Pierre Elliott Trudeau, 1968-1979 et 1980-1984
Honorables membres du Sénat,
Membres de la Chambre des communes,
J’ai l’honneur de vous souhaiter la bienvenue à la deuxième session de la trentième législature du Canada.
Je suis fier aujourd’hui de reprendre le dialogue avec vous
après une absence due à une attaque que j’ai subie, attaque
qui m’a rayé des cadres de la vie communautaire pour quelque
temps.
Maintenant, je comprends mieux la fragilité humaine, mais
aussi les grandes ressources de dévouement des personnes qui
nous aiment et aussi les grandes ressources de la volonté
humaine axée sur le désir de vivre.
Je profite de l’occasion pour remercier tous mes concitoyens
pour les veux de bonne santé qu’ils m’ont témoignés, et ceux
qui ont prié pour moi.
Dans mes parcours, soit en voyage à travers le Canada ou en
faisant le tour de ma chambre, j’ai assisté, entre autres
cette années à Vancouver, à la Conférence des Nations unies
sur Habitat, et j’ai vu, à Montréal, le spectacle des Jeux
olympiques.
Le monde entier est venu chez nous pour ces manifestations,
et le contraste m’a frappé entre, d’une part, les Canadiens
qui parfois se livrent à une morbidité contagieuse et,
d’autre part, les étrangers venus ici, qui parlent du Canada
comme d’un pays comblé.
A l’occasion des Jeux olympiques, la reine et sa famille
sont venues au Québec et en Ontario, après une visite de Sa
Majesté et du prince Philippe en Nouvelle-Ecosse et au
Nouveau-Brunswick. On leur a réservé partout un accueil
chaleureux.
Sa Majesté célébrera l’an prochaine le vingt-cinquième
anniversaire de son accession au trône. Elle viendra passer
quelques jours à Ottawa pour fêter l’événement avec nous et
pour commémorer aussi le vingt-cinquième anniversaire de
la nomination du premier Gouverneur général canadien au
Canada, ainsi que le dixième anniversaire de fondation de
l’Ordre du Canada. Ce sera la septième fois en dix ans que
la reine visitera notre pays.
Comme nous nous réunissons en ce lieu historique au
lendemain du jour d’actions de grâces, il convient de nous
arrêter un instant et de témoigner de notre reconnaissance
pour la remarquable liberté dont nous autres, Canadiens,
jouissons et pour les ressources humaines et naturelles qui
permettent à notre pays d’occuper une position tellement
privilégiée parmi les nations.
Grâce aux solides assises de son économie et à l’esprit de
solidarité de la majorité des Canadiens, sources de
l’efficacité du programme anti-inflationniste, le Canada a
de meilleures raisons d’être confiant et optimiste que
presque tous les autres Etats. En effet, nos réserves de
ressources naturelles, notre potentiel de production
alimentaire et la compétence de notre main-d’oeuvre, à tous
les niveaux, ouvrent au Canada des perspectives de
croissance comme bien peu d’autres pays industrialises en
ont. La réalité fondamentale qui guidera vos délibérations,
c’est donc que le Canada est au seuil d’une décennie pleine
de promesses .
Mais ce qui, par-dessus tout, soutient notre progression
vers ces objectifs que nous visons tous et qui s’appellent:
unité nationale, égalité des chances, garantie accrue des
droits individuels, c est notre force, c’est notre confiance
en nous-mêmes.
L’unité nationale
Afin d’entretenir parmi les Canadiens le degré d’unité sans
lequel nous ne saurions véritablement être libres, sans
lequel nous ne pouvons former une nation véritable, ni
espérer atteindre nos objectifs communs, le Gouvernement
accordera une très haute priorité à l’instauration d’un
meilleur climat de compréhension entre Canadiens de langue
française et Canadiens de langue anglaise, ainsi qu’à la
réalisation de l’indépendance constitutionnelle formelle du
pays.
Depuis 1968, notre politique des langues officielles,
qu’appuient tous les partis représentés au Parlement, se
fonde sur le principe de l’égalité et sur le droit des
Canadiens de parler à leur gré l’anglais ou le français. De
cette politique, il s’ensuit nécessairement, comme l’a
reconnu le Parlement, que l’administration fédérale offre ses services dans nos deux langues officielles, dans la
capitale nationale et partout où la demande le justifie.
Il s’agit là d’une politique de justice et de bon sens
envers tous ceux de nos concitoyens qui parlent l’une des
deux langues officielles du Canada; et le Gouvernement
estime qu’elle doit être poursuivie dans l’intérêt de
l’équité et de l’unité nationale.
Le Canada présente une grande diversité d’aspects. Son unité
ne peut reposer que sur la reconnaissance de cette
diversité; on ne saurait absolument pas l’établir en
cherchant à imposer une stricte uniformité. La matière de
langue et de culture, il importe de reconnaître leur
personnalité aux différentes régions sans s’écarter des
principes de justice et de générosité qui doivent
s’appliquer partout.
Le Gouvernement a créé des programmes pour donner corps à la
politique des langues officielles. Certaines mesures se sont
avérées efficaces et seront maintenues. D’autres, qui n’ont
pas eu autant de succès, seront modifiées.
Les griefs des fonctionnaires transmis par le Commissaire
aux langues officielles continueront d’être examinés,
conformément à l’engagement que le Gouvernement a pris
d’appliquer avec toute l équité et l’efficacité possibles la
politique des langues officielles.
Le Gouvernement est toujours décidé à accentuer le
bilinguisme de la fonction publique. Cependant, il croit
qu’il conviendrait de mieux équilibrer les crédits affectés
à la diffusion du bilinguisme dans la fonction publique et
les sommes dépensées pour que plus de Canadiens, des jeunes
surtout, puissent s’exprimer dans les deux langues
officielles. Le Gouvernement est persuadé qu’une grande
majorité les Canadiens sont bien résolus à raffermir les
liens qui les unissent à leurs concitoyens qui parlent l’autre langue officielle, ou qui appartiennent à l’une des
nombreuses cultures du pays.
Il semble que les Canadiens tiennent particulièrement à ce
que leurs enfants de comprendre leurs compatriotes de
l’autre groupe linguistique. Et c’est pourquoi le
Gouvernement a l’intention de voir avec les provinces
comment on pourrait améliorer l’enseignement des deux
langues officielles dans toutes les écoles du Canada.
Le Gouvernement entend de plus augmenter le nombre des
programmes qui aident les jeunes des diverses régions à
mieux se connaître les uns les autres.
II- égalité des chances
Certes, l’unité nationale suppose chez tous les Canadiens la
conviction qu’ils ont tous la même possibilité de se
réaliser pleinement sur le plan culturel: il est néanmoins
tout aussi vital pour l’unité que nous jouissions tous de
chances égales d’épanouissement, individuel et régional, sur
le plan économique.
Pour que le potentiel économique du Canada se traduise en
croissance réelle et en véritable égalité des chances, il
faut que nous sachions reconnaître les obstacles qui nous
gênent et que nous voulions ensemble les surmonter.
Parmi ces obstacles, le principal est l’inflation, force
destructrice qui, nous le savons tous, peut, une fois
libérée, enlever aux travailleurs leur emploi et leur
revenu, aux personnes âgées, la valeur de leurs économies,
briser les rêves de familles entières, ralentir le flux de
capital indispensable à la croissance industrielle et
compromettre la lutte à la pauvreté et aux inégalités.
Le freinage de l’inflation et la création d’emplois beaucoup
plus nombreux pour les Canadiens continueront de compter
parmi les grands objectifs prioritaires du Gouvernement.
Le Gouvernement poursuivra la politique d’austérité fiscale
indispensable à la réalisation de ce double objectif. La
maîtrise de l’inflation restera la clé de notre stabilité
économique, même au terme du programme anti-inflationniste.
A cet effet, une rigoureuse austérité fiscale et monétaire
s’impose.
Le Gouvernement demeure résolu à réduire l’expansion de la
fonction publique. Avant 1975-76, durant dix ans, les
années/hommes autorisées au sein de ]a fonction publique
augmentaient annuellement à un taux moyen de 4 pour cent.
Cette année l’augmentation a été abaissée à 1.5 pour cent,
ce qui a entraîné des compressions dans vingt-sept
ministères et organismes. Le Gouvernement réduira encore le
taux d’expansion à moins de un pour cent au cours de la
prochaine année financière.
Dans un effort renouvelé pour diminuer la taille de
l’administration gouvernementale et étendre le champ de
l’entreprise privée, tous les programmes fédéraux seront
réexaminés afin de voir lesquels d’entre eux pourraient
passer au secteur privé sans nuire à la qualité des services
au public.
Quant au rendement économique du pays, il dépendra beaucoup
de l’état du marché international; aussi, le Canada
cherchera-t-il à améliorer sensiblement sa situation par des
négociations commerciales multilatérales et d’autres
initiatives visant à stimuler le commerce. Pour accroître la
capacité concurrentielle de l’industrie privée sur le marché
international, le Gouvernement remaniera en profondeur ses
programmes d’aide industrielle.
Pour le Gouvernement, l’apport des petites entreprises au
bien-être socio-économique des Canadiens est très précieux.
Les petites entreprises gérées par leurs propriétaires sont
la principale source d’emploi dans nos villes et nos
villages. Elles produisent les biens et services essentiels
aux consommateurs et aux autres firmes, elles manifestent
l’imagination et l’initiative nécessaires à la réussite de
toute entreprise. Bien plus, les petites entreprises et ceux
qui les possèdent, les dirigent et y travaillent sont, du
point de vue économique, la force vive d’innombrables
collectivités canadiennes.
Le Gouvernent présentera des mesures pour faciliter à la
petite entreprise l’accès à l’aide financière et aux autres
services qu’assurent les ministères, la Banque fédérale de
développement et les institutions financières du secteur
privé.
Pour répondre aux préoccupations de nombreux hommes
d’affaires canadiens le Gouvernement équilibrera mieux son
besoin de données économiques et le fardeau que cela
représente pour les petites entreprises. On réduira
considérablement le nombre des sociétés tenues de remettre
des rapports statistiques à l’administration. Les firmes
plus importantes, qui seront encore obligées de communiquer
ces renseignements à intervalles réguliers, pourront le
faire sur des formules plus simples et moins nombreuses.
Parallèlement, pour améliorer la situation de l’emploi, il
faudra accroître l’efficacité du marché du travail et tout
mettre en oeuvre pour hâter le retour des chômeurs à l’effort productif. La dignité humaine suppose un revenu convenable.
Le Gouvernement est sur que la plupart des Canadiens sans
emploi préféreraient de loin vivre d’un travail utile que de
l’assistance publique. C’est un but qui, dans certains cas
et en certains lieux, ne peut être atteint que par une
intervention directe des pouvoirs publics.
Il vous sera donc demandé d’approuver un programme global et
permanent de création directe d emplois au bénéfice spécial
des régions qu’éprouve un chômage chronique élevé. D’autres
programmes garantiront de meilleures perspectives d’emploi à
la jeunesse et mettront à sa disposition des services
améliorés l’orientation professionnelle.
Ce faisant, le Gouvernement n’entend pas concurrencer le
secteur privé sur le marché du travail, mais bien créer des
emplois là où il put apporter un supplément nécessaire à
l’activité des entreprises.
Vous serez invités à modifier la loi sur l’assurance-chômage
de façon à pouvoir affecter une partie de ses fonds au
maintien du revenu des travailleurs en recyclage et aider
les employeurs qui gardent à leur emploi des salariés
menacés de licenciement temporaire.
Pour faciliter ces informations, le Gouvernement propose de
regrouper les services de la Commission d’assurance-chômage
et du ministère de la Main-d’oeuvre et de l’Immigration, de
sorte que les Canadiens puissent obtenir en un même bureau
les services d’aide à l’emploi.
Il vous sera demandé d’étudier certains amendements à la Loi
sur l’immigration qui ont pour but d’aider à la réalisation
de nos objectifs d’expansion régionale et d’aménagement
rural, de favoriser l’unité familiale, d’harmoniser le flux
d’immigration et les possibilités d’emploi et de conserver
au Canada sa réputation de société ouverte, tolérante et qui
accueille volontiers les origines culturelles les plus
diverses.
L’amélioration des relations entre le patronal et les
salariés constitue un préalable crucial à un retour à la
stabilité économique. Mais tout en continuant de voir dans
la négociation collective l’un des meilleurs moyens dont on
dispose en démocratie pour assurer des salaires équitables,
le Gouvernement et les Canadiens en général ne laissent pas
être profondément troublés par la baisse de productivité et
l’aggravation des tensions sociales, si souvent attribuables
aux carences du système.
On ne résoudra rien en limitant excessivement le droit de
négociation collective, il faudrait plutôt élaborer de
meilleurs mécanismes de règlement, en les fondant sur la
collaboration bien plus que sur l’antagonisme.
Le Gouvernement se propose donc, de concert avec les
provinces ainsi qu’avec les milieux syndicaux et patronaux,
de travailler à l’amélioration des relations patronales-
ouvrières.
On compte établir un centre d’information sur les
négociations collectives où les parties pourront se procurer
des données objectives sur l’économie et la rémunération. On
se propose aussi d’encourager les ouvriers de chaque usine à
s’intéresser de plus près aux décisions touchant leurs
conditions de travail, d’élargir les programmes d’éducation
de la main-d’oeuvre, de mettre au point un code volontaire de
pratiques équitables et de créer un organisme national
destiné à améliorer la qualité de la vie au travail.
On fondera en outre un centre d’hygiène et de sécurité
industrielles, dont la mission sera d’aider les entreprises
et les travailleurs à déceler les risques professionnels et
à les éliminer.
Le Gouvernement collaborera étroitement avec ses propres
employés des divers ministères et sociétés de la Couronne à
améliorer, par de nouvelles méthodes de coopération,
l’hygiène et la sécurité. Il compte utiliser ses propres
services pour mettre à l’épreuve de nouvelles façons
d’améliorer les conditions de travail et les relations
patronales-ouvrière.
Des mesures seront avancées pour améliorer la négociation
collective dans la fonction publique, en réduire le
caractère antagoniste et assurer un rapport équitable entre
la rémunération de la fonction publique et celle du secteur
privé.
Le Gouvernement entend favoriser la liberté et l’efficacité
du marché, confirmant ainsi le rôle vital de ce système dans
la répartition des ressources nationales selon les besoins.
D’importantes révisions de la législation en faveur de la
concurrence vous seront présentées. Car aussi bien, le
Gouvernement est résolu à poursuivre, en l’accentuant, la
politique traditionnelle du Canada, qui est de faire de
l’initiative privée le ressort de l’activité économique.
Le second volet de la réforme de la politique de concurrence
s’articulera autour du renforcement des lois qui régissent
les fusions et les monopoles, renforcement qui nous
permettra d’assurer à notre économie une efficacité et un
dynamisme accrus; il faut que notre économie récompense
l’imagination et l’esprit d’initiative; qu’elle laisse les
prix se fixer au gré des forces du marché tout en protégeant
ce dernier des concentrations abusives. Plus la concurrence
joue librement sur le marché, moins les gouvernements ont
besoin d’intervenir.
D’autre part, là où la concurrence ne joue pas assez, l’Etat
doit intervenir dans l’intérêt général. Aussi amendera-t-on
la loi nationale sur les transports pour mettre le public à
l’abri des tarifs abusifs.
Les Canadiens sont de plus en plus sensibles à la nécessité
d’une meilleure gestion des grandes ressources énergétiques
du pays, notamment le pétrole et le gaz naturel. Le
Gouvernement mettra donc davantage l’accent sur la recherche
et l’exploitation de sources d’énergie renouvelables et sur
les moyens de mieux les utiliser. en particulier les
combustibles domestiques et commerciaux.
Pour favoriser la mise en valeur consciencieuse de nos
ressources naturelles, le Gouvernement entend présenter des
mesures de réglementation et de l’exploitation des terres
fédérales.
Dans le dessein de conserver les ressources alimentaires de
la
mer et d’améliorer la situation des pécheurs, le
Gouvernement portera avant
le 1er janvier la limite des eaux canadiennes à deux cents
milles des côtes.
Autre aspect de sa politique alimentaire, le Gouvernement
prévoit des mesures pour allonger la liste des produits
agricoles engrangés et ayant droit à paiement par
anticipation. De concert avec les provinces et les
associations agricoles le Gouvernement tâchera de renforcer
la structure de l’agriculture canadienne et accroître sa
productivité.
Dans le domaine des services sociaux, trois ans de
discussions approfondie entre les autorités fédérales et
provinciales ont abouti à une nouvelle formule de partage
des frais qui a aussi contribué à assouplir les programmes
de services sociaux. Le Parlement sera par conséquent appelé
à examiner une nouvelle loi qui améliorera sensiblement
l’efficacité des programmes à frais partagés, et surtout
ceux qui intéressent les personnes âgées, les enfants et les
handicapés.
Face au besoin général de pouponnières et de garderies, le
Gouvernement entend faciliter la mise en place des
infrastructures indispensables en encourageant les
gouvernements provinciaux à fixer une nouvelle tarification,
variable en fonction du revenu des parents. Beaucoup plus de
mères canadiennes seront, par exemple, en mesure de
travailler à l’extérieur de leur foyer puisqu’il y aura un
plus grand nombre de garderies subventionnées.
Il vous sera demandé d’étudier des amendements au Régime de
pensions du Canada afin de mieux reconnaître la valeur de
la contribution apportée à la famille et à la société par
les conjoints, lorsque l’un deux reste à la maison pour
s’occuper des enfants pendant que l’autre travaille à
l’extérieur, ou lorsqu’il y divorce ou séparation de corps.
Le 1er janvier, les allocations familiales seront indexées
de nouveau en regard de l’augmentation du coût de la vie en
1976.
En ce qui concerne l’assurance-maladie, l’assurance-hospitalisation et l’enseignement postsecondaire, les négociations se poursuivront avec les provinces au sujet de l’adoption graduelle de nouveaux arrangements financiers et administratifs. Cela permettrait aux provinces de mieux dispenser ces services tout en rencontrant le désir du Gouvernement fédéral de collaborer avec elles pour modérer l’augmentation des frais des programmes de santé et de sécurité sociale.
Un bon choix de logements à prix raisonnable, dans un
environnement agréable, importe également au bien-être des
Canadiens. Aussi la construction d’un million d’unités en
quatre ans demeure-t-elle un élément clé de la politique
d’habitation du Gouvernement. De concert avec les autres
paliers de gouvernement et le secteur privé, le Gouvernement
travaillera à accroître l’efficacité de l’effort global du
Canada en ce sens.
Le Gouvernement entend toujours faire droit aux aspirations
des autochtones du Canada. Il attache une importance
particulière à un juste règlement de leurs revendications
territoriales. Durant la présente session, vous serez
invités à approuver le règlement négocié des réclamations
concernant !a région de la baie James.
A la suite du remarquable succès des Jeux olympiques de
Montréal et des performances extrêmement encourageantes des
athlètes canadiens, l’aide fédérale aux programmes de santé,
à certains sports amateurs et au conditionnement physique
sera encore augmentée.
Cette année, la Commission canadienne de réforme du droit a
présenté un rapport sur le droit familial qui mérite
l’attention de tous les Canadiens. Le Gouvernement a
l’intention de mener des discussions avec les provinces dans
le dessein d’encourager la création de cours familiales
intégrées, ayant complète juridiction en matière de droit de
la famille, de sorte que les causes pourront être entendues
de manière plus positive. Le Gouvernement discutera en outre
avec les provinces et le public d’autres aspects du droit de
la famille portant sur la stabilité des mariages, la
protection des enfants et le partage équitable des
conséquences financières des divorces et des séparations de
corps.
Nos concitoyens sont de plus en plus sensibles au fait que
la nation canadienne ne saurait vivre dans la dignité
pendant que d’autres peuples, habitant des pays moins
fortunés, vivent dans le dénuement et le désespoir.
Il n’est pas dans l’intérêt économique, politique ou moral
du Canada de laisser s’élargir le fossé entre la richesse de
quelques-uns et la pauvreté du grand nombre. C’est pourquoi,
le Gouvernement continuera de participer à l’édification
d’un nouvel ordre économique mondial de nature à ranimer
l’espoir de nations qui ne demandent qu’à s’aider elles-mêmes.
Le monde est aujourd’hui aux prises avec de nombreux
problèmes d’une complexité et d’une ampleur telles que nulle
nation, ou nul groupe de nations, ne peut espérer y apporter
des solutions particulières. Seules les solutions globales
sont possibles.
C’est pour cette raison précise que le Canada oriente de
plus en plus son action internationale dans le sens d’une
coopération élargie. L’habitat, le droit de la mer, la
protection de l’environnement. La production alimentaire,
l’exploitation des ressources, le terrorisme, la
démographie, le contrôle des armements nucléaires,
I’expansion économique. voilà autant de domaines qui exigent
le partage des responsabilités et l engagement universel.
III Les droits de l’individu
Dans la ligne d’action du Gouvernement en vue accroître la
solidarité et l’égalité des chances à l’échelle mondiale
comme à l’échelle nationale, il est évident que ce double
objectif appelle un profond respect des droits de
l’individu, en particulier du droit de tout homme ou toute
femme libre d’exercer une influence réelle sur les décisions
concernant son propre avenir.
A une époque où les affaires publiques deviennent de plus en
plus complexes, il importe au plus haut point de faire
ressortir le droit du citoyen d’accéder à l’information qui
lui est indispensable pour porter des jugements éclairés et
agir en connaissance de cause.
C’est pourquoi le Gouvernement attache tant d’importance aux
travaux du comité parlementaire mixte sur la liberté d’accès à l’information. Il se propose de soumettre à ce
comité un énoncé de principes dans l’espoir qu’on
s’accordera bientôt sur la meilleure façon d’améliorer
l’accès du public aux documents officiels. Dans
l’intervalle, le Gouvernement augmentera le nombre et
élargira l’éventail des documents internes mis à la
disposition du public.
A cette même fin, il vous sera demandé d’étudier un projet
de loi définissant plus précisément les fonctions et
responsabilités de l’auditeur général du Canada et de
fournir à ce serviteur du Parlement les moyens de mieux
accomplir sa mission .
En outre, afin de supprimer les obstacles à l’information
et à l’égalité des chances, le Gouvernement déposera un
projet de loi sur les droits de l’homme. Ce projet de Loi
aura pour principal effet d’interdire toute distinction
injuste fondée sur la race, la couleur, l’origine nationale
ou éthique, religion, l’âge, le sexe, l’état civil, les
infirmités ou les dossiers judiciaires effacés. Il
instituera notamment le principe du droit au traitement égal
pour travail égal sans distinction de sexe. Il écrira dans
la loi le droit du citoyen à accéder plus facilement à ses
dossiers personnels stockés dans les banques fédérales de
données, ainsi qu’à faire corriger toute erreur. Il limitera
en outre la compilation par l’Etat de renseignements d’ordre
personnel.
Le degré d’information des citoyens sur les affaires du
Parlement est un sujet de préoccupation pour le Gouvernement
et pour tous les parlementaires. Le Gouvernement désire que
le plus grand nombre de Canadiens possible soient au fait
des travaux du Parlement. Il vous demandera donc d’autoriser
la télédiffusion des débats de la Chambre des communes.
IV – Le rôle de l’Etat
Il est essentiel au raffermissement de l’unité nationale, à
la cause de l’égalité des chances et des droits de
l’individu, que les Canadiens oeuvrent tous ensemble dans un
esprit de coopération et de respect mutuel. C’est pourquoi
il importe que tous aient une idée très précise de ce qu’on
attend d’eux dans la poursuite des objectifs nationaux.
Il convient donc de définir le rôle de l’Etat dans la
planification économique et sociale et l’action qui en
découle. D’aucuns ne reconnaissent à l’Etat qu’un rôle très
limité. A leur sens, l’économie de marché garantit au mieux
la répartition efficace des ressources nécessaires à la
production et à la croissance, réduit au minimum le
gaspillage et favorise au maximum la liberté et l’initiative
individuelles.
A ces vues s’opposent vigoureusement ceux qui préconisent
une intervention de plus en plus prononcée de l’Etat dans
l’orientation de la croissance économique, dans la
compensation des insuffisances de la libre entreprise et
dans la répartition des revenus en fonction de critères
socialement acceptables. Selon cette école de pensée, les
dépenses publiques et l’intervention de l’Etat doivent
augmenter de façon à combler à cet égard les lacunes de
l’économie de marché.
Entre ces deux extrêmes, le Gouvernement opte pour le juste
milieu.
Cette option intermédiaire envisage une société au sein de
laquelle tous les Canadiens puissent s’épanouir pleinement,
une société où la justice, la bonté, la tolérance et
l’ouverture d’esprit fonderont un Canada fort et uni, une
société qui repose sur l’initiative individuelle et la
liberté personnelle. Choisir le juste milieu suppose qu’on
se fie au système de marché pour stimuler la croissance dont
le Canada a besoin et qu’en même temps, on continue de se
préoccuper de la justice sociale et de l’égalité des
chances. D’autre part, un tel choix suppose aussi qu’il
faille améliorer le fonctionnement du marché et trouver une
façon moins coûteuse et moins interventionniste de
poursuivre les objectifs sociaux.
Ces vues ont inspiré le programme législatif du Gouvernement
pour les prochains mois, et ce sont elles qui détermineront
les lignes de conduite à suivre après le programme anti-inflationniste.
De toute évidence, la mise au point d’une action propre à
notre époque exige la plus étroite collaboration entre les
pouvoirs publics, les travailleurs, les hommes d’affaires,
les associations bénévoles et coopératives et tous les
autres groupes sociaux. C’est la raison pour laquelle le
Gouvernement lancera une série d’importantes consultations à
travers le Canada, dans le dessein d’assurer un partage plus
équitable des responsabilités économiques et sociales.
Dans ce contexte, la consultation ne se borne pas à la
communication au public des décisions gouvernementales, ni à
une quête d’opinions pour la forme. Elle servira au
Gouvernement à exposer aux intéressés son évaluation des
principaux problèmes que nous devons régler ensemble et sa
conception des solutions possibles.
Le Parlement et, bien entendu, les gouvernements provinciaux
et municipaux, auront un rôle vital à jouer. Aussi, les
provinces seront-elles priées de consulter au plus tôt le
Gouvernement fédéral sur le renouvellement des accords
relatifs au programme anti-inflationniste et, le moment
venu, sur la façon de mettre fin à la réglementation des
prix et des salaires.
Le Gouvernement est sûr que le Canada saura réaliser les
splendides promesses de la prochaine décennie, parce que les
Canadiens de toutes les couches sociales regardent vers
l’avenir et veulent manifestement profiter de tous leurs
atouts. Le Canada continuera de progresser dans la voie de
l’unité nationale et dans la fidélité aux idéaux de
l’égalité des chances et de la garantie des libertés
individuelles, parce que son peuple a le courage d’affronter
les obstacles, la volonté de prendre en main son destin et
la sagesse de reconnaître que l’unité est la clé de
l’efficacité.
Membres de la Chambre des communes.
Le Gouvernement se propose de présenter un budget au cours de cette session.
Vous serez priés de voter les fonds requis pour les services et les paiements autorisés par le Parlement.
Honorables membres du Sénat, Membres de la Chambre des communes.
Puisse la Divine Providence vous guider dans vos délibérations.
[Texte électronique établi par Denis Monière (Université de Montréal) 1999]