Discours du trône, Ottawa, 12 septembre 1968

Pierre Elliott Trudeau, 1968-1979 et 1980-1984

Honorables Membres du Sénat,
Membres de la Chambre des communes,

Je vous souhaite la bienvenue à la première session de la 28e législature du Canada.

Tous les Canadiens fondent de grandes espérances sur les réalisations futures de la présente législature. Mes ministres sont conscients des qualités de chef qu’ils devront montrer pour répondre à ces espoirs. Ils sont résolus à faire tout leur possible pour remplir le mandat qu’ils ont reçu de la population du Canada lors des récentes élections générales. Ils reconnaissent qu’il leur incombe de faire en sorte que les désirs des Canadiens en ce qui concerne leur Gouvernement soient comblés aussi rapidement et aussi entièrement que le bien général le permet. D’autre part, mon Gouvernement sait que les aspirations et leurs réalisations doivent être tempérées par une conscience réfléchie des réalités. A cause des complexités de la société moderne, il faut du temps pour élaborer des programmes efficaces et encore davantage pour les mettre en œuvre. A toutes les étapes, ils exigent des ressources financières et intellectuelles qui ne sont pas illimitées et qui doivent être utilisées selon une planification d’ensemble minutieuse et un choix rigoureux des priorités. Chose certaine, on ne saurait tout accomplir en même temps.

Mon Gouvernement a établi le programme législatif de cette première session dans le contexte d’une législature d’une durée normale. Afin de permettre, lors de sessions ultérieures, l’examen de nouveaux programmes que les Ministres s’occupent déjà
d’élaborer, il est envisagé durant la présente session d’établir des priorités et de mettre en marche de nouvelles politiques. Ce qui est tout aussi important, mais beaucoup moins dramatique, le Parlement sera prié d’aborder une foule de questions essentielles au fonctionnement régulier et moderne du gouvernement dont la législature précédente n’a pas disposé. Mon Gouvernement estime que sa première responsabilité, et la première responsabilité du Parlement, est de liquider l’accumulation de rectifications, d’améliorations et de modernisations législatives essentielles qui restaient de la dernière législature. A moins que ces questions ne soient promptement réglées, une administration publique efficace et le bon fonctionnement de l’économie et de la société canadienne en seront entravés.

Mes Ministres sont convaincus que bien des retards et des difficultés auraient pu être évités ces dernières années dans la conduite des affaires parlementaires par la réforme du Règlement et de la procédure parlementaire. Ils sont d’avis que les Canadiens reprochent à leur Parlement son éloignement du peuple qu’il sert, son fonctionnement beaucoup trop lent et trop lourd, ses débats souvent peu éclairés et ses décisions trop rares et trop lentes. Afin que les institutions parlementaires puissent conserver la confiance du peuple et s’acquitter de la tâche énorme et complexe que comporte le gouvernement moderne, il est essentiel de prévoir un appareil législatif capable de s’occuper rapidement du nombre considérable de questions détaillées et compliquées qui, dans les domaines législatif, financier et politique, constitueront le programme parlementaire normal, et toujours croissant, de demain. Mon Gouvernement attache la plus grande importance à la réforme parlementaire et, comme il s’agit là d’une question hautement prioritaire, il a déjà eu des entretiens utiles avec les représentants des partis de l’opposition au sujet des changements à apporter au Règlement de la Chambre des communes. Afin que l’opposition officielle, que nous, au Canada, tenons pour un élément essentiel de notre régime démocratique, de même que les autres partis de l’Opposition, soient mieux en mesure de s’acquitter efficacement des lourdes responsabilités d’action et de décision, à affronter à chaque session, vous serez appelés à adopter de nouvelles dispositions pour soutenir l’Opposition officielle et les autres partis dans leur rôle au Parlement. Vous serez priés également d’étudier l’établissement d’autres services qui permettront au Parlement en général de mieux s’acquitter de ses fonctions.

Mon Gouvernement a pris l’engagement profond et irrévocable de tendre vers les objectifs d’une société juste et d’une économie prospère dans un monde en paix. Mes Ministres croient que l’unité du pays est essentielle pour atteindre ces objectifs, tout comme elle est essentielle pour que chaque Canadien accède au maximum de libertés de bonheur et de bien-être matériel. La réforme constitutionnelle demeure, à longue échéance. La meilleure garantie de l’unité canadienne. Mes Ministres ont chargé les hauts fonctionnaires des pourparlers avec les provinces qui sont en bonne voie et qui conduiront, au moyen d’une série de conférences intergouvernementales, à des propositions que le Parlement voudra examiner. D’ici là, cependant. afin de favoriser l’unité canadienne, vous serez appelés à adopter, au cours de la présente session, une toute nouvelle Loi sur les langues officielles, fondée sur les recommandations de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Vous serez priés d’approuver une nouvelle Loi sur la publication des statuts, visant à modifier la forme de présentation et de publication, dans les deux langues officielles, des lois de notre pays bilingue. Vous serez également invités à étudier des mesures relatives aux Indiens, à la citoyenneté, aux symboles nationaux, aux organismes culturels, à tous les genres de transport et aux communications (y compris les satellites), à la télévision éducative et au financement des Postes.

Certaines de ces propositions viseront le redressement des torts, tandis que d’autres offriront des possibilités longtemps refusées. Ensemble, elles illustrent l’interdépendance essentielle entre la Justice et l’unité nationale. La réalisation d’une société juste est un idéal que caressent les hommes civilisés. Il est peut-être plus difficile à formuler pour les groupes que pour les individus, mais même les membres des majorités politique, religieuse, linguistique ou économique doivent savoir ce que c’est que d’être victimes d’injustice. Mon Gouvernement se préoccupe tout particulièrement d’assurer plus de justice, de dignité et de considération à l’individu, particulièrement à une époque caractérisée par l’État omniprésent, l’automatisation de l’industrie, l’embrigadement social et les lois anciennes. On a accompli beaucoup ces dernières années pour rendre la société canadienne plus juste dans les domaines de la répartition des revenus et de la protection contre les vicissitudes de la vie. Les dispositions concernant les pensions aux personnes âgées, les malades et les personnes dans le besoin sont devenues plus efficaces grâce aux mesures adoptées au cours des récentes législatures et aux dispositions adoptées par les provinces. Nonobstant ces mesures, la pauvreté existe toujours au Canada. Mon Gouvernement le reconnaît, mais il estime qu’il serait illusoire et cruel de prétendre qu’il existe un remède simple, universel ou d’une efficacité instantanée. On ne peut régler le problème de la pauvreté de façon permanente que par une action soutenue et résolue, dans une foule de domaines, de la part de tous les gouvernements.

Le Parlement, quant à lui, peut être certain que le gouvernement fédéral collaborera pleinement et qu’il prendra l’initiative partout ou il peut légitimement le faire. A cette fin les propositions qui vous seront soumises comprendront l’établissement d’un ministère chargé de voir à ce que la population de tous les secteurs et de toutes les régions de notre pays ait, dans la mesure du possible, égal accès aux occasions offertes par le développement économique du Canada. Il y a toutefois d’autres éléments plus vastes qui sont essentiels à une société juste et mes Ministres estiment que ces éléments doivent recevoir, au cour de la session actuelle du Parlement et de celles qui vont suivre, une attention qui a manqué jusqu’ici. A ces fins, vous serez priés de procéder à d’importantes modifications au Droit criminel, d’assurer de nouvelles mesures de protection des consommateurs et aux investisseurs, De moderniser la législation concernant les aliments, les produits pharmaceutiques et la santé publique, de réviser ou de modifier les lois régissant l’appareil judiciaire et de corriger un certain nombre d’injustices particulières, y compris celles qui résultent de certaines dispositions de la Loi sur les relations industrielles et sur les enquêtes visant les différends du travail.

Au cours de la session actuelle, le Gouvernement compte recevoir des rapports d’enquêtes touchant la législation ouvrière et les pensions des anciens combattants et mes Ministres ont l’intention de vous soumettre le plus tôt possible leurs propositions au sujet de ces problèmes.

Mon Gouvernement croit que l’objectif d’une société juste doit toujours comprendre la poursuite d’une économie prospère aussi bien que la distribution équitable de ses bénéfices, De même que dans le passé, nous avons peut-être eu tendance à considérer la justice dans notre société surtout en termes de confort matériel, ainsi nous devons reconnaître que nous avons eu tendance au Parlement, et jusqu’à un certain point au sein du Gouvernement, à concentrer nos efforts sur les concepts distributifs de notre économie. Ce faisant, nous avons eu parfois tendance à négliger les aspects susceptibles de toucher la productivité de notre pays et, partant, à négliger d’assurer totalement le bien-être économique de notre société et de lui fournir les moyens de soutenir la concurrence selon l’évolution de la conjoncture dans le monde moderne. Les richesses naturelles du Canada et les industries qui se fondent sur elles revêtent toujours une importance immense pour notre économie, mais les avantages de nos grandes richesses matérielles, en eux-mêmes, ne constituent plus une base suffisante pour une économie moderne, croissante et prospère. Il nous faudra de plus en plus concurrencer à armes égales les pays les plus avancés sur le plan technologique dans la production des articles les plus perfectionnés de la vie moderne. Si le Canada ne peut maintenir une économie efficace, concurrentielle et productive par rapport aux nations les plus avancées du monde, nous ne pourrons avoir la base nécessaire à une société ou la pauvreté a été éliminée, nous ne pourrons maintenir des niveaux élevés d’emploi et de revenu, ni assurer aux Canadiens le niveau de vie auquel, dans l’ensemble, ils aspirent. C’est dans cette optique et conscient que les intérêts de tous doivent être également sauvegardés que le Gouvernement envisage ses politiques et programmes d’ordre économique, Dans cette même optique, le Parlement sera appelé à étudier, au cours de la présente session, des propositions visant la révision systématique et continue des coûts et des prix dans notre économie. Tout comme les revenus ne doivent pas augmenter plus vite que la productivité si l’on veut restreindre la hausse des prix, ainsi les dépenses des gouvernements à tous les niveaux ne doivent pas augmenter plus vite que la productivité si nous voulons restreindre la hausse des impôts. Ces deux réalités figurent parmi les plus importantes que les Canadiens et leurs dirigeants devront se rappeler pendant les mois et les années à venir. Les mesures législatives que vous aurez à étudier au sujet de la négociation Kennedy sont la conséquence d’un effort d’importance tenté à l’échelle internationale pour abaisser les barrières qui s’opposent aux échanges internationaux et elles feront ressortir les possibilités qui s’offrent à un grand pays commerçant tel que le Canada. Il vous sera présenté une mesure législative visant la modification des accords de Bretton-Woods, résultat d’efforts comparables en vue de stabiliser et d’améliorer l’ensemble du système financier international.

Conscient des limites qu’il doit fixer à ses dépenses, mon Gouvernement a agi dans le cadre des principes directeurs qui avaient déjà été annoncée. Il a choisi avec soin, à la lumière des besoins et des possibilités des diverses régions, les programmes qu’il estime les plus prometteurs et les plus aptes à favoriser la prospérité économique. Mes Ministres vous présenteront des mesures législatives concernant l’encouragement des programmes de main-d’œuvre, les améliorations régionales, les investissements nationaux, le développement régional, le développement de l’exportation et l’administration des ressources, dont une Loi sur l’exploitation des mines au Yukon et une Loi sur la production du pétrole et du gaz, se rapportant à la gestion des richesses du Nord canadien qui se révèlent de plus en plus importantes. En outre, mon Gouvernement présentera une Loi visant la mise en marché du poisson d’eau douce et il se propose d’examiner immédiatement diverses méthodes qui permettront une plus grande efficacité dans la production et la vente du blé, y compris l’établissement éventuel d’un Conseil national des grains. Vous serez priés d’approuver des modifications aux lois suivantes: Loi sur les prêts destinés aux améliorations agricoles, Loi sur le crédit agricole, Loi sur le crédit accordé aux syndicats de machines agricoles, Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies et Loi sur les prêts aidant aux opérations de pêche.

Vous serez priés d’étudier une Loi sur une Société de développement du Canada, une Loi fédérale sur les coopératives et une Loi sur la société de développement de l’exportation.

La croissance de notre population et la modification de la nature de notre société urbaine et industrielle mobile prêtent une nouvelle importance à la conservation au sens traditionnel du mot, Nous progressons effectivement en matière de conservation sur le plan économique en faisant graduellement un meilleur usage de nos richesses en vue d’une haute productivité à long terme.

Nous devons aussi, avant qu’il soit trop tard, songer de nouveau à la préservation de notre patrimoine, dont devraient jouir les
générations futures de Canadiens. Vous serez priés d’étudier des mesures législatives concernant les parcs nationaux et les lieux et monuments historiques. Ces biens ainsi que les autres aménagements destinés au repos de l’esprit au renouvellement de la vitalité, au sport et à la détente corporelle deviennent sans cesse d’une plus grande importance dans notre cadre social. Ils permettent aux Canadiens et à nos visiteurs de goûter une vie enrichissante, d’une qualité qui disparaît de plus en plus chez nous comme dans d’autres pays industrialisés.

D’une importance plus vaste est le problème de la pollution, qui doit recevoir une plus grande attention de la part des autorités fédérales, provinciales et municipales. Mes Ministres s’occupent d’élaborer des propositions sur ces sujets, et celles-ci seront soumises à votre examen en temps utile.

Les richesses naturelles dont le Canada est comblé doivent nous rappeler que nous avons une responsabilité considérable et de grandes possibilités dans le domaine de l’aide étrangère. Mon Gouvernement tient à activer ses projets et ses programmes de coopération et de développement internationaux, ce qui comprendra la création au Canada d’un Centre international de développement.

Sur le plan général des affaires internationales, mes Ministres estiment que la situation actuelle est incertaine et fort inquiétante. Les négociations sur le Vietnam se poursuivent à Paris, mais jusqu’ici elles n’ont pas progressé selon nos espoirs. Le Gouvernement a observé avec une profonde inquiétude les tentatives faites en vue d’un règlement pacifique au Nigeria et il a pris une part active aux efforts internationaux destinés à soulager les souffrances de la population civile. La situation en Tchécoslovaquie a causé aussi une très vive inquiétude au Gouvernement, qui s’est préoccupé non seulement de ses effets sur les perspectives de détente et l’évolution future au sein des pays communistes, mais aussi de ses conséquences en ce qui regarde la liberté et le bien-être des Tchécoslovaques. Mes Ministres rédigent actuellement des propositions en vue d’offrir, au Canada, un foyer permanent à ceux d’entre eux qui doivent chercher refuge à l’étranger.

Le Gouvernement a entrepris une étude approfondie de notre politique en matière d’affaires extérieures et de défense. L’apport du Canada à l’OTAN, les relations avec Pékin, l’Amérique latine et l’Europe sont à l’étude. Une révision de nos relations avec d’autres pays sera entreprise plus tard, et lorsque des conclusions auront été formulées, le Parlement sera invité à les étudier.

Les événements qui sont survenus dans d’autres pays et dont j’ai déjà parlé nous rappellent de façon frappante que le bonheur que nous avons d’être Canadiens comporte des droits et des libertés aussi bien que des avantages matériels, Ils nous alertent quant à la nécessité non seulement d’être vigilants pour conserver nos institutions démocratiques, mais aussi de veiller constamment à les améliorer. Un gouvernement efficace, qui répond aux exigences publiques et qui se prête à la participation publique, est indispensable au fonctionnement satisfaisant d’un régime démocratique. Il sera encore plus essentiel à l’avenir, à mesure que la technologie et la science fourniront de nouveaux moyens plus directs pour disséminer l’information et obtenir la participation individuelle de toute notre population. Le Gouvernement a déjà pris certaines mesures pour revoir l’organisation de ses services d’information, afin d’y apporter le plus tôt possible certains perfectionnements qui rendront plus efficaces l’obtention et la diffusion des renseignements, de qui permettra aux Canadiens de participer de façon soutenue, éclairée et plus active aux travaux de leur Gouvernement, En outre, dans le cadre du processus continuel de modernisation et de perfectionnement des rouages gouvernementaux, vous serez priés, durant la présente session, d’adopter une Loi sur l’organisation du gouvernement. Cette mesure viendra compléter un certain nombre de modifications de l’organisation et de la structure qui ont été annoncées par le Premier ministre il y a quelques semaines et compléteront les réformes parlementaires Si indispensables au bon fonctionnement de nos institutions démocratiques.

Après le renforcement et le rajeunissement des rouages parlementaires et administratifs et l’exécution des travaux considérables qui restent présentement à terminer dans le programme législatif, le Parlement sera en mesure de s’attaquer aux difficiles et urgents problèmes concernant la jeunesse, la pauvreté, les disparités régionales, l’expansion urbaine, le bien-être des particuliers, l’application et l’encouragement de la technologie scientifique. Ces sujets intéressent tous les gouvernements du Canada et il est évident que nous devons faire beaucoup plus que ce qui avait été prévu jusqu’ici. Ce serait une erreur cependant de s’attendre à trouver des solutions faciles, ni même une solution quelconque, sans une étroite et franche collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, non seulement pour la planification mais aussi pour la mise en œuvre.

Afin de favoriser un tel travail, il serait utile de mettre à la disposition de tous les gouvernements un institut qui pourrait s’appliquer à des recherches et à des considérations à long terme sur les multiples questions intéressant les gouvernements, Il n’existe pas de service semblable au pays à l’heure actuelle et mes Ministres ont l’intention de vous saisir prochainement d’une mesure qui comblera cette lacune des plus importante dans notre appareil gouvernemental.

Membres de la Chambre des communes,

Durant la session, vous serez priés de voter les fonds requis pour les services et les paiements autorisés par le Parlement. Outre cela, le programme législatif que propose le Gouvernement est très étendu, mais bon nombre de ses articles vous sont déjà connus ou ils ne portent pas à la controverse. Le Premier ministre déposera, dans le courant de la journée, une liste des projets de loi qui traitent des questions dont j’ai parlé, et d’autres parties du programme vous seront présentées au cours de la session. Il est très important pour le bon gouvernement du pays dans les années à venir que les propositions de la présente session soient réglées. Le Canada, a l’instar d’autres pays démocratiques, doit aujourd’hui faire face à un défi décisif. Il doit s’adapter à de nouvelles circonstances et à de nouvelles exigences ou il faillira à la tâche. Un tel défi n’a rien d’abstrait; c’est une confrontation qui vous sera imposée en raison de votre élection au présent Parlement.

Honorables Membres du Sénat,
Membres de la Chambre des communes,

Puisse la Divine Providence vous éclairer dans vos délibérations.

[Texte électronique établi par Denis Monière (Université de Montréal) 1999]

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