Discours du trône, Ottawa, XX XXXX 1984

Brian Mulroney, 1984-1993

Honorables membres du Sénat, Membres de la Chambre des communes,

C’est avec la plus grande joie et la plus grande fierté que j’ai
l’honneur de vous accueillir cet après-midi en qualité de
représentant canadien de Sa Majesté la Reine Elizabeth II, à
l’occasion de l’ouverture officielle de la première session de la
trente-troisième législature du Canada.

Cette année, les Canadiens ont eu la joie d’accueillir Sa
Majesté la Reine Elizabeth et le Prince Philip, qui ont participé
aux célébrations organisées au Nouveau-Brunswick et en Ontario
pour souligner le bicentenaire de l’arrivée des Loyalistes au
Canada. Nos hôtes royaux ont aussi visité plusieurs localités du
Manitoba. La monarchie représente pour les Canadiens un lien
précieux avec les siècles d’histoire et de traditions qui ont
modelé notre démocratie parlementaire. La Couronne est un symbole
de nos valeurs démocratiques et contribue de ce fait à la
sauvegarde des droits et libertés sur lesquels repose notre
régime politique. Chef du Commonwealth, la Reine personnifie les
liens et les idéaux des peuples membres de cette grande
communauté de nations. Sa vie, consacrée au service des autres
pourrait servir de modèle à tous ceux qui aspirent à servir
autrui.

Plus tôt cet automne, les Canadiens de toutes les régions du pays
ont eu l’insigne privilège de recevoir Sa Sainteté le Pape
Jean-Paul II. L’accueil chaleureux réservé au Saint-Père a
témoigné du respect et de l’estime que nous lui portons ; il a
mis en évidence l’esprit de fraternité et de générosité qui
anime notre société, où se côtoient des gens de races et de
croyances diverses. La visite du Pape a rappelé aux Canadiens
que la promotion de la justice et de la paix a encore sa
place chez nous, et que nous devons aussi en faire notre vocation
dans le monde. Pour son message pastoral et pour son témoignage
moral et spirituel, le peuple canadien lui exprime sa profonde
gratitude.

Au cours des premiers mois qui ont suivi mon investiture, j’ai
eu le grand avantage de visiter diverses régions de notre si beau
pays. La chaleur et l’enthousiasme que mes compatriotes m’ont
manifestés au Québec, au Nouveau-Brunswick et, tout récemment,
dans ma province natale de la Saskatchewan, m’ont profondément
émue: j’anticipe donc avec plaisir de compléter ma tournée des
provinces et des territoires. Jour après jour, je prends de plus
en plus conscience de la force de caractère, des immenses
qualités et de la bonne volonté des Canadiennes et des Canadiens.
Je découvre mieux ainsi combien notre nation est riche et
privilégiée.

C’est avec un intérêt et une fierté bien légitimes que les
Canadiens ont suivi le voyage du premier astronaute canadien, le
commander Marc Garneau. Sa participation à un vol de la navette
spatiale Challenger est la manifestation la plus récente et la
plus impressionnante du rôle que joue notre pays dans
l’entreprise de conquête de l’espace. Nous sommes ainsi heureux
de pouvoir collaborer au programme spatial des Etats-Unis et de
faire notre part dans la recherche des avantages immenses que
l’exploration de l’espace peut apporter à l’humanité.

En juillet, tous les Canadiens ont applaudi aux brillantes
performances de nos athlètes aux Jeux olympiques de Los Angeles.
Mon gouvernement désire leur rendre hommage, ainsi qu’aux
entraîneurs et officiels, et souligner leurs remarquables efforts
et leur dévouement à l’idéal olympique. Le haut degré
d’excellence qu’ils ont atteint constitue à nos yeux à tous le
plus bel exemple d’accomplissement national.

Réconciliation et unité nationale

La législature que nous inaugurons aujourd’hui doit marquer le
début d’une ère de réconciliation nationale, de renouveau
économique et de justice sociale. C’est dans cet esprit que mes
ministres entendent faire honneur au mandat que leur a confié la
population du Canada.

Certes, il n’y a pas de solutions toutes faites aux sérieux
problèmes que connaît notre pays, mais les Canadiens témoignent
d’une volonté évidente de repartir à neuf. Pour la première fois
depuis fort longtemps, toutes les régions du pays sont
représentées au sein du gouvernement national, et c’est là pour
mes ministres une excellente occasion de réaliser un nouveau
consensus national.

Vous serez appelés à faire un examen critique des rapports du
Parlement avec la population canadienne. Les députés seront
invités à approuver la création d’un groupe de travail
parlementaire sur la réforme de la Chambre des communes. Ses
travaux seront axés sur la valorisation du rôle du député, et
dans cette perspective. il étudiera les pouvoirs, les pratiques,
l’organisation et les ressources de la Chambre et présentera des
recommandations.

Le gouvernement du Canada constitue un énorme appareil qui touche
les citoyens de multiples façons, et il importe de veiller à ce
qu’il demeure sensible aux besoins de chacun. Un comité de
ministres, présidé par le vice-premier ministre a déjà amorcé un
examen de l’ensemble des programmes gouvernementaux en vue de
rationaliser et de simplifier le fonctionnement de l’Etat. Ainsi,
l’administration deviendra plus facile à comprendre, plus
accessible et plus proche du citoyen.

Le régime d’imposition sera révisée afin de le rendre plus simple
et plus équitable, et de permettre aux représentants du peuple au
Parlement d’exercer an plus grand contrôle sur sa gestion. Les
droits des contribuables doivent être protégés; des mesures
législatives seront donc proposées afin qu’aucun n’ait à payer
des impôts qu’il conteste avant d’avoir été entendu par un
arbitre impartial.

L’un des objectifs prioritaires de mes ministres sera d’insuffler
un nouvel élan au fédéralisme et de redonner aux Canadiens pleine
confiance en l’efficacité de notre régime de gouvernement.

La consultation et la collaboration doivent redevenir l’ordre
normal des choses. Mes ministres se réunissent déjà régulièrement
avec leurs homologues provinciaux afin d’éliminer les sources de
friction et d’améliorer les services dans les secteurs dont la
responsabilité incombe conjointement aux administrations fédérale
et provinciales.

Trois objectifs fondamentaux commanderont les relations de mon
gouvernement avec les provinces, à savoir: l’harmonisation des
politiques des deux ordres de gouvernement, l’assurance du
respect de leurs domaines de compétence respectifs et la
cessation des doubles emplois inutiles et coûteux.

L’unité nationale exige en outre que les deux ordres de
gouvernement collaborent pour appuyer les minorités de langue
officielle et promouvoir le caractère multiculturel de notre
pays. Mon gouvernement s’est engagé à faire respecter l’égalité
des deux langues officielles consacrée dans les textes
législatifs ; cette exigence est vitale pour notre originalité et
notre identité nationales; il importe donc qu’on la consacre
également dans les faits. Mes ministres reconnaissent la
nécessité de réaliser des progrès constants et de manifester la
vigilance requise dans ce domaine crucial de notre vie nationale.

La réalité canadienne est une mosaïque d’identités régionales
distinctes, longuement enracinées dans notre histoire, de
cultures diverses et de forces économiques régionales, que
cimente un profond sentiment d’attachement envers un seul et même
Canada.

Mes ministres sont déterminés à réaliser un consensus national
qui soit le reflet de cette réalité. Ce consensus est essentiel
si nous voulons rompre l’isolement chronique des régions du
Canada, relever les défis que présentent les disparités
économiques et sociales, redonner à nos secteurs économiques
traditionnels, comme l’agriculture, les forêts, les mines, les
pêches et le tourisme, la vigueur qui les a toujours caractérisés
et faire en sorte que nos réseaux de transports et de
communications servent mieux les intérêts de la nation.

Ce nouveau consensus national devra trouver son aboutissement
dans la loi fondamentale de notre pays, car il est évident que
l’entente constitutionnelle demeurera incomplète tant que le
Québec n’y aura pas adhéré. Même si la principale obligation de
mes ministres consistera d’abord à promouvoir un renouveau
économique, ceux-ci s’emploieront à créer les conditions
nécessaires à la réalisation de cet objectif primordial; il va de
soi que cette tâche nécessitera la coopération de tous les
partenaires de notre fédération.

Leur généreux concours ne sera pas moins essentiel au respect des
engagements pris envers les peuples autochtones tels qu’ils
apparaissent dans la Loi constitutionnelle de 1982. Par égard
pour ces peuples et pour l’ensemble des Canadiens, il ne faut pas
décevoir les grandes attentes qu’a fait naître le rapatriement de
notre Constitution.

Réconciliation et réalisation d’un consensus économique

C’est dans notre vie économique que se font le plus sentir
l’urgence et l’importance d’une réconciliation nationale. Notre
incapacité de réaliser notre plein potentiel économique ces
dernières années fait clairement ressortir la nécessité d’un
effort national véritablement soutenu et concerté. Les premiers
ministres se réuniront donc la semaine prochaine pour établir
l’ordre du jour d’une conférence qu’ils tiendront sur l’économie.

Mes ministres ont entrepris la tâche complexe, longue et
laborieuse de bâtir un consensus économique. Ainsi. mon
gouvernement annoncera sous peu la date d’un sommet économique
national, qui réunira les principaux intervenants de notre
économie. Ce sommet constituera non pas l’aboutissement, mais le
commencement de ce processus. Il réunira des représentants des
consommateurs, des femmes, des peuples autochtones, des milieux
d’affaires, des syndicats et de l’administration publique. Leur
objectif sera de créer au Canada un nouveau climat plus propice à
la prise des décisions économiques.

A cet égard, on ne peut douter un instant de l’importance ou de
la légitimité du mouvement syndical au Canada, ou de
l’opportunité de la participation active du patronat et des
syndicats au processus de consultation qui mènera à
l’établissement du nouveau plan d’action national.

Le sommet économique sera un succès pourvu que les participants
s’entendent sur certaines priorités économiques et sur le rôle
respectif des principaux intervenants, et s’engagent à appliquer
immédiatement certaines mesures dont ils auront convenu ensemble.

Les prochains sommets pourront porter sur un examen approfondi de
sujets comme l’accroissement de la productivité et les
responsabilités respectives de l’industrie, des syndicats et des
gouvernements dans les domaines de la technologie et de la
formation de la main-d’oeuvre. Avec le temps, ces consultations
créeront un sentiment de confiance mutuelle et de responsabilité
commune à l’égard de l’économie; il sera alors possible de
s’entendre sur des questions encore plus fondamentales comme: le
partage du fardeau des ajustements économiques nécessaires et des
avantages de la croissance de l’économie qui en résultera : les
moyens de faire face, dans ses dimensions nationales et
internationales, au défi que présente la protection de
l’environnement: et en sus les moyens de concrétiser notre idéal
de justice sociale par des programmes bien adaptés aux besoins de
notre société.

A défaut de parvenir à un tel consensus national, le Canada
demeurera, bien des années encore, incapable de réaliser son
potentiel économique. La recherche de ce consensus amènera les
partenaires du secteur privé à se consulter sur les objectifs
économiques et à travailler ensemble à leur réalisation. Dans un
tel contexte, le gouvernement pourrait agir comme guide, comme
médiateur ou catalyseur, selon les circonstances, sans trop
intervenir dans les affaires du secteur privé, tout en veillant à
l’intégrité de l’économie canadienne et au maintien des normes
nationales.

Renouveau économique: une stratégie en trois volets

Le consensus que nous visons mettra du temps à se concrétiser
mais, entre-temps, le gouvernement fédéral peut prendre certaines
initiatives importantes pour contribuer à susciter un renouveau
économique. La stratégie qu’ont connue mes ministres comporte
trois volets: rétablir la responsabilité financière, supprimer
les obstacles à la croissance et favoriser les nouveaux
investissements.

Plus tard cette semaine. le ministre des Finances exposera l’état
de l’économie et des finances publiques fédérales. Il dévoilera
alors un plan destiné à réduire le déficit de façon juste,
équilibrée et méthodique et à limiter la croissance de la dette
publique.

Il est incontestable que nous devons nous attaquer de toute
urgence au déficit. Si nous le laissons poursuivre sa croissance
incontrôlée, il finira par engloutir toutes les ressources
financières encore disponibles, il nous empêchera de profiter au
maximum des nouvelles possibilités, il exercera une pression
accrue sur les taux d’intérêt et il paralysera les
investissements et la croissance de notre économie.

Par ailleurs, mon gouvernement s’emploiera à accroître
l’efficacité et la souplesse de nos marchés financiers, à
améliorer les perspectives d’emploi à l’aide de programmes de
formation axés sur les besoins du marché et à stimuler les
investissements dans la recherche et le développement de façon à
accroître notre productivité. Vous aurez à examiner des
propositions visant à améliorer les conditions du marché en
modifiant la législation sur la concurrence ainsi que la
réglementation de l’industrie des services financiers.

Enfin, mon gouvernement vous invitera à examiner, pendant cette
session, une série de propositions ayant pour objet de stimuler
l’esprit d’entreprise et l’innovation, et de mieux récompenser le
succès, particulièrement dans le secteur de la petite et moyenne
entreprise.

Des initiatives seront également prises afin de multiplier les
investissements, tant canadiens qu’étrangers. Mon gouvernement
est déterminé à redonner au Canada sa réputation de lieu propice
aux affaires.

Par cette stratégie en trois volets, mon gouvernement compte
relancer l’économie afin de créer les emplois dont les Canadiens
ont besoin et de mettre fin à une tragédie qui dure depuis trop
longtemps, le chômage des jeunes. Le chômage constitue le
problème le plus critique du Canada et le plus grand défi que la
nation ait à relever. Il est donc urgent de stimuler les
investissements créateurs d’emplois. Mes ministres prendront
toutes les mesures possibles pour tenter de résoudre ces
problèmes prioritaires.

Toute stratégie efficace d’élargissement des perspectives
d’emploi repose sur l’intensification de la formation et du
recyclage des travailleurs. Au cours de la présente session. vous
serez appelés à examiner une nouvelle stratégie d’emploi fondée
sur l’optimisation des ressources et sur le recours au secteur
privé. Cette stratégie viendra au terme de consultations
intensives avec les provinces, les syndicats et les milieux
d’affaires.

Justice sociale

En matière de justice sociale, mon gouvernement veut qu’il soit
constamment tenu compte de l’évolution des besoins des divers
segments de notre population. A cet égard. le rôle des femmes
dans toutes les sphères de la société canadienne et l’égalité
qu’elles revendiquent légitimement constituent certes le
changement le plus important des dernières années.

Comme les Canadiennes le savent, il y a un écart considérable
entre le principe de l’égalité, qui est largement accepté, et
son application dans les faits. Il est donc du devoir du
Parlement et du gouvernement de veiller à ce qu’on comble cet
écart sans tarder. Il vous faudra pour cela user parfois de votre
autorité et prêcher constamment par l’exemple.

La véritable parité entre hommes et femmes passe par l’égalité
économique. Le Parlement s’est engagé, dans les secteurs de
compétence fédérale, à faire respecter le principe du salaire
égal pour un travail d’égale valeur. Mon gouvernement convient
qu’il s’agit là d’un préalable essentiel à l’accession des femmes
à l’égalité économique. Mes ministres feront appel à des femmes
et à des hommes des secteurs privé et public pour mieux définir et appliquer ce principe. En outre, mon gouvernement intensifiera
les efforts déjà entrepris pour accroître les perspectives
d’emploi des femmes dans l’administration fédérale et ses
organismes, ses conseils, ses offices et ses sociétés.

Vous serez par ailleurs invités à vous pencher sur d’importantes
initiatives législatives, dont l’abrogation des dispositions
discriminatoires de la Loi sur les Indiens, certaines
modifications de la Loi sur le divorce, ainsi que des mesures
destinées à contrôler la pornographie et la diffusion d’émissions
axées sur l’exploitation sexuelle. D’ici peu, mes ministres
entreprendront avec leurs homologues provinciaux des discussions
visant à établir, à l’échelle nationale, un système qui permette
de contrôler l’exécution des ordonnances de pension alimentaire.
De concert avec les provinces, mon gouvernement prendra aussi des
mesures destinées à accroître l’aide aux victimes de violence en
milieu familial.

Mon gouvernement attache une grande. importance à l’application
de mesures d’aide destinées à renforcer la cellule familiale,
pierre angulaire de notre société. Au cours des dernières années,
la nécessité d’assurer des services de garde d’enfants
accessibles et abordables s’est hissée au premier plan des
préoccupations sociales. Dans un effort pour dégager un consensus
national sur les possibilités qui s’offrent dans ce domaine, vous
serez appelés à établir un groupe de travail parlementaire chargé
d’examiner l’ensemble de la question.

Les Canadiens apprécient le vaste système de sécurité sociale que
les gouvernements fédéral et provinciaux ont mis sur pied au
cours des ans. Toutefois, le caractère et les besoins changeants
de notre société font que de nombreux aspects de ce système
doivent être renforcés. Il est temps de reconnaître la
responsabilité qui nous incombe à tous de donner à ceux de nos
concitoyens qui souffrent d’une incapacité physique ou mentale
l’occasion pleine et entière de contribuer activement à la vie
nationale.

Mon gouvernement engagera avec les provinces des discussions
portant sur la révision complète du régime canadien des pensions,
notamment en ce qui concerne la transférabilité, la dévolution,
les prestations au conjoint survivant et la participation des
femmes, et une attention particulière sera accordée à l’étude de
mesures qui pourraient inciter les Canadiens à épargner en
prévision de leur retraite.

Les provinces seront également consultées sur la meilleure façon
d’accroître la contribution fédérale à l’amélioration des
systèmes communautaires de soins de santé.

Au cours de la session qui s’ouvre aujourd’hui, vous aurez à vous
prononcer sur une mesure législative visant à accorder
l’allocation de conjoint, fixée en fonction du revenu, aux veufs
et aux veuves de 60 a 64 ans, indépendamment de l’âge de leur
conjoint au moment de son décès. Mes ministres présenteront aussi
des mesures destinées à améliorer la situation financière de nos
anciens combattants.

Pays riche en ressources humaines, le Canada doit beaucoup aux
personnes qui se consacrent à la poursuite de l’excellence dans
des domaines comme la culture, les arts et l’athlétisme. Dans ces
secteurs et dans d’autres, mon gouvernement se fera un devoir
d’encourager tous ceux qui, par leur exemple, inspirent aux
Canadiens une volonté de dépassement.
Justice et sécurité publique

Les Canadiens sont profondément troublés par la fréquence des
actes criminels dans notre société, particulièrement des crimes
commis avec violence. Pour une nation respectueuse de la loi, les
actes de violence à l’endroit des personnes chargées d’assurer la
protection des citoyens sont particulièrement répugnants. Les
meurtres récents de plusieurs agents de police ont semé la
consternation dans la population. La Parlement compatit à la
tristesse et à la douleur des familles et collègues de ces
policiers morts en service.

Le système correctionnel a fait l’objet de nombreuses études au
cours des dernières années et il s’est fait beaucoup de réformes
fructueuses dans ce domaine. Il est néanmoins évident qu’il reste
de sérieuses lacunes à combler et mon gouvernement accepte la
responsabilité qui lui incombe à cet égard. Vous serez donc
appelés à examiner des mesures législatives visant à éliminer les
problèmes et les abus qui subsistent dans le système
correctionnel. Entre-temps, des mesures administratives pour
mieux protéger le public et les agents de la paix sont en voie de
préparation.

Au cours de la session, le Parlement sera appelé à étudier des
modifications au Code criminel qui permettront une action plus
efficace à l’égard de l’établissement des peines et des problèmes
que posent la conduite avec facultés affaiblies, le racolage et
le crime électronique. D’autre part, mon gouvernement collaborera
étroitement avec les provinces dans les domaines du droit de la
famille, de la prévention du crime et de l’aide aux victimes
d’actes criminels.

A plus long terme, il s’attaquera avec elles à d’autres anomalies
de notre système de droit pénal qui préoccupent grandement la
population.

Rayonnement international

L’histoire du Canada possède une riche tradition d’ouverture sur
le monde. Les Canadiens ont pris part aux deux guerres mondiales
de même qu’aux combats en Corée sous le drapeau des Nations
Unies. Nos forces armées ont accompli des missions de paix dans
des pays lointains. Nos hommes d’Etat ont joué un rôle de premier
plan dans la fondation de l’OTAN et dans la laborieuse entreprise
de limitation des armements. A des moments critiques de
l’histoire du Commonwealth, notre pays a défendu avec succès la
cause de l’égalité raciale, et il a contribué au développement
international par l’entremise d’organismes publics et privés.

Mon gouvernement se propose de renouer avec cette tradition de
rayonnement international.

Nos relations avec les Etats-Unis touchent pratiquement tous les
aspects de notre vie nationale. Elles sont essentielles à notre
sécurité et à notre prospérité, et elles sont l’expression des
valeurs que partagent les citoyens de nos deux pays. Au delà de
la myriade de questions à discuter et de différends à régler, au
delà des centaines de contacts quotidiens entre nos deux
économies et nos deux gouvernements, il y a cette grande
confiance entre deux peuples.

Mon gouvernement a pris l’initiative de rétablir un esprit de
bonne volonté et un véritable partnership entre le Canada et les
Etats-Unis, et il se réjouit de la réaction positive du
gouvernement et du secteur privé américains.

Il y a bien des domaines où les politiques et les intérêts
nationaux des deux pays divergent ou s’opposent, mais il existe
aussi de nombreuses possibilités encore inexploitées de
collaboration fructueuse. Pour résoudre nos conflits et saisir
ces possibilités, il fallait rétablir un climat de bonne volonté
entre nos gouvernements respectifs. Le nôtre voit dans cette
initiative la confirmation de notre force et de notre maturité
nationales.

Aussi vitales que soient nos relations avec les Etats-Unis, mes
ministres sont déterminés à faire en sorte que le Canada joue à
nouveau un rôle actif et constructif sur la scène mondiale. Les
grands objectifs de mon gouvernement sont clairs: défendre la
liberté et préserver la paix, écarter la menace d’un affrontement
nucléaire, améliorer les échanges commerciaux et assainir
l’économie mondiale. La réalisation de ces grands objectifs
s’accomplit grâce à l’action concertée avec d’autres pays de
toutes les régions du monde; qu’ils soient nos alliés, nos
partenaires économiques, nos concurrents, nos amis ou nos
adversaires, il est certainement possible de chercher et de
trouver avec chacun d’eux un terrain d’entente qui permette de
faire cause commune.

Mon gouvernement a la ferme intention de veiller à ce que nouveau
le Canada assume pleinement les obligations qui lui incombent au
sein du dispositif de défense de l’OTAN. C’est ainsi, et
seulement ainsi, que nous pourrons obtenir d’être consultés et de
participer pleinement à l’élaboration des politiques de cette
alliance. Sous la dictée de la prudence et de la conscience de
ses responsabilités, le Canada profitera de toutes les tribunes à
sa disposition pour travailler sans relâche avec d’autres pays à
enrayer la prolifération et à empêcher la mise au point et
l’utilisation des armes nucléaires. Il nous faudra de la patience
et de la persévérance car, dans cette entreprise, le moindre
progrès vaut qu’on lui consacre les plus grands efforts.

Dans le domaine économique autant que dans ceux de la défense, du
développement et du désarmement, l’influence que peut exercer le
Canada sur le cours des événements mondiaux dépend dans une large
mesure de la vigueur des institutions internationales.

Le Canada ne peut prospérer sans le commerce international. Il
est évident que nos échanges commerciaux avec les Etats-Unis
jouent un rôle prépondérant dans notre économie, et mon
gouvernement a entrepris d’examiner avec notre voisin les façons
d’améliorer nos relations commerciales mutuelles. Mais par sa
situation géographique, le Canada occupe aussi une place
privilégiée pour exploiter les nouveaux marchés de la Ceinture du
Pacifique et traiter avec ses partenaires commerciaux
traditionnels d’Europe occidentale. Mon gouvernement fera preuve
d’initiative et d’imagination dans la recherche de nouveaux
débouchés.

Il est impératif pour le Canada. par ailleurs, que soient abolis
les obstacles qui entravent les échanges commerciaux et les
investissements à l’échelle mondiale. A cet égard, il est urgent
de mener une attaque vigoureuse et concertée contre les barrières
non tarifaires, toujours plus nombreuses et insidieuses.
Conscient qu’aucun pays, pas même le Canada, n’est sans reproche
sous ce rapport, mon gouvernement se déclare prêt à faire sa
part, dans le cadre d’un effort multilatéral renouvelé, pour
supprimer ces obstacles.

Au chapitre de l’aide publique au développement, le dossier du
Canada est, dans l’ensemble, positif. Mon gouvernement reconnaît
qu’il existe un besoin constant de programmes de ce genre, par
exemple, pour appuyer le travail humanitaire efficace et
hautement valable que nos organisations bénévoles et
indépendantes accomplissent à l’échelle internationale. Mais il
est frappant de constater combien les pays en développement ont
souffert, combien le fardeau de leur dette a augmenté et combien
leur activité économique a été ralentie à cause de la récession
mondiale, de l’instabilité des marchés et des barrières
commerciales. Une lutte vigoureuse et tenace contre ces problèmes
accélérera le développement économique et le progrès social dans
un grand nombre de ces pays, soulageant par le fait même une
misère humaine que rien ne saurait justifier.

Au cours de la présente session, on vous demandera d’étudier ces
questions et de considérer les autres engagements et
responsabilités du Canada dans le monde. Un comité spécial du
Parlement procédera à un examen complet des composantes majeures
et des principaux objectifs de nos relations internationales.

Mon gouvernement a la conviction qu’il est urgent de redéfinir le
rôle des Forces armées canadiennes, car le contexte stratégique
dans lequel nous assurons notre défense et participons à celle de
nos alliés à énormément changé depuis le dernier examen
approfondi de la question au début des années 70. Mes ministres
ont entrepris une étude complète du dossier en vue de clarifier
le mandat de nos forces armées et de leur donner les ressources
nécessaires pour s’en acquitter.

Une ère nouvelle

Cette nouvelle législature nous offre une occasion peut-être
unique dans notre histoire de surmonter les différends qui ont pu
nous diviser par le passé, et d’éliminer l’esprit de
confrontation de la conduite des affaires nationales.

Mon gouvernement entend redonner aux Canadiens le sentiment que
le Parlement est vraiment la voix des citoyens, que le
gouvernement est là pour les servir, que le fédéralisme est le
meilleur moyen d’harmoniser et de préserver la magnifique
diversité de notre pays.

Plus que tout, mon gouvernement associera pleinement les citoyens
à sa recherche des nouvelles voies dans lesquelles il doit
s’engager afin de s’acquitter de ses responsabilités nationales;
qu’il s’agisse du consensus en matière d’économie, de la
tolérance dans notre vie domestique ou du dévouement à la cause
de la paix et de la justice sociale, chez nous et dans le reste
du monde.
Membres de la Chambre des communes.

Vous aurez à affecter les crédits nécessaires à défrayer les
dépenses et à assurer les services requis et approuvés par le
Parlement.

Honorables membres du Sénat.

Membres de la Chambre des communes,

Vous êtes conviés aujourd’hui à une noble tâche de réconciliation
nationale, de renouveau économique et de justice sociale. Puisse
la divine Providence guider chacun de vos efforts.

[Texte électronique établi par Denis Monière (Université de Montréal) 1999]

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