, bien nous allons laisser la démocratie jouer. Mais nous ne souhaitons pas, d’une façon générale, ni M. Duceppe ni moi, que ce phénomène soit encouragé ou généralisé.
[ M. Lavoie (Gilbert): Gilbert Lavoie, Le Soleil.
Puisqu’on est
rendu dams les partielles, M. le premier ministre, comment expliquez-vous que les fonctionnaires des relations extérieures aient préparé un document pour la nomination de… parlant de possibilités de nomination de David Payne à Hong-Kong? Est-ce que c’est une demande politique ou…]
[ M. Landry:] Non, pas du tout. David Payne, depuis très longtemps, rêve de diplomatie internationale et rêve de diplomatie internationale en Asie et plus précisément en Chine, car il parle plus ou moins cette langue et sa conjointe est chinoise. Cela dit, on n’a aucune décision de prise et M. Payne est député et il va rester député le temps qu’il le souhaitera.
[ M. Lavoie (Gilbert): Alors, c’est écarté, cette
possibilité-
là, si je comprends bien?]
¸[ M. Landry:] C’est ni infirmé ni confirmé. C’est théorique.
[ M. Lavoie (Gilbert): Bon. Maintenant, ma question
sur le
rapport Séguin. Dans la principale critique qui a été faite par M. Martin, c’est que les projections sur 20 ans, c’est peut-être bon en théorie. Mais, en pratique, c’est souvent dépassé par les événements.]
[ M. Landry:] Moi, je pense que M. Martin a tort et le Conference Board lui donne tort. En prenant les propres méthodes du gouvernement du Canada, les prévisions les plus fiables, c’est celles qui sont sur le long terme. Les dangereuses, c’est les conjoncturelles parce qu’on peut avoir un accident de conjoncture. On peut dire: Les trente glorieuses par exemple après la guerre. Ça a monté comme ça tout le temps et les prévisions étaient sur 30 ans de prospérité. On les a eues. Mais il y a eu des dents de scie plus graves durant les 30 ans. Alors, le court terme est dangereux et le Conference Board le sait et M. Martin le sait parce que tous les ministères du gouvernement du Canada font des analyses à long terme. Et, dans le cas de la méthodologie du Conference Board cette fois-ci, en plus, ce n’est pas une simple projection théorique sur l’avenir. C’est la projection du passé sur l’avenir. Le passé est garant de l’avenir. Ils ont vu comment ça s’était passé au cours d’un certain nombre d’années et ils disent: La tendance se maintient et elle va se maintenir parce que le gouvernement fédéral collecte 60% des impôts. Ça va donner le résultat que l’on sait.
Alors, je soumets respectueusement à M. Martin qu’il a tort et qu’il commet une grave erreur méthodologique.
[ (Fin à 16 h 57)]
[QLDRY20020415cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Résultat des élections partielles du 15 avril Le mardi 16 avril 2002 (Neuf heures dix minutes) ]
[ M. Landry:] Alors, je vais d’abord faire le geste démocratique qui s’impose en premier, c’est de féliciter les candidats et les candidates, ceux et celles qui se sont présentés dans ces élections complémentaires. Je les félicite évidemment sans exception mais je félicite chaleureusement les élus qui ont eu la confiance de la population. J’ai remarqué avec beaucoup d’intérêt que les candidats et les candidates sont des jeunes, ça veut dire qu’il y a une relève de la classe politique au Québec et c’est un excellent signe pour notre santé démocratique. Je félicite évidemment le chef de l’Action démocratique pour le doublement de ses effectifs, premièrement; si ça m’arrivait à moi, il n’y aurait plus de place dans l’Assemblée nationale. Et je le félicite aussi pour la campagne qu’il a faite, il a fait une campagne de terrain. C’est vrai qu’il n’est pas retenu par la nécessité de gouverner, mais il est allé sur le terrain beaucoup plus qu’un gouvernant ne peut le faire, il a fait son travail. Dans des élections complémentaires, dont notre parti n’a pas la spécialité comme chacun sait, il y a des enjeux locaux qui nous limitent un peu dans notre interprétation générale. Il est sûr que dans Saguenay on a fait face à ce que j’appelle l’angoisse des régions-ressources, pas parce que le gouvernement s’en désintéresse, mais parce que les politiques mises en place, qui sont vigoureuses — les exemptions fiscales, etc., les CNE — n’ont pas donné tous leurs fruits encore, de même que la politique nationale de la ruralité. Alors, les régions font des analyses assez angoissées: exode des populations, etc. Ça explique en partie. Et, dans le cas de Saguenay, il y a eu une décision découlant d’une stratégie économique globale du Québec dans le domaine de l’aluminium. Et ce que j’espère, c’est que, dans les mois qui vont venir, le comté de Saguenay retrouvera son intérêt parce qu’on discute en profondeur avec Alcoa puis on n’a pas l’intention d’arrêter, au contraire, on a l’intention d’accélérer les discussions. Et puis, on prend acte de ce que la population peut avoir à dire à un gouvernement en cours de mandat. Ce n’est pas le temps de changer de gouvernement mais c’est le temps de lui envoyer des signaux. On les reçoit ces signaux et on va essayer d’en faire le meilleur usage possible. Ce qui est intéressant aussi, c’est que Saguenay va encore être représenté par un député souverainiste. Ça, ça nous conforte dans notre voie de continuer à mettre de l’avant la solution de la question nationale du Québec. Plusieurs nous conseillaient, sans espoir, j’imagine, qu’on suivrait leur conseil, de parler moins de souveraineté, de façon à assurer de meilleures chances de réélection. Vous savez que ça va complètement à l’encontre de nos convictions et que ce n’est pas vrai non plus, puisque Saguenay vient de démontrer que le pourcentage de voix souverainistes est resté rigoureusement le même. Donc, la question nationale du Québec n’est pas réglée, elle doit rester d’actualité. Vous savez que j’en parle à chacune de mes apparitions publiques, ainsi que mes collègues et nos militants et nos militantes sur le terrain, et on a l’intention de continuer à le faire.
Ça dégonfle aussi largement le mythe que le Parti libéral serait devenu le parti des régions. Je pense que c’est une des consolations qu’on peut avoir, la chose est claire. Alors, qu’allons-nous faire à partir de maintenant? Bien, nous allons continuer à assurer au Québec une bonne gouvernance, comme on le fait depuis des mois et des mois. Le bilan des 12 mois depuis que je dirige ce gouvernement est économiquement plutôt bon: il y a eu 60000 emplois créés dans les trois premiers mois de l’année, je n’ai pas vu ça souvent dans ma vie; les finances publiques sont restées saines malgré le ralentissement qui a suivi le 11 septembre; nous avons posé des gestes historiques et porteurs d’immenses potentiels économiques en signant la «paix des braves» avec les Cris, et un autre entente historique avec les Inuits. Alors, nous allons continuer à nous attacher à la gouvernance.
Quand j’ai accepté la succession de Lucien Bouchard, je savais très bien que ce mandat que j’allais demander, ce nouveau mandat, succéderait à deux autres. Je connais assez le métier politique pour savoir quelle est la difficulté de cette chose, je l’ai assumée avant d’accepter et j’ai l’intention de continuer à gouverner et à persuader la population que ce qui est le meilleur choix pour le Québec, à la prochaine élection générale, c’est de me confier un nouveau mandat que je n’ai jamais eu, en fait, puisque j’ai continué le mandat de Lucien Bouchard. Voilà ce que j’avais à vous dire. Vous avez sans doute quelques questions.
[ Journaliste: M. Landry, en dépit du message…, si
je
comprends bien, vous ne… dans la conduite des affaires et votre orientation politique?]
[ M. Landry:] On va accentuer notre effort vis-à-vis les régions. On a déjà une série de mesures en place, des mesures fiscales, des mesures plus actives comme les CNE, les carrefours de la nouvelle économie, les mesures plus actives, comme la politique nationale de la ruralité. Alors, on va accélérer la mise en place et on va la peaufiner. Il y a une angoisse dans les régions, dans les régions-ressources, due au fait que le prix des matières premières est à son plus bas de l’histoire économique contemporaine, due au fait, qu’avec les Américains, on a des difficultés que vous savez, dues à des attitudes protectionnistes. Alors, plus, cette diminution relative du poids démographique des régions, tout ça, ça fait de l’angoisse, et l’ensemble du Québec doit, comme le gouvernement, être de plus en plus solidaire des régions-ressources. C’est ce que nous allons faire.
[ Journaliste: (Question inaudible)]
[ M. Landry:] Par région-ressource, j’entends Côte-Nord, Gaspésie, Saguenay—Lac-Saint-Jean et Abitibi. Vous savez que les autres régions vont bien.
[ Journaliste: …une troisième dans Saguenay…
certains
diraient une gifle envers vous, envers le gouvernement. Avez-vous l’intention… ]
[ M. Landry:] Je ne le prends pas comme ça. Bien, je pense que j’ai répondu à cette question. Je savais que les choses étaient difficiles quand j’ai décidé, en toute connaissance de cause, de remplacer Lucien Bouchard. Et ces risques, je les ai assumés d’avance, ces difficultés, je les ai intégrées d’avance, et j’ai l’intention de continuer à faire mon métier le plus courageusement et le plus honnêtement possible. Et mon métier, mais ça consiste à gouverner le Québec avec une très bonne équipe, et ça consiste à faire avancer la question nationale du Québec parce que je suis chef du gouvernement mais chef du Parti québécois aussi.
[ Journaliste: Est-ce que les résultats d’hier vous
amènent à
des élections uniquement en 2003, par exemple?]
[ M. Landry:] Bah, ça ne change pas grand-chose. La population ne réclamait pas d’élection. S’il y a une constante dans les sondages, c’est bien celle-là, et on fera des élections quand ce sera dans l’intérêt de la population, et qu’il y aura vraiment un désir apparent d’en avoir.
[ Journaliste: Est-ce que ça va amener une réflexion
sur la
question de la nomination des candidats, le choix…]
[ M. Landry:] Cette réflexion, elle a déjà été faite. C’est la base qui décide, et ça va rester comme ça. Je sais que, dans d’autres partis, c’est le chef qui désigne. Nous, c’est la base, mais la base elle-même doit réfléchir profondément à chaque fois qu’une candidature est présentée. Mais j’ai vu, moi, des candidats, des candidates, excellents de notre côté, dans cette élection-là. Notre candidate dans Saguenay connaissait ses dossiers parfaitement, est une femme qui a fait du bénévolat pendant 20 ans dans la région. Alors, je n’attribue pas du tout, ni à notre candidate dans Saguenay, ni à celle d’Anjou, ni à M. Villeneuve, le résultat des élections. C’est un phénomène beaucoup plus général qui va au-delà des personnes.
[ Journaliste: Prévoyez-vous…]
[ M. Landry:] C’est pour ça que je les ai félicités chaleureusement.
[ Journaliste: Croyez-vous êtes en mesure de
renverser un tant
soit peu la vapeur d’ici les prochaines partielles?]
[ M. Landry:] Ah bien, c’est ce que je vais essayer de faire de toutes mes forces. C’est ce que nous allons essayer de faire de toutes nos forces, avec notre équipe, avec notre nouvel organisateur, Rosaire Bertrand, avec notre nouveau directeur général du Parti. Et tout ça, c’est des choses qui sont stimulantes aussi. C’est des signaux extrêmement forts à redoubler d’ardeur et puis à faire notre métier de mieux en mieux.
[ Journaliste: Est-ce que David Levine va faire
partie des
prochaines partielles quelle que soit la date?]
[ M. Landry:] Je ne peux pas vous dire ni la date des partielles ni la séquence parce que la réflexion n’est pas terminée. On va y aller une chose à la fois.
[ Journaliste: Je comprends bien. Indépendamment de
la date,
est-ce que c’est concevable que M. Levine ne fasse pas partie de la prochaine tournée de partielles…]
[ M. Landry:] Mais on ne sait pas quand sera la prochaine tournée de partielles. Je ne suis pas assez avancé dans les décisions pour répondre à cette question.
[ Journaliste: …vous attribuez la… dans Saguenay
à avoir eu
des problèmes locaux, je ne sais pas… Une étude des régions-ressources, est-ce que la volonté de changement des gens que constatent les… est aussi un ingrédient important, selon vous?]
[ M. Landry:] Oui. Mais, ça, ça fait partie de la fatalité de rechercher un nouveau mandat pour un gouvernement qui en a déjà eu deux, mais ce sont les circonstances. On ne les a pas inventées. C’est là. On a été élus en 1994 et puis il faut persuader la population que, dans les circonstances, nous sommes encore le meilleur choix. Si on s’attache à la gouvernance, on a une bonne chance de faire cette preuve. Soixante mille emplois dans trois mois, encore une fois, je n’ai pas vu ça souvent dans ma vie, des finances publiques équilibrées comme on avait dit qu’on le ferait, des réinvestissements spectaculaires en éducation, en santé. Plus que ça, les chiffres sortent le premier vendredi du mois, vous le savez. Le premier vendredi du mois d’avril, qu’est-ce qu’on a appris? Il n’y a jamais eu dans l’histoire du Québec une proportion aussi élevée d’hommes et de femmes qui sont rentrés au travail le lundi. Le taux d’activité est à un niveau historique. Alors, il s’agit simplement d’en persuader la population puis de mieux nous expliquer et aussi de faire mieux.
S’il y a des domaines où… en économie c’est une chose, mais, là, l’équipe de la Santé, les trois hommes de la Santé sont à l’oeuvre d’une façon déchaînée pour améliorer, malgré le problème du déséquilibre fiscal, ce que nous faisons en santé. Les trois femmes en économie cherchent à améliorer encore davantage l’économie. Ceux du social préparent la lutte à la pauvreté et s’y consacrent déjà.
Alors, en faisant mieux, puis en expliquant mieux, ces deux choses on devrait arriver quelque part.
[ Journaliste: Est-ce qu’il y a aussi des
inconvénients à
attendre trop comme on disait… C’est vous qui avez à décider si vous y allez ou pas. Mais est-ce qu’il y a un inconvénient?
D’abord, plus on attend les gens vont…]
[ M. Landry:] Je ne vois pas ça comme ça. Je vois ça comme un travail à faire, comme un devoir à remplir et puis comme service à la population puis la population, dans toutes les façons de la consulter, ne demande pas d’élection.
[ (Fin à 9 h 26)]
[QLDRY20020612cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec, Mme Linda Goupil, ministred’État à la Solidarité sociale, à la Famille et à l’Enfance, Mme Nicole Léger, ministre déléguée à la Lutte contre
la pauvreté et l’exclusion, et Mme Jocelyne Caron, secrétaire d’État à la Condition féminine Présentation de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale Le mercredi 12 juin 2002 (Onze heures quarante minutes)]
[ M. Hébert (Michel): Alors, Mme Goupil, Mme Léger,
M. Landry
vont prendre la parole. Ensuite, vous me faites signe pour les questions.
Mme Goupil: Alors, voilà. Bonjour, tout le monde.
M. Landry, notre premier ministre, mes deux collègues qui m’accompagnent, Mme Léger qui est ministre déléguée à la Lutte contre la pauvreté et l’exclusion, ainsi que Mme Jocelyne Caron qui est secrétaire d’État à la Condition féminine, et, comme je le disais, c’est l’équipe de la Solidarité sociale.
Vous savez, les récentes données statistiques sur l’emploi démontrent hors de tout doute le potentiel du modèle québécois. Depuis le début de l’année, c’est 120 400 emplois qui ont été créés au Québec, et plus de la moitié des emplois qui ont été créés au Canada, et plus du double d’emplois qui ont été créés au Québec qu’en Ontario. Alors, ces résultats, nous les devons à un Québec qui est fort, un Québec qui se
compare avantageusement aux autres nations du monde. Ce Québec qui est plus fort et plus prospère, nous le devons aux Québécoises et aux Québécois entrepreneurs, travailleurs, travailleuses et porteurs de projets. Nous le devons aussi à des hommes et à des femmes qui ont su prendre des bonnes décisions au bon moment.
Et je voudrais en profiter pour indiquer que lorsque
notre
premier ministre, M. Landry, avant qu’il occupe ses fonctions, indiquait qu’il faisait de l’emploi, et surtout du chômage, une obsession, quand on regarde le chemin parcouru, on est passés à plus de 12 % à 8 %. Il reste que, concrètement, on a des résultats qui sont incontestables.
Quand je pense aussi à notre vice-première ministre, quand
elle a présenté ses deux derniers budgets, les énoncés budgétaires, et qu’on lui a dit qu’elle avait des lunettes roses, et quand on regarde toute la création du climat de confiance qui a été installé, qui a permis des mesures spécifiques pour soutenir l’emploi, on a permis à des femmes et à des hommes aussi de retrouver le chemin de l’emploi… Et, à cet égard, je vous parlerai tout à l’heure de certains chiffres.
Ce Québec qui est fort et prospère se doit donc d’être encore plus solidaire, plus solidaire envers nos concitoyennes et nos concitoyens qui, pour différentes raisons, ne bénéficient pas toujours autant du progrès collectif que nous vivons en ce moment.
Ce que nous proposons aujourd’hui aux Québécoises et Québécois, c’est un nouveau défi pour une meilleure égalité des chances, c’est un plan de match, c’est un contrat social qui interpelle à la fois tous les membres de notre société.
Que les femmes et les hommes du Québec puissent réaliser leur
plein potentiel et contribuer fièrement à la mesure de leurs capacités au progrès collectif, voici un projet qui est emballant, un projet qui se veut rassembleur; un projet aussi qui est à la hauteur d’une société -moderne qui, désormais, prend conscience plus que jamais qu’elle ne peut, pour son avenir social et économique, laisser personne de côté, une société qui a la volonté d’agir et qui a la force de réussir.
La richesse d’une société repose en grande partie sur
les
talents, les compétences des femmes et des hommes qui la composent. Il est démontré par de nombreux chercheurs et scientifiques que, lorsqu’il y a un trop grand espace ou inégalité
entre les citoyens, cela freine le développement économique et social. Par exemple, on sait que les personnes à faibles revenus ayant moins de moyens financiers ont moins accès au crédit, moins de chances d’atteindre un niveau élevé de scolarité, donc moins de chances d’avoir un emploi leur permettant d’exercer pleinement leur citoyenneté. Les inégalités sont également nuisibles à la cohésion sociale. On sait par exemple que, plus l’écart entre les riches et les pauvres existe, plus cet écart peut être une source de ressentiments pour les plus pauvres et ainsi nuire à leur volonté de participer à la vie économique et sociale.
Au contraire, la diminution des inégalités contribue à développer
une plus grande solidarité, un meilleur climat social et ainsi accroître le désir de tous à exercer pleinement sa citoyenneté, et ainsi contribuer à augmenter la croissance économique et sociale de sa communauté, de sa région et de son pays.
Le gouvernement du Québec et la société québécoise doivent
également tenir compte de deux données factuelles extrêmement importantes dans les choix qu’ils doivent faire maintenant. Je parle ici de notre déficit démographique qui, actuellement se situe à 1,4, et combiné au vieillissement accéléré de notre population qui, après le Japon, est l’endroit au monde où le rythme de vieillissement de la population âgée de 65 ans ou plus doublera en moins de 30 ans. Je vous ai apporté deux
tableaux — tout à l’heure, si vous souhaitez, on pourra juste les regarder — où on voit tout le phénomène du vieillissement de la population, où on se retrouve avec des personnes qui, d’ici 20 ans, au Québec, sur une période, doublera. C’est-à-dire, le nombre de personnes qui sont sur le marché du travail, il y en a le double, 65 ans et plus,
qui vont se retrouver à la retraite. Conséquemment, combiné avec un taux de natalité de 1,4, je vais vous dire, nous nous retrouvons actuellement dans une situation que, si nous n’avons pas une vision d’ensemble et un cadre d’action intégré, les coûts de la pauvreté vont exercer de plus en plus des pressions sur les finances publiques au fur et à mesure des changements démographiques. Et l’exclusion d’une partie des citoyennes et citoyens affectera la capacité de développement du Québec en le privant d’une main-d’oeuvre requise au cours des prochaines années.
– Ce défi, le gouvernement ne peut le relever seul. C’est pourquoi la
stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale s’appuiera sur une approche globale, intersectorielle, où l’ensemble des groupes de la société seront invités à apporter leur contribution. La stratégie se veut d’abord un cadre intégrateur aux politiques et aux plans d’action en matière sociale qui viennent d’être annoncées et celles qui le seront au cours des prochains mois dans le cadre d’un plan d’action.
La stratégie proposera des moyens de soutenir la prise en
charge régionale et locale, de lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale et de reconnaître la contribution des entreprises socialement responsables. La stratégie s’appuiera, en matière de prévention, sur des approches intégrées, mises de l’avant dans les divers ministères et organismes — et, tout à l’heure, Nicole pourra vous indiquer de façon plus spécifique les cinq grandes orientations que nous retrouvons dans notre
stratégie — également, un revenu de solidarité et, enfin, nous nous retrouvons avec une stratégie qui se concrétise dans un texte de loi.
Le projet de loi qui est déposé cet avant-midi constitue presque une première mondiale. Nos légistes, pour bâtir ce projet de loi, n’ont pu se référer qu’à un seul précédent, c’est la Loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, qui a été adoptée par le Parlement français. Ainsi, pour s’inspirer, nos collaborateurs ont puisé dans le projet de loi qui nous a été proposé par le Collectif pour une loi sur l’élimination de la
pauvreté et, à cet égard, nous tenons à les remercier de leur contribution. Ce projet de loi déposé ce matin constitue donc un grand projet de société, un projet original et unique, qui prend racine dans notre réalité nord-américaine.
Toutefois, l’expérience européenne nous a été grandement utile aussi, que ce soit l’expérience de la Grande-Bretagne avec sa stratégie d’«opportunity for all» mettant en oeuvre une série de mesures et de programmes qui visent la réduction de la
pauvreté; de la France, sur la Loi d’orientation relative à la Loi contre les exclusions. Et, finalement, comme le soulignait le programme des Nations unies pour le développement humain, Tendre vers un monde sans pauvreté — et je cite — «c’est un impératif moral en même temps qu’un but accessible.» La pauvreté n’est plus une fatalité. Pour les sociétés
comme
pour les individus, avec une volonté ferme d’agir, nous pouvons trouver la force de réussir. Désormais, par cette loi, les situations de pauvreté et d’exclusion feront l’objet d’une préoccupation constante et interpelleront l’ensemble de la société. Désormais, l’État et ses partenaires devront régulièrement rendre compte de leurs actions pour combattre la pauvreté et l’exclusion. C’est, désormais… Je veux être bien précise… ne discrédite nullement le travail qui a été accompli jusqu’à maintenant. Au contraire, l’engagement fondamental concrétisé par la loi s’inscrit dans la foulée d’une série de gestes en faveur d’un Québec qui est plus solidaire.
Rappelons quelques actions gouvernementales qui, depuis 1994, ont
permis de faire en sorte qu’une diminution importante… les prestataires de l’assistance-emploi puissent diminuer de façon importante. C’est près de 30 % de la population du Québec qui se retrouve actuellement soit en retour d’emploi ou en action pour justement poursuivre une formation scolaire leur permettant d’avoir de meilleures conditions salariales.
La création d’emplois sans précédent — 120000 emplois pour
les cinq premiers mois — je vais vous dire: Ne seraient-ce que ces données-là confirment qu’il y a eu des mesures spécifiques qui ont soutenu cette solidarité à l’égard des femmes et des hommes. Nous avons eu aussi l’application de la clause d’appauvrissement zéro pour les prestataires de l’aide sociale qui ont des contraintes sévères à l’emploi. On a instauré également, vous le savez, cette politique familiale. Le régime de perception des pensions alimentaires, le régime d’assurance médicaments, la nouvelle allocation de logement et bien d’autres mesures sociales avant-gardistes ont été nombreuses, lors des dernières années particulièrement. Il y a beaucoup de choses qui ont été faites aussi au niveau de l’emploi. On a mis en place Emploi-Québec et des centres locaux d’emploi. Des carrefours locaux d’emploi aussi ont permis aux chercheuses et aux chercheurs d’emploi d’avoir accès à des services publics d’emploi performants, diversifiés, regroupés sous un même toit et, surtout, accessibles à tous et à toutes.
Rappelons-nous la création du Fonds de lutte à la
pauvreté,
en 1997, par la réinsertion au travail, de Destination emploi, de Solidarité jeunesse, de Ma place au soleil, qui ont permis à
36000 personnes, depuis la création du Fonds, d’occuper un emploi, et cela, dans l’ensemble du territoire. Les derniers investissements qui ont été annoncés par les deux derniers budgets confirment que c’est plus de 1400000000 $ de sommes d’argent qui sont consacrées pour être en plus grande solidarité aux femmes et aux hommes qui en ont le plus besoin. Je pense notamment à l’indexation annuelle et automatique des prestations d’assistance-emploi pour toutes les personnes qui sont à l’aide sociale et qui sont aussi avec les mesures d’Action emploi.
Il faut se rappeler aussi au Québec qu’avec l’indexation des tables d’impôt, l’augmentation du nombre de personnes qui ne paient plus d’impôt, en 2002… les chiffres sont de 43 % de personnes qui ne paient plus d’impôt. Et quand on regarde ce
qu’était la proportion en 1982, c’est 27,9 % de gens qui, à ce moment-là, ne payaient pas d’impôt.
Malgré toutes ces avancées, il faut constater que
c’est une réalité qui existe, et à tous les jours on est confrontés, comme députés, dans nos bureaux, notre premier ministre est sollicité de part et d’autre, pour faire en sorte qu’on soit capables de se doter d’une intervention qui soit, je dirais, plus concertée, et c’est dans ce contexte-là que le travail qui a été amorcé par notre collègue, M. Jean Rochon, qui a été amorcé par Nicole tout au long de l’année et également avec Jocelyne qui s’occupe aussi les dossiers de la Condition féminine… Il nous fallait absolument être capables d’avoir une intervention qui soit globale. Lutter contre la pauvreté, ce n’est pas une chose qui est simple en soi, ça demande de l’intervention et ça demande surtout une stratégie d’intervention avec des actions précises.
Le plan concerté que nous allons… la stratégie que
nous
déposons aujourd’hui et le texte de loi nous permet de
se dire que, collectivement, on peut mieux utiliser nos ressources financières qui sont déjà importantes, être capables d’en ajouter pour permettre aux gens de se sortir de cette situation extrêmement difficile et, finalement, convenir ensemble que, d’ici 10 ans, nous nous engageons collectivement à faire en sorte qu’il y ait moins de personnes pauvres au Québec. Et vous avez, dans les documents qui vous ont été remis, différents tableaux dans lesquels on y retrouve quels sont les outils sur lesquels nous allons nous baser pour être capables de faire le débat en commission parlementaire.
Et je terminerais en vous disant que relever le défi de réussir à
diminuer le nombre de personnes qui vivent une situation de pauvreté et d’exclusion, c’est nous permettre individuellement et collectivement de devenir encore meilleurs.
Mme Léger (Nicole): Alors, M. le premier ministre, mes collègues Linda Goupil et Jocelyne Caron, représentants des médias, mesdames et messieurs. Le dépôt du projet de loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale me remplit de joie et de fierté. De joie d’être parmi vous pour présenter le fruit des travaux de validation et
d’échanges fréquents qui se sont tenus tout au long de la dernière année avec les groupes intéressés par cet enjeu. De fierté puisque le projet de loi et les moyens qu’il institue favorisent la mobilisation des forces vives qui désirent que le Québec poursuive sa marche vers une société plus équitable où toutes les citoyennes et tous les citoyens pourront vivre dignement et participer à la prospérité du Québec de demain.
Au printemps 2001, le premier ministre du Québec, M. Bernard
Landry, nous confiait la responsabilité de mener une importante démarche de mobilisation et de validation auprès des entreprises, des syndicats, des régions et des organismes communautaires qui côtoient les
personnes démunies au quotidien où les personnes elles-mêmes plus démunies et vivant dans la pauvreté témoignent de leur vécu. Ainsi, à l’automne dernier, avec le soutien des conseils régionaux de développement, une tournée des 17 régions du Québec a été réalisée, et les groupes visés étaient appelés à réagir et à valider le document d’orientation intitulé Ne laissez personne de côté, à s’en inspirer pour identifier leurs priorités régionales en matière de lutte contre la pauvreté.
Ces rencontres locales et régionales ont permis de rejoindre et de
recueillir les propos de
-représentantes et représentants de plus de 1000 organismes de toutes les régions du Québec. De plus, sept forums de discussions regroupant près de 50 organismes nationaux ont eu lieu. Ces rencontres de travail ont permis aux participantes et aux participants de s’exprimer ouvertement sur plusieurs questions spécifiques dans les domaines de la famille et l’enfance, de l’éducation, de la reconnaissance des acquis et des compétences des nouveaux arrivants, de l’intégration en emploi des jeunes, des communautés culturelles, du logement social et des préoccupations du milieu rural en ce qui a trait à la pauvreté.
Alors, l’élaboration de la stratégie nationale de
lutte
contre la pauvreté et l’exclusion sociale est également alimentée par l’apport d’un groupe-conseil regroupant des femmes et des
hommes provenant de tous les horizons de la société et des travaux de recherche-action qui sont venus soutenir les efforts en documentant les pistes d’action les plus prometteuses. Également, plusieurs rencontres avec le Collectif pour une loi sur l’élimination de la pauvreté ont permis de guider le gouvernement dans l’élaboration du projet de loi et de s’inspirer de cette grande démarche citoyenne.
Avec le dépôt de ce projet de loi, le Québec se
montre plus solidaire que jamais à l’endroit des personnes qui ont eu moins de chance dans la vie. Investir pour améliorer la société des plus démunis constitue un choix d’avenir pour le Québec. Notre préoccupation première est d’améliorer les conditions de vie des plus pauvres, favoriser leur autonomie et bâtir un Québec meilleur où chaque personne a sa place, peut mener une vie digne, peut participer selon ses capacités à la vie sociale et au progrès collectif, et cela, tout au long de sa vie.
Ce projet de loi vise à guider le gouvernement,
les partenaires socioéconomiques, les collectivités régionales et locales de même que les organismes du milieu vers la planification et la réalisation d’actions pour combattre la pauvreté en atténuant les effets sur les individus et les familles et contrer l’exclusion sociale.
Le projet de loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion
sociale institue quatre grands éléments: la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, le Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, l’Observatoire de la pauvreté et de l’exclusion sociale et un fonds pour appuyer les initiatives d’inclusion sociale.
La Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion
sociale va s’appliquer dans toutes les sphères de la société et va s’articuler autour de buts et d’orientations qui constituent une base solide pour l’élaboration d’un plan d’action d’envergure qui contiendra une foule de mesures qui toucheront tous les secteurs de la société et qui sera dévoilé cet automne.
Le Comité consultatif de lutte contre la pauvreté
et
l’exclusion sociale, quant à lui, aura pour mandat de conseiller le gouvernement dans l’élaboration, la mise en oeuvre et l’évaluation des actions prises dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
L’Observatoire de la pauvreté et de l’exclusion
sociale sera
un lieu d’observation, de recherche et d’échanges visant à fournir des informations qui soient fiables et objectives en matière de pauvreté et d’exclusion sociale. L’Observatoire vise à mesurer les progrès afin de maintenir le cap sur les objectifs et la mobilisation collective. Le Comité consultatif collaborera avec l’Observatoire de la pauvreté et l’exclusion sociale pour la mise en place d’indicateurs permettant d’évaluer les progrès réalisés dans l’atteinte des buts fixés dans le projet de loi.
Un fonds pour appuyer les initiatives d’inclusion
sociale,
qui prendra la relève du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail, sera un outil essentiel pour favoriser la prise en charge locale et régionale de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, un levier important pour la réalisation de projets novateurs sur les plan local et régional.
En terminant, permettez-moi de remercier toutes ces femmes et
tous ces hommes qui ont rendu possible, par leurs judicieux commentaires, l’élaboration de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
Le gouvernement du Québec s’est engagé fermement
depuis plusieurs années dans la lutte contre la pauvreté, mais il ne pouvait élaborer ce projet de société seul. Certes, il assume son leadership mais, en mettant de l’avant une stratégie, une loi, un plan d’action et une commission parlementaire, il place des éléments essentiels dans la durée, dans un débat public, avec des actions globales et intégrées, parce que les causes de la pauvreté sont multiples et complexes et entraînent des problématiques variées.
Le gouvernement du Québec doit pouvoir compter sur l’importante
participation de toutes celles et de tous ceux qui, comme nous, aspirent à un Québec plus solidaire, plus équitable pour toutes les Québécoises et tous les Québécois. Nous comptons à nouveau sur leur engagement afin de mener à bien la mise en application des mesures qui seront prévues dans le plan d’action. Merci. M. le premier ministre.]
[ M. Landry:] Le modèle québécois, ce n’est pas qu’un modèle économique, ce n’est pas qu’un modèle de création de la richesse; c’est un modèle socioéconomique. Et, souvent, les grandes orientations prises par notre société au cours des dernières années l’ont été dans des rencontres socioéconomiques, précisément. Et, lors de notre retour au pouvoir, nous avons eu à mener une opération plus administrative, plus budgétaire et économique que sociale. Nous avons pris la précaution quand même de baliser l’action sociale dans ces années difficiles par la clause d’appauvrissement zéro qui fait que ceux qu’on appelait les «inaptes» et ceux qui ont de sévères contraintes à l’emploi voyaient leurs moyens maintenus. Et nous avons créé, lors des mêmes périodes, le Fonds de lutte qui a été un instrument puissant, qui a eu des résultats intéressants. Mais ce n’était pas encore à la hauteur de nos aspirations. C’était à la hauteur de nos moyens. Mais nos moyens ont fini par augmenter. Et, en particulier, quand j’ai accepté de succéder à Lucien Bouchard, j’ai établi des lignes de base de mon action déjà dans mon discours d’acceptation, à Verchères, où j’ai bien dit que la création de la richesse, pour moi comme pour notre parti, n’est pas une fin en soi; il faut qu’elle soit accompagnée d’un effort articulé de redistribution de la richesse entre les individus comme entre les régions. C’est pourquoi, dès le discours inaugural de 2001, dès le discours d’ouverture, j’ai souligné que nous allons engager une action frontale de lutte contre la pauvreté, et c’est ce que nous avons fait dès ce moment. D’autres ministres ont été responsables, Jean Rochon, en particulier, qui s’est mis à l’oeuvre et, en fait, depuis 2001, c’est 1300000000 $ que le gouvernement a investis, en plus de tout ce qu’il fait déjà — parce que le Québec est déjà une société généreuse et répartitrice — dans des mesures de ce genre. On a même utilisé, à hauteur de 100000000 $, la fameuse réserve pour répondre à des besoins précis, et ça a donné en particuliers les petits déjeuners dans les écoles, les cuisines collectives, l’achat en commun, des initiatives qui ont été très appréciées et qui sont de portée très pratique.
Par la suite, dès que les premiers énoncés budgétaires sont venus, nous avons ajouté des mesures aussi dirigées directement vers cette lutte à l’exclusion et la pauvreté alors, en particulier, l’abolition de la pénalité de 50 $ par mois pour ceux qui partagent un logement, qui est déjà annoncée; des logements à prix abordable; construction de 13000 nouveaux logements; rénovation de 27000. Nous avons consolidé — et ça, c’est proprement québécois et c’est très efficace — près de 5000 organismes communautaires en portant nos contributions à plus de 500000000 $ par année. C’est une façon très québécoise de faire les choses, parce que ce n’est pas l’État qui agit directement, c’est des groupes communautaires, sur le terrain, où il y a beaucoup d’argent, mais beaucoup de dévouement aussi. Il y a plus de dévouement que d’argent. Donc, quand on met 500000000 $ là, il y a peut-être quelques milliards de dollars de travail et d’action là-dedans. Cependant, pour distribuer la richesse, il faut la créer. Alors, attaque frontale contre la pauvreté, oui, dont une des dimensions est la création de la richesse. Et, de ce point de vue, le modèle québécois réussit très bien aussi, vous le savez. Et ça va nous faciliter les choses pour mettre en place ce plan, puisque, chose jamais vue du reste, 120000 nouveaux emplois ont été créés dans cinq mois dans notre économie nationale. Même dans nos rêves les plus secrets, on ne pensait pas qu’une telle chose pouvait se faire en cinq mois. Et Robert Bourassa est passé à l’histoire pour l’avoir fait en 12. Au-delà de ces chiffres de création d’emplois, il y en a un qui est plus important encore. Il y a 3600000 de personnes qui travaillent au Québec actuellement. C’est le plus haut niveau de toute notre histoire. Alors, ça en fait autant qui, par leurs moyens, s’échappent de la pauvreté en tout ou en partie. Quand on travaille, on est déjà moins pauvre, même quand on est au bas de l’échelle des salaires, et vous savez qu’au bas de l’échelle des salaires, le Québec a des stimulants puissants pour que les gens améliorent leur condition ou que l’impôt ne leur prenne pas ce qu’ils gagnent. Ce qui fait que le nombre de ménages à l’aide sociale était de 813000 en mars 1996, il est de 563000 en mars 2002. Il y en a 30 % de moins. Donc, la lutte à la pauvreté et à l’exclusion, elle est menée sur plusieurs fronts et, bien sûr, sur le front de la création de la richesse. Mais ce n’est pas assez. Dans un État libéral ou néolibéral, on dit: Bon, au mieux, on va créer la richesse, on va laisser l’économie le faire, puis la redistribution se fera suivant les lois du marché. C’est l’économie de marché. Nous sommes d’accord avec l’économie de marché, nous récusons la société de marché. Alors, là, notre société se donne, par cette loi, par cette stratégie, par ce plan d’action, une obligation, face à toute la population et face aux plus démunis, d’accentuer considérablement l’effort pour baisser le nombre des gens que l’on appelle des pauvres ou des démunis.
Nos objectifs sont ambitieux et nous entendons dégager près de 600000000 $ annuellement pour assurer la mise en oeuvre du plan d’action, en plus de ce qu’on a annoncé depuis mars 2001. La société peut être fière de cet effort, peut être fière d’être capable de se le payer aussi puisque, moins il y a de gens à l’aide sociale, plus il reste de moyens pour ceux qui restent à l’aide sociale; plus il y a de gens au travail, plus il y a d’impôts payés, ainsi dégageant plus de moyens pour lutter contre la pauvreté.
Ça place notre société dans une position enviable parmi les nations progressistes. Ce n’est pas nécessaire qu’une nation progressiste ait une loi, mais certaines en ont, la France en particulier; nous en avons une. Et, encore une fois, que l’on n’attribue pas cette action à la conjoncture, ou politique, ou économique. C’est une erreur manifeste de faire cela. Pourquoi? Parce que la lutte a commencé en 2001, dans le discours inaugural et par l’action de Jean Rochon et par le milliard quelques centaines de millions que nous avons déjà mis.
Mais, pour arriver à un document aussi avancé, qu’est-ce qu’ont fait mes collègues? Ils ont vu des centaines, des centaines et des milliers de personnes. Ce n’est pas le fruit de la génération spontanée, ce qui donne une vertu supplémentaire au document. Mes collègues — Jean Rochon avait déjà commencé, d’ailleurs — ont consulté plus pour ce plan et cette loi qu’on le fait dans un sommet socioéconomique. Ils ont vu beaucoup plus de monde sur une beaucoup plus longue période, donc une action beaucoup plus en profondeur. C’est pour ça qu’on peut affirmer sans l’ombre d’un doute que ce désir de lutter contre la pauvreté a animé mon gouvernement depuis la première seconde où il a été en existence. Et ce que nous voyons aujourd’hui, c’est une accélération, une augmentation de l’effort parce que ça correspond à des convictions profondes. On peut avoir diverses convictions pour être dans la vie publique; les nôtres, vous les connaissez: création de la richesse, oui, par tous les moyens, y compris l’intervention publique, et redistribution de cette richesse entre les hommes et les femmes et les diverses régions.
Alors, je crois que le Québec était déjà exemplaire. Avec l’effort de ces femmes qui m’entourent, il le sera davantage et, avec l’appui des groupes communautaires nombreux de l’économie sociale — le Québec est la terre de l’économie sociale, à cause de nos efforts des dernières années nous sommes les plus avancés au monde — tout ça devrait faire que la stratégie contre la pauvreté va donner des résultats éblouissants qu’a donnés la stratégie pour le développement économique.
M. Hébert (Michel): Alors, question en français
d’abord.
Claude Brunet.
M. Brunet (Claude): M. Landry, pourquoi ne pas
d’abord tout simplement bonifier les prestations d’aide sociale pour les amener au seuil de pauvreté, plutôt que ce programme un peu complexe de supplément de revenu?]
[ M. Landry:] Parce que les gens qui vivent sur le terrain, dans les centaines de groupes communautaires, dans le fameux Collectif de lutte contre la pauvreté, ont un diagnostic beaucoup plus précis, beaucoup plus aigu que jamais aucun fonctionnaire ne pourra le faire parce qu’ils sont sur place. Alors, on aurait pu faire suivant la tradition et décider d’en haut: Il faut cela et cela, et le faire en ordre dispersé. Là, on a une stratégie voulue par le milieu, connue, concertée et qui va augmenter nos chances de succès considérablement. La lutte contre la pauvreté, c’est un idéal. Il y a peu de pays qui ont une victoire totale, mais nous, on vient d’augmenter nos chances de victoire, là, en ayant une pensée beaucoup plus approfondie. Comme en économie: il y a beaucoup de provinces au Canada qui n’ont pas de stratégie de développement économique, on n’entend pas parler de modèle de Saskatchewan. Au Québec, il y a un modèle québécois qui donne des rendements extraordinaires, et on veut que, dans notre lutte à la pauvreté, on ait le même modèle plus performant, plus efficace qu’ailleurs.
[ M. Brunet (Claude): En fait, ma question c’est:
Actuellement,
on constate que les prestations d’aide sociale maintiennent les prestataires sous le seuil de pauvreté. Pourquoi ne pas avoir augmenté leurs prestations pour les amener au-delà de ce seuil?]
[ M. Landry:] D’abord, je vais laisser à mes collègues qui sont plus spécialisés. J’aurais bien aimé y répondre moi-même, mais j’ai plus de chance de parler.
[ Mme Goupil: En fait, l’objectif c’est que… Vous
savez, on
ne réussira pas à faire tout ça du jour au lendemain. Il est démontré que, pour être capable… Par exemple, pour soutenir des gens, pour les sortir de cette réalité, ça prend des interventions plus globales. Je prends par exemple l’expérience qu’on a vécue, de Solidarité jeunesse. On a choisi au Québec, depuis maintenant, on en est à notre deuxième année, d’offrir autre chose à nos jeunes qu’un chèque d’aide sociale. On les accompagne d’abord pour comprendre comment se fait-il qu’ils se retrouvent à 18 ans pour aller se chercher un chèque. Et on les accompagne par des interventions. C’est trois réseaux du gouvernement du Québec, avec des partenaires sur le milieu, qui accompagnent ce jeune.
On avait 8000 jeunes qui étaient ciblés par cette mesure il
y a deux ans, quand on l’a mise de l’avant et,
actuellement, on se retrouve avec 5 300 jeunes qui
sont en mouvement, retour à l’emploi, retour aux études, parce qu’on les a accompagnés du
début jusqu’à la fin. Et ce n’est pas en fonction d’un programme qu’on soutient ce jeune, mais on a changé notre façon de faire; c’est en fonction de l’individu. Alors, c’est une…
La pauvreté, aujourd’hui, elle est plus complexe
que ce qu’elle était autrefois. Ce n’est pas en donnant uniquement une prestation à quelqu’un qu’on va réussir à combler tous les problèmes. Parce que l’objectif, c’est qu’on soit capable d’atteindre un niveau permettant à des gens d’être moins dans une situation de pauvreté et de tendre à un revenu de solidarité qui nous permettrait collectivement de dire que ces gens peuvent exercer leur citoyenneté parce qu’ils ont suffisamment de sous pour subvenir à leurs besoins.
M. Hébert (Michel): Norman Delisle.
M. Delisle (Norman): Je suis un petit peu inquiet
sur la transparence du processus. Je regarde à l’article 19: «Le ministre va faire rapport sur le plan d’action au gouvernement», pourquoi pas à l’Assemblée nationale? Ailleurs, les avis du conseil consultatif, on dit à l’article 31 que «le comité consultatif peut les rendre publics», pourquoi on ne dit pas «doit les rendre publics? À l’article 41: «L’Observatoire va proposer au ministre des mesures de pauvreté», pourquoi pas les proposer plutôt à l’Assemblée nationale, de façon à ce que tout le monde soit au courant du processus?
Mme Goupil: Alors, je vais vous dire, c’est une excellente question. Et, en commission parlementaire, ce sont les débats que nous avons aussi. Vous avez raison qu’il sera possible de le faire. On n’a pas indiqué dans les moindres détails tout ce qu’il allait y avoir dans le projet de loi. On a essayé de le
rendre le plus complet possible. C’est évident que c’est quelque chose qui pourrait être fait de le déposer à l’Assemblée nationale.
Quant à l’Observatoire, il est évident que l’Observatoire qui va
être créé va justement nous permettre de leur confier soit des mandats, soit que le conseil demande à avoir des spécifications pour qu’on soit capable de dire: Les mesures qu’on a mises de l’avant, est-ce qu’elles correspondent réellement
-à des gestes permettant de réduire la pauvreté? Et si jamais ce n’est pas suffisant, nous permettant de corriger le tir au bout de trois ans, quatre ans ou cinq ans, selon ce que l’Observatoire va nous avoir livré comme outils de spécification pour lutter contre la pauvreté.
M. Hébert (Michel): Denis Lessard.
M. Lessard (Denis): M. le premier ministre, deux questions.
La première: Vous avez parlé de l’injection de 600000000 $
annuellement, est-ce qu’on peut avoir des détails? Combien de ça est associé au revenu de solidarité, et est-ce qu’on parle de l’année 2002-2003 ou des années ultérieures?]
[ M. Landry:] Les détails vont venir dans le plan d’action, là, qui va être sur la table au cours de l’été, mais on sait déjà à peu près, là, qu’est-ce que ça va faire.
[ Mme Goupil: Il y a des mesures, dans son
ensemble… C’est
parce que le projet de loi tel qu’il est, vous savez, on a l’obligation de déposer le plan d’action dans les 60 jours de l’adoption de la loi. Alors, il est évident qu’en vertu… Vous faites signe que non, mais c’est écrit dans la loi. On a 60 jours…
M. Delisle (Norman): Article 12. Ce n’est pas dans l’adoption de la
loi, c’est dans son entrée en vigueur. Ce n’est pas la même chose du tout.
Mme Goupil: Non, mais une fois que la loi va être entrée en vigueur
puis qu’on va l’avoir adoptée à l’Assemblée nationale, on a 60 jours pour le déposer. Alors, il est évident qu’on va, avec ce débat de la commission parlementaire… Notre plan d’action est presque complété, mais on ne voulait pas être capable de tout de suite cibler toutes les mesures sans les canner. On a dit: Dans le cadre de la commission parlementaire, on va indiquer, à la suite des débats
qu’il va y avoir, à quel endroit nous devrions déposer plus d’argent: Est-ce que c’est dans des mesures d’emploi, des mesures de soutien à l’éducation, est-ce que, au niveau des personnes qui sont inaptes, on va leur donner des sommes d’argent plus importantes plus rapidement? Et les personnes qui sont aptes, on va les accompagner dans des mesures.
M. Lessard (Denis): D’accord. Mais sans aller jusqu’à la décimale,
je voulais savoir, sur le 600000000 $, est-ce qu’on peut dire que les deux tiers de ça vont aller au revenu de solidarité ou une partie moins importante ou…
Mme Goupil: Ça va être tout précisé dans le plan d’action.
Puis, dans le cadre de la commission parlementaire, on va être à même… Vous voyez, dans la Stratégie, vous y retrouvez les bases de calcul sur lesquelles on veut travailler. Ce revenu de solidarité là, va falloir qu’il se fasse un consensus au Québec, parce que c’est des sommes d’argent importantes. On parle de la création d’un fonds. Quelle va être la hauteur du fonds? Est-ce qu’il va exister de la même façon dont on a existé jusqu’à maintenant? On veut que le débat puisse se faire d’abord pour éliminer les préjugés qui existent encore trop souvent versus les personnes qui essaient de s’en sortir actuellement.
Deuxième des choses, on veut être capable de mieux utiliser les sommes d’argent que nous avons. On a déjà soutenu davantage. Je prenais l’exemple du programme de Solidarité jeunesse. C’est 19000000 $ d’argent qu’on a consacrés, des mesures supplémentaires versus l’aide qu’ils avaient pour les aider à s’en sortir. Et, sur les 8000 jeunes, il y en a 5 800 aujourd’hui qui ne sont plus prestataires et qui sont soit à l’emploi ou soit aux études.
Alors, c’est à partir de ces données-là qu’on a
calculé des
chiffres et l’ordre de grandeur de 1500000000 $. Et on ne veut pas tout de suite les canner au complet, parce
qu’on veut que le débat se fasse en commission parlementaire.]
[ M. Landry:] Les chiffres vont se modifier en cours de route aussi, on l’espère bien, parce que le nombre de ménages, en très peu de temps quand même, de 1996 à 2002, a reculé de 30 %. Et là, l’économie tourne comme jamais. Alors, ça va reculer encore, on l’espère, laissant du découvert pour d’autres choses.
[ M. Lessard (Denis): Ma deuxième question, c’est:
Là, il y a
des surplus, ça va bien, mais j’imagine que vous avez fait la réflexion: En temps de récession, qu’est-ce que ça voudrait dire si on a des objectifs aussi contraignants? Parce que, si je comprends bien, le gouvernement est lié, va être lié, après l’adoption du plan d’action, à des objectifs très précis.]
[ M. Landry:] Oui. Mais c’est toujours proportionné aux capacités de payer de la société, de l’État, mais de la société en général. Là, on voit que l’économie va bien, et la plupart des observateurs prévoient un certain nombre d’années d’opulence. Parfait. Mais la loi tient compte du fait que c’est suivant la capacité de payer de notre société, suivant les conjonctures.
[ M. Hébert (Michel): Dominique Poirier.
Mme Poirier (Dominique): Mme Goupil, on nous disait tout à
l’heure, en briefing, que le premier but qu’on voulait atteindre avec le revenu de solidarité, c’est 200000 personnes, dans un premier temps, d’ici cinq ans.
Mme Goupil: Ménages.
Mme Poirier (Dominique): Ménages, oui, c’est ça, d’ici cinq
ans. Il y a des chômeurs, il y a des salaires minimums, des assistés sociaux inaptes. On a l’impression que ça laisse en plan des milliers et des dizaines de milliers d’assistés sociaux aptes au travail qui, eux, n’auront pas droit à ce supplément de revenus là s’ils n’améliorent pas leur condition.
Mme Goupil: Alors, il est évident que, dans le cas de cette stratégie, on veut être capables de soutenir de façon… le plus solidairement possible les femmes et les hommes sans aucune distinction. Et c’est pour ça qu’il y aura une indexation automatique des prestations. C’est ce qui a été annoncé par l’énoncé budgétaire de Mme Marois. Donc, forcément, il va y avoir une indexation qui va se retrouver pour l’ensemble des gens. Mais ce qu’on veut faire aussi, c’est qu’on veut soutenir de façon plus progressive encore ceux et celles qui font tous les efforts nécessaires pour s’en sortir. Et, dans cette réalité, on convient que ça interpelle à la fois les employeurs, ça interpelle les intervenants et intervenantes qui accompagnent les gens.
Je prends comme exemple une femme de 51 ans, qu’on a rencontrée
encore cette semaine, qui est devenue
veuve, elle reçoit tout simplement la Régie des
rentes, elle ne reçoit pas un gros montant en soi, et elle veut justement occuper un emploi. On l’accompagne par des mesures d’emploi. Alors, ce qui fait en sorte que, sur chaque dollar supplémentaire qu’elle pourra gagner, cette personne, on veut la soutenir puis l’accompagner pour que, d’ici 10 ans, on ait réussi à augmenter le revenu de ces gens-là pour qu’ils se situent à un revenu de solidarité leur permettant justement de subvenir à leurs besoins.]
[ M. Landry:] Ce n’est pas juste du transfert, c’est de l’inclusion sociale, l’exclusion. Alors, pour les gens qui ont des contraintes sévères, dans certains cas, il n’y a aucun espoir d’amélioration de l’employabilité, sauf exception. Les ateliers pour personnes handicapées, entre autres, un exemple extraordinaire, mais ça reste assez marginal. Puis, pour les autres, l’objectif, c’est de leur donner ce qu’il faut, oui, mais surtout les inciter à se réinsérer dans le circuit. Et c’est une grande partie de la philosophie de cette loi.
[ Mme Poirier (Dominique): Vous parlez d’exclusion,
mais ce
n’est pas une façon d’exclure aussi les assistés sociaux qui sont aptes au travail. C’est peut-être aussi une façon de les exclure en ne leur donnant pas ce supplément de revenu.
Mme Poirier (Dominique): En fait, ce que vous leur dites, c’est: Si vous voulez l’argent, vous devez travailler pour…
Mme Léger: Il faut faire attention.
Mme Goupil: …catégorique.
Mme Léger: Moi, j’ai fait la tournée, la tournée du Québec
cet automne particulièrement. Et, dans la tournée, les gens, ce qu’ils nous demandaient, dans la tournée… Il y a des régions du Québec qui sont très avancées dans des plans d’action stratégique vraiment pour aider les gens qui vivent dans les situations de pauvreté.
Ils nous disent, la plupart nous disent: Oui, on veut une
loi, parce qu’on veut que ça dure, qu’il y ait une durée puis que ça oblige… comme M. Lessard dit, lier le gouvernement dans un plan d’action et une stratégie. Ils veulent aussi, les gens, que nos actions soient concertées, intégrées, parce que c’est évident qu’on peut avoir des prestations d’aide sociale, effectivement, mais les gens démunis ne se retrouvent pas tous dans l’aide sociale nécessairement, ça peut vous arriver à vous comme à moi d’être un jour ou l’autre dans une situation de pauvreté. Donc, il faut être capable de les accompagner, pas juste qu’il y ait un programme.]
[ M. Landry:] Depuis leur dernière négociation, eux autres, ils sont corrects.
[ Des voix: Ha, ha, ha!]
[ Mme Léger: Ha, ha, ha! Pas juste nécessairement
des
programmes, ils nous disent: On peut-tu intégrer ces actions-là? On peut faire de la lutte au décrochage scolaire, mais il faut aussi accompagner l’adolescent dans toute une démarche. Alors, c’est ça, la stratégie de lutte à la pauvreté, c’est qu’il y a une loi, il y a des actions, une stratégie qui nous obligent à faire des actions intégrées puis englobantes, prendre la personne où elle est. Il y a des gens actuellement dans les entreprises d’économie sociale qui ne peuvent pas demain matin aller sur le marché du travail. Il y a des gens qui sont sur l’aide sociale qui ne peuvent pas demain matin se retrouver un emploi tout de suite; pas parce qu’il n’y a pas d’emplois, mais il faut les accompagner à avoir des habitudes de travail, des habitudes de comportement. Alors, ça, c’est des entreprises d’économie sociale à qui il faut donner un coup de main.
Alors, le fonds qu’on va instituer aussi, qui fait la suite
du Fonds de lutte à la pauvreté, va permettre à des actions locales et régionales… Pas un programme nécessairement d’aide sociale — oui, on en a un, programme d’aide sociale — mais que, en région, partout au Québec, dans des régions plus rurales aussi, d’être capable de se doter d’outils pour être capable d’aider vraiment et sur le terrain des actions qui sont pour aider les gens qui sont en situation plus démunie.
Donc, c’est une stratégie qui a une loi pour nous
lier, mais qui a aussi des actions intégrées et va permettre dans un autre temps, après une commission parlementaire qu’on va avoir cet automne… qui va remettre le débat… parce que ça n’appartient pas juste à un gouvernement, la lutte à la pauvreté, ça appartient à toute la société civile. Dans les tournées régionales, j’ai rencontré les gens du monde économique, les gens d’entreprises. C’est sûr qu’il y a un cheminement à faire aussi au niveau des entreprises, qui se sentent concernées aussi par la lutte à la pauvreté.
Donc, le leadership vient du gouvernement, on met
sur place
ce que les gens nous ont demandé, parce qu’ils nous ont demandé ça dans les régions.]
[ M. Hébert (Michel): Une dernière en français,
Valérie Lesage.
Mme Lesage (Valérie): Je reviens sur les investissements, parce qu’on parle de 1500000000 $ sur cinq ans. Mais, par contre, vous parliez tout à l’heure de 600000 $ annuellement. Alors, sur cinq ans, ça ferait 3 milliards.
Une voix: 600000000 $.
Mme Lesage (Valérie): 600000000 $, pardon. Mais,
sur cinq ans, ça ferait plus que ça si on met 600000000 $ annuellement. Alors, j’aimerais ça, comprendre, moi.]
[ M. Landry:] C’est parce que le rythme n’est pas exactement le même. Il y a des mises en place puis il y a des récurrences annuelles, et puis on fait l’addition au bout du processus.
[ Mme Goupil: En fait, quand on regarde les annonces
qui ont
déjà été faites…
Mme Gagnon (Katia): Au bout de la ligne, la récurrence et
tout ça, ça fait combien d’argent sur tant d’années?
Mme Goupil: À partir des calculs qu’on a effectués, sur les
cinq prochaines années, c’est de 1500000000 $ que l’on parle. Alors, ça, c’est très clair. Il y a des annonces budgétaires qui ont été faites avec l’énoncé budgétaire de Mme Marois, avec des mesures qui ont déjà été annoncées, et on sait que c’est près de 1300000000 $ sur les trois prochaines années.
Mme Gagnon (Katia): Juste une précision, là, 1,5 c’est en
plus du 1,3?
Mme Goupil: Tout à fait, tout à fait. Alors, c’est une concentration…]
[ M. Landry:] Il peut avoir une année où on va pouvoir en mettre 150000000 $ puis, l’année d’après, 250000000 $. Alors, ce n’est pas par tranches égales annuelles, c’est suivant la mise en place des programmes et des besoins.
[ Mme Goupil: Et de notre capacité collectivement
aussi à
répondre à tout cela. Alors, il est évident que, lorsqu’on regarde les prestations que nous versons aux personnes, de dernier recours, on a eu une réduction au cours des années. Les sommes d’argent, nous les avons utilisées pour être capables de soutenir les gens dans la formation. Alors, il est évident que s’il y a moins de personnes qui sont prestataires et qu’on
investit les sommes, c’est ce qu’on a fait comme choix puis ça a donné des résultats. Et parfois, aussi, on regarde des personnes qui se retrouvent dans une situation où, lorsqu’ils gagnent un peu plus, on va leur permettre justement de conserver ce qu’ils ont pour qu’ils aient un incitatif et qu’ils se sortent de cette pauvreté-là, qui, souvent, sont plafonnés, quand on parle de la poche de pauvreté. Parce qu’ils ont augmenté leur revenu, ils perdent parfois un programme. Alors, comme on veut avoir une intégration complète, bien, on veut que chaque personne qui va faire les efforts pour s’en sortir ne soit pas dans une situation pénalisante mais, au contraire, que, lorsqu’il se sort la tête de l’eau, bien, on le soutient puis on l’accompagne, puis il n’est pas pénalisé.
M. Hébert (Michel): Kevin…]
[ M. Landry:] Je voudrais ajouter deux éléments de macroéconomie à ça, qui nous ont aidés dans notre décision. Premièrement, tout cet argent réparti généralement est mis en circuit économique dans les semaines qui suivent l’émission du chèque. Alors, sur le plan macroéconomique, cette dépense-là a un effet de stimulation de l’économie. Et le deuxième élément macroéconomique, c’est que, la pauvreté, elle coûte cher, pas rien qu’en aventures et mésaventures humaines, elle coûte cher en argent parce que c’est avec la pauvreté qu’on retrouve souvent la maladie et d’autres misères humaines. Alors, une lutte contre la pauvreté est aussi une opération macroéconomique.
[ Mme Gagnon (Katia): Juste une dernière question,
Mme Goupil,
si je peux me permettre. Les groupes, là, comme le Collectif, par exemple, la Fédération des femmes, vous demandaient d’imposer une
espèce de barème plancher à l’aide sociale, un seuil en bas duquel on ne peut pas descendre en termes, bon, de coupure de chèque et tout ça si la personne ne participe pas à des mesures d’employabilité. Pourquoi vous ne faites pas ça?
Mme Goupil: Bien, c’est parce qu’on a besoin de
faire une intervention globale. Il y a des mesures spécifiques qui ont été apportées tout de suite. On parlait tout à l’heure de la réduction pour le partage du logement, il y a des mesures spécifiques qui ont été faites. L’indexation automatique, ça a été fait. Mais les personnes qui vivent cette situation de pauvreté, combien il y a de gens qui, aujourd’hui, perdent un emploi, ils ont parfois 45 ou 50 ans. Ils ne sont pas outillés pour faire face soit aux nouvelles technologies ou tout simplement à la nouvelle technologie leur permettant d’occuper un emploi. Alors, ces gens-là, ce qu’ils nous disent, c’est qu’on a besoin d’être soutenus et accompagnés, et ce n’est pas parce qu’on ne correspond pas à un programme qu’on ne peut pas avoir d’aide. Et comme on se retrouve avec un taux de natalité qui est extrêmement bas puis une population qui va se retrouver à la retraite massivement, on a besoin d’accompagner nos gens pour les soutenir.
Alors, plutôt que de faire… ça aurait été plus
facile de dire à la pièce, une et l’autre, mais ce qu’on veut et ce qui nous a été demandé, et ce que les chercheurs ont dit: À l’étranger, quand on est allé voir, ils nous confirment qu’il faut avoir une intervention globale en prévention, meilleure sécurité, permettre aux gens de les soutenir au niveau de l’emploi et surtout que ça ne parte pas du niveau national constamment, mais qu’on soit capable de s’inspirer de ce qui se fait sur le terrain et la réinsertion sociale, c’est ce qui a permis à bien des gens aujourd’hui d’occuper un emploi rémunérateur et qui se situe au-delà du seuil de pauvreté.
Une voix: Oui, je comprends…]
[ M. Hébert (Michel): En anglais, Kevin Dougherty. ]
[ M. Landry:] Le barème plancher, c’est du mur-à-mur et les spécialistes, et les gens qui regardent ça de façon pointue et qui sont vraiment favorables à la réinsertion disent que ce n’est pas la meilleure méthode. Il faut se garder une souplesse d’opération.
[ M. Landry:] Bien, une grande partie.
[(Fin à 12 h 31)]
[QLDRY20020614cp]
[Conférence de presse de M. Bernard Landry premier ministre du Québec, et de M. André Boisclair, leader parlementaire du
gouvernement Bilan de la session parlementaire Le vendredi 14 juin 2002 (Quatorze heures quatre minutes)]
[ M. Hébert (Michel): M. Landry et M. Boisclair vont faire
chacun une déclaration. Après ça, je prends les questions, comme d’habitude.]
[ M. Landry:] La session parlementaire qui se termine a été caractérisée par plusieurs initiatives remarquables du gouvernement et l’adoption de lois exceptionnelles, même courageuses. Ces lois, j’en suis convaincu, amélioreront la qualité de vie des Québécoises et des Québécois. Mais, avant de dresser le bilan, je vais faire un retour sur des aspects quand même assez exceptionnels de cette session qui, pour nous, n’a pas été facile. Ça a été une mer orageuse et exceptionnellement agitée. Je souhaite donc faire un peu état du climat politique de la dernière session. Celle-ci s’est en effet déroulée en grande partie sur fond de controverse, tant sur la scène québécoise que celles municipale et fédérale, l’un portant l’autre, d’ailleurs. Ce climat s’est établi aussi bien en écoutant les bulletins de nouvelles qui venaient d’Ottawa ou de Montréal ou de Québec. C’est sûr que les allégations des derniers mois ont causé un tort certain à la crédibilité du gouvernement et à l’image de notre parti. J’ai sous-estimé les conséquences de certaines pratiques naguère acceptées, aujourd’hui réprouvées, et avec un fort impact auprès de la population. Cependant, et je suis très clair sur cette question, mon gouvernement n’a pas tardé à agir et apporter les correctifs réglementaires et législatifs qui s’imposaient. En effet, dès le 18 février 2002, je signais une directive, une directive concernant les règles applicables lors de la cessation d’exercice de certaines fonctions pour ‘État qui s’appliquait aux événements que nous avons vécus. Cette directive a été émise afin d’encadrer les gestes et actions des hauts fonctionnaires et du personnel politique. Quoique jugée sévère par certains, cette directive témoigne clairement de notre volonté d’agir. La directive a été suivie par une loi; cette loi a été adoptée à l’Assemblée nationale et place désormais très haut la barre en matière d’éthique. Nous sommes allés au-delà, comme vous le savez, de la loi fédérale; j’espère que cette loi aura le même impact et la même symbolique que celle sur le financement des partis politiques adoptée il y a plus de 20 ans par notre parti, précisément.
Je suis particulièrement fier du courage et de la détermination dont a fait preuve mon équipe ministérielle en maintenant le cap sur les priorités que nous nous étions fixées et en mettant de l’avant une série d’initiative qui permettront d’améliorer la qualité de vie de toutes les Québécoises et de tous les Québécois. C’est un des paradoxes, d’ailleurs, des mois que nous avons vécus et de l’atmosphère politique que le bilan du gouvernement est bon. Le bilan du gouvernement, globalement, est un des meilleurs bilans gouvernementaux dont on puisse parler. D’ailleurs, plusieurs analystes, plusieurs commentateurs l’ont remarqué, en s’étonnant du fait que, souvent, la qualité du bilan était l’inverse de ce qu’on voyait dans les sondages. Alors, c’était sûrement une résultante de ce climat dont j’ai parlé, et la population a jugé graves des choses qui, par ailleurs, s’étaient faites souvent auparavant mais, dans notre parti, les attentes étaient plus hautes. Et je suis très fier, d’ailleurs, que les attentes d’éthique soient plus hautes dans notre parti que partout ailleurs, sauf que le moindre écart fait très mal. Alors, il s’agit de nous remobiliser, de renouer avec ces traditions strictes, voire scrupuleuses d’éthique, de façon que les gens de nouveau portent le regard sur notre bilan. Et j’y reviens, le leader du gouvernement parlera du bilan législatif, et vous allez voir, lui aussi, qu’il est mathématiquement simplement en nombre exceptionnel et aussi en qualité de projets adoptés. Mais le bilan global du gouvernement, commençons par la conjoncture économique. Ça fait aussi longtemps que Pierre April exerçait le métier de journaliste que je suis, moi, l’économie du Québec pratiquement d’heure en heure, et je ne l’ai jamais vu dans un état de prospérité et d’activité pareil. Sur le plan des nombres et des chiffres, vous vous souvenez, les plus vieux et les plus vieilles d’entre vous se souviennent que Robert Bourassa passait à l’histoire pour 100000 emplois dans 12 mois. On est à 120000 dans cinq mois. Ça ne s’est jamais vu. Les écarts Québec-Ontario, les écarts Canada-Québec, le pourcentage de Québécois et de Québécoises qui travaillent le plus haut jamais atteint dans l’histoire. Lundi dernier, il est rentré plus de monde au travail contre un salaire que jamais à aucun autre moment puis, au-delà des chiffres, il y a la diversité de l’économie québécoise. Il y a eu quelques belles périodes auparavant, oui, mais c’était forêts, mines, ressources naturelles. Aujourd’hui, c’est biotechnologie, télécoms, aérospatiale, exportation d’expertises sophistiquées dans les pays étrangers. Donc, un bilan économique sans pareil. On est allé, avec le modèle québécois, dépoussiérer, réajuster plus loin qu’on aurait espéré aller nous-mêmes. Et ce n’est pas fini. 125000 emplois en cinq mois, ça ne veut pas dire que l’année est finie. Toutefois, et vous savez que ça va rejoindre de nos convictions profondes qui sont les caractéristiques de notre parti depuis sa fondation, nous voulons que cette performance économique rejoigne tous et toutes, individus comme régions. En d’autres termes, on ne crée pas la richesse pour qu’elle se consacre uniquement dans quelques grands centres ou dans les mains de quelques-uns. Je l’ai dit souvent et je le répète à nouveau: créer la richesse et des emplois est nécessaire et c’est ce que nous avons fait. Mais, ce n’est pas suffisant. Il faut s’assurer que tous et toutes profitent de cette prospérité. C’est une question de solidarité, de qualité de vie. Cette conviction, pour nous, est aussi profonde que celle à l’effet que le Québec doit être un pays souverain. C’est pourquoi mon gouvernement a décidé de pousser encore plus loin ses efforts pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale, afin que toutes les forces vives du Québec puissent mettre à profit leur potentiel. C’est ce que j’avais annoncé dans les premières heures de ma décision de succéder à Lucien Bouchard, Je m’étais consacré surtout à une lutte obsessionnelle contre le chômage et j’ai dit que nous allions nous consacrer à une lutte du même ordre contre la pauvreté et l’exclusion, et on avait commencé tout de suite avec Jean Rochon et avec plusieurs autres, et là on est arrivé au point culminant, hier, avec la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté qui doit être expliquée, c’est clair. Mais dans les milieux spécialisés, ceux et celles qui connaissent ça par profession, disons. Léo-Paul Lauzon, par exemple, pour une fois que mon collègue Léo-Paul Lauzon est vraiment d’accord avec une chose qu’on fait — et les milieux syndicaux et les milieux de la Coalition, qui avaient demandé cette politique de la pauvreté. Nous y avons eu des échos très favorables, et, peu à peu, ça va percoler dans l’ensemble de la population.
Nous avons également démarré, comme vous le savez, des actions régionales, qui vont dans la suite de ce qu’on avait fait avant — les CLD, c’est nous qui les avions faits, les CLE, c’est nous qui les avions faits, les politiques fiscales stimulant l’économie des régions — mais nous avons continué, en particulier envers certaines régions comme la Gaspésie et la Côte-Nord, des efforts particuliers pour les aider à combattre l’angoisse que produit un certain déclin démographique, l’exode des jeunes, une certaine restructuration de l’économie. Même en Gaspésie, l’espoir renaît. Il y a des travaux importants qui se font aujourd’hui; à Chandler, il y a près de 1000 emplois dans des centres d’appel en Gaspésie. Qui l’eût cru il y a simplement deux ou trois ans? J’ai pris moi-même la direction du comité de relance de la Gaspésie, et on voit l’espoir de nouveau apparaître dans l’esprit des Gaspésiens et des Gaspésiennes.
En éducation, la politique d’éducation aux adultes et de formation continue fera évoluer notre main-d’oeuvre en fonction des besoins de notre société. Cette politique a été très bien acceptée aussi, vous vous en souvenez, c’est un geste supplémentaire du gouvernement, d’ailleurs, dans la lutte à l’exclusion et à la pauvreté, puisque l’éducation est une clé de la lutte contre ces fléaux.
En santé, sujet difficile s’il en est, lors de mon arrivée au pouvoir comme premier ministre, j’avais indiqué que nous allions consolider les réformes entreprises. À cet égard, nous avons poursuivi nos efforts en mettant en place les premiers groupes de médecine familiale, après des négociations longues et difficiles. Afin d’assurer la pérennité du régime d’assurance médicaments, le gouvernement agit de façon responsable. Ç’aurait été facile de dire: Bon, bien, on n’a pas le courage, on laisse se détériorer le régime, on n’a pas le courage d’expliquer à nos concitoyens et concitoyennes qu’il faut une hausse raisonnable. Nous l’avons fait, elle a été généralement très bien comprise, et par les analystes, et par la population, et ce régime, je le rappelle, est le plus généreux en Amérique du Nord. Et quand on voit les tragédies que peut causer le manque de médicaments dans certaines familles, on peut être fier de ça.
Dans l’environnement, vous savez qu’une angoisse majeure, dans toutes les régions du Québec, concernant la production porcine s’était établie. Mais, par ailleurs, il y a des équilibres à respecter entre le développement économique, la santé publique, la qualité de la vie. Mais encore là, nous n’avons pas hésité, nous avons fait un choix fondamental, qui a été annoncé hier et qui est également bien reçu, quant à ce moratoire de 24 ou de 18 mois. Nous avons aussi, depuis le début de la session et au cours des derniers mois, conclu cette entente historique, la «paix des braves», qui était déjà une réalisation majeure et qui a été suivie d’une autre, c’est-à-dire l’entente de 25 ans avec la nation Inuit et l’ouverture, peut-être, pour n’en nommer qu’une, réalisation économique potentielle, de 10000 MW électriques dans ces territoires et en harmonie avec les populations locales. Nous tentons aussi, comme vous le savez, d’élargir ça à toutes les nations aborigènes du Québec dans l’esprit de ce que nous avons adopté en 1985, avec René Lévesque, de leur statut national. Nous avons aussi, dès mon arrivée, mis sur pied la commission Séguin. Excellent travail! Yves Séguin, ancien ministre de Robert Bourassa, avec une dizaine de collaborateurs et de collaboratrices, nous a donné une base scientifique solide et incontestable confirmée par le Conference Board et le Hudson Institute comme itant la réalité. Alors, ça nous permet d’abord de constater avec horreur qu’il nous manque 50000000 $ par semaine qui sont en trop à Ottawa pour la santé, pour l’éducation, pour l’aide aux familles, mais ça nous permet aussi d’aller ajouter à la force de nos revendications, et ce n’est pas fini, on veut que… Déjà, M. Séguin et ses collaborateurs sont sur le terrain, vont expliquer en profondeur… Nous voulons que cette chose soit comprise en profondeur et soit réglée une bonne fois pour toutes. La société civile, dès l’automne, sera invitée à participer à des actions importantes pour que nous donnions au gouvernement du Québec les moyens de ses responsabilités. Notre argent ne doit pas aller grossir des surplus à Ottawa, il doit aller aux familles et à l’éducation. Alors, le vrai changement recherché par la population passe, je crois, par une équipe compétente — nous en avons une — avec une vision d’avenir. À cet égard, le Parti québécois présente l’équipe la plus apte à faire progresser le Québec. Les succès des dernières années et de la dernière session en témoignent éloquemment. Malgré les difficultés, je le dis, sérieuses que nous avons dû affronter, la base est là, les idées sont là, l’action est là, la détermination est là, le courage est là, et nous nous accrochons à nos principes. C’est pourquoi je vous dis que, quel que soit le résultat des élections partielles, il est de mon devoir de diriger cette équipe extraordinaire aux prochaines élections générales, et c’est ce que j’ai l’intention de faire: c’est mon devoir. Quand j’ai accepté de succéder à Lucien Bouchard, j’ai accepté tout ce qui venait avec et, en plus, je sens, autour de moi, dans mon équipe ministérielle et ma députation, une solidarité exemplaire et sans faille, ce qui est, avant, évidemment, tout à fait nécessaire pour que je puisse vous annoncer ce que je viens de vous annoncer.
Notre parti a toujours excellé lorsque les défis étaient grands. On en a vu d’autres, tempêtes. René Lévesque a vu la démission de neuf de ses ministres. René Lévesque est revenu d’Ottawa après la «nuit des longs couteaux» dans l’état que vous savez, et notre parti était dans l’état que vous savez. Nous avons relevé ces défis et nous avons l’intention de continuer.
Ma vie publique, elle est archipublique et archiconnue, a toujours été fondée sur un seul élément qui détermine tout le reste: l’intérêt supérieur du Québec. Je n’ai pas basé ma carrière politique sur des calculs et des ambitions personnelles ou des motivations qui n’étaient pas essentielles, je suis venu en politique pour le développement économique du Québec: la répartition de la richesse parce que j’ai toujours été un social-démocrate depuis le début de ma carrière. J’ai commencé ma carrière comme avocat syndical, comme vous le savez largement. Je n’ai jamais dérogé de cet idéal qu’un pays doit être riche, que la richesse ne doit pas se concentrer uniquement dans les grands centres ou chez un certain nombre d’individus. Je poursuis cela avec ardeur et j’ai toujours pensé aussi, et je le pense encore, que la nation québécoise doit faire partie du concert des nations, c’est-à-dire qu’elle doit être souveraine, et ce sont ces trois piliers qui me maintiennent, comme mon équipe, comme celui qui m’accompagne, comme mes députés, dans l’action au service de la population. Maintenant, pour un bilan plus détaillé en termes législatifs, mon collègue a ce qu’il faut. D’ailleurs, on vous a distribué des documents, je crois. C’est vraiment impressionnant, là. Rien que sur le plan mathématique, là, c’est une grosse, grosse recette. Paul Bégin, à lui seul, a fait adopter 10 lois, dont deux historiques: l’union civile et le lobbying.
[ M. Boisclair: Alors, je voudrais ajouter aux
propos du
premier ministre que tous les observateurs qui ont regardé le gouvernement évoluer au cours de la dernière semaine ont bien
compris à la fois la détermination et l’enthousiasme de l’ensemble des membres du Conseil des ministres qui se sont présentés devant l’Assemblée nationale avec des projets de loi importants, de pousser plus loin et toujours plus loin le progrès au Québec. Au-delà de l’ensemble des dispositions et des projets de loi qui ont été adoptés, je dois vous dire que, comme première expérience à titre de leader du gouvernement, je suis particulièrement satisfait du bilan que nous présentons à l’ensemble de la population.
D’abord, de façon générale, l’ensemble du plan de
match que nous nous étions fixé, l’ensemble des projets de loi qui avaient fait l’objet de discussions au Conseil des ministres et qui figuraient au palmarès des priorités du gouvernement du Québec ont été adoptés. Ces projets de loi ont été adoptés malgré les dispositions particulières qui avaient été convenues
entre les partis politiques sur les nouvelles règles qui conduisent à l’adoption des projets de loi et qui nous empêchent, comme auparavant, d’utiliser une procédure d’exception dans laquelle nous aurions pu fondre plusieurs projets de loi pour les voir adopter à l’Assemblée nationale.
C’est avec un certain succès et un certain plaisir que je rappelle
que nous avons utilisé la motion d’exception, donc, cette nouvelle procédure qui vient limiter les débats à l’Assemblée nationale, que nous l’avons utilisée qu’une seule fois. D’ailleurs, nous n’aurions pas eu à en faire un usage additionnel puisque l’ensemble des priorités qui figuraient au tableau des priorités gouvernementales ont été adoptées à l’Assemblée nationale.
Je tiens à vous dire aussi, comme l’exprimait bien le premier ministre, que la qualité du menu législatif fait la preuve hors de tout doute que le gouvernement du Québec est porteur de projets et porteur de vision, et que son action aussi incarne des espoirs nouveaux pour la population québécoise. Je pense que cette force tranquille qui est la nôtre, cette détermination s’incarne bien d’un certain nombre de projets de loi sur lesquels je voudrais attirer votre attention.
D’abord, vous dire que nous sommes
particulièrement contents, comme l’exprimait le premier ministre, d’avoir été capables, au Québec, de pousser plus loin l’expérience démocratique en adoptant deux lois fondamentales: d’abord, la Loi sur transparence et l’encadrement des activités de lobbyisme et aussi la réforme importante et attendue du Code de procédure civile.
Je suis aussi particulièrement fier, et à bien des titres, de
vous dire que cette session a été l’occasion pour le Québec de faire un pas déterminant vers davantage d’égalité entre l’ensemble des citoyens et des citoyennes du Québec. J’applaudis, et l’ensemble des députés de l’Assemblée nationale, et je pense que la population dans son ensemble ont applaudi à l’adoption du projet de loi sur l’union civile.
Je suis aussi content de rappeler que l’action du gouvernement nous
amène aussi à poser des gestes forts de réconciliation. La loi qui vient sanctionner l’entente avec les Cris, l’entente avec les Innus aussi est porteur de nouveaux espoirs pour le développement du Québec, un développement que nous souhaitons se faire dans l’harmonie.
Ce développement aussi est marqué de façon définitive
par une
préoccupation forte sur le développement durable. Je rappelle l’adoption de la loi portant restriction à la production porcine; je rappelle aussi l’adoption importante de la loi sur la réhabilitation des terrains contaminés. Le gouvernement du Québec,
-encore là, a l’occasion de marquer le progrès et le développement au sceau du développement durable.
Je suis aussi heureux d’indiquer que nous nous
sommes donné des nouveaux moyens pour correctement donner un appui à cet élan que nous incarnons en faveur du développement du logement social. Non seulement avons-nous mis des budgets considérables, mais nous nous
sommes donné aussi des nouveaux moyens pour faire en sorte d’habiliter la Société d’habitation du Québec et les offices municipaux d’habitation de mettre la main à la roue pour faire
-en sorte que le chantier souhaité sur le logement social, entre autres dans les grandes régions de Montréal, de Gatineau, de Québec et de Sherbrooke, puisse se traduire par des nouveaux logements accessibles pour la population défavorisée.
Je suis aussi, en dernier lieu, heureux de rappeler
que
l’accès à l’éducation s’est traduit non seulement par des décisions fortes au Conseil des ministres, entre autres sur la question des frais de scolarité, mais rappeler l’appui que nous donnons à la jeunesse avec l’adoption de la Loi sur l’aide financière aux étudiants qui donne aujourd’hui de nouveaux espoirs à des jeunes qui, sans cet appui, n’auraient pu poursuivre leurs études avec la même qualité de vie.
En somme, au-delà de la technique des projets de loi et au-
delà de leur contenu, nous sommes capables aujourd’hui de nous présenter devant l’opinion québécoise avec la ferme conviction que, sur le plan des valeurs, celle de la qualité démocratique, de l’accès à l’éducation, du développement durable, de l’égalité entre les citoyens, nous avons, au cours de cette décision, pris des décisions qui nous permettent d’aller plus loin et qui, de façon définitive, continuent d’inscrire le Québec sur la voie du renouveau et de la modernité. Je vous remercie.]
[ M. Hébert (Michel): Questions en français d’abord.
Francis
Labbé.
M. Labbé (Francis): M. le premier ministre, ça fait
quelques
années que vous êtes en politique, vous avez une certaine expérience. On dirait que, bon, malgré les projets de loi que vous avez déposés qui vont changer plusieurs aspects de la société québécoise, on dirait qu’il y a une saturation dans la population et qu’on veut un changement là, du côté des citoyens. Avec votre expérience, qu’est-ce que vous pouvez faire pour essayer de renverser cette tendance-là?]
[ M. Landry:] Bien d’abord, elle peut se renverser d’elle-même. Je ne compte pas que sur ce facteur mais elle peut se renverser d’elle-même parce qu’il y a des choses qui montent très vite. C’est un engouement, hein. Être dans le vent, c’est le destin des feuilles d’automne. Alors, il peut y avoir une correction automatique qui, à mon avis, est déjà commencée, parce que plusieurs éléments de la société et des analyses, des commentateurs, se sont mis à poser des questions à l’ADQ qui n’en recevait aucune auparavant, et les réponses ont été, on l’a vu, parfois loufoques, mais généralement extrêmement confuses sur le bon pour choisir les maisons d’enseignement ou pour choisir les garderies. Malgré mon expérience politique, j’ai beaucoup difficultés à suivre les explications de M. Dumont et des ses porte-parole. Deuxièmement, nous avons connu une mer agitée, et j’ai dit pourquoi. Il est arrivé des choses qui étaient courantes dans la pratique québécoise et qui, dans l’état actuel de l’évolution du Québec, ne sont plus acceptables. Le lobbying, ça se fait aux États-Unis depuis des années, et ça a été balisé. À Ottawa, ça l’a été aussi. Ici, on aurait dû le faire il y a un an quand on aurait eu envie avant de le faire. Mais là, on l’a fait sur la pression d’événements qui ont perturbé l’opinion.
Alors, c’est à nous de démontrer notre bonne foi puis notre attachement aux valeurs qui ont toujours été les nôtres. Il n’y a pas eu un scandale d’argent touchant un homme, une femme politique au Québec depuis que notre parti a établi la Loi de financement des partis politiques. Et j’espère que, pour le lobbying, il en sera de même. Il y a des choses qui se sont produites qui ne pourront plus se produire maintenant comme être rémunéré à pourcentage sur les subventions. Mais c’est un pas en avant parce que ça, ça révulsé la population, alors que, dans certains corps de métier, comme les comptables, les avocats, ça se fait depuis toujours. Mais, c’est devenu non acceptable, et je pense qu’on a pris acte et puis on a agi et puis on va aussi finir par les convaincre comme on a toujours fait. C’est le destin de notre parti. On est un parti d’idées, on est un parti d’idéal et puis assis sur un bilan encore une fois exceptionnel. Vous les avez vus comme moi les analyses de… certains d’entre vous en avez fait de ces analyses. Mais je pense à Mme Beaulieu, L’actualité, qui n’est pas un quotidien, et qui a pris du recul et a parlé du bilan du gouvernement en des termes extrêmement élogieux, ça n’avait rien à voir d’un gouvernement en deuxième mandat et demi. Elle parlait d’espoirs ressemblant au début de la colonisation. Et puis j’ai vu aussi chez des éditorialistes qui ne sont pas nos amis, ça leur donne de la crédibilité quand ils nous vantent. Arrangez-vous pas pour être nos ennemis pour avoir de la crédibilité auprès de nous. Ce n’est pas ça que je veux dire, mais…
Alors, il y a un paradoxe, là. Un excellent gouvernement qui n’a pas dans les sondages la récompense de ses actions, c’est dur, c’est difficile mais le courage, c’est une vertu politique essentielle et importante et nous en avons.
Alors, on va essayer de faire notre preuve. Et je vous dis en plus, je lève le voile sur des études approfondies de sondage que vous n’avez pas, mais nos sondages avancés, puis on a des techniques, comme vous le savez, très bonnes au PQ, nous démontrent que la correction est commencée puis qu’il reste du travail à faire.
[ M. Hébert (Michel): Paul Larocque.
M. Larocque (Paul): M. Landry, vous avez pris la peine de préciser
dans vos mots, d’entrée de jeu, que vous seriez là à la prochaine élection. Est-ce qu’on doit comprendre que, dans votre âme et conscience, à un certain moment, vous avez réfléchi à l’hypothèse de ne pas être là?]
[ M. Landry:] Non. Enfin, je sais qu’on est dans l’univers du cynisme et puis, ce que disent les politiciens, il faut prendre ça avec un grain de sel. Prenez-le comme vous voudrez, mais je suis un homme de conviction et de devoir, et je pense que c’est mon devoir de faire ça. Quand j’ai accepté de succéder à Lucien Bouchard, après toutes les années d’expérience que j’avais en politique, je savais que deux mandats et demi, aller jusqu’au bout et en obtenir un autre, ce ne serait pas une mince affaire. Ce n’est pas une mince affaire, mais je continue. Il en aurait été autrement si je n’avais pas senti cette solidarité et cette solidité de solidarité que j’ai autour de moi. Tous mes collègues qui, dans la tempête, sont venus me voir puis ont dit: Tiens bon, on est avec toi, on est derrière toi, et puis c’est sur toi qu’on compte et sur nul autre. C’est un peu la situation quand Lucien Bouchard est parti, personne ne s’est présenté contre moi, parce que personne ne pensait que j’étais parfait, tout le monde pensait que j’étais le meilleur, ils pensent encore ça. Je ne suis pas plus parfait que j’étais, puis, à leurs yeux, je suis encore le meilleur. Il s’agit que je le prouve à la population.
[ M. Hébert (Michel): Sophie Langlois.
Mme Langlois (Sophie): M. Landry, vous avez dit: Cette session n’a pas été facile pour nous. À quel point ça a été difficile pour vous, Bernard Landry, ces derniers mois?]
[ M. Landry:] C’est sûrement une des périodes les plus difficiles de ma vie publique et de ma vie, après l’année de maladie et le décès de mon épouse. Je ne vous ferai pas de cachette, là. Ils ne peuvent pas dire: Les politiciens sont tous des menteurs. Je vous dis, comme d’habitude d’ailleurs, exactement ce que je pense.
[ Mme Langlois (Sophie): Si je peux continuer: Si c’est si
difficile, pourquoi ne pas avoir songé à quitter? Vous dites, bon, «dans les intérêts supérieurs du Québec», mais peut-être que, dans les
intérêts supérieurs du Québec, un autre que vous aurait pensé que c’était mieux de quitter?]
[ M. Landry:] Si je l’avais cru. Mais avec ma réflexion et celle de mes collègues, on est revenu au même point que quand j’ai décidé de succéder à Lucien Bouchard. S’il y en avait un ou une autre meilleur, il se serait présenté. Et mes collègues pensent encore la même chose. D’ailleurs, faites des comparaisons, là, pensez à Mario, Mario, mais il y en a un autre chef de parti, là, qui est le chef de l’opposition officielle, là. Je ne veux pas m’appesantir sur mes malheurs, les siens sont probablement plus grands que les miens. Pourquoi? Parce que le chef de l’opposition officielle, il est en face du premier ministre en raison du jour où, mathématiquement, il va changer de côté, prendre sa place. Et voici que, soudainement, ce n’est plus comme ça. Ça doit être horrible, profondément.
[ Des voix: Ha, ha, ha! ]
[ M. Landry:] Surtout — parce que je ne veux pas être méchant d’aucune façon, ce n’est pas dans ma nature — mais dans un parti qui est un parti de pouvoir plus que d’idées et d’idéal, c’est le Parti libéral, c’est un parti de pouvoir, quand le pouvoir se dérobe, c’est le monde qui s’effondre. Au Parti québécois, idées, idéal, devoir, souveraineté, social-démocratie, on peut se raccrocher à ça. Mais celui qui a abandonné sa carrière, là, à Montréal pour, ou celle-là, pour venir s’asseoir à l’opposition en attendant d’être M. le ministre ou Mme la ministre puis qu’il voit que ça n’arrivera pas, là, il doit être pas mal plus malheureux que je ne l’ai été aux pires heures.
[ M. Hébert (Michel): Robert Dutrisac.
M. Dutrisac (Robert): M. Landry, dans le texte qui nous a été distribué, il y a une phrase ici où vous alliez dire: «Nous allons faire rêver les Québécois comme jamais nous ne l’avons fait». C’est une grosse commande, semble-t-il. J’aimerais un peu vous parler de l’article 1, justement, de votre programme. À l’heure actuelle, ce qu’on peut considérer, c’est que cet article-là et le PQ, etc., ça représente, en quelque sorte, dans l’esprit des gens et des électeurs, probablement, une forme d’impasse. Et cette impasse-là, elle n’est pas… vous n’avez pas exprimé encore de moyens pour sortir de cette impasse-là. Alors, lorsque vous dites que vous voulez faire rêver les Québécois, j’imagine que c’est un peu en relation avec ça. J’aimerais savoir, justement, qu’est-ce que vous entrevoyez.]
[ M. Landry:] Bon. Pour être bien précis là, l’article 1, c’est celui qui dit que la souveraineté est au centre de l’action du Parti québécois, et je vous réitère — je l’ai déjà dit mais je veux que ça soit tellement clair — il n’est pas question de se détourner de cet objectif. Vous parlez d’impasse. Impasse apparente parce que, dans les années qui ont suivi le référendum de 1980, l’impasse paraissait bien plus grave. On avait eu 40 % des voix, à peine une majorité francophone, peut-être pas. Et, après 1995 — et c’est peut-être là qu’on a été trompé, que nous nous sommes trompés nous-mêmes — après 1995, il nous manquait 30000 voix. Alors on a eu l’impression que ce n’était pas si grave que ça et, au lieu de faire le deuil référendaire immédiatement puis repenser à l’avenir puis ce sera telle mentalité, on est resté comme des demi-gagnants alors qu’on avait perdu. Alors ça, ça a été dur pour nos militants, ça a été dur pour la population.
Sans dramatiser, souvenez-vous du mot laissé par Dédé des Colocs quand il a décidé de quitter cette terre, bien, ça doit être, ça, dans le coeur de beaucoup de jeunes Québécois et Québécoises qui… Je ne veux pas dire que Dédé a mis fin à ses jours pour cette seule raison, mais, en tout cas, c’était dans son mot d’adieu. Et c’est très, très dur de perdre un référendum pour des souverainistes et des gens qui veulent se donner un pays. Vous le savez. Il y a une comédienne, là, qui a écrit un article extraordinaire dans votre journal, tiens, justement, il n’y a pas si longtemps. Et vous avez entendu Yvon Deschamps dire des propos semblables. Vous avez entendu Gilles Vigneault. Un autre comédien, là, l’extraordinaire gars qui fait Broue là. Bon. C’était grave ce qui est arrivé.
Mais ce n’est pas une raison pour arrêter. Quand on arrive à 30000 voix de faire entrer un nouveau pays aux Nations unies, ça peut prendre quelque temps pour se ressaisir, pour retrouver la voie, mais je vous jure qu’on la cherche jour et nuit puis qu’on va convoquer nos militants et nos militantes au cours de l’automne. On va leur demander de commencer à réfléchir maintenant puis, à l’automne, on va les revoir puis on va reprendre contact. Et on a beaucoup de fers au feu puis on a beaucoup de comités à l’oeuvre. Puis je ne cache pas la difficulté, mais la motivation est tellement grande qu’on va y arriver.
[ M. Dutrisac (Robert): Mais, en 1994, le PQ avait
un plan de
match. Est-ce que, la prochaine élection, vous allez arriver avec un plan de match?]
[ M. Landry:] Absolument. Il est déjà en… D’abord, nous sommes des gouvernants et pas uniquement des souverainistes. Alors, plan de match de gouvernance, qui est en train de se bâtir; plate-forme électorale, en train de se bâtir; et, sur la souveraineté, nos réflexions avancent aussi. J’ai déjà, pour Lucien Bouchard, moi, présidé un comité où on avait fait beaucoup de travaux; ces travaux sont encore là, sont encore accessibles.
[ M. Hébert (Michel): Bon. Une courte dernière en
français.
Norman Delisle.
M. Delisle (Norman): Et on m’excusera d’aborder un sujet un peu plus terre-à-terre, mais, il y a de ça huit mois, il y a une commission parlementaire qui vous avait fait des recommandations très précises en matière de concentration de la presse. C’est un dossier dans lequel votre gouvernement n’a pas encore bougé. J’aimerais savoir si, oui, vous allez bouger et, deuxièmement, dans quel sens ira votre action.]
[ M. Landry:] Oui, on va bouger. J’en ai discuté longuement avec ma collègue Mme Lemieux dernièrement. Je lui laisserai le soin de vous annoncer ce que nous avons l’intention de faire. Mais nous avons une idée qui est féconde, disons.
[ (Fin à 14 h 48)]
[QLDRY20021008cp]
[Point de presse de M. Bernard Landry, premier ministre du Québec Bilan
du Forum national sur le déséquilibre fiscal Le mardi 8 octobre 2002(Dix-sept heures trente minutes)]
[ M. Landry:] Bon. Alors, la dernière journée et demie a servi d’introduction. Je vais répondre à vos questions.
[ Journaliste: …est-ce qu’il faut s’attendre à ce
que, là, si
vous recevez encore un non, qu’est-ce qui va changer à partir de maintenant à la suite de cet exercice-là face à Ottawa?]
[ M. Landry:] Bon. D’abord, le niveau de compréhension du problème, là, est pratiquement à son paroxysme. Là, ça a été expliqué par Séguin, par le Conference Board, par Statistique Canada, par les études de la commission Romanow. Normalement, personne ne peut plus dire: Je ne comprends pas. Et, ayant compris, personne ne peut dire: Je nie le problème. Comme l’attitude légère, au moins, de M. Manley quand il a dit: Montez vos impôts. Ce qui est, entre vous et moi, une sottise, là, parce que l’ensemble de la société québécoise trouve qu’on contribue déjà beaucoup; ou «Fermez vos délégations». Là, ça veut dire qu’il ne comprenait pas le problème. Il ne sait pas que c’est 50000000 $ par semaine, parce qu’il nous propose une solution qui rapporterait 100000000 $ par année et qui défigurerait la personnalité internationale du Québec. Donc, je présume qu’il n’a pas compris.
Là, on va tout faire pour qu’il comprenne. Lui, le premier ministre du Canada, leurs collègues, parce que continuer à avoir cette attitude négationniste après tout ce qui a été dit et écrit, là, il y a péril d’entrer dans la zone de mauvaise foi, c’est-à-dire: je comprends mais je fais semblant de ne pas comprendre. Et ça, j’espère que ça n’arrivera pas. Et on va prendre tous les moyens pour informer le gouvernement du Canada. Nos collègues à Victoria et à Halifax ont compris rapidement. D’abord, parce que le Conference Board a fait des études pour les provinces, parce qu’ils ont eu le rapport Séguin et puis on a eu un très beau consensus. Alors, si le premier ministre de l’Ontario, Ernest Eves, comprend ça parfaitement et épouse le consensus, pourquoi un député ontarien, John Manley, ne pourrait pas comprendre?
[ Journaliste: …avec ces gens-là à Ottawa, puis dire:
Écoutez, ce n’est pas juste moi qui parle, c’est tous ces gens-là aussi.]
[ M. Landry:] Nous avons déjà une rencontre de prévue avec le premier ministre du Canada, et là ma voix, qui était déjà forte du consensus de l’Assemblée nationale, là, va s’enrichir du consensus sociétal. La société civile a approuvé à l’unanimité, à toutes fins pratiques, ce que l’Assemblée nationale déjà avait très sagement décidé.
[ Journaliste: Mais est-ce que ça rend… en fait, ce consensus-
là enterre définitivement l’idée d’un référendum, là, à quelque part peut-être aux prochaines élections ou…]
[ M. Landry:] Ce qu’il faut, c’est régler le problème, et j’espère que, cette fois-ci, on va le régler avec ce qu’on a puis on verra. Il a d’autre chose, là, qui s’en vient qui a été proposé par les participants eux-mêmes, c’est-à-dire alerter le réseau interne, leurs membres. Il y a des groupes qui ont parlé de pétitions puis alerter le réseau externe. Alors, les étudiants ont dit qu’ils allaient parler aux étudiants du reste du Canada, d’autres ont dit qu’ils feraient la même chose avec leurs homologues canadiens. Alors, c’est important de monter la pression dans tout le Canada. C’est un service que le Québec rend au reste du Canada d’ailleurs soit dit en passant.
[ Journaliste: Mais l’idée, là, du référendum, donc, est encore
là, elle plane encore. Vous gardez ça dans votre manche. ]
[ M. Landry:] Ça a toujours été une hypothèse. C’est encore une hypothèse. J’espère qu’on n’aura pas à se rendre à ce genre d’action quand tout est si clair maintenant pour l’ensemble de la société québécoise, ce qui rend plus hypothétique encore le référendum.
[ Journaliste: M. Landry, est-ce que ça vous trouble
de savoir
que votre ami Raymond Bréard, le temps qu’il était votre chef de cabinet au ministère des Finances, a fait embaucher un fonctionnaire à Investissement Québec, est aujourd’hui accusé de corruption pour avoir accepté un pot-de-vin pour donner une subvention?]
[ M. Landry:] Ce qui me troublerait, c’est qu’il n’y ait pas un procès qui commence demain. Or, il y en a un qui commence demain, donc les choses qui devaient être faites l’ont été et la justice s’occupera du reste.
[ Journaliste: Pour revenir sur la question du
déséquilibre, M.
Landry, est-ce que… le constat est très clair, il l’était, il l’est devenu de plus en plus, mais il manque une sanction pour le gouvernement fédéral. Il peut continuer à faire la sourde oreille, il n’y a pas de sanction, là, pour lui.]
[ M. Landry:] Bien. D’abord, se déshonorer dans un segment de l’opinion de plusieurs millions de personne, c’est déjà une sorte de sanction. Là, j’espère que le ministre des Finances, M. Manley, a compris — je le dis en tout respect pour sa personne, là — il a dit des sottises. Alors, déjà ça, là, c’est une sorte de sanction, là, que des millions de Québécois et de Québécoises et de Canadiens, je l’espère, se rendent compte que leur ministre des Finances vient de nous dire ici des sottises sur un point majeur qui est l’étranglement fiscal du Québec. Et, par la suite, des autres sanctions en politique peuvent se développer de la manière que vous savez.
[ Journaliste: Si je comprends bien, M. Landry, vous
n’avez pas
de rapport de force réel, là, vous n’avez pas de plan B, là, pour… une fois qu’Ottawa vous aurait…]
[ M. Landry:] Je pense que la voix du Québec est plus forte aujourd’hui qu’elle ne l’était hier. On avait déjà l’unanimité de l’Assemblée nationale réitérée. Maintenant, la société civile, ses membres, ses ramifications, c’est une sorte d’escalade dans l’expression du Québec par rapport à Ottawa.
[ Journaliste: …vos collègues, les deux leaders de
l’opposition qui promettent actuellement tout ça. Ils disent actuellement qui sont en mesure de baisser les impôts malgré le déséquilibre fiscal.]
[ M. Landry:] Ça c’est des choix qui se feront aux élections. Là, la position commune est claire, celle du ouvernement est claire, puis, depuis quelques semaines, celle des autres partis s’éclaircit singulièrement. C’est une excellente chose, une excellente. Mais face au gouvernement du Canada, c’est le gouvernement du Québec qui est l’interlocuteur.
[ Journaliste: M. Landry, vous dites que la voix du
Québec est
plus forte. Moi, j’ai eu l’impression d’assister à un exercice futile parce que le gouvernement fédéral, semble-t-il, ne veut pas entendre. Alors, à quoi ça a servi finalement?]
[ M. Landry:] Quand l’ensemble de la société civile lus les rois partis de l’Assemblée nationale insistent lourdement sur la véracité d’un point, je ne peux pas concevoir qu’il n’y ait pas de sanction au Canada à nier cette chose. Quand le gouvernement du Canada a nié le consensus de René Lévesque et de Claude Ryan quant au rapatriement unilatéral, ça a eu des conséquences historiques qui erdurent encore aujourd’hui. Alors là, on n’est pas dans le même ordre de problèmes, mais quand les Québécois, parlant d’une voix à ce point uni, disent une chose, je ne peux pas concevoir que ça n’ait pas de conséquences au gouvernement du Canada.
[ Journaliste: Qu’est-ce que ça veut dire: Mettre
plus d’accent
sur la formation de la population? Des campagnes de publicité?]
[ M. Landry:] On va prendre les moyens pour que ce qui s’est dit ici soit su et connu de l’ensemble de la population du Québec. Plusieurs Québécois et Québécoises, vous le savez, Séguin l’a démontré, pensent qu’on paie plus d’impôts à Québec qu’à Ottawa. Ce n’est pas ça, et je le redis, c’en est une forme d’information: Nous payons à peu près 60 % de nos impôts à Ottawa et 40 % à Québec. Alors, déjà, il faut que ça se sache. Plusieurs personnes pensent que le déséquilibre fiscal, c’est qu’il y en a qui paient trop d’impôts et d’autres pas assez. Dans ce dont on a discuté depuis deux jours, c’est que l’argent est à Ottawa et les moyens sont à Québec; l’argent est à Ottawa et les besoins en santé sont à Québec, et en éducation et pour les familles. Alors, c’est ça qu’il faut rendre évident à des millions et des millions de personnes qui ne le sauraient pas déjà.
[ M. Landry:] Merci beaucoup, Mesdames et Messieurs.
[(Fin à 17 h 40) ]