Adélard Godbout, 1939-1944
Honorables Messieurs du Conseil législatif,
Messieurs de l’Assemblée législative,
La guerre dans laquelle le Canada s’est engagé, il y a déjà plus de deux ans, pour défendre notre droit de vivre en liberté, a pris en ces derniers temps une tournure inquiétante. Le conflit s’est singulièrement rapproché de nous. Pendant que nous avons à protéger la côte
du Pacifique, les sous-marins ennemis s’aventurent sur l’Atlantique tout près de nos rives. Le sort de notre pays est en jeu.
Le sol canadien n’aura pas de meilleurs défenseurs que nos jeunes gens de la province de Québec qui s’entraînent actuellement dans nos camps. Par ailleurs, nos volontaires s’enrôlent en grand nombre dans l’armée, l’aviation et la marine. Il a plu au lieutenant-général McNaughton, dès son retour au Canada, de louer hautement les régiments québécois dont il a le commandement en Angleterre et qu’il classe parmi ses unités de choix. Quant à ceux qui ne sont pas sous les armes, l’esprit qui les anime se révèle dans l’habileté et l’énergie qu’ils déploient pour activer la production du matériel de guerre. Rien ne démontre mieux à quel point tous comprennent leur devoir que les sacrifices qu’ils s’imposent, d’un commun accord, pour fournir le nerf de la guerre en souscrivant généreusement aux emprunts de la Victoire.
En s’inspirant des nécessités de l’heure pour orienter son programme économique, le gouvernement se propose d’accroître la production agricole de telle sorte que notre Province soit une abondante source de ravitaillement, aussi bien qu’un arsenal, pour les nations alliées. Nos cultivateurs seront encouragés à augmenter le rendement de leurs terres, et nos colons recevront l’appui voulu pour activer leurs fructueux travaux de défrichement.
Les perspectives de l’après-guerre nous invitent à entourer des soins les plus vigilants notre domaine forestier et nos richesses hydrauliques, et à nous. mettre en état de garder les marchés que notre industrie forestière aura conquis. Vous serez priés d’adopter certaines lois qui répondent aux vœux de techniciens et d’exploitants intéressés à la conservation de la forêt.
L’instruction publique, à tous ses degrés, doit rester au premier plan de nos préoccupations. D’importantes assises auront lieu au cours de l’année, et seront précédées d’un recensement qui apportera des précisions définitives sur la fréquentation scolaire. Nos instituteurs et nos institutrices pourront aussi compter sur une amélioration graduelle et constante de leur sort. La question des finances tient une large part dans nos problèmes d’enseignement. Le gouvernement s’efforce, à cet égard, d’en arriver à une solution satisfaisante.
Nos écoles techniques et nos écoles d’arts et métiers s’appliquent ‘à former les compétences requises pour la fabrication de nos armements. L’école d’avionnerie de Cartierville et la magnifique École d’arts et métiers de Rimouski, tout récemment inaugurée, sont appelées de ce chef à jouer un rôle très utile. Elles procureront en outre aux jeunes gens qu’il nous faudra plus tard réhabiliter dans la vie civile les moyens de se spécialiser, et de s’ouvrir une voie dans de profitables carrières.
Nos fonctionnaires bénéficient d’un boni de vie chère qui leur permettra de traverser la crise actuelle sans que leurs familles aient trop à en souffrir. Pour reconnaître le mérite de tous ceux dont le dévouement et la compétence assurent le bon fonctionnement de nos rouages administratifs, il vous sera soumis une nouvelle loi des pensions accordant au personnel de nos services extérieurs et de nos diverses commissions des avantages analogues à ceux que possèdent les membres du service intérieur.
Dans le but de protéger la santé publique, le gouvernement se propose de réglementer plus efficacement la manipulation des aliments.
Des modifications seront apportées à nos lois de chasse et de pêche pour faciliter la répression de certaines• in-
fractions et pour établir une meilleure surveillance des établissements de pisciculture.
Tout en continuant d’améliorer les routes stratégiques qui peuvent servir à la défense de notre territoire, le gouvernement s’emploiera à fournir de bons chemins à nos régions agricoles.
La situation financière de la Province permet l’abolition des péages sur tous les ponts qui lui appartiennent, ainsi que sur le pont de Québec. Un projet de loi a été préparé à cette fin.
Des représentations ayant été faites au gouvernement concernant les nombreux inconvénients qu’entraîne la Loi de l’assurance des maris et des parents, lorsque la femme de l’assuré est bénéficiaire, le gouvernement a l’intention de supprimer ces anomalies. Vous jugerez s’il est opportun d’adopter les amendements que l’on suggère.
L’assurance-automobile soulève également des problèmes qui demandent à être étudiés.
Une refonte de la Loi électorale vous sera proposée dont l’objet est d’améliorer le mode selon lequel nos listes électorales sont dressées.
Le gouvernement vous soumettra une entente qu’il a été invité à conclure avec les autorités fédérales. Cette entente est d’ordre temporaire, et la sauvegarde de nos droits constitutionnels y doit être pleinement assurée.
Divers autres projets vous seront présentés concernant les Caisses populaires, les Syndicats professionnels, nos lois municipales et l’administration de la justice.